Sommaire
1Ce nouvel opus de la RMT propose divers textes qui continuent de souligner la variété de sujets publiables au sein de cette revue qui se veut transdisciplinaire. Cet objectif est difficile à atteindre au fil des numéros, car nombreux sont les auteurs qui ne cherchent pas à aller se balader vers de nouvelles disciplines. Mais à regarder de plus près les bibliographies, les auteurs de ce numéro ont le bon réflexe de lire des homologues selon le phénomène étudié, plutôt que la discipline d’ancrage du propos. C’est tout l’avantage du marketing territorial qui n’est pas enfermé dans une seule discipline, même si dans les faits, il n’est surtout au cœur d’aucune mais plutôt à la marge de plusieurs. Au sein du numéro 9 de la RMT, les sujets sont éclectiques.
2Deux articles traitent d’événements d’envergure que sont le label Capitale européenne de la culture et les Jeux olympiques et paralympiques d’été. En étudiant les terrains de Marseille et de Paris, quatre auteurs géographes préfigurent la venue de deux numéros thématiques de la RMT, actuellement en cours d’écriture, l’un portant sur le label CEC et l’autre sur les Jeux olympiques parisiens. Les temporalités d’écriture font que ces deux articles écrits en 2021 sortent dès à présent, alors que les deux numéros basés sur les méga-événements, ont été envisagés en 2022 et feront publications en 2023 et 2024.
3Les deux autres textes qui forment la rubrique Articles sont écrits par deux doctorantes, l’une en marketing et l’autre en sémiologie. Nous voilà face à deux écritures diamétralement opposées. Chacune aidée dans l’écriture par leur encadrant de thèse, la forme et le fond diffèrent fortement.
4L’une s’autorise un style enlevé, en basant son travail sur la littérature existante à propos de la définition de la ville afin de comprendre les images. Quelle ambition à partir d’auteurs de références, qui n’a pas manqué de faire réagir les deux évaluateurs, chacun d’eux étant issus d’une autre discipline et ne connaissant pas celle des auteurs. C’est là tout l’enjeu de la revue que de faire dialoguer les disciplines et il est important de rappeler que l’un des évaluateurs est toujours issu d’une discipline autre que celle des auteurs d’article, ce qu’il ne sait pas.
5L’autre chercheuse offre un travail d’une rigueur irréprochable, qui vient expliquer chaque hypothèse proposée au regard d’entretiens réalisés auprès des acteurs économiques de Casablanca. On est dans le style de recherche que le marketing connaît, basé sur une approche d’ordre psycho-sociologique (confiance, satisfaction, ancrage) qui amène à cerner de ce que les auteurs nomment le « marketing territorial relationnel ».
6S’ensuit la rubrique Synthèse qui, pour la première fois, propose un nouveau type de texte qu’est le témoignage d’un expert du marketing territorial. La règle du doctorat (en cours ou obtenu) des auteurs de la RMT est respectée avec Vincent Gollain, docteur en Economie, identifié chez les professionnels du marketing territorial comme une référence notamment grâce à ses traces sur le web (blog, interview, vidéo…). Il livre, comme à son habitude au travers de ces écrits professionnels, une boîte à outil pour penser le marketing territorial, dont les questions de « convivialité » sont interrogées pour clore son propos.
7Marie-Eve Ferrerol prend aussi la parole dans cette rubrique afin de proposer un plaidoyer auprès d’un objet de recherche qui n’est pas assez développé selon elle : l’étude des stations thermales. Les organisateurs du colloque MABEST, en 2019, sur le management des activités de bien-être et de la santé dans une approche territoriale, avaient déjà observé un manque de proposition de communication à ce sujet alors que le thermalisme pouvait y tenir une bonne place. Peut-être qu’un numéro thématique de la RMT serait à envisager dans quelques années sur un objet d’étude aussi passionnant ?
8Enfin, la recension de la chercheuse en Aménagement-urbanisme Nathalie Audas, à propos de ce gros ouvrage dirigés par deux géographes et issu d’un colloque de Cerisy-La-Salle, montre toute la richesse autour de la question des affects des lieux. Nous voilà sur la question du sensible, sujet central dans cet ouvrage de plus de 500 pages ; sujet qui parsème sans en avoir l’air les textes de ce numéro varia. Le sensible est abordé avec l’étude de cas de Casablanca quand il s’agit d’observer que la « confiance affective » n’est pas un critère déterminant pour l’ancrage territorial des entreprises étrangères. Le sensible parcourt le texte de Vincent Gollain quand il évoque les marches sensibles, la convivialité des espaces, la qualité de vie ou le réenchantement des territoires. L’article de Lucile Berthomé et Didier Tasla-Effa traverse la question du sensible avec des auteurs comme Pérec, Martouzet et ce qui est nommé dans le texte comme la « part sensibilisée de la ville ». À travers le paysage olympique Séquano-Dionysiens ou les utopies des architectes des siècles passés à Bordeaux, là encore l’espace sensible est étudié. Les visuels présentés par Louise de Sédouy laissent libre court à l’imagination de ce qu’aurait pu être le prestige d’une ville à travers des lieux culturels du XVIIIème siècle, envisagés de manière grandiloquente.
9Nous ne pouvons pas dire que ce numéro varia porte sur la géographie du sensible mais nous observons que ce thème est en filigrane de bien des productions écrites actuelles. Nous vous souhaitons une agréable lecture.
Charles-Edouard Houllier-Guibert, « Un marketing territorial sensible ? » dans © Revue Marketing Territorial, 9 / été 2022
URL : http://publis-shs.univ-rouen.fr/rmt/index.php?id=856.
Rédacteur en chef de la Revue Marketing Territorial, Charles-Edouard Houllier-Guibert est maître de conférences à l’université de Rouen, au sein du laboratoire NIMEC.