Compte-rendu d’ouvrage. Événements et territoires. Aspects managériaux et études de cas.
Charlène Arnaud, Olivier Keramidas, Martial Pasquier, Renaud Vuignier - 2018 - 432 pages

Alexia Gignon


Texte intégral

1L’ouvrage paru en 2018 est coordonné par quatre auteurs et regroupe des contributions s’inscrivant dans le champ du management territorial sous l’angle événementiel écrites. 27 auteurs pour 18 chapitres proposent des bibliographies concernant principalement les sciences de gestion.

2L’ouvrage se compose de trois parties qui analysent les impacts des événements sur les territoires. La première partie s’attache à définir ce qu’est le territoire, les enjeux autour de cette définition ainsi que la notion d’événementiel. La deuxième partie s’intéresse aux politiques publiques mises en place dans le contexte d’organisation d’événements en se demandant quelles sont les stratégies territoriales et en questionnant les relations entre événement et territoire. La troisième partie a pour but de présenter diverses études de cas, aussi bien en ce qui concerne des événements sportifs que culturels, de nature et d’ampleur variées, en France ou dans d’autres pays (Suisse, Canada, Italie) et mettant en contexte les éléments théoriques présentés dans les deux parties précédentes.

3L’originalité de l’ouvrage tient dans la diversité des événements étudiés sous l’angle du marketing territorial, ce qui permet d’avoir une vision d’ensemble de l’implication des acteurs territoriaux dans l’événementiel, sur les politiques publiques mises en œuvre ainsi que sur les impacts attendus et l’utilité pour ces acteurs d’organiser ces événements. Ces derniers sont présentés comme des leviers pour le développement des territoires et pour leur attractivité, rythmant la vie sociale grâce à des politiques publiques facilitant leur organisation.

4Dans la première partie de l’ouvrage, intitulé « Concepts », les contributions de Marc Langenbach (chapitre 1), ainsi que Martial Pasquier et Renaud Vugnier (chapitre 2) présentent les concepts clés : la notion de territoire dans le marketing. Ils se demandent notamment quel est le rôle des acteurs en matière de marketing territorial et quelles sont leurs implications managériales ? Le marketing territorial s’intéresse à 3 éléments : l’identité (du territoire), les acteurs (qu’il faut fédérer et mettre en action) et les projets. Le chapitre 1 situe les acteurs comme essentiels à la construction des territoires tandis que le chapitre 2 montre de quelle manière les nouvelles configurations territoriales ajoutées aux périmètres traditionnels vont complexifier le contexte dans lequel s’insère le management public.

5Le chapitre 3 écrit par Charlène Arnaud revient sur les liens entre événement et territoire en soulignant l’importance des relations entre les acteurs. Elle présente une typologie (événement local, régional, événement phare, événement partagé et méga-événement) puis s’interroge sur la structuration de l’offre événementielle. La notion de portefeuille territorial d’événements fournit une discussion sur le processus de sélection des événements, les stratégies et les attentes pour les territoires. L’objectif du portefeuille territorial d’événements étant de créer de l’attractivité pour le territoire, il doit également permettre aux acteurs de construire une stratégie pérenne autour des événements.

6La deuxième partie « Politique et managements des événements » questionne l’organisation par les politiques publiques. Que peuvent apporter les événements aux territoires ? Elle regroupe quatre contributions de six auteurs.

7Le chapitre 4 écrit par Olivier Keramidas interroge le rôle de la décentralisation au sein de la gouvernance des événements. La superposition des échelons (état, région, département, ville…) crée des jeux de pouvoirs entre les acteurs publics, l’auteur s’attache à comprendre en quoi les relations peuvent être des accélérateurs ou des freins à la mise en place de projets événementiels. Il se demande comment s’effectue le partage des compétences entre acteurs et quels sont les impacts de cette multitude d’acteurs sur les prises de décision. Deux éléments de réponse émergent : l’importance de l’évaluation et la liberté d’action et de décision des acteurs territoriaux.

8Le chapitre 5 écrit par Jean-Loup Chappelet et Joël Pinson étudie les stratégies d’accueil des événements pour les territoires. Les auteurs présentent l’évolution des stratégies d’accueil des événements afin d’obtenir leur organisation. Les événements engendrent de la croissance urbaine et touristique, ce qui nécessite l’implication des collectivités territoriales ainsi que la nécessité de la diversité du portefeuille d’événements organisés localement (varié et équilibré), impliquant divers acteurs, structures et réparti sur l’ensemble de l’année.

9Dans le chapitre 6, Christophe Alaux et Léa Boutard analysent les interactions produites par l’attractivité territoriale, en tant que préoccupation primordiale des décideurs publics. Ils s’intéressent aux effets de l’attractivité à différentes temporalités (court, moyen et long terme), aux effets d’images pour les territoires, aux relations entre l’image et l’attractivité notamment l’influence sur l’identité des territoires. Analyser les retombées économiques sur le moyen et long terme permet d’identifier ce qui peut créer de la valeur. Les événements ont des impacts sur l’image des territoires mais c’est peu pris en compte dans les stratégies d’accueil d’événements. Selon la manière dont l’événement est étudié court, moyen ou long terme, les résultats varient.

10Le chapitre 7 d’Edina Soldo revient sur l’évaluation stratégique d’un portefeuille territorial d’événements et sur les conditions de réussite des stratégies événementielles. Elle renouvelle les démarches évaluatives en présentant d’abord leurs limites actuelles et en expliquant les dimensions qu’elles pourraient suivre. Elle définit un nouveau périmètre d’évaluation avec une grille de questionnement à propos du portefeuille territorial d’événements dont les trois dimensions à évaluer sont l’ancrage spatial, l’ancrage professionnel et l’ancrage démocratique. L’ancrage spatial vise à identifier si l’événement participe au renforcement des ressources territoriales ; l’ancrage professionnel identifie si l’événement renforce les compétences du territoire ; l’ancrage démocratique permet de savoir si l’événement inclut la participation de la population. Le renouvellement des pratiques d’évaluation doit encourager la co-construction et la co-production dans les stratégies événementielles locales afin de contribuer à la légitimation de la stratégie territoriale et favoriser son appropriation par les acteurs.

11La troisième partie « Etudes de cas », la plus conséquente de l’ouvrage, regroupe onze contributions de vingt auteurs qui viennent chacune présenter un ou plusieurs événements étudiés au travers d’enquêtes. Ces exemples éclairent les propos tenus précédemment et fournissent des exemples d’application et d’évaluation. La diversité des cas en fait la richesse de cette partie qui portent sur des événements sportifs (chapitres 8 à 12) puis sur des événements culturels à partir du chapitre 13.

12Le chapitre 8 s’intéresse à la patrimonialisation de deux événements sportifs de montagne ayant lieu en Suisse. Joël Pinson réalise une enquête par entretien et l’analyse d’articles de presse desquels il ressort que, malgré leurs caractéristiques proches, seul l’un des événements apparaît comme « sportif patrimonial ». Trois thématiques ressortent pour que l’événement soit perçu comme tel : la présence d’une narration forte (dans la communication et dans la presse), le lieu de l’épreuve et la présence de l’armée suisse qui donne un caractère particulier à l’événement en jouant le rôle de symbole.

13Le chapitre suivant s’intéresse au patrimoine olympique territorial. Jean-Loup Chappelet se demande quels sont les aspects patrimoniaux des Jeux, souvent passés sous silence au profit de l’héritage que peut engendrer ce méga-événement. Il explique pourquoi cet événement gagne à être considéré comme producteur de patrimoine matériel et immatériel. Des pistes sont proposées afin de manager le patrimoine dans les villes olympiques comme par exemple la création d’un organisme spécialisé et dont la structure perdurerait après l’événement, à la différence des Comités d’Organisation des Jeux Olympiques.

14Le chapitre 10 traite des stations de montagne qu’Emilie Jaccard compare en analysant l’impact des stratégies de l’événementiel sportif. Elle revient tout d’abord sur la définition des stations de moyennes montagnes et leurs particularités dues à leur enneigement limité et incertain. Pour attirer des visiteurs, sont mis en place des politiques d’accueil et d’organisation d’événements sportifs afin de se différencier. Elle évoque l’importance des relations entre les acteurs en soulignant qu’elles sont peu présentes dans ces deux études de cas. Les impacts des événements organisés sont mesurés une fois qu’ils sont terminés avec une influence favorable sur l’attractivité touristique.

15Dans le chapitre 11, Olivier Mutter présente un modèle de mesure des impacts d’un événement sportif qui comprend six critères : économique, social, environnemental, sportif, promotionnel et de respect des valeurs publiques. Son étude de cas porte sur un tour cycliste en Suisse nommé le Tour de Romandie dont les impacts sont plutôt positifs en termes promotionnels et sociaux mais plutôt faibles en termes économiques et sportifs.

16Lionel Maltese dans le chapitre 12 s’intéresse à des tournois de tennis à Nice et à Marseille afin de montrer comment les acteurs publics peuvent activer une ressource partenariale évènementielle sportive. La connaissance des ressources activables dans les collaborations publiques-privées, telles que la réputation, les ressources partenariales, les ressources relationnelles, la marque, les ressources territoriales et les ressources sportives sont des critères qui contribuent au modèle d’événement sportif.

17Le chapitre 13 revient sur les capitales européennes de la culture et plus précisément le cas de Mons en 2015 à propos de la territorialisation de la culture. Fabienne Leloup et Laurence Moyart s’interrogent sur la manière dont la valorisation du territoire peut continuer après l’événement et comment en pérenniser les effets. Cette labellisation européenne a permis d’engendrer des bénéfices culturels, économiques, sociaux, structurels et politiques. En plus des impacts sur l’image et l’attractivité touristique, Mons a connu une transformation urbaine, de nouvelles pratiques culturelles et de nouveaux lieux de culture ont fait leur apparition, des relations ont été créées entre les industries culturelles et créatives.

18Dans le chapitre 14, Manuela Barreca, Marco Meneguzzo, Gloria Fiorani et Nathalie Colasanti s’intéressent à Puglia Sounds, un programme régional qui vise à développer un réseau créatif de l’industrie musicale dans le sud de l’Italie. Leur étude s’appuie sur deux démarches, l’une qualitative afin d’étudier l’impact des appels à projet menés dans le cadre de l’événement ; la seconde démarche, quantitative, a pour but d’identifier les impacts économiques. Trois résultats ressortent. Tout d’abord, il est nécessaire d’avoir des méthodes innovantes prenant en compte les relations entre les différentes variables pour évaluer l’offre événementielle culturelle. Ensuite, les valeurs générées par ces événements peuvent toucher l’économie, la cohésion sociale, la cohésion territoriale. Enfin, l’évaluation multidimensionnelle prend en compte les relations entre la culture et la créativité et entre la culture et le développement territorial.

19Le chapitre 15, écrit par Géraldine Dallaire et Andrea Sartori, se penche sur la stratégie événementielle d’un musée de Montréal et son insertion dans la ville créative. Cette recherche qualitative (entretien et observation participante) étudie le rôle d’une institution culturelle avec une stratégie événementielle dans la formation d’idées créatives en milieu urbain. Les auteures mettent en lumière la diversité (taille, mission, orientation culturelle, structure de gouvernance, relations avec la scène artistique) dans les institutions culturelles.

20Dans le chapitre 16, Vincent Clavez et Thomas Paris analysent la dynamique territoriale des Vieilles Charrues. En étudiant le festival afin de comprendre son implantation, ils reviennent sur l’historique de l’événement et sur son organisation, puis ils s’intéressent aux impacts culturels générés, aux caractéristiques du public et à l’originalité de l’événement. Ces différents éléments montrent une fonction motrice du festival pour le développement local grâce à un ancrage territorial fort et une appropriation par les habitants.

21Le chapitre 17 de Solange Hernandez et Bruno Tiberghien expliquent les actions de sensibilisation mises en place afin de favoriser l’ancrage social et territorial de l’opéra dans le cadre du festival d’Aix-en-Provence. L’événement se veut accessible à tous, les auteurs étudient alors les actions de sensibilisation menées afin d’évaluer son ancrage territorial.

22Enfin, dans le chapitre 18, Djelloul Arezki, Edina Soldo et Imane Mohat concluent les propos en revenant sur les apports de la recherche francophone pour la compréhension des méga-événements. Leur analyse s’appuie sur les capitales européennes de la culture à partir de la méthode Alceste qui classifie les lemmes de 26 articles scientifiques sélectionnés afin d’en faire émerger diverses catégories. Leur analyse créé 6 classes. La première fait apparaitre l’axe de recherche en management public territorial et la deuxième, l’histoire des espaces locaux où se déroulent les méga-événements. La troisième fait émerger 3 objets de recherche : la nature artistique de l’évènementiel culturel, le méga-événement et ses impacts. La quatrième classe porte sur les objets de recherche suivant : les processus managériaux ainsi que le méga-événement et l’espace local. La cinquième se focalise sur le territoire. La dernière classe porte sur les dimensions immatérielles de l’espace local. Les résultats montrent que les recherches en management des événements culturels ont une approche centrée sur le management territorial stratégique.

23Les bibliographies à chaque chapitre permettent de retrouver aisément les références associées. L’ouvrage peut se lire par étape, le lecteur peut choisir de s’intéresser à une étude de cas en particulier sans lire la totalité, même si les parties théoriques viennent les éclairer. L’ensemble construit une réflexion sur le management territorial stratégique s’appuyant sur l’événementiel et donc sur les projets des acteurs pour l’accueil d’événements qui nécessite une coordination intra et inter organisationnelle. Le volume contribue à alimenter ce champ d’étude et éclaire via de nombreux exemples les interrogations autour des pratiques des acteurs, des impacts et de l’évaluation des événements dans les stratégies territoriales. L’ouvrage vient compléter un manque sur l’analyse managériale concernant l’organisation d’événements culturels ou sportifs sur les territoires et sur la manière dont ils peuvent contribuer à la dynamisation des territoires.

Pour citer ce document

Alexia Gignon, « Compte-rendu d’ouvrage. Événements et territoires. Aspects managériaux et études de cas.  » dans © Revue Marketing Territorial, 8 / hiver 2022

URL : http://publis-shs.univ-rouen.fr/rmt/index.php?id=733.

Quelques mots à propos de :  Alexia Gignon

Doctorante en contrat CIFRE au Lab’Urba de l’Université Gustave Eiffel et à la mission Partenariats et Tourisme de la Ville de Paris, sa thèse porte sur le rôle des acteurs sur le développement territorial et touristique lié aux Jeux Olympiques et Paralympiques sur le territoire du nord-est parisien.