Sommaire
5 / été 2020
numéro varia
- Editorial
- Charles-Edouard Houllier-Guibert Les acteurs privés et les acteurs publics font du marketing territorial, parfois ensemble
- Articles
- Marie-Eve Férérol Le positionnement marketing de l’Auvergne : la marge et la périphérie comme attrait touristique
- Manu Tranquard Attractivité et mise en tourisme des espaces naturels : principes et méthodes d’évaluation appliqués aux parcs québécois
- Marie-Josephe Leroux-sostenes et Carlos Rabasso La construction identitaire du FC Barcelone : sa marque, son territoire
- Celine Desmoulins La réputation des territoires : un outil non reconnu par les managers territoriaux
- Synthèses
- André Joyal Compte-rendu d’ouvrage. Une géographie visionnaire
Antoine Bailly, 2020, 111 pages - Agnès François-Lecompte et Michel Gentric Afficher le « made in » de ses produits : quels enjeux et alternatives pour les entreprises ?
- Sylvie Christofle, Catherine Papetti et Carine Fournier Positionnement congressuel mondial et marketing digital
Le positionnement marketing de l’Auvergne : la marge et la périphérie comme attrait touristique
Marie-Eve Férérol
Dans cet article, nous partons de l’hypothèse que les espaces en périphérie sont capables de faire preuve de résilience et que l’activité touristique y tient une grande place. Notre étude de cas reposera sur l’Auvergne, territoire situé au cœur de la France. Ce choix s’explique par ses caractéristiques géo-socio-économiques qui font d’elle une "périphérie au centre" et un territoire souvent connoté négativement dans l’opinion commune. Avec cette étude de cas, nous verrons comment le statut de marge/périphérie peut être utilisé par les acteurs régionaux dans le cadre d’une politique d’attractivité. Les caractéristiques négatives qui sont souvent liées aux espaces interstitiels (enclavement, démographie déprimée) deviennent alors des arguments d’attractivité touristique. La méthode suivie a consisté à articuler enquêtes par entretiens, par questionnaires via Google Form et études documentaires (documents institutionnels, articles de presse...).
In the competitive context that governs the global economy, interstitial spaces, those located between metropolitan areas, seem doomed to decline. In this article, we will start from the hypothesis that these spaces are capable of demonstrating resilience and that in this process of renewal, tourism plays a major role. Our case study will be based on the Auvergne, a territory located in the heart of France. This choice can be explained by its geo- socio-economic characteristics which make it a “periphery in the centre” and a territory often negatively connoted in the common opinion. With this case study, we will see how the status of margin and periphery can be used by regional actors in the framework of an attractiveness policy. The negative characteristics which are often linked to interstitial spaces (isolation, depressed demography) then become arguments for tourist attractiveness. The method followed consisted of combining surveys through interviews, questionnaires via Google Form and documentary studies (institutional documents, press articles…).
1Depuis 2008, le Conseil Régional d’Auvergne s’est lancé dans une démarche de marketing territorial pour renforcer l’attractivité de son territoire. Plusieurs chercheurs en sciences de gestion se sont fait l’écho de cette démarche (Rochette, 2010, 2012 ; Rochette et al., 2015, 2016, 2019 ; Zumbo-Lebrument, 2017, 2019 ; Martin, 2019). Nous souhaitons compléter leur travail en apportant un éclairage de géographe, en nous positionnant plus particulièrement dans le champ de la géographie du tourisme. L’article contribue à l’analyse d’une stratégie de marketing territorial, avec une réflexion sur le rôle du tourisme dans les dynamiques territoriales, notamment dans la recomposition de la marginalité. Il étudie ainsi la création quasi simultanée d’une marque Territoire (Auvergne Nouveau Monde) et d’un label (Nattitude) pour les hébergements.
2Les espaces interstitiels, espaces compris ici entre les métropoles, à l’écart des centres de commandement et dont la démographie et l’économie sont bien souvent chancelantes, appartiennent aux espaces de marge, périphériques. On peut alors s’interroger sur leur capacité à réagir et à s’intégrer au système socio-économique global. Dans cet article, nous partons de l’hypothèse selon laquelle les espaces interstitiels sont à même de faire preuve de résilience1 et que l’activité touristique tient une grande place dans ce processus de renouveau. Nous nous appuyons sur le cas de l’Auvergne, territoire à l’écart des grandes destinations touristiques et des principaux centres urbains français et européens. Nous allons montrer comment le statut de marge et de périphérie peut être utilisé par les acteurs régionaux et comment des caractéristiques négatives (enclavement, démographie déprimée) deviennent des arguments d’attractivité. Ce questionnement semble pertinent au regard de la « Troisième révolution touristique » (Violier, 2016) marquée par des pratiques beaucoup plus personnalisées, en rupture totale avec celles du tourisme de masse et au regard des tendances actuelles d’un retour vers la nature de la part de beaucoup de citadins anciens ruraux.
« Le désir de nature et du passé est considéré comme une contre-tendance à la mondialisation et à l’urbanisation qui lui est associée; c’est un échappatoire de la société basée sur le tout technologie et une reconnexion avec ses racines2 » (Steinmetz, 2010, p.21).
3L’Auvergne est intéressant à investiguer, tant ses représentations tranchent avec la réalité d’un monde « sous condition urbaine » (Mongin, 2007 ; Lévy, 2013). Or, l’imaginaire, les représentations, sont de puissants vecteurs d’attirance et donc des générateurs de flux vers les contrées rêvées ou fantasmées (Gravari-Barbas et Graburn, 2012 ; Petr, 2015 ; Bernard et al., 2017).
4Cet article se décompose en quatre parties. La première pose le cadre théorique en définissant les concepts d’attractivité, de marketing territorial, de marge et de périphérie et en explicitant selon quels registres et quelles articulations ils sont opératoires. La seconde expose notre méthodologie et la présentation du terrain d’étude. La troisième montre comment les caractéristiques négatives de la marge et de la périphérie peuvent être utilisées comme des éléments attractifs. Enfin, l’ultime partie interroge la pertinence de la politique auvergnate dix ans après le lancement de la marque Auvergne Nouveau Monde et du dispositif Nattitude.
1. Le potentiel d’attractivité des espaces marginaux et périphériques
5Définir la notion de marge est complexe car cela renvoie à une multitude d’approches (géomorphologie, analyse spatiale, géographie sociale) (Chabrol et al., 2016). Souvent, la marge est confondue avec la périphérie, mais si une marge est souvent une périphérie, toute périphérie n’est pas une marge ; tout est question de subordination et de degré de rupture. Dans cette partie théorique, il est également nécessaire de revenir sur le concept de marketing territorial et son corollaire, le concept d’attractivité.
1.1. Marges et périphéries : des définitions et liens ambigus
6Ardue, complexe, confuse, tels sont les adjectifs qui reviennent le plus souvent dans les écrits des chercheurs pour décrire la définition de la marge (Candelier et Gaudin, 2017). La marge renvoie déjà à un espace dont les limites varient dans le temps. Habité ou non, cet espace a une identité forte du fait de ses caractéristiques propres (mentalités, habitudes de vie...). Quelquefois, il peut même faire preuve d’une capacité d’organisation et d’innovation (de Ruffray, 2000). La marginalité n’est pas obligatoirement subie ; elle peut être choisie, construite et entretenue médiatiquement (Depraz, 2017 ; Milhaud, 2017). La marge n’est pas seulement liée aux valeurs dévalorisantes de précarité, d’isolement, de relégation, voire de délinquance. Elle peut aussi être considérée comme un espace de liberté, dans lequel se développent l’audace, l’anticipation et l’innovation créatrice (Florida, 2002 ; Séchet et Zeneidi, 2017).
7Bien souvent, la marge a été appréhendée via le modèle centre/périphérie d’A. Raynaud (1992) pour lequel il existe des centres concentrant pouvoirs politiques et économiques et des périphéries intégrées, dominées ou délaissées, d’où une certaine confusion avec le terme périphérie. La valeur des indicateurs socio-économiques (comme le taux de pauvreté, l’évolution de la population, le taux de vieillissement, l’accès aux soins, l’accès au numérique…) permet de caractériser les espaces périphériques comme défavorisés, dévitalisés, lacunaires, marginalisés, sensibles. Mais, comme nous le montrons par la suite, la situation n’est pas figée ; « le tourisme peut permettre l’intégration spatiale des périphéries en créant de la valeur dans des lieux qui en étaient a priori dépourvus » (Bernard et al., 2017, p.8). Suivant l’approche dont on se sert, les termes périphérie et marge peuvent être voisins. Dans notre article, du fait des caractéristiques géographiques et socio-économiques du terrain d’étude, nous faisons nôtre la définition de Grataloup :
« Marges, périphéries, isolats, espaces interstitiels… tous ces substantifs désignent un même espace en lien avec sa position géographique ou/et économique : un espace non métropolitain, un espace non central (au sens christallérien), un espace dominé. En bref, c’est un espace à l’écart des dynamiques territoriales les plus favorables » (Hypergéo, 2019)
1.2. Attractivité et marque territoriale
8Dans le cadre de cet exposé limité, il serait fastidieux de citer dans leur totalité les ouvrages académiques et les articles universitaires qui ont abondé ces dernières années sur le marketing territorial (Gollain, 2011 ; Rochette et al., 2015, 2016, 2019 ; Meyronin, 2015 ; Vuignier, 2017 ; Houllier-Guibert, 2019), c’est pourquoi nous limiterons nos propos aux points les plus essentiels pour l’analyse de cas.
1.2.1. L’attractivité : une préoccupation majeure des territoires
9Accentuées par la mondialisation, la concurrence et la compétitivité se retrouvent à toutes les échelles territoriales et dans tous les domaines. Les pouvoirs publics rivalisent alors d’ingéniosité pour consolider l’attractivité de leur territoire. Comme le souligne C. E. Houllier-Guibert (2019), ce terme est devenu au cours des années 2000-2010 de plus en plus usité, tant par les collectivités locales que par les chercheurs. Pour beaucoup (Hatem, 2004 ; Fabry, 2009 ; Poirot, 2010), « l’attractivité d’un territoire est généralement assimilée à la capacité de ce territoire à attirer et à retenir les facteurs mobiles de production et/ou la population » (Poirot, 2010, p.27). Les individus seront plus sensibles aux capacités potentielles d’être (capacités/capabilités au sens d’A. Sen) tandis que les entreprises rechercheront des facteurs ayant davantage trait au fonctionnement même de leurs unités de production (coût et qualification de la main d’œuvre, services aux entreprises, infrastructures de transport…). Depuis une dizaine d’années, des auteurs (Sacareau et al., 2010 ; Chaze, 2017 ; Houllier-Guibert, 2019) ont mis en exergue la complexité du terme attractivité et ont jugé bon de le circonscrire selon deux types d’approches : l’attraction, phénomène renvoyant à une simple force mécanique et l’attrait qui est beaucoup plus subjectif et qui renvoie à la qualité de vie. L’étude du cadre de vie, de l’hospitalité touristique comme résidentielle et le marketing expérientiel sont alors nécessaire pour bien appréhender l’attractivité (Houllier-Guibert, 2019).
10Évoquer la dimension touristique est très pertinent car comme le reconnaît N. Fabry, elle est trop souvent mise en arrière-plan alors qu’elle constitue l’un des piliers de l’attractivité d’un territoire.
« On entend par attractivité touristique le fait d’attirer des touristes. La qualité de cette attractivité est révélée non seulement par le nombre d’entrées mais aussi par la durée des séjours et surtout des dépenses générées par ces touristes dans le respect de l’environnement socio-économique de l’espace mis en tourisme » (Fabry, 2009, p.56-57).
1.2.2. Des marques pour développer l’attractivité des territoires
11L’enjeu du développement territorial est de mettre en valeur ou de créer les ressources, les compétences et les aménités distinctives qui permettent à un territoire de se différencier de ses concurrents et de se doter d’un avantage concurrentiel (Veltz, 2004 ; Fabry, 2009 ; Pecqueur et Gumuchian, 2007 ; Gomez, 2015). C’est sur la base de cet avantage concurrentiel que le territoire sera compétitif et attractif. Nombre de chercheurs ont mis en évidence ces dernières années l’existence de deux types de ressources territoriales (Pecqueur, 2018) : les ressources génériques, facilement reproductibles ailleurs et les ressources spécifiques ou innées, en lien direct avec le territoire. Ces dernières ont plus particulièrement trait à l’ADN, aux composantes géographiques et socio-identitaires du territoire. Les ressources naturelles comme les produits locaux rentrent par exemple dans cette catégorie.
« [Contrairement à un produit], le territoire possède une identité propre, riche de sens et de valeurs, qui seule lui offre la possibilité de se distinguer réellement. C’est cette identité profonde, la personnalité qui s’en dégage, l’histoire qu’il est capable de raconter qui vont alimenter "sa marque" » (Rebillard, 2012, p.14).
12La création d’une marque territoriale est bien un levier de développement car elle va rendre visibles les ressources et les actions engagées par un territoire (Aaker, 1996 ; Ferras Sexto, 2001 ; Gollain, 2011 ; Meyronin, 2015). Plusieurs fonctions lui sont assignées.
« Elle a, à la fois, une fonction défensive de différenciation d’un produit de celui de la concurrence et une fonction symbolique, identitaire, d’incarnation d’une promesse. Elle est créatrice de valeur financière et constitue en cela une ressource importante (le made in France par exemple) mais elle est aussi un processus de mobilisation de tous derrière un projet commun s’exprimant à travers des valeurs ». (Rochette, 2012, p.7)
13Plus largement, « la construction de marques territoriales est un moyen de promouvoir le territoire en tant que destination touristique3 » (Lorenzini et al., 2011, p.541). Elle contribue à la notoriété d’un territoire mais par ses valeurs et l’histoire qu’elle porte, elle peut aussi inciter à la prise de décision de se rendre dans tel ou tel territoire pour le découvrir.
1.2.3. La marque territoriale et l’image du territoire
14Comme nous l’avons dit, l’attractivité doit s’entendre comme l’association entre l’attrait et l’attraction. Or, pour provoquer cette attraction, pour créer une intention de visite ou d’installation pérenne, le rôle de l’image compte : « La désirabilité territoriale devient le socle de mobilisation des acteurs locaux, l’identité territoriale servant de levier d’action » (Houllier-Guibert, 2017). Une marque territoriale repose sur deux registres d’action : un registre rationnel et un registre émotionnel. Ce sont les éléments émotionnels (donner envie, faire rêver, faire aimer, s’identifier) qui conditionnent le fait de partir. Que ce soit pour l’attractivité globale du territoire ou uniquement l’attractivité touristique, les valeurs du territoire doivent correspondre aux sens de la vie que s’en donnent les individus (Leroux et Pupion, 2014). Ce besoin de provoquer la désirabilité est au cœur des politiques d’attractivité touristique.
« Dans un marché touristique très concurrentiel, l’image de marque d’un territoire ou d’un site joue un rôle majeur, car elle évoque les qualités et stimule des émotions dans l’esprit des touristes » (Marcotte et al., 2011, p.210).
15D’autres auteurs (Frochot et Legoherel, 2014 ; Leroux et Pupion, 2014 ; Marchat et Camelis, 2017 ; Lebrun et Corbel, 2019) ont également montré que le choix d’une destination dépendait fortement de l’image qu’en avaient les consommateurs avant de partir. Pour un territoire plus particulièrement touristique, une marque a de nombreux bénéfices en termes d’images. Geneviève Brisson en liste les principaux.
« Une stratégie de marque peut aider un lieu à matérialiser une identité unique et à offrir des expériences mémorables aux voyageurs, ce qui lui permet de mieux rivaliser avec les autres destinations. La marque peut également faire connaître une destination, réduire l'anxiété des consommateurs à l'idée de risquer d’entreprendre un voyage et encourager les visites répétées en fidélisant les voyageurs (Kolb, 2006). Parmi les autres avantages de la marque d'une destination, on peut citer une promotion touristique plus efficace, une plus grande visibilité dans les médias et le développement d'une atmosphère où l'innovation et l'investissement sont valorisés4 ») (Brisson, 2012, p.34).
16Certes, une marque doit faire rêver, mais les éléments mis en avant pour envoûter doivent exister. Une rupture entre les produits, les idéaux promis par la marque et l’offre délivrée sur le territoire n’est pas recommandée. Il est indispensable de montrer un monde à vivre et non un monde à voir au risque de décevoir les nouveaux arrivants et touristes (Chon, 1990 ; Rebillard, 2007). Dans le même temps, si la désirabilité touristique peut être enclenchée par des images façonnées par une marque, le tourisme peut aussi alimenter un processus de marketing territorial. En mettant en valeur par exemple les activités évènementielles ou le patrimoine matériel et immatériel, il contribue à donner une meilleure image du territoire. Cette donnée est fondamentale dans un contexte de compétitivité territoriale, notamment pour les territoires en situation de marge et de périphérie. Par ailleurs, comme le soulignent I. Sacareau et al. (2010), par leur mobilité touristique, les individus peuvent déjà avoir la connaissance et l’expérience du lieu. Certains sont, en l’occurrence, susceptibles de s’installer durablement au pays des vacances.
1.3. Le tourisme dans les marges et périphéries
« Les marges spatiales ont un capital spatial avec lequel les acteurs sociaux parviennent dans certains cas à jouer, au point de réaliser parfois un retournement des polarités patrimoniales et touristiques » (Bernier, 2013, p.369).
17Sans considérer le tourisme comme un graal, il faut bien reconnaître l’apport de cette activité dans le développement ou la restructuration économique de certains territoires en marge. L’article que B. Bunnik consacre au Haut-Taravo en Corse illustre bien la mise en tourisme d’une marge rurale, « territoire peu peuplé perçu comme enclavé, dépendant, voire en retard. Les connotations péjoratives sont fréquentes sur ce bout du monde » (2017, p.151). Malgré ces handicaps ou grâce à eux, le Haut-Taravo a fait du tourisme vert un de ses axes de développement. Parallèlement à la création de petites structures d’accueil du type gîtes, et à l’organisation notamment de trails, les acteurs renforcent l’image de marge de leur territoire :
« Si les touristes viennent visiter le Haut-Taravo, ce sera pour sa marginalité : des villages isolés, une nature préservée, des traditions locales et des produits d’un terroir unique et menacé » (Bunnik, 2017, p.151).
18Pour J.M. Hazebroucq (2007, p.121), le tourisme est « un changement provisoire d’habiter » ; pour M. Stock, le tourisme passe pour un moment de re-création, « ensemble de pratiques, de normes, d’institutions et de représentations qui se caractérise par un relâchement des contraintes et des pratiques déroutinisantes, bref une libération contrôlée du self-control quotidien » (Stock, 2010, p.290). Le territoire d’accueil touristique doit donc être le plus dépaysant possible afin que toutes les conditions soient réunies pour que l’habitant temporaire puisse se recréer hors de son quotidien ou renouer avec ses racines. De plus en plus, en lien avec les nouveaux besoins des touristes, les périphéries rurales endossent ce rôle de territoire d’accueil pour les habitants des centres urbains. Dans les années 1990, de nouvelles tendances apparaissent ; pour Salvatore et al. (2018, p.42), elles sont au nombre de quatre :
« (a) une prise de conscience environnementale croissante ; (b) une individualisation et une ouverture à de nouvelles expériences ; (c) un appel émergent pour des expériences de voyage très originales et sur mesure ; et (d) un désir croissant de participer et d’être intégré dans un mode de vie local5 ».
19La périphéricité et la marginalité ne sont pas toujours des tares si les acteurs locaux savent en tirer profit. Les Auvergnats l’ont ainsi bien compris lorsqu’ils ont lancé la marque Auvergne Nouveau Monde puis imaginé le nouvel dispositif d’hébergement touristique Nattitude.
2. Méthodologie et présentation de l’étude de cas
2.1. Le design de la recherche
20Très classiquement, notre travail a consisté en une revue de littérature consacrée aux marges, au marketing territorial et à la marque Auvergne Nouveau Monde. Ensuite, l’acquisition de données s’est faite grâce à plusieurs entretiens semi-directifs menés entre 2014 et 2017 auprès d’acteurs-clés. Nous avons délibérément choisi de nous placer du côté des initiateurs de la marque (CRDT, association qui gère la marque, Conseil Régional), avec la conscience que ce positionnement peut constituer une limite à notre enquête. Mais notre but premier était de nous intéresser aux apports mutuels entre une marque territoriale et un dispositif touristique. Pour mieux comprendre ce dispositif, nous avons également approché, en 2018, M. Pourcher, pièce-maîtresse de l’association regroupant les hébergements Nattitude ; c’est elle qui a facilité notre enquête auprès des autres hébergeurs. Nous avons profité de toutes ces entrevues pour récupérer des documents importants tels l’étude identitaire, le Schéma Régional de Développement Touristique, le plan marketing, les différents cahiers d’idées de Nattitude... Durant l’été 2019, nous avons contacté les Comités Départementaux du Tourisme (CDT) de l’Allier et de la Haute-Loire et les responsables des services Tourisme aux Conseils Départementaux du Cantal et du Puy-de-Dôme afin de nous enquérir de leur avis sur la stratégie touristique départementale et régionale et nous avons eu de nouveau contact avec J.F. Jobert, directeur-adjoint du CRDT, pour faire le point sur la situation actuelle et clarifier quelques détails. Pour l’analyse plus précise du dispositif Nattitude, nous avons opté pour l’élaboration d’un questionnaire dont la distribution s’est effectuée, durant l’été 2018, via Google Form. Cette enquête visait d’une part à mieux connaître les déterminants sociaux que sont la position sociale, l’enracinement familial des hébergeurs Nattitude, leur lien avec l’Auvergne (autochtones ou nouveaux arrivants ? comment l’ont-ils connue ? quels mots leur évoque-t-elle ?), leur avis sur le réseau (points positifs et négatifs de cette démarche, ont-ils bénéficié des aides financières et à quoi leur ont-elles servi ?) et d’autre part à caractériser la clientèle adepte de ces nouveaux hébergements (âge, origine, CSP, fibre écologique, durée des séjours). D’autres questions ont servi pour comprendre leur démarche (raison de l’adhésion au réseau, preuve de leur engagement en termes de développement durable, activités proposées à leur clientèle). Tous les membres du réseau ont reçu un mail avec explication de notre démarche. Sur les 180 personnes contactées, 396 ont bien voulu nous répondre, soit un taux de réponse de 21,7 %7. Notre étude se réduit donc à une enquête exploratoire, basée sur un 1/5e des hébergements. Parmi les répondants, les hébergeurs sont plutôt âgés (56,8 % ont entre 50 et 60 ans et 16,2 % plus de 60 ans) et ne sont pas auvergnats d’origine (51,4 % des répondants). 4 des répondants sont étrangers (Suisse, Italien et Belges) mais d’après les brochures ou les sites internet, nous voyons que ce nombre peut atteindre une dizaine avec des représentants néerlandais et anglais. Afin de préserver l’anonymat des réponses, les noms des individus interrogés ont été codés. Un responsable de gîtes sera ainsi codé G, d’un hôtel H, d’un hébergement de plein air C et d’une chambre d’hôtes CH. Le numéro associé correspondra à un ordre chronologique de réception des réponses. 21 hébergeurs (14 chambres d’hôtes, 4 gîtes et 2 hôtels) ont accepté d’être rappelés (mais CH14 a oublié de laisser ses coordonnées).
21En ce qui concerne l’image de l’Auvergne, notre travail s’est divisé en deux parties, s’appuyant sur une définition de l’image fournie par plusieurs chercheurs. En communication, il existe deux sortes d’image (Marchat et Camelis, 2017 ; Lebrun et Corbel, 2019).
« L’image organique provient de l’exposition des consommateurs à des sources d’informations non touristiques telles que les journaux, articles de magazines, reportages télévisuels, films et opinions d’amis. En conséquence, un individu qui n’aura jamais voyagé vers une destination et qui n’aura même jamais considéré cette destination comme un choix touristique potentiel en aura quand même une image. L’image induite quant à elle résulte des communications des acteurs touristiques (publicités, brochures, guides touristiques, conseils d’agents de voyages) qui ont pour vocation de vendre la destination et d’informer le consommateur » (Marchat et Camelis, 2017, p.45).
22Pour appréhender l’image de l’Auvergne, nous avons donc mené dans un premier temps une analyse fine des documents recueillis lors des entrevues et dans un deuxième temps nous avons accordé une attention particulière au traitement de la marque et de Nattitude dans la presse régionale et nationale. Comme l’explique C. Petr (2015), le rédactionnel des journalistes rassure le consommateur et le touriste. Leurs propos sont beaucoup plus crédibles aux yeux des lecteurs qu’une campagne de communication traditionnelle organisée par la destination elle-même. Enfin, la notoriété web est abordée. Pour la circonscrire, nous nous sommes référé au baromètre du site internet de l’agence de communication spécialisée dans les médias et le tourisme we-like-travel.com. Il classe les destinations en fonction de leurs performances quantitatives et qualitatives sur les réseaux sociaux (Facebook, Instagram et Twitter), via des tableaux comparatifs entre les destinations touristiques et ce, d’une manière mensuelle et annuelle, permettant une vision de l’évolution de la notoriété web.
2.2. L’Auvergne, prototype des espaces de marges et de périphérie, mise en marque
23Lancée officiellement en 2011, il a été décidé à l’été 2017, que la marque Auvergne Nouveau Monde deviendrait simplement la marque Auvergne et que le logo changerait afin de reprendre le graphisme et la même couleur que celui de la nouvelle grande région Auvergne - Rhône Alpes, née le 1er janvier 2016 suite à la réforme territoriale de 2015. Cette modification ne change en rien les ressorts de notre enquête, mais nous tenions à le signaler. Si le soutien du Conseil Régional reste le même avec toujours une subvention de 475 000€ (montant en 2017), la philosophie de la marque change. Désormais, en plus de la recherche d’attractivité et d’un changement d’image, la marque se conçoit comme outil d’individualisation au sein de la région AURA. Comme le souligne C. Zumbo-Lebrument dans une interview (2019), la réforme territoriale a eu un impact sur les marques Territoire déjà existantes et a mis à mal leur évolution. En ce qui concerne plus précisément l’Auvergne, la marque est devenue un outil au service du marketing politique alors qu’auparavant elle reposait davantage sur une démarche participative de l’ensemble des parties-prenantes.
24En 2008, lorsque les élus du Conseil Régional réfléchissent à une marque Territoire, l’Auvergne ne jouit pas d’une image exceptionnelle. Sa périphéricité n’est pas seulement géographique ; elle est aussi économique et sociale, en tant que bout de « la France enclavée » (Sutton, 2017). Elle demeure une périphérie et une marge pour le reste du pays quant aux conditions d’accessibilité. Le point noir est principalement le rail ; les lignes secondaires (celles qui ne ferment pas) ne s’améliorent guère et les lignes INTERCITÉS sont décriées pour la durée des trajets (2h30 pour Clermont-Lyon et 3h30 pour faire Clermont-Paris). Quant à l’aéroport de Clermont-Ferrand, il reste bel et bien un équipement de province de par son trafic et les lignes proposées.
25Avec 52 hab/km² en moyenne et 1 347 387 habitants en 2010, l’Auvergne appartient à la « diagonale du vide » dont la principale caractéristique est une situation démographique déprimée (0,38 % de croissance entre 2003 et 2007 ; vieillissement accentué avec 23, 4% de plus de 65 ans en 2010 ; déficit naturel prononcé8). Économiquement, avec un PIB de 34 milliards d’euros en 2012, l’Auvergne se situe seulement au 19ème rang des 22 régions françaises. Quant à la répartition des emplois par secteur d’activité, elle reflète encore en 2007 l’économie traditionnelle de la région : près de 6 % dans le secteur agricole, 67 % dans le secteur des services et 28 % dans le secteur secondaire porté par des entreprises connues internationalement (Michelin et Limagrain). L’Auvergne bénéficie malgré tout d’un secteur touristique assez dynamique (3ème secteur d’activité avec 7,5 % du PIB et 2,7 milliards d’euros de consommation touristique). Véritable atout pour la région, il repose sur des sites naturels, une dizaine de stations thermales, des stations de sports d’hiver et des sites phares avec plus de 300 000 visiteurs par an en 20129 : le parc animalier du Pal, le sommet du Puy de Dôme et le parc scientifique Vulcania. En 2012, à l’époque du lancement de la marque, l’Auvergne est la 11ème région touristique de France pour son nombre de lits et la 10ème pour son nombre de nuitées marchandes.
26La mise en avant, pendant des décennies, des aspects agricoles et ruraux, a malheureusement impacté durablement la notoriété de l’Auvergne. Pour Jamot (1992 et 2002), les Auvergnats eux-mêmes, « aidés » par les médias, ont une grande part de responsabilité dans cette image peu moderne. Le chercheur clermontois pointe en premier lieu les slogans publicitaires utilisés, soi-disant, pour vanter la région et estime que la formule L’Auvergne est un grand plateau de fromages « réduit la province à une perception olfactive, souvent forte, au relent animal confirmé par la présence visuelle d’autochtones choisis, en costume traditionnel » (1992, p.55). Dix ans plus tard, Jamot surenchérit en critiquant ouvertement les médias.
« L’Auvergne, observée depuis l’extérieur, appartient à la France profonde, celle d’un monde rural demeuré à l’écart de toute civilisation urbaine, où l’agriculture s’avère omniprésente et en prime passablement attardée. […] Les médias s’évertuent souvent à rechercher le vieillard le plus édenté qui soit, habitant la ferme la plus isolée, au confort le plus rustique, dont les discours doivent être sous-titrés (exotisme oblige), pour restituer l’image que l’on se fait de l’Auvergnat authentique » (Jamot, 2002, p.5).
27En 2008, les élus régionaux situent l’attractivité de leur territoire comme un enjeu économique, social et culturel décisif, générant le lancement d’une marque qui servira aussi bien à l’attractivité globale de la région (Houllier-Guibert, 2019) qu’à l’attractivité touristique (Conseil Régional, 2009). Cette marque n’est pas le seul outil qu’adopte l’Auvergne ; une politique d’amélioration de la qualité de l’offre d’hébergement (Nattitude) et une communication spécifique (plus moderne, percutante, nouvelles images) l’accompagnent.
3. La naturalité et l’exception au service d’une marque Territoire
28La marque auvergnate, tout comme le dispositif d’hébergement, intègrent parfaitement les lignes directrices. Comme nous l’avons vu dans la partie théorique, quatre grandes tendances identifiées par Salvatore et al. (2018, p.42) : une prise de conscience environnementale ; des pratiques touristiques plus individualisées, autonomes ; l’envie d’expérience ; la volonté des touristes de s’approprier un mode de vie local.
3.1. Les principes au cœur de la marque touristique : marginalité, périphéricité et naturalité
29La marque Auvergne Nouveau Monde est officiellement lancée en 2011. Sa philosophie repose sur quatre idées :
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Les faibles densités sont l’assurance d’un espace préservé où la qualité de vie est bonne
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L’Auvergnat n’est pas un arriéré mais un homme ou une femme authentique qui a préservé ses traditions et qui mange sainement
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Au lieu d’être un espace inaccessible, l’Auvergne se veut un lieu intimiste permettant un ressourcement
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Au lieu d’être un territoire secret, complexé, l’Auvergne se veut une région moderne, ultraconnectée au reste du monde via les réseaux sociaux.
30Il est clair que la marginalité est acceptée ; on choisit d’y rester afin d’en faire un monde à part. L’exemple auvergnat illustre parfaitement les propos de Salvadore et al. (2018, p.42).
« Les mêmes attributs qui étaient auparavant considérés comme désavantageux sont désormais considérés comme de nouvelles opportunités (Brown et Hall, 2000). L’isolement et l’éloignement en sont venus à représenter la paix et le caractère distinctif, la ruralité est considérée comme un moyen d’entrer en contact avec la nature et les modes de vie traditionnels sont à la base d'une expérience patrimoniale10 ».
31Le positionnement centré sur la naturalité et quatre autres valeurs (partage, exigence, créativité et idéalisme) s’inspire d’une réflexion menée sur le monde d’aujourd’hui. Comme nous l’a rappelé J. Pinard (entretien, 2014), directeur de l’association Auvergne Nouveau Monde11, les pourparlers autour de la marque avaient comme contexte le début de la crise et un climat anti-libéral dû notamment à la crise des Subprimes aux Etats-Unis. En écoutant les analystes disserter sur les raisons de la morosité économique et les solutions pour en sortir, les élus et les acteurs économiques auvergnats ont pris conscience que l’Auvergne semblait correspondre aux aspirations nouvelles de la société (qualité, partage, rejet de la sur-fréquentation et surconsommation). La responsable du Pôle tourisme au Conseil Régional, C. Louradour, a bien insisté sur ce point : « la marque ne se résume pas à un positionnement de tourisme vert. Les valeurs transmises par cette marque vont beaucoup plus loin : c’est un état d’esprit, un positionnement de ressourcement, de bien-être et de comportement » (entretien 2014).
3.2. Une démarche qualitative d’hébergement de tourisme durable : Nattitude
32Parallèlement aux discussions inhérentes à la création de la marque, le CRDT imagine un nouveau dispositif d’hébergement en lien avec le positionnement naturalité adopté par la marque : le réseau Nattitude (contraction de nature et d’attitude). Animé directement par le CRDT, le credo de ce réseau est « la défense de l’environnement et la qualité du service, soit deux valeurs essentielles du tourisme durable ». Nattitude est « une démarche qui sert de vitrine car basée sur des éléments identitaires, au bon sens du terme, pas passéistes » (entretien Jobert, 2014). Son rôle est d’améliorer l’image des hébergements auvergnats et de capter la clientèle étrangère davantage sensible à ce genre d’initiative, cette clientèle haut de gamme qui fait défaut en Auvergne. Ce réseau d’hébergement contribue donc à alimenter la légitimité de la marque et constitue une activité économique support du tourisme. Pour sélectionner les hébergements qui peuvent intégrer le programme, le CRDT et ses partenaires (Conseils Régional et Départementaux, CCI, Parcs Naturels Régionaux) vérifient la recherche de la haute qualité et l’adéquation du produit avec les valeurs de la marque auvergnate. Globalement, six critères sont à remplir pour intégrer Nattitude : une localisation exceptionnelle (villages de caractère, parc naturel…), une qualité architecturale et décorative, une approche écologique, une offre d’activités bien-être, des liens resserrés avec le territoire via des achats chez les producteurs et artisans locaux et un savoir-faire en termes d’accueil et de connaissances sur la région. Le positionnement de Nattitude entre alors dans le tourisme transmoderne cher à Corneloup (2010). Pour ce sociologue, le style transmoderne repose sur plusieurs éléments :
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La naturalité (la recherche de sauvagerie, d’habitats écologiques et de relations intimistes avec la nature et les populations locales est privilégiée)
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Le métissage culturel
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Une chaîne éco-sportive et bio-pratique (la valorisation du jardin, l’attention portée au design et à l’esthétisme dans l’habitat, la valeur accordée au quartier et aux relations de proximité, le goût émergent pour les mobilités douces)
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Le style récréatif et la spiritualité écologique
« En 2000, pour beaucoup, le tourisme en Auvergne c’était uniquement le tourisme social ; des gens qui n’avaient pas le choix du lieu de leurs vacances (imposé car malades ou désargentés, envoyés dans les centres de vacances des Comités d’Entreprise). Pour les élus, le tourisme était subi et on ne pouvait rien faire d’autre. J’ai mis beaucoup de temps à les convaincre que le tourisme était une économie particulière où l’offre faisait la demande. Si on ne fait que du 2 étoiles avec des murs sans identité, les gens ne vont pas choisir leur destination. En revanche, si on inverse la tendance et qu’on modifie l’offre, si on met en scène la nature d’une manière différente, ça peut changer » (Pinard, 2014).
33Très logiquement, en lien avec la philosophie de Nattitude, les hébergements se localisent très majoritairement (84 %) à la campagne et semblent plus adaptés aux gîtes et chambres d’hôtes (70 %). La majorité se situe essentiellement dans le Puy de Dôme (à 36,1 %) et dans le Cantal (à 34,4 %). Le bâti des hébergements est bien souvent typique de la région avec des maisons robustes en pierres volcaniques et aux toits de lauze.
Figure 1. Exemples d’hébergements Nattitude
Source : https://leclosdespierresrouges.fr et Google Image avec l’aimable autorisation des propriétaires.
34Outre leur aspect, les hébergements Nattitude peuvent même être cossus. Il en est ainsi des châteaux et demeures seigneuriales. À l’opposé, on retrouve de l’habitat populaire (burons, maisons vigneronnes, corps de ferme…), réhabilité avec un certain luxe. Bien souvent, et en lien avec la qualité requise pour adhérer au réseau, les hébergements sont haut de gamme. La plupart de ces structures affichent ainsi un nombre élevé d’étoiles ou d’épis (4 ou 5). Certains hôtels sont bien souvent couplés avec un restaurant tenu par un chef étoilé du Guide Michelin. Les autres hôtels-restaurants ne déméritent pas, étant souvent labellisés Logis ou Gault et Millau. Au final, suscité par les opportunités du marché, Nattitude peut être considéré comme une innovation « demand-pull » (Encaoua et al., 2004). Il relève aussi des innovations appartenant à la catégorie « innover, c’est faire du neuf avec du vieux » (Margetic et al., 2017). Ce réseau s’est en effet appuyé sur les ressources territoriales pour adhérer au mieux aux nouvelles attentes des touristes et a su composer avec la marginalité de l’Auvergne. Mieux, il s’en est servi pour attirer une clientèle de citadins à la recherche d’air pur et d’authenticité.
3.3. Une nouvelle communication régionale mettant en avant la valeur de la régénération socio-culturelle du territoire
35Les images employées pour faire la publicité de l’Auvergne sont différentes des années passées. Désormais, on n’hésite pas à afficher des humains, fait « impensable » il y a à peine 15 ans selon J. Pinard. Oubliés les vaches et le fromage (même si ces éléments s’affichent encore en référence à un tourisme gourmand), désormais place aux jeunes et au combi Volkswagen symbolisant le voyage. Le but est de casser l’image de l’Auvergne uniquement occupée par une population âgée. Outre ce souhait, la communication auvergnate a suivi une évolution classique en lien avec celle du tourisme en général : très schématiquement, au départ, l’Auvergne est belle, il y a des choses à voir (présentation des paysages et des sites) ; ensuite, il y a des choses à faire et à vivre (mise en avant des activités) ; et désormais, l’Auvergne est un territoire « où l’on renaît » (concept qui renvoie notamment aux travaux de J. Pine sur l’expérience).
36La marque et le CRDT vont aussi s’appuyer sur les vidéos demandées par l’Agence Régionale de Développement des Territoires auprès de prestataires privés et de youtubeurs connus. Les vidéos des urbanophiles par exemple, exagèrent les désagréments de Paris et sont censées montrer les avantages de l’Auvergne par l’humour et l’autodérision, une recette fort usitée par les marketeurs pour attirer l’attention du consommateur et du touriste (Meyronin, 2015 ; Petr, 2015).
4. Dix ans après le lancement de la marque territoriale et de Nattitude
4.1. Un positionnement en accord avec les préoccupations écologiques et la recherche de racines terriennes
37Pour Atout France, le tourisme de nature est devenu une tendance très forte ces dernières années, avec un cœur de cible constitué de familles et de seniors. Selon cet organisme d’Etat, la crise économique et écologique incite les vacanciers à « se recentrer sur de vraies valeurs » et à « un retour aux racines », « en rupture avec les contraintes de la vie urbaine » (site web d’Atout France : le tourisme de nature). Le sociologue Jean Viard arrive au même constat en montrant que la préoccupation écologique provoque ce désir de nature et de campagne.
« Les urbains cherchent dans les villages un certain art de vivre qui n’existe pas dans les métropoles, où est privilégié l’art de produire. De bons produits, des choses simples » (Viard, Le Figaro du 06/06/20).
38L’envie de se ressourcer et se détendre est donc satisfaite par des séjours dans les « pleasure peripheries » (Marcotte et al., 2020). Sur le plan local, les acteurs auvergnats ont bien anticipé ce regain d’intérêt pour le patrimoine naturel, les produits et savoir-faire locaux et le détournement d’une certaine partie de la population « des usines à touristes »12 construites uniquement sur le modèle fonctionnaliste et pour lesquelles l’environnement ne constituait qu’un simple décor et non une ressource. Pour J. Pinard, la nature et donc le tourisme de nature sont de nos jours très recherchés ; c’est devenu « un luxe » pour les populations des grandes villes qui recherchent l’emmagasinage de bien-être pour affronter la grisaille urbaine pendant une année13. Ses propos sont recoupés par ceux de N. Bordas (Vice-pdt de TBWA Europe) qui suggère de faire fructifier la marque territoriale en accentuant la communication sur la notion de « Je me ressource en Auvergne », « expression qui capitaliserait avec l’idée qu’a l’Auvergne de faire du bien au corps et à l’esprit. Mens sana in corpore sano » (entretien Bordas, La Montagne, 21/01/2017). En 2019, le nouveau directeur du CRDT Auvergne – Rhône Alpes souhaite poursuivre dans la lignée de ses prédécesseurs :
« Nous voulons nous inscrire dans le tourisme bienveillant, qui agit en pleine conscience et en pleine responsabilité, par rapport aux impacts environnementaux, climatologiques, économiques et sociétaux » (Flasseur, 2019).
39Avec le positionnement de la marque et les campagnes de communication qui ont suivies, l’Auvergne deviendrait une destination « tendance » au niveau mondial. En 2016, elle a ainsi figuré à la 6ème place mondiale des régions à visiter selon le Guide Lonely Planet. Le label Unesco obtenu en 2018 par la Chaîne des Puys et de la faille de Limagne participe au regain d’attractivité recherché par la marque.
40Globalement, les hébergeurs Nattitude sont en accord avec le positionnement de la Région. Ils sont certes 70,6 % à trouver inexacte la dénomination de situation périphérique et de marge appliquée à l’Auvergne. Pour se justifier, les deux-tiers des répondants disent qu’elle est au contraire « centrale », « au centre du pays » (localisation géographique mentionnée 7 fois). En revanche, 29,4 % sont d’accord avec cette assertion. Une personne fait toutefois remarquer que c’est un atout à préserver :
« Une vraie chance dans un monde ultra connecté. Dernière expérience désastreuse : l’Islande que j’avais découverte, inviolée, il y a 18 ans. Cette dernière visite n’avait rien à voir. Saturée, sale, dépouillée du sacré de cette terre du bout du monde » (H2).
41Certains s’accommodent fort bien de la situation car pour eux l’isolement correspond à la demande de la clientèle et permet, selon leurs dires, « un tourisme durable », « un tourisme vert » et « un écotourisme ». À noter que pour les hébergeurs, marge et périphérie renvoient à ces types de tourisme. En résumé, les hébergeurs décrivent la région comme authentique (l’adjectif et le substantif associé reviennent 7 fois), où la nature est importante (17 fois mentionnée). Ce cadre de vie invite nos répondants à parler de « ressourcement », « liberté », « quiétude », « calme » et « bien-être », des termes utilisés par les instigateurs de la marque. Cette analogie est logique lorsque l’on sait que le développement du réseau s’inscrit dans la promotion de la marque territoriale. Hormis la nature et la notion d’espace (« espace » et « grands » espaces cités 13 fois), certains font également le lien entre l’Auvergne et « la gastronomie », « les produits de qualité » dont « les fromages ». Les produits locaux et les savoir-faire sont des marqueurs identitaires forts et le tourisme gourmand un apport précieux dans une politique d’attractivité, ce que nous avions déjà démontré lors d’une précédente recherche à propos de l’adéquation des valeurs de la marque auvergnate (idéalisme, naturalité, partage, exigence, créativité) avec les préceptes d’un tourisme gourmand (Férérol, 2018). Enfin, les activités proposées par certains hébergeurs Nattitude correspondent aux attentes des touristes qui pratiquent un touriste de nature et recherchent aussi une expérience et un partage avec les autochtones. Les hébergements Nattitude proposent ainsi des activités en lien avec le territoire, c’est-à-dire « des reconnections à la nature et à notre propre nature par effet miroir » (H2) : cours de cuisine, de vannerie, découverte de plantes aromatiques et comestibles, sorties botaniques… Un prestataire initie même à l’activité agro-pastorale en acceptant que ses invités nourrissent les agneaux et suivent les troupeaux. Toutes ces activités ont du sens, sont éthiques et reposent sur des liens sociaux.
4.2. Un dispositif satisfaisant mais incertain pour son devenir
42Le dispositif Nattitude a été globalement bien accueilli par les professionnels du tourisme14 et les hébergeurs eux-mêmes. Mais certains points négatifs sont ressortis des questionnaires : manque de moyens, faible renommée du réseau et notamment une sélection pas assez stricte.
« Le réseau est parti d’un type de proposition touristique et s’est dévoyé vers du chiffre, en ayant des objectifs de nombre d’hébergements labellisés par an. On a perdu en qualification » (G3)
« La sélection aurait pu être plus stricte » (CH13)
« Des établissements qui à mon sens n’avaient pas lieu d’y être, labellisés Mercure ou chaînes. A mon sens, Nattitude doit regrouper principalement des indépendants et des petites structures atypiques et authentiques » (H2)
43Nattitude est considéré comme un référent vers qui se tourner (CH10), un esprit d’équipe et de partage (G11) et des hébergeurs partageant une éthique et des valeurs sur les plans économiques, environnementales et sociétales (CH8). Bien qu’un peu en perte de vitesse, le nombre d’hébergements a progressé au fil des ans : 150 en 2015, 180 en 2018. C’est peu par rapport au nombre total d’établissements dans la région (2,5 % des établissements en 2016 et 6,5 % des lits marchands – CRDT), mais le rôle de ces structures est de faire office de vitrine auprès de la clientèle. Ils sont une source d’émulation pour les autres établissements, en sachant fort bien que tous ne pourront pas effectuer des travaux onéreux.
44Même si une hausse de la clientèle n’a pas été perçue après l’adhésion au réseau (seuls 8,8 % des répondants affirment le contraire), des effets bénéfiques ont été remarqués par le CRDT et certains hébergeurs. Selon 57 % de ces derniers, la clientèle passe entre 1 et 3 jours dans les hébergements Nattitude, 35 % entre 3 jours et une semaine et 8 % une semaine, sachant que la durée moyenne du séjour en Auvergne est de 4,8 jours (stat de 2015). Quant au taux moyen de remplissage annuel, il est de plus de 50 % pour la moitié des répondants et de plus de 80 % pour près de 10 % des sondés. De son côté, le CRDT avance un certain nombre de statistiques en 2016 : le taux d’occupation moyen d’un hébergement Nattitude est supérieur15 aux autres hébergements régionaux (plus de 10 points de différence) et nationaux.
45Notre enquête a également servi à révéler le profil des clients Nattitude qui reste majoritairement français (77 % des hébergeurs accueillent plus de 75 % de français). Le pari d’attirer davantage d’étranger est donc globalement perdu. Parmi eux, les plus nombreux sont Belges (75 % des interviewés ont choisi cette réponse)16, les Suisses 44 %, les Allemands 42 % et les Anglais 39 %, soit les clientèles traditionnelles de l’Auvergne17. Issus de la ville (91 % des cas) et plutôt des CSP+ (66 %), les clients viennent généralement sans enfant (69 %).
46Dix années après son lancement, on peut s’interroger sur la pérennité du dispositif : le CRDT a cessé de s’en occuper après la fusion des deux régions. Nonobstant, il continue d’en faire la promotion et soutient l’association des hébergeurs Nattitude qui a vu le jour fin juin 2018. Regroupant une vingtaine de membres, cette association souhaite faire perdurer le dispositif et l’étendre géographiquement vers des régions avec les mêmes problématiques que l’Auvergne (entretien M. Pourcher, 2018). Concrètement, le CRDT est encore propriétaire de l’appellation Nattitude jusqu’en 2029 ; il est garant de son fondement et met en avant l’association qui s’occupe de la labellisation des hébergements et peut agir en matière de développement commercial (entretien Jobert, 2019).
4.3. Des problèmes persistants d’image et de désirabilité
47Depuis une dizaine d’années, le numérique est devenu quasi incontournable pour Auvergne Tourisme avec un million d’euros annuel de budget et une équipe de 10 personnes s’occupant de l’Auvergne au sein du CRDT élargi18. Grâce au dispositif Nattitude, les médias parlent de l’Auvergne avec moins de condescendance et d’une manière un peu plus flatteuse que dans les décennies précédentes (voir supra).
« Adieu riads, fincas et palazzis, cet été on s’offre la vie en cabane ! Nouvelle valeur refuge, le retour aux sources fait craquer les rich and famous. Le primitif c’est chic ! » (Le Figaro Madame du 22/05/2015, p.112-116).
48Pour illustrer son article, la journaliste du Figaro cite les hébergements Nattitude. « Les purs et durs mettent maintenant le cap sur l’Auvergne et ses vieux burons. Ces anciens refuges de bergers d’estive, déconnectés de la vie moderne, qui servaient jadis à la confection du fromage, voilà l’hyperluxe du moment ». Cette sophistication est un autre facteur de performance, en plus de l’adéquation du produit avec les attentes des consommateurs.
49Malgré tout, des problèmes d’image et de désirabilité persistent. Il y a d’abord certaines remarques recueillies auprès des hébergeurs Nattitude
« L’Auvergne a hélas encore cette image de marge. L’Auvergne est trop humble. Elle ne met pas assez en avant son attractivité. C’est un territoire qui devrait travailler un peu plus pour capter un touriste aisé et se détacher de l’image trop rurale » CH2
« L’Auvergne est encore méconnue et peu parcourue par les touristes. C’est une terre de passage avec des visites de 2 jours » CH8
« Elle mérite d’être mieux connue » CH15
50Puis, un certain nombre de verbatim relevés dans la presse témoignent de l’image mitigée que renvoie encore l’Auvergne : « l’Auvergne est hors des radars de beaucoup de touristes » (Le Figaro, 08/07/2018). Grâce aux études qu’ils ont commandées, les quatre Comités Départementaux du Tourisme auvergnats sont bien conscients de ces problèmes : « image et notoriété limitées » (Schéma de développement touristique réactualisé de l’Allier, 2019, p.22).
51Dans les années à venir, beaucoup d’efforts sont donc encore à fournir pour renforcer l’attractivité de la région sur le plan touristique. « L’Auvergne est connue. C’est la désirabilité qu’il faut travailler. Il faut être pointu » (Flasseur, La Montagne Entreprendre, n°19, juillet 2019). Cette remarque signifie en conséquence que l’objectif de la marque de renforcer l’attractivité touristique n’a pas été totalement atteint.
Discussion conclusive
52Cette étude de cas menée sur le territoire auvergnat s’inscrit dans nos travaux sur l’attractivité territoriale et touristique. L’objectif était de comprendre pourquoi et comment était née une marque associée à un territoire dans un espace interstitiel et de souligner le rôle du tourisme dans les dynamiques territoriales, notamment dans la recomposition de la marginalité. L’hypothèse selon laquelle les espaces interstitiels peuvent faire preuve de résilience est validée. Les résultats de la recherche montrent la pertinence pour ces espaces de transformer leurs faiblesses en atouts mais soulèvent aussi des interrogations.
53Dans le cadre d’une politique concertée, les acteurs du développement économique et touristique de l’Auvergne ont pris le parti depuis une dizaine d’années de convertir l’état de marge et de périphérie délaissée en marque attractive. Comme d’autres territoires en France (Dénès, 2012), cette région va transformer des éléments négatifs en avantages (enclavement, grands espaces…). Nous pouvons saluer les efforts et la créativité des acteurs régionaux pour relancer l’attractivité de la région ; en revanche, nous sommes plus sceptique sur le positionnement de la marque. En quoi l’Auvergne permettrait-elle plus que d’autres territoires, comme Limousin ou Champagne-Ardennes, de « se ressourcer et de se sentir libre » ? À notre interrogation, J. Pinard avait répondu que la différence se situerait au niveau des marqueurs de qualité (nombre de restaurants étoilés, de plus beaux villages de France, d’hôtels haut de gamme…). C’est donc dans ce contexte que Nattitude a été pensé, en promouvant une montée en gamme des établissements en matière de qualité du service et du bâti. Néanmoins, Nattitude n’a pas été un modèle pour les autres établissements de la région. En 2020, pour les hôtels 4 et 5 étoiles, les quatre départements se retrouvent encore en effet en fin de classement pour la part des chambres : 100ème pour la Haute-Loire, 97ème pour le Cantal, 57ème pour le Puy-de-Dôme et 56ème pour l’Allier. Il en est de même pour les campings.
54L’apport de la recherche est d’avoir montré comment un dispositif touristique peut venir en renfort d’une politique de marketing territorial, à condition de suivre la même philosophie. Pour être en accord avec l’un des principes-phare de la marque (la naturalité), les hébergements Nattitude adoptent clairement un style transmoderne. Nous l’avons vu avec la présentation des hébergements, les services proposés et les préoccupations écologiques avancées par les propriétaires. En ce qui concerne ces préoccupations écologiques, s’il existe bien des éléments tangibles prouvant l’intérêt sincère des prestataires pour le développement durable (circuits-courts, choix des matériaux de construction…), il n’en est pas de même pour l’affichage « retour à la nature ». La plupart des hébergements possède en effet un confort du nec plus ultra (spas et d’accès rapide à internet) en contradiction à la fois avec le développement durable et avec l’image de nature/naturalité.
55Le choix du positionnement pour une marque territoriale centrée sur le public touristique est hasardeux. En effet, les touristes peuvent vouloir rechercher un idéal, difficilement conciliable avec la société et l’économie d’aujourd’hui et avec les desiderata des autochtones (par exemple, les « Auvergnats de Paris » qui souhaiteraient montrer à leur descendance la région de leurs propres grands-parents telle qu’elle était à l’époque engoncée dans sa ruralité et son agriculture (Mazataud, 1997 ; Chinier, 2002). Les travaux de chercheurs rochelais complètent nos propos. Le plus souvent, faible attractivité touristique rime avec faible attractivité résidentielle (ou vice-versa). Mais I. Sacareau, L. Vacher et D. Vye ont montré que ce n’était pas toujours le cas : « la notion d’attractivité ne doit pas être uniquement appréhendée de manière globale et doit être ainsi déclinable selon différentes catégories de population » (Sacareau et al., 2010, p.8). On en revient alors à notre interrogation précédente qui renvoie à la complexité de mettre en œuvre une politique d’attractivité globale. Comme l’a souligné L. Rieutort19, président du Comité Scientifique des CCI de montagne, « l’attractivité peut être touristique, économique, démographique, sans que l’une induise nécessairement l’autre » (2013). Qu’une marque territoriale et une politique touristique reposent sur un socle commun, à savoir des éléments identitaires, est très judicieux, voire nécessaire. Mais, le plus difficile est d’arriver à deux stratégies qui ne s’annihilent pas mutuellement (en l’occurrence ici, une Auvergne, hors du temps, qui peut attirer des touristes et repousser certains investisseurs économiques).
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1 Comprise ici comme « la capacité à surmonter des situations graves » (AAC du colloque Penser et faire la résilience, Université de Pau et des Pays de l’Adour – mars 2017).
2 « The desire for nature and the past is seen as a counter tendency to globalisation and associated urbanisation ; it is an escape from technology-based society and a reconnection with one’s roots’ » traduit par nous.
3 « the building of territorial brands is a way of promoting the territory as a tourist destination », traduit par nous.
4 “Branding can assist a place in becoming associated with a unique identity as well as help it deliver memorable experiences to travelers, thus allowing it to better compete with other destinations. Branding can also build awareness for a destination, reduce consumer anxiety and risk about undertaking travel, and encourage repeat visits by building loyalty (Kolb, 2006). Other advantages of destination branding for places could include more effective tourism promotion, a larger profile in the media, and the development of an atmosphere where innovation and investment is prized (Anholt, 2007)”, traduit par nous.
5 « (a) a growing environmental awareness; (b) individualisation and an openness to new experiences; (c) an emergent appeal for highly original and tailor-made travel experiences; and (d) a growing desire to participate in and to be integrated within a local life-style », traduit par nous.
6 3 hôtels, 2 campings, 11 gîtes et 23 chambres d’hôtes (le total fait plus de 37 car certains sont propriétaires de plusieurs types d’hébergement). Deux autres ont également répondu mais en nous signalant qu’ils ne remplieraient pas notre questionnaire pour cause de fermeture définitive.
7 La faiblesse de ce taux (malgré une relance fin août) s’explique très certainement par la période de distribution du questionnaire, à savoir la pleine saison. Il apparaît toutefois honorable, le taux de retour avec une administration « online », soit par mail, soit par internet étant généralement faible : entre 8 et 15% (Aubel et al., 2008).
8 INSEE Auvergne, La Lettre, n°68, 2011
9 Nous pourrions ajouter pour 2014 (nous n’avons pas de données pour une date antérieure) : 4 000 km d’itinéraires VTT, 900 km de pistes nordiques et 170 de pistes alpines, 11 Plus beaux villages de France et 3 édifices classés à l’UNESCO dans le cadre des chemins de Compostelle (Chiffres-clés 2014 du tourisme en Auvergne – éd. 2015, 12 p).
10 « The very same attributes that were previously considered to be disadvantageous are now being valued as new opportunities (Brown & Hall, 2000). Isolation and remoteness have come to represent peace and distinctiveness, rurality is considered to be a way of getting in touch with nature, and traditional lifestyles are the basis of a heritage experience » traduit par nous.
11 Cette association a pris le relais du CRDT quand le Conseil Régional a décidé d’élargir la marque à tous les secteurs économiques.
12 Nous pensons aux infrastructures issues des grands plans d’aménagement de la montagne et du littoral sous les années de Gaulle et Pompidou basées sur des ressources génériques et non spécifiques.
13 Cette idée de luxe et de bien-être se retrouve dans les propos du Président de Voyageurs du Monde, un Auvergnat, pour qui avoir un buron dans le Cantal est « un luxe qui n’a pas de prix. Je ne connais pas de plus bel endroit au monde. Le panorama me rappelle la steppe de Mongolie, c’est une nature qui impose le lâcher-prise » (J.F. Rial interrogé par le Figaro Madame du 22/05/2015).
14 Il est en ainsi de L. Stelly, directeur de la communauté de communes du Sancy (Sancy Volcans étant la plus touristique des zones auvergnates – INSEE avril 2011, 07/06/2016) et de P. Jal, dir. de La Route des Villes d’Eaux (17/03/2017), rencontrés pour d’autres recherches.
15 Les gîtes et les meublés par exemple atteignent en moyenne 22 semaines de location par an, soit 6 semaines de plus que la moyenne nationale ; dans ces mêmes gîtes, le Chiffre d’Affaires par nuitée se monte à 43 € (le double de la moyenne régionale qui est de 19 €). Enfin, dans l’hôtellerie, le Revenu Moyen par Chambre occupée est supérieur de 33% à celui des hôtels auvergnats 3 et 4 étoiles et pour les chambres d’hôtes le RMC est supérieur de 40 % à la moyenne régionale (courriel Jobert, le 06/09/2019 suite à notre deuxième entretien).
16 Les répondants avaient la possibilité de donner deux nationalités.
17 Sur le plan régional (Auvergne stricto-sensu), les nuitées de la clientèle étrangère équivalent en effet à 15 % de l’ensemble (2015). Quatre nationalités arrivent largement en tête : Pays-Bas (36 %), Royaume-Uni (13 %), Belgique (12 %) et Allemagne (11 %).
18 Témoin de son dynamisme, sa place dans le baromètre we-like-travel.com des performances sur les réseaux sociaux des destinations touristiques : n°1 en juillet 2019 (déjà n°2 en juillet 2017). 336 043 personnes la suivent sur Facebook (7ème sur 27 destinations analysées), 38 221 sur Instagram (8ème) et 12 295 sur Twitter (11ème). Pour le CRDT, cette notoriété web est l’un des effets de la création de la marque territoriale (pour les autres effets, aucune étude scientifique n’a été menée pour mesurer son impact).
19 Intervention à la Biennale de la Montagne, La Bresse, 13-14 octobre 2013.
Marie-Eve Férérol, « Le positionnement marketing de l’Auvergne : la marge et la périphérie comme attrait touristique » dans © Revue Marketing Territorial, 5 / été 2020
URL : http://publis-shs.univ-rouen.fr/rmt/index.php?id=483.
Quelques mots à propos de : Marie-Eve Férérol
Ancienne doctorante de Clermont II, Marie-Eve Férérol a rédigé une thèse sur les petites villes du sud Massif central et de l’ouest de la Meseta espagnole, ce qui lui a valu une mention spéciale du Sénat et un 5 ème prix de thèse décerné par les CCI de montagne (2011). Actuellement qualifiée CNU en géographie-aménagement, elle poursuit ses recherches sur la durabilité et l’attractivité des lieux. Une partie de ses travaux portent notamment sur les stations thermales et le renouveau du thermalisme français.