0 / printemps 2018
le marketing territorial comme champ de recherche

Le numéro 0 de RMT regroupe un ensemble de textes commandés aux auteurs afin de circonscrire ce que recouvre le marketing territorial. Il n'y a pas d'évaluation en double-aveugle comme pour les autres numéros de la revue.

Les deux dernières rubriques sont entièrement rédigées par le rédacteur en chef sur ce numéro 0 car il s'agit de montrer les formats possibles pour les prochains numéros, ouverts à toute discipline et tout croisement disciplinaire.

Communication territoriale et technologies numériques : bilan provisoire et perspectives de recherche

Jean-Baptiste Le Corf


Résumés

Cet article dresse un bilan provisoire et actualisé de l’insertion des TIC numériques (TICN) dans la communication territoriale. Dans une perspective à la fois généalogique et prospective, il s’agit d’examiner comment ces technologies renforcent un processus de rationalisation de l’action publique, renouvèlent les formes du marketing territorial et d’étudier leurs impacts sur les pratiques des communicants territoriaux. Les opportunités et les limites de ces initiatives pour les autorités locales sont aussi explorées. Enfin, sont discutées certaines propositions de recherche plaidant pour une approche systémique de la communication territoriale pour comprendre la complexité des mutations en cours.

This article aims about insertion of ICTS (information and communication technologies) in territorial communication. By genealogical and forward-looking perspective, we examine how digital technologies strengthen a process of rationalization of public action and evolution of territorial marketing. Then, we study their impacts on the practices of the territorial communicators. The opportunities and the limits of these initiatives for local authorities are also explored. Finally, few proposals of research pleading for a systematic approach of territorial communication are discussed.

Texte intégral

1À l’instar des organisations marchandes (D’Almeida, 2001), les collectivités territoriales construisent leur identité entre projets (actions) et récits (discours de communication territoriale valorisant ces projets). Un territoire a une identité en partie liée à sa population, son histoire et ses ressources. Il diffuse des valeurs (intérêt général), incarne un art de vivre qu’il est délicat de réduire en produits de consommation (Meyer, 2012). Il doit aussi en priorité être attractif pour ceux qui y vivent : les citoyens ne sont pas des clients comme les autres. En outre, les liens étroits entre la communication publique et le marketing territorial, qui ne cessent de se développer depuis les lois de Décentralisation de 1982, ont fait l’objet de nombreuses critiques que l’on peut relever dans la littérature académique :

  • Un risque de superposition d’images pouvant rendre difficile l’appropriation du territoire par la population locale. Alains Mons (1992) a bien montré que la ville est perçue à travers son image médiatique, y compris par ses usagers et que la communication publicitaire nuit à la « personnalité » du territoire.

  • Un manque d’évaluation des politiques d’image, dans la mesure où leur efficacité économique est aussi peu démontrable que leur inefficacité (Le Bart, 1999). Quel rapport de cause à effet peut-on établir entre une campagne d’affiches et une série d’implantation d’entreprises ou entre une campagne publicitaire et la fréquentation touristique ? Plus largement, nombreux sont les auteurs qui affirment que ces campagnes de communication, souvent coûteuses, peuvent ne pas apporter aux élus les bénéfices espérés.

  • Un marketing politique, qui reste une logique sous-jacente au marketing territorial. En effet, les élus peuvent croire à l’efficacité des politiques d’image car il y aurait pour les élus un intérêt à y croire, ne serait-ce que pour instrumentaliser cette image dans une stratégie de communication politique. En somme, l’image permettrait de ressourcer le discours politique et de redorer la figure d’un maire totem.

  • La banalité des slogans, dans un contexte où les collectivités souhaitent s’afficher au centre de l’Europe, les amenant à puiser dans de multiples métaphores organicistes qui s’observent par les occurrences de termes comme le « cœur », le « poumon », ou les « artères » (Tétu, 1995, p. 295).

2La production de ces discours de communication territoriale a pu se développer en raison d’une professionnalisation croissante de la communication publique locale (Bessières, 2013), liée en partie au besoin de légitimité et de reconnaissance des communicants, ainsi qu’à l’élargissement d’une offre de formation initiale auxquelles les SIC ont notamment contribué. Pour autant, le marketing territorial évolue aujourd’hui au-delà des seuls discours. Il se renouvèle par le déploiement d’offres territoriales soutenues par les valeurs de la « créativité » (Houllier-Guibert et Le Corf, 2015), amenant la communication des territoires à la servir autrement, davantage par des actions que par du discours. Ces mutations sont soutenues par les Technologies de l’Information et de la Communication (TIC) que nous définissons, dans une double acception : d’une part des outils utilisés comme « instruments de gouvernance » (Le Galès et Lascoumes, 2005), et d’autre part, des acteurs économiques car ces outils sont produits le plus souvent par des acteurs privés. L’action publique dans le domaine des TIC se caractérise aussi par une spécialisation selon les compétences des collectivités territoriales. En effet, la plupart des collectivités territoriales conçoivent les TIC comme des outils au service d’actions sectorielles, elles sont utilisées et pensées pour rendre plus efficaces des politiques menées par exemple dans le domaine de la recherche, de l’enseignement, de l’économie : « les TIC servent donc à accompagner une activité dont l’objet principal leur est extérieur » (Bouquillion et Pailliart, 2006), afin de renforcer un processus de modernisation et de rationalisation de l’action publique. En outre, si la capacité d’expérimentation des territoires dans le domaine des TIC s’est illustrée depuis les années 1970, le concept de « territoire numérique » (Musso, 2008 ; Pagès, 2010) est à revisiter dans le cadre des transformations urbaines. À l’heure où ce paradigme de l’expérimentation est bien ancré dans l’action publique locale, la notion relativement flexible de « ville numérique » se caractérise par plusieurs figures conceptuelles et des pratiques hétérogènes. Nous avons pu observer, dans nos recherches antérieures, que les projets de TIC accompagnent un élargissement du marketing urbain qui s’ouvre de plus en plus à différentes politiques sectorielles soutenues par divers services administratifs : démocratie locale, économie, culture, communication ou innovation numérique. Ces pratiques étendent le périmètre du marketing urbain, en renouvelant les relations entretenues entre l’action publique locale et les usagers du territoire, qu’ils soient citoyens, entrepreneurs, touristes, ou investisseurs (Le Corf, 2018). L’essor de politiques numériques territoriales montre que l’adjectif « numérique » est en effet souvent accolé à divers domaines de l’action publique locale (Pailliart, 2014, p. 97). Dans ce contexte politique marqué par un référentiel des TIC, le débat au sein de la sphère académique et professionnelle est aussi contrasté : ces technologies servent-elles la fabrique de nouvelles utopies locales pour alimenter la réflexion politique ou au contraire sont-elles à considérer comme de simples palliatifs employés pour donner plus de sens aux politiques locales en quête de « symbolique et de projets mobilisateurs » (Musso, 2008, p. 31) ?

3L’objectif n’est pas de prendre ici position dans ces controverses mais de dresser un bilan provisoire et actualisé de l’insertion des TIC dans les territoires (Bouquillion et Pailliart, 2006), en proposant quelques perspectives de recherche fondamentale et appliquée pour analyser et accompagner ces mutations. De surcroît, il s’agira de montrer comment les SIC, par le recours au concept d’intelligence territoriale (Bertacchini, 2010 ; Bourret, 2008 ; Masselot, 2014 ; Herbaux, 2007) et par l’ouverture épistémologique et méthodologique propre aux humanités numériques1, contribuent à l’étude des territoires numériques et à leurs développements. L’étude des rapports entre TIC et communication territoriale nous amènera à explorer plusieurs axes d’analyse, faisant l’objet de 4 parties dans cet article :

  • Les positions entre les acteurs publics et privés et entre les collectivités et l’Etat dans l’émergence et le développement des TIC dans les territoires, ainsi que les concepts adaptés pour décrire ces phénomènes.

  • Les impacts du numérique à l’œuvre dans les territoires, en particulier dans le renouvèlement des stratégies de management public.

  • Les évolutions structurantes dans la manière dont les collectivités construisent leur image et leurs relations aux usagers avec les TIC, amenant les communicants territoriaux à se repositionner.

4En guise de conclusion, nous ouvrirons la réflexion avec des pistes de discussion sur l’enjeu pour le chercheur d’étudier plusieurs phénomènes imbriqués, dans une approche systémique inspirée des propositions d’Alex Mucchielli (2000), cela afin de mieux saisir les mutations de la communication territoriale en contexte numérique.

Eléments de contextualisation historique des rapports entre TIC et communication territoriale

5Avant d’en venir à l’exploration des usages du numérique au niveau local et leurs impacts sur la communication territoriale et le marketing urbain, il convient d’apporter quelques éléments de contextualisation dans les rapports entre l’Etat et les territoires qui transparaissent derrière le déploiement des TIC dans les collectivités territoriales, ainsi que sur les origines de leur émergence.

6La question du numérique ne peut s’analyser indépendamment de l’histoire des relations entre l’État et les collectivités territoriales et d’une progressive volonté d’autonomie de la part de ces dernières. Grâce à l’accompagnement que les collectivités reçoivent de la part d’associations militantes, de consultants et éventuellement d’appels d’offre de l’Union européenne, nous venons d’assister à l’émergence de politiques numériques territoriales, lesquelles ne se déploient plus sous l’impulsion de l’État, contrairement à certains programmes gouvernementaux de modernisation de l’administration publique qui poursuivaient l’objectif de réduire les dépenses. Citons pour exemples le rapport Nora-Minc sur l’informatisation de la société, en 1977 ; le rapport de Gérard Théry sur les autoroutes de l’information, en 1994 ; le Programme d’Action Gouvernementale sur la Société de l’Information (PAGSI), soutenu en 1997 par le gouvernement de Lionel Jospin ; le plan Re/So 2007 pour une « République numérique dans la société de l’information », lancé par Jean-Pierre Raffarin et mise en œuvre depuis 2002 par les gouvernements successifs ; ou encore le plan « France numérique » 2012, soutenu par Éric Besson en 2008. Toutes ces mesures gouvernementales en faveur d’une action publique en matière de TIC peuvent bénéficier aux collectivités territoriales désireuses d’une part de renforcer l’efficacité de leur administration et, d’autre part, de garantir un meilleur service aux usagers. Elles peuvent par exemple profiter du label « Ville internet » pour redéfinir l’image liée au territoire. À l’externe, ces labellisations sont des arguments à valoriser dans les plaquettes de communication et sur les sites internet, comme l’illustre l’actuel label French Tech suscitant un vif engouement des grandes villes et métropoles.

7Les usages du numérique s’inscrivent dans une rhétorique du changement des formes de développement et de valorisation des territoires. Nous pouvons aussi inscrire ces pratiques dans une généalogie du déploiement des nouveaux médias dans les territoires. En effet, dès les années 1980, les collectivités témoignent d’un vif intérêt pour les Nouvelles Technologies de l’Information et de la Communication (NTIC). Elles bénéficient de plusieurs programmes gouvernementaux qui les incitent à soutenir certaines expérimentations liées aux TIC.

8À partir de l’année 1982, conformément à la volonté des pouvoirs publics, un Plan câble est entrepris sur le modèle américain. Il vise un million de foyers raccordés en cinq ans et devra exploiter pour son réseau, les technologies avancées parmi lesquelles la fibre optique. Ce dispositif prévoyait le câblage de 52 grandes agglomérations françaises pour mettre en œuvre un projet télévisuel, mais sa mise en place s’est rapidement heurtée à des complications et des difficultés économiques qui ont réduit la portée des réalisations prévues. En effet, cette expérimentation pionnière des collectivités a été considérée comme un échec, bien que l’on constate leur pérennité aujourd’hui.

9À cette faille dans l’aménagement des territoires s’ajoute le constat que les chaînes de télévision favorisent la parole du pouvoir politique en place. Ainsi, la télévision locale apparaît comme une déclinaison télévisuelle du journal municipal, un outil de communication territoriale supplémentaire, géré par un pouvoir politique et dont les contenus sont souvent similaires à ceux du bulletin local. Par la suite, certaines nouvelles constructions territoriales comme les communautés d’agglomération se sont emparées de ces outils pour avoir leur propre canal de communication, leur assurant une certaine visibilité.

10Cette tentative illustre une préoccupation des élus de donner une image de modernité à leur territoire. C’est dans cette perspective qu’il faut comprendre les expérimentations locales liées au TIC, et plus particulièrement le soutien des collectivités territoriales à la télématique et ses services (Minitel)2, puis à l’Internet.

11Le développement de sites internet, incarnant le passage des NTIC aux TIC numériques (TICN)3, se généralise rapidement parce que les collectivités ont pu acquérir une expérience dès les années 1980, avec les sites télématiques. L’effet de stimulation et de concurrence entre collectivités (diffusion des politiques publiques locales en matière de TICN) et la massification des usages de l’internet explique cet essor encouragé par une logique de classement et de labellisation. Sous l’impulsion d’associations, régissant certaines normes d’actions, on constate de fortes ressemblances entre les sites internet des collectivités, avec des rubriques identiques comme peuvent l’illustrer les travaux pionniers de Gérard Loiseau (2000). Ainsi, sur un site internet municipal, les informations hétérogènes relèvent de deux registres : une communication au service de la démocratie locale et une communication au service de la publicité et de la promotion électorale ou touristique. Toutes ces ressources informationnelles peuvent construire une territorialité, en orientant la perception vécue des usagers et les relations qu’ils entretiennent avec l’espace.

12Dans les années 1990, l’on assiste à l’avènement des « villes numériques4 » qui incarnent divers programmes européens en faveur du développement de la « société de l’information ». Le territoire numérique serait la transposition d’un espace géographique dans un espace numérique. Cette expression expose à l’origine deux réalités : Matérielle en tant qu’espace physique avec un ensemble de ressources naturelles ; Humaine en tant que ressources sociales pour faire vivre ensemble.

13Dès 1982, la dimension locale est apparue pour la première fois dans les contributions de chercheurs au congrès de la Société Française des Sciences de l’Information et de la Communication, notamment à travers le thème « les décideurs politiques et économiques devant les systèmes d’information » (Pailliart, 1995). À cette période, l’intérêt porté par les chercheurs à la notion de territoire renvoie d’abord à une interrogation sur les rapports entre le pouvoir local et le rôle de l’Etat à travers deux phénomènes : la décentralisation et le développement des TIC, en particulier la télématique et les réseaux câblés. Puis les concepts utilisés en SIC dans le champ de la communication territoriale ont évolué, sous l’effet de certaines transformations politiques et économiques issues d’un double mouvement : d’une part les mutations du marketing territorial s’inscrivant au-delà des seuls discours de promotion du territoire, et d’autre part, le désengagement de l’Etat obligeant les collectivités à trouver leurs propres moyens pour construire leur stratégie de développement et d’attractivité. C’est dans ce contexte de changements que nous pouvons recourir au concept d’intelligence territoriale (Bertacchini, 2010 ; Bourret, 2008 ; Herbaux, 2007 ; Masselot, 2014) en tant que capacité́ d’innovation des acteurs d’un territoire grâce à des processus de mise en commun d’informations et de connaissances. Les technologies numériques, en tant qu’outils, renforcent ces dynamiques territoriales en intervenant de manière transversale dans ces processus. Ce néologisme, issu de la réunion des deux termes Intelligence et Territoire, est aussi adapté pour décrire les transformations d’un marketing territorial qui ne puise pas uniquement dans des stratégies proprement discursives, associées à des actions de communication publique, mais aussi dans la mobilisation des acteurs locaux notamment via l’usage des TIC. Ces initiatives convergent souvent en faveur d’une logique de déploiement d’offre territoriale de services urbains informationnels. Selon nous, l’intelligence territoriale s’inscrit au croisement des logiques informationnelles (gestion et appropriation de l’information pour le développement local) et communicationnelles (gestion d’une image de marque du territoire) qui sont aujourd’hui à l’œuvre dans les dynamiques de développement territorial. Ce concept empirique engage de surcroît à porter davantage le regard sur les processus de collecte, de traitement et de partage d’informations. Conceptualisée en résonnance avec l’action de la Délégation interministérielle à l’aménagement du territoire et à l’attractivité régionale (DATAR) pour qui « le développement [territorial] est une organisation à construire par de l’information en reliant des acteurs publics et privés, engagés dans une dynamique de projet sur un territoire », l’intelligence territoriale a connu une institutionnalisation académique.

14Sur le plan opérationnel, la notion d’intelligence territoriale renvoie en général à trois principaux buts :

  • Renforcer la capacité d’innovation des acteurs d’un territoire grâce à des processus de mise en commun d’informations et de connaissances, une dimension que l’on retrouve dans les pratiques des clusters, des fablabs, ou dans les ateliers participatifs composés de profils variés pour faire émerger une « intelligence collective ».

  • Acquérir une connaissance du territoire, utile au pilotage politique pour mieux maîtriser son développement, dimension qui s’illustre notamment dans les think tanks ou observatoires locaux à l’instar du CESER présenté comme fablab de la démocratie régionale. Les observatoires numériques facilitent l’organisation d’un discours professionnel et la fabrique médiatique du territoire (Piponnier, 2010).

  • Aider les acteurs à projeter, définir, animer et évaluer les politiques et les actions de développement territorial pour qu’ils s’approprient les ressources d’un espace.

15Les usages des technologies numériques alimentent ces perspectives caractérisées par une synergie de projets, encouragés à travers des processus de confiance entre acteurs publics et privés, aux intérêts variés, voire contradictoires mais partageant en partie des représentations. Ces dynamiques s’illustrent en effet avec les stratégies digitales actuelles des collectivités.

Management public, gestion de l’information et participation numérique locale

16Les utilisations que les collectivités font actuellement du numérique ne sont pas réduites à servir l’idéal d’un espace public habermassien, caractérisé par diverses formes de débat et de délibération argumentées et raisonnées. Cet idéal délibératif d’une démocratie électronique locale (Wojcik, 2013) est-il amené à progressivement se dissoudre dans une logique gestionnaire de la participation citoyenne visant à concevoir et déployer, à moindre coût, des services publics efficaces tout en répondant mieux à l’intérêt général ?

17Depuis les années 2010, la participation des citoyens outillée par les TICN s’accompagne d’une injonction à la créativité individuelle (Le Corf, 2011) qui sert davantage la gestion publique qu’un idéal démocratique. Ces actions délèguent à certains individus, compétents dans l’usage de ces technologies, des responsabilités qui relevaient auparavant du domaine d’intérêt général de l’action publique. Ainsi, cette participation citoyenne ne se traduit plus uniquement par des confrontations de points de vue et des délibérations. Elle est censée être efficace dans le cadre du nouveau management public, en étant associée à des objectifs de rationalisation visant à atteindre le meilleur rapport coût / qualité de service possible. En ce sens, la gestion publique, qui inclue le marketing territorial, concerne également les habitants et citoyens du territoire, partant du principe que ces derniers doivent être associés à sa promotion, voire à la conception de ces offres de services pour d’autres usagers comme les touristes ou les entreprises. Pour autant, l’implication des habitants dans la conception de ces villes numériques se heurte à plusieurs limites déjà à l’œuvre pour les actions de concertation locale en présentiel. Ces points de vigilance ont été relevées tant par les chercheurs que par de nombreux praticiens de la participation, voire des citoyens, pouvant partager ces critiques, à savoir :

  • L’orchestration de la participation avec des sujets déjà prédéfinis.

  • Le décalage entre d’une part le discours faisant la promotion d’une participation très inclusive des citoyens et d’autre part, une mobilisation effective qui reste minoritaire.

  • Une participation qui reste pour beaucoup un outil de communication venant conforter et légitimer la démocratie représentative. Autrement dit, l’idée de faire participer s’inscrit dans un exercice de démocratie procédurale, où l’important est davantage la manière dont est prise la décision que la décision elle-même. Ainsi, pour la plupart des élus qui la mettent en œuvre, la démocratie participative relève davantage d’une forme de rhétorique, sans véritable engagement, ni politique ni financier.

  • Une évaluation quasi absente, qui reste un impensé de l’action publique locale, alors même que certaines échelles de mesure de la participation existent (Arnstein, 1969) pour sonder à quel niveau et avec quelle utilité s’insère la parole citoyenne, par exemple dans un projet urbain

18Utilisant aujourd’hui diverses plateformes numériques comme instruments de gouvernement urbain, les administrations publiques font jouer de multiples rôles aux habitants. La participation outillée par les TICN est indissociable d’une démarche en matière de qualité des services publics locaux servant deux objectifs stratégiques : repenser l’innovation dans le secteur public tout en offrant un nouveau mode organisationnel qui met en cause les logiques bureaucratiques, en allant davantage vers une logique de la demande grâce à l’insertion des usagers dans la conception du service qui lui est destiné (logique de servuction publique). Ces derniers sont ainsi impliqués dans les stratégies en matière de marketing territorial et la conception d’un vaste projet de territoire orienté vers la notion de smart cities aussi appelées villes intelligentes. Ce dernier avatar de la ville numérique se caractérise par des logiques d’agrégation, de stockage et de traitement des données via notamment des capteurs ou une logique de crowdsourcing, pour optimiser la qualité de services aux publics et inviter les citoyens à des modes de vie plus responsables en matière de consommation d’énergie, de moyens de transports par exemple. Cette production exponentielle des « Data » et des traces recomposent les modalités de pilotage de la ville, ses modèles politiques et organisationnels (nouvelles gouvernances), ainsi que les « devenirs urbains » (Carmes et Noyer, 2014). Au niveau organisationnel, l’impératif de gestion des dispositifs numériques et de l’information s’accompagne aussi de nouveaux modes de coopération d’interdépendance au sein des collectivités, d’une part entre les agents des services de communication et des services techniques de l’informatique et de la DSI (Direction des Systèmes d’Information), mais aussi d’autre part entre les techniciens et des acteurs-usagers (Akrab, 2016).

19En outre, les nouveaux systèmes d’information territoriaux se greffent à une tendance bien ancrée aujourd’hui, amenant les collectivités à s’ouvrir à de nouvelles idées de services afin d’améliorer leur relation avec les usagers du territoire (citoyens, touristes, entreprises), souvent considérés comme des clients à satisfaire. Cet objectif se traduit par la mise en place de diverses plateformes numériques qui, en bénéficiant de l’idéologie du web 2.0 et de l’innovation ascendante (Aguiton et Cardon, 2008), répondent à des enjeux hétérogènes de rationalisation de l’action publique qui transparaissent en arrière-plan de la participation citoyenne, parmi lesquels :

  • Accroître la participation politique en reconnaissant l’utilité d’une expertise profane. Sans remettre en cause une logique de contrôle politique et de démocratie représentative, ce mythe d’une cyberdémocratie ne cesse de croître au niveau local, malgré un certain nombre d’échecs constatés, depuis les premiers forums électroniques à la fin des années 1990 jusqu’au manifeste Civic Tech « pour une démocratie délibérative »5 et atteste de la prégnance d’un déterminisme technique au niveau des territoires.

  • Promouvoir l’image du territoire (wikis numériques de territoire, réseaux sociaux numériques).

  • Renouveler l’offre de services en ligne de la collectivité (projets Open Data, diagnostic citoyen6). Cet objectif donne lieu à des événements en présentiel qui encourent la créativité et l’innovation (hackatons, cartoparties…) et les logiques de crowdsourcing.

  • Concevoir collectivement les politiques publiques via par exemple des labs d’innovation publique intégrés au sein de l’organigramme des collectivités.

  • Encourager le tourisme participatif, basé sur l’engagement de citoyens ambassadeurs de leur territoire.

  • Soutenir le financement des projets d’industries créatives ou restaurer le patrimoine local (crowdfunding territorial).

  • Initier des démarches de veille, de « science citoyenne », de diagnostic distribué ou de prospective pour inventer des visions du territoire, moderniser la concertation locale à travers par exemple un principe très ancien qu’est la « boîte à idées » très en vogue dans les dynamiques participatives au sein des organisations. La proximité avec le citoyen s’incarne aussi dans le design de certaines plateformes ou dans l’usage des réseaux sociaux numériques soutenant la communication descendante et la culture du contrôle éditorial des communicateurs (Doutrellot et al., 2012).

20Ces différents objectifs, qui entrent dans le paradigme du gouvernement ouvert et d’une philosophie gestionnaire de servuction publique plus communément appelée co-design, entraînent les villes à mettre en place une panoplie d’outils, parfois en référence à la « Société de l’information » (Labelle, 2007). Cette hétérogénéité de dispositifs numériques, impulsés par diverses configurations institutionnelles et pouvant cohabiter sur un même territoire, amène à nous demander s’il n’est pas plus judicieux, pour le chercheur, de recourir à la notion de « territoire de projets », plutôt que celle de « projet de territoire », pour décrire ces usages pluriels du numérique au niveau local et ces projets qui émergent souvent de manière non concertée entre les élus et les agents publics. Ce phénomène peut aussi soulever deux principales limites :

21En premier lieu, l’absence de coordination pour clarifier la responsabilité en matière de communication sur le numérique fait de ce terme une notion triviale au sens de Jeanneret7. Sa réappropriation par les acteurs de plusieurs politiques locales sectorielles risque aussi de créer une cacophonie de discours que l’on peut observer parfois plus largement dans d’autres domaines de la communication publique (Pasquier, 2011, p. 126). Néanmoins, cette production discursive met à l’honneur de nouveaux thèmes de modernité qui sont légitimés par l’idée d’une émancipation des usagers, tout en occultant les objectifs d’optimisation du management public.

22En second lieu, la participation citoyenne encouragée par ces outils numériques peut de surcroît occasionner des difficultés pour les collectivités en raison de leurs moyens humains et financiers limités. En effet, elle implique pour l’administration un travail conséquent et certaines reconfigurations qui s’inscrivent dans un management territorial, en réponse à cet impératif participatif :

  • traitement des données liées aux propositions des habitants, travail qui peut aussi s’externaliser,

  • évaluation de la faisabilité des idées ayant suscité le plus d’adhésion au sein des citoyens,

  • politique locale volontariste en faveur de la mise en œuvre de ces idées dans des projets.

23Par conséquent, cet empilement de plateformes numériques, profitant au développement commercial de nouveaux prestataires des collectivités, servent aussi une rationalisation du politique (report des responsabilités de l’action publique sur les individus) et accélèrent la temporalité de l’administration pour traiter les doléances citoyennes par exemple. Si l’on se réfère à l’échelle d’Arnstein (1969), on remarque qu’elles illustrent différents niveaux d’engagement assignés aux citoyens, allant de l’information à la participation, jusqu’à la co-production. Les usages de ces technologies numériques au niveau local ne sont pas sans incidences sur les mutations du rôle et des compétences des communicants publics qui illustrent un cheminement vers une logique d’animation du territoire.

Quels enjeux pour les communicants territoriaux ?

24La présence sur le Web d’une organisation est une construction qui relève de plus en plus d’un enjeu stratégique (Charest et al., 2015). La gestion de la réputation sur Internet constitue un des principaux défis actuels des communicants territoriaux. Deux acquis de recherche en SIC, d’une part le modèle de communication à deux étages et, d’autre part les humanités numériques, permettent d’examiner comment ces apports peuvent faciliter la compréhension des nouveaux enjeux auxquels les communicants territoriaux sont confrontés.

25En effet, avec les mutations du web et la démocratisation des usages sociaux des technologies numériques, les professionnels de la communication des collectivités pourraient davantage à l’avenir, par opportunité, soutenir une veille informationnelle des traces numériques susceptibles de véhiculer des représentations de leur territoire (Severo et Romele, 2015), dans les interstices de la communication institutionnelle, au sein des plateformes du web collaboratif notamment. Dans un même temps, les pratiques des communicants évoluent aussi avec les dynamiques de recommandations en vigueur sur le web, qui reconsidèrent le rôle des publics et des leaders d’opinion. Cette conception renvoie à la théorie de l’influence aussi appelée la « communication à deux étages », développée par les sociologues américains Paul Lazarsfeld et Elihu Katz dans leur ouvrage Personal Influence (1955), qui notent que certains groupes sociaux intermédiaires ont davantage d’influence sur l’opinion publique des individus que les médias de masse. Ces leaders d’opinions sont des personnes qui, par leur comportement ou leur position, ont une emprise sur leur entourage. Ces gatekeepers filtrent l’information, jouent un rôle d’interprète et pèsent ainsi sur l’opinion. Partant de ce modèle, les communicants territoriaux remettent en cause l’efficacité des discours de promotion territoriale qu’ils peuvent produire ou commander à des agences de communication extérieures. Ils sont aujourd’hui nombreux à considérer que l’attractivité du territoire devient effective lorsqu’elle est prise en relais par les réseaux de communication et d’influence personnelle appelés plus communément le « bouche à oreille ». Ces formes de recommandation, via les dispositifs numériques, nuancent le pouvoir d’influence attribué à une traditionnelle communication publicitaire qui ne miserait pas sur ces groupes intermédiaires. Ces logiques dites d’e-réputation sont analogues à celles que l’on peut observer dans la communication d’entreprise pour orienter les opinions et décisions des consommateurs (Alloing, 2016). Elles sont bien présentes dans les logiques professionnels, comme le révèlent certains événements qui montrent que les blogueurs peuvent être perçus par les communicants comme de potentiels influenceurs de destinations, occupant une position déterminante dans la fabrique de l’e-réputation territoriale du fait de leur influence sur leur communauté8.

26Dans cet environnement numérique, les communicants territoriaux deviennent des animateurs amenés à raisonner davantage encore en termes de ressource pour co-produire et non plus en termes de cibles ou de publics. Ils ont désormais pour mission d’établir un diagnostic numérique, en cartographiant les contenus du web pour repérer différents types d’influenceurs potentiels répartis par exemple par thématiques ou niveaux d’audience, à qui ils vont privilégier la diffusion de messages spécifiques. Dans le débat professionnel, force est de constater que ces pratiques émergentes du marketing territorial sont encouragées au détriment de campagnes d’affichage, jugées depuis les années 1990 comme trop coûteuses et peu efficaces.

27Ce modèle de communication est donc impacté par le paradigme faisant des citoyens de potentiels communicants, bien que des inégalités, issues de déterminismes culturels, sociaux et techniques, existent dans les compétences mêmes des citoyens à pouvoir communiquer sur le territoire. Ce dernier paradigme d’une compétence distribuée est en effet considéré par les communicants comme une condition d’efficacité de la communication publique9. Une telle tendance invite les professionnels à organiser des actions pour construire et fédérer des communautés, et ainsi donner de la visibilité à certains groupes sociaux. On passe d’une communication portée par l’institution vers une communication des territoires illustrant un phénomène de désinstitutionnalisation et de compétence communicationnelle distribuée (Chauvin, 2017). Cette tendance incarne de surcroît le glissement d’une communication publique vers un marketing territorial se renouvelant par sa tentative de fédérer des forces locales, que l’on retrouve aussi dans les initiatives de marques (Houllier-Guibert, 2012), soutenues par les collectivités ou leurs partenaires. De surcroît, ces derniers travaux montrent que l’objectif de mobilisation des acteurs locaux et donc de communication intra-territoriale prime, dans la plupart des cas, sur l’objectif de communication extra-territoriale, alors même que l’argument du rayonnement extérieur peut être affiché comme prioritaire.

28Dans ce nouveau cadre, le communicant devient le facilitateur des mutations d’une action publique qui délègue à l’individu la responsabilité de la qualité de service (Le Corf, 2011). Cette tendance apparaît nettement avec les projets Open data des collectivités qui visent à enrôler, par le recours à une communication engageante, des communautés de développeurs (Le Corf, 2015). Par les technologies numériques, ces travailleurs créatifs s’investissent dans l’action publique en soutenant des innovations sociales numériques, sous la forme d’applications mobiles répondants aux besoins sociaux des citoyens. Les outils numériques soutiennent leur engagement citoyen et leur envie d’invention, plus qu’une recherche de but lucratif (Le Corf, 2016). En outre, les stratégies de communication, consistant à mobiliser des communautés du territoire, sont assez analogues à celles des entreprises autour du marketing d’influence (e-influence ou e-reputation). S’agissant des nouvelles politiques d’image, la tâche du communicant public est désormais d’identifier des citoyens influenceurs comme les leaders d’opinions déjà fortement investis dans la vie locale comme des associations, des dirigeants d’entreprise, des universitaires ou des bloggeurs, en tant que parties prenantes susceptibles d’être acteurs de la stratégie de communication territoriale, que ce soit en collaborant pour produire ou relayer un discours promotionnel sur le territoire en ligne ou en enrichissant l’offre de services de la collectivité. Les communicants territoriaux peuvent ainsi se référer à la figure de l’ambassadeur pour désigner cette nouvelle forme de citoyenneté qui profite à l’attractivité du territoire. La prise en compte du pouvoir d’influence de cette figure dans l’opinion fait écho au modèle assez ancien de communication à deux étages, qui trouve donc dans les territoires une actualité nouvelle, en remettant parfois en cause la position surplombante du communicant qui consistait à régir ou contrôler un récit officiel et institutionnel. De surcroît, ces logiques sont encouragées par l’exploration possible d’un web territorial (Le Béchec et Boullier, 2014) permettant de recenser les contenus de sites traitant d’un territoire spécifique. Diverses investigations empiriques permettent en effet, d’une part, de sonder la présence des symboles, des attributs constituant des référents identitaires et des signes de la marque territoriale (comme le drapeau breton) circulant sur le web, et d’autre part, d’identifier des communautés d’appartenance liées à un certain type d’attachement au territoire. Les nouveaux outils de collecte et d’analyse de données massives pourraient ainsi s’intégrer davantage dans l’univers de travail du communicant public œuvrant en collectivités et souhaitant évaluer la réputation de son territoire sur Internet.

Conclusion et discussion

29Les autorités locales sont les premières à soutenir les expérimentations en matière de numérique car c’est d’abord au niveau local que se développent les usages. Malgré tout, si le numérique et ses promesses peuvent être des leviers de mobilisation des acteurs locaux, il est aussi possible de recourir aux théories de la communication pour illustrer les incertitudes inhérentes en situation de projets urbains (Boullier, 2003). Dans une perspective de recherche-action, il convient de noter que les agents en charge de ces projets ont pour défi de mieux prendre en compte six points de vigilance et limites à surmonter pour tendre vers une gestion réfléchie des politiques numériques territoriales :

  • La difficulté de la coordination des acteurs, notamment en situation de conflits d’intérêts, et la création d’un langage commun nécessaire à la collaboration.

  • La construction de collectifs provisoires ou mal ficelés, au détriment d’un projet de ville pensé dans la durée.

  • L’enjeu crucial de s’affranchir des rivalités politiques, notamment dans une logique de mutualisation des moyens. Cette dimension organisationnelle de la communication territoriale est particulièrement prégnante dans le contexte des intercommunalités. A titre d’exemple, les affirmations politiques des échelons territoriaux risquent d’engendrer au contraire un empilement des dispositifs numériques, chaque échelon souhaitant disposer de sa propre plateforme pour affirmer son identité. Cette affirmation des « clochers » génère des investissements publics non négligeables, en ne facilitant pas le parcours et l’expérience des usagers dans leurs modes d’accès aux services.

  • Le renforcement des inégalités en matière d’offre de services à la population entre les grandes métropoles et les campagnes rurales. Le risque est, avec ces outils, de s’acheminer vers de nouvelles fractures numériques qui pourraient davantage concerner les services que les infrastructures de réseaux.

  • La surveillance généralisée, car les services personnalisés de géolocalisation favorisent certes la mobilité mais rendent plus localisables les individus.

  • La difficulté d’identifier les besoins sociaux des habitants, ce qui rend délicate la tâche de fournir des services adaptés. Dans le cadre de projets Open Data par exemple, faire appel à une large gamme de contributeurs (ingénieurs, urbanistes, designers...) peut ainsi favoriser des usages interactifs. Sans cette réflexion stratégique, le risque augmente d’avoir des services assez similaires et sur la même thématique, les transports notamment. Les types de données doivent aussi élargir ce spectre afin de mieux répondre à d’autres usages insatisfaits du territoire.

30Dans l’optique d’ouvrir un débat épistémologique, nous proposons quelques éléments de discussion en vue d’une approche systémique des politiques numériques territoriales pour laquelle nous plaidons. Si les technologies numériques apparaissent souvent comme des réponses organisationnelles aux mutations de l’action publique, nous pouvons formuler l’hypothèse que les rapports entre les technologies numériques et la communication territoriale font en effet l’objet d’un système qui résulte de cinq principaux phénomènes (politiques, économiques et juridiques) qui peuvent être étudiés conjointement (Le Corf, 2014), pour saisir la complexité des transformations de la communication des territoires. Cette perspective de recherche systémique invite à appréhender la communication territoriale en nous penchant sur les axes d’analyse suivants :

31- Premièrement, une analyse des lois composant un cadre législatif, qui redistribuent les compétences entre les collectivités et aussi avec l’Etat. En effet, depuis les lois Deferre de 1982, tout un cadre législatif encourage la communication en fournissant un budget aux collectivités leur permettant de structurer leurs politiques de communication dans un service venant appuyer de nouvelles compétences. De même, les dispositifs numériques se greffent à diverses réformes en France qui encadrent la participation locale10, la communication des données publiques et diverses recompositions territoriales11. Enfin, cet axe juridique invite à prendre en considération le rôle des politiques nationales incitatives, voire supranationales (rôle de la commission européenne par exemple), dans ces dynamiques territoriales se référant au numérique (Le Corf, 2011). 

32- Deuxièmement, une analyse des stratégies d’acteurs industriels mobilisés dans la communication territoriale et qui peuvent défendre des valeurs parfois différentes de celles portées par les acteurs des collectivités. Cette seconde dimension renvoie plus particulièrement à la dualité des TIC, qui désignent des outils (acception technique), mais aussi des acteurs économiques ayant des stratégies spécifiques (acception économique). Le secteur des TICN rassemble de surcroît des métiers hétérogènes liés au développement web, au multimédia, en passant par le design numérique et porteurs d’emplois Ils sont souvent considérés comme une courroie d’innovation pour le reste de l’économie, se traduisant par une intégration du numérique dans les processus de conception, de production, de distribution et de marketing. Ces promesses d’essaimage, que l’on retrouve plus largement dans les discours de communication territoriale en faveur de « l’économie créative » (Le Corf, 2013), incitent les pouvoirs publics locaux à subventionner des dispositifs de soutien à l’innovation dédiés aux entreprises du secteur des TICN, à l’instar des « cantines numériques » ou des pôles de compétitivité. Comment comprendre de telles initiatives ? Elles s’inscrivent aujourd’hui d’une part dans les nouvelles formes organisationnelles de construction collective de l’innovation, basées sur des dispositifs de « coprésence sociale » à l’œuvre avec le télétravail et le coworking, qui encouragent un travail nomade s’appuyant sur les technologies numériques (Gramaccia, 2015). Ces dispositifs territorialisés se caractérisent par l’organisation de la communication interpersonnelle au niveau local autour de logiques de gestion des compétences. Selon ses promoteurs et au-delà des objectifs d’image des politiques de communication, les entrepreneurs des secteurs des TICN bénéficient ainsi plus facilement, par ces modes d’organisation territorialisés, de effets supposément positifs associés aux processus d’industrialisation des offres de services et de formation, à la mutualisation et au partage des informations (Le Corf, 2013). L’étude de ces pratiques montre qu’elles répondent à plusieurs enjeux, allant de la mutualisation de moyens (partage d’espace et de matériels), en passant par l’invention (nouvelles idées de produits ou services), et parfois l’innovation (rencontre d’un nouveau marché), bien que cette dernière ambition soit affichée dans tous les discours. Ces initiatives font également l’objet de récupérations politiques au profit du marketing territorial. Des labels comme « Métropole French Tech » prennent en effet en compte, comme critère essentiel, la mobilisation des entrepreneurs au niveau local. En outre, cet axe d’analyse invite aussi à remarquer que les technologies numériques, en tant qu’outils des collectivités, génèrent un nouveau marché pour divers prestataires se réclamant de la mouvance du web 2.0, voire 3.0. Ces derniers profitent notamment de grands salons où se réunissent les communicants publics pour faire du développement commercial et proposer leurs solutions numériques à ces prospects ou clients en quête d’image de modernité. Ce secteur économique évolue ainsi en faisant place à des nouveaux entrants selon les orientations des évolutions de la communication territoriale, des mutations technologiques ou des usages des TICN.

33- Troisièmement, une analyse des porosités de la communication des territoires avec la communication organisationnelle des entreprises. La communication politique, la concurrence entre territoires dans un contexte mondialisé, les relations administratives multiscalaires, les appels d’offre et les marchés publics sont autant de logiques relevant en effet de stratégies politiques impulsées par des « maires-entrepreneurs » notamment, lesquelles conditionnent les usages des technologies numériques au niveau local. De la même manière que le modèle d’ « organisation processus » s’est généralisé dans de grandes entreprises, il conviendrait d’explorer l’hypothèse selon laquelle « l'extension du modèle de l'organisation-processus transcende les secteurs, les métiers et les types d'organisation » (Bouillon, 2015, p. 93). De quelles manières cette approche processus investit-elle les nouvelles formes de l’organisation territoriale ? Les préoccupations des collectivités pour la gestion de l’information, le souci de développer une organisation agile, plus transversale et moins bureaucratique et pyramidale, par des initiatives dites d’open democraty comme l’ouverture des données, laissent en effet penser à certaines isomorphisations organisationnelles (Hémont, 2011)12. Cette hypothèse est confortée par les politiques d’évaluation des politiques publiques locales reposant sur des indicateurs informationnels évolutifs, et plus largement, par l’appropriation de rationalités gestionnaires dans les collectivités pour optimiser les services publics et les dépenses de soutien à l’attractivité des territoires. En ce sens, les communications managériales et les modes d’organisations des relations avec les publics nous semblent comparables avec celles du secteur marchand. C’est le cas si l’on observe par exemple les stratégies politiques consistent en effet à fabriquer une « valeur publique », comme un élément suffisamment fort pour fédérer un système multi acteur. Avec le paradigme participatif, outillé par les TICN, la collectivité se positionne dans ce système partant du principe qu’elle n’est plus la seule détentrice de l’intérêt général. De surcroît, au niveau local, dans la lignée des principes du marketing d’entreprise, les usages des TICN répondent à des processus de déploiement d’offres territoriales (Houllier-Guibert et Le Corf, 2015) amenant la communication et ses acteurs à être subordonnés de nouveau aux stratégies du marketing (Dacheux, 2001).

34- Quatrièmement, une analyse de l’institutionnalisation progressive du benchmark entre collectivités et des pratiques d’auto-formation prenant la forme de communautés de pratiques entre agents publics. Cette perspective est d’autant plus importante si l’on se rappelle que, dès l’insertion des NTIC, les villes se sont copiées. Souvenons-nous notamment des nombreux échanges entre Grenoble, Rennes et Nantes, en amont du projet de télévision câblée. Si cette logique est ancienne, avec le développement des TICN, les échanges informels ont aussi progressivement donné place à des formes plus organisées de benchmark pour répondre aux préoccupations des collectivités qui cherchent des solutions, souvent normées, à des questionnements sur la reproductibilité des modèles de mise en œuvre des actions publiques (système d’acteurs, type de partenariat, management du projet, choix techniques, modes de diffusion et de valorisation…), dans un contexte marqué par des moyens humains et financiers contraints. La multiplication rapide des projets locaux en faveur de l’Open Data témoigne de cette organisation interterritoriale des échanges. Appuyant ce phénomène de standardisation des politiques numériques territoriales, plusieurs dispositifs communicationnels reflètent cette institutionnalisation (salons professionnels, réseaux de villes, plateformes numériques de partage de ressources…). Ainsi, bien que concurrentes, les villes prennent conscience qu’elles gagnent à mutualiser des connaissances et des expériences pour mieux orienter leurs politiques numériques territoriales. Ces pratiques sont similaires aux modes de management opérés dans la sphère de l’entreprise, illustrant la notion de coopétition, néologisme signifiant que des organisations concurrentes peuvent coopérer, par effet de stimulation.

35- Cinquièmement, une analyse des idéologies territoriales ambiantes dans l’air du temps (culture, urbanisme, cohésion sociale, économie notamment), soutenues et diffusées par les politiques de communication et qui participent à la fabrique de l’image de la ville (Houllier-Guibert, 2011). Il convient en effet de repérer à quel point ces idéologies locales préexistantes sont structurantes pour accueillir certaines notions flexibles à la mode dans les territoires, comme celles de développement durable, de créativité ou d’innovation, que l’on retrouve notamment au centre des politiques numériques territoriales. Ces dernières reflètent également ce que les politistes nomment un référentiel, en tant que construction intellectuelle de l’action publique. Dans une approche communicationnelle, nous pouvons remarquer que cette dimension idéologique est porteuse d’un sens symbolique de la ville (Lamizet, 2002) pour les administrateurs ou les administrés du territoire, orientant l’action et l’image du territoire. En effet, que ce soit pour mettre en place des dispositifs numériques répondant aux logiques d’externalisation du management public (plateformes de servuction ou de co-design de services assignant au citoyen plus encore un rôle d’acteur) ou pour soutenir des entreprises représentant la « nouvelle économie territoriale », cette sphère symbolique du politique est très présente dans la communication publique (Ollivier-Yaniv et al, 2014). Il convient aussi de comprendre que l’important pour les pouvoirs publics, dans leur soutien au numérique, réside moins dans le résultat que dans un processus d’expérimentation politique qui encourage le « vivre ensemble », la coopération entre acteurs publics et privés et soutient, par conséquent, une vision de société locale à construire. L’objectif d’innovation de produits ou de services reste ainsi secondaire par rapport à ces partenariats porteurs d’image pour le territoire. De surcroît, cette utopie de l’innovation fortement associée aux TICN converge avec une idéologie du localisme comme lieu d’expérimentation du lien social (Pailliart, 1993)13. Cette dimension symbolique n’est pas déconnectée non plus des changements de configurations organisationnelles spécifiques dans l’institution : la création d’un service Innovation numérique dans l’organigramme de la collectivité, le recrutement de chargés de mission dédiés aux TIC ou à l’innovation, le rattachement du service Communication au cabinet du maire ou au contraire à la Direction Générale des Services, entre autres. De surcroît, bien souvent, il convient de remarquer que cette dimension symbolique s’affirme aussi dans l’aménagement des espaces. En particulier, l’art numérique contextuel en milieu urbain devient un instrument des politiques de communication. Contribuant à la fabrique de lieux sensibles et esthétiques dans la ville (Mons, 2013), l’art numérique peut être utilisé en effet comme outil des politiques urbaines pour renforcer une territorialité, un attachement au lieu et construire de nouvelles urbanités numériques (Boullier, 1999), pour des habitants ou des touristes en quête d’expériences.

36Ainsi, l’étude conjointe de ces cinq phénomènes, interagissant dans les mutations des politiques numériques territoriales, invite le chercheur à concilier une approche socio-économique et socio-politique, dans le cadre d’une épistémologie systémique adaptée à l’étude scientifique des phénomènes de communication (Muchielli, 2000). Plutôt que d’adopter une vision surplombante vis-à-vis de son terrain, cette approche systémique relevant d’une perspective de recherche fondamentale gagnerait à être nourrie par des connaissances produites dans le cadre de projets de recherche-action et d’intelligence territoriale. Plus particulièrement, l’analyse des pratiques d’e-réputation des territoires s’inscrit dans le périmètre des humanités numériques. Cette approche présente des opportunités pour les SHS, principalement à deux niveaux : d’une part, elle permet de repenser les catégories d’analyse en présentant un intérêt pour la recherche fondamentale, laquelle développe une réflexion théorique sur l’emploi des données numériques dites massives dans les études territoriales (Severo et Romele, 2015) ; d’autre part, cette évolution de la communication territoriale peut aussi nourrir une recherche appliquée mise au service d’une nouvelle forme de diagnostic territorial d’une image locale. Ces deux postures épistémologiques, qu’il ne faut pas systématiquement opposer, participent également d’une évolution du concept de territoire numérique vers celui d’un « territoire numérique de marque » reposant sur les logiques de contenus des plateformes (Le Béchec et Alloing, 2016).

37Ces quelques éléments de cadrage ne constituent nullement un point final, mais plutôt un point de départ pour la discussion. Le lecteur comprendra que l’objectif est plus modestement de fournir quelques repères et orientations pour inviter au débat épistémologique dans un champ de la communication territoriale marqué par peu de stabilisation théorique, du fait de la dispersion des concepts (Awono, 2015). Cette perspective converge heureusement avec l’arrivée de cette nouvelle revue RMT, qui saura sûrement s’imposer comme lieu de débat pluridisciplinaire, voire transdisciplinaire !

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Notes

1 Nous situons les humanités numériques « dans la convergence des démarches scientifiques et de l’ingénierie informationnelle » (Cormerais, 2014, p. 133).

2 Les Services Télématiques Municipaux, ancêtres du site internet, ont soutenu l’expérimentation du Minitel à travers le projet « Télétel 3V ». Le projet prévoit que 2 500 foyers volontaires de Versailles,Vélizy, Jouy-en-Josas, Buc, Bièvres et Loges-en-Josas reçoivent un terminal Vidéotex. L’offre de services proposait un annuaire téléphonique, des réservations, une messagerie notamment.

3 Nous reprenons cette expression de TICN à Françoise Paquienséguy.

4 L’expression est utilisée pour la première fois en 1994 pour désigner l’expérience de la ville d’Amsterdam comme Digital Stadt.

5 http://civictechno.fr/2017/07/17/manifeste-civic-tech-pour-une-democratie-deliberative/, page consultée le 20/02/2018.

6 Après l’engouement pour l’outil « Fix my street », certaines applications sont aujourd’hui utilisées au service d’une délation organisée consistant à dénoncer son voisin comme à Nice avec l’outil Reporty, invitant tout citoyen à lancer un appel vidéo à la police lorsqu'il est témoin d'une agression, d'un incendie ou d'une incivilité.

7 Pour une vulgarisation du concept de trivialité d’Yves Jeanneret, nous renvoyons le lecteur à cette vidéo : https://www.youtube.com/watch?v=9831mJsQTyM.

8 http://www.marketing-territorial.org/2017/05/le-role-des-blogueuses-blogueurs-dans-l-e-reputation-des-territoires.html, consulté le 10/01/2018.

9 Le séminaire Histoire et enjeux de la communication publique territoriale co-dirigé par Didier Chauvin et Thibault Tellier en 2017-2018 vise à discuter dans une approche généalogique ce glissemement de perspectives pour les communicants territoriaux.

10 Cette participation des habitants est un thème récurrent depuis le rapport Guichard de 1976 en faveur du vivre ensemble, en passant par la loi ATR de 1992, jusqu’à la loi Vaillant de 2002 notamment.

11 Citons aussi la loi Chevènement de 1999 qui facilite l’explosion des intercommunalités, la création des nouvelles régions, la loi NOTRE qui redéfinit les compétences ou la loi MAPTAM qui affirme les métropoles.

12 Ce concept d’isomorphisation organisationnelle (Hémont, 2011) se traduit par une standardisation de formes organisationnelles, des ressemblances dans les règles et pratiques impulsées par des logiques gestionnaires.

13 Dans cette utopie locale, le thème de l’éducation populaire des citoyens dans la Cité aux nouveaux médias numériques et de la diffusion d’une information à dimension pédagogique est très présent. Ce sont ces valeurs qui ont d’ailleurs été portées par l’association Cap Com, dès sa création.

Pour citer ce document

Jean-Baptiste Le Corf, « Communication territoriale et technologies numériques : bilan provisoire et perspectives de recherche » dans © Revue Marketing Territorial, 0 / printemps 2018

Le numéro 0 de RMT regroupe un ensemble de textes commandés aux auteurs afin de circonscrire ce que recouvre le marketing territorial. Il n'y a pas d'évaluation en double-aveugle comme pour les autres numéros de la revue.

Les deux dernières rubriques sont entièrement rédigées par le rédacteur en chef sur ce numéro 0 car il s'agit de montrer les formats possibles pour les prochains numéros, ouverts à toute discipline et tout croisement disciplinaire.

URL : http://publis-shs.univ-rouen.fr/rmt/index.php?id=142.

Quelques mots à propos de :  Jean-Baptiste Le Corf

Maître de conférences en Sciences de l’Information et de la Communication

Université Rennes 2 – Laboratoire PREFics

Jean-Baptiste Le Corf travaille sur l’étude des dispositifs de participation citoyenne et d’intelligence territoriale induits par les technologies numériques, les industries créatives et leurs rapports avec les logiques sous-jacentes du management public (rationalisation de l’action publique, recompositions institutionnelles), du marketing urbain et de la communication politique (discours sur la créativité et les territoires créatifs). Ses travaux abordent également les nouvelles formes de l’organisation territoriale, leurs impacts sur les rôles et compétences des communicants territoriaux, ainsi que les porosités entre la communication des territoires et la communication organisationnelle des entreprises.