Les Temps épiques
Structuration, modes d’expression et fonction de la temporalité dans l’épopée

sous la direction de Claudine Le Blanc (maître de conférences HDR en littérature comparée à l’Université Sorbonne Nouvelle – Paris 3) et de Jean-Pierre Martin (professeur émérite de langue et littérature du Moyen Âge à l’Université d’Artois)

Le volume constitue les actes du septième congrès du Réseau Euro-Africain de Recherches sur les Épopées (REARE), organisé conjointement par Ursula Baumgardt (INaLCO/Llacan), Romuald Fonkoua (Paris-Sorbonne), Claudine Le Blanc (Sorbonne Nouvelle/CERC) et Jean-Pierre Martin (Université d’Artois/Textes et Cultures), qui s’est tenu à Paris les 22, 23 et 24 septembre 2016 à l’INaLCO et  à la Sorbonne. Il propose une exploration de la question de la temporalité dans l’épopée, question qui reste paradoxalement peu étudiée de façon systématique, en vingt-sept études couvrant un très vaste empan géographique et historique (de l’Afrique à l’Inde, de l’Antiquité aux séries contemporaines), précédées d’une introduction par les coordinateurs.

Les temps épiques
  • Claudine Le Blanc et Jean-Pierre Martin  Dédicace
  • Claudine Le Blanc et Jean-Pierre Martin  Introduction

Temps épique, temps dramatique : la délibération dans l’épopée indienne (Mahâbhârata, VIII)

Claudine Le Blanc


Résumés

L’épopée indienne du Mahâbhârata dans sa version sanskrite comprend de nombreux passages où l’action se fait problématique et donne lieu à des débats. L’exemple de la discussion entre deux des cinq frères PâNDava, YudhiSThira et Arjuna, au livre VIII, montre comment ces longues pauses discursives prennent sens dans un jeu subtil avec le temps : rappel du passé dans le discours épidictique, projection dans l’avenir par la promesse, création d’un futur dans le passé par le rappel d’une promesse ancienne, cependant que le présent, envahi par le discours et la délibération, est le lieu d’une manipulation habile de la part de l’avatar du dieu qui « connaît tout le passé et l’avenir du monde ».

In the Sanskrit Mahâbhârata, on the two major epics of ancient India, on can find many passages where the action is questioned and gives rise to debate. Focusing on the discussion between two of the Pandava brothers in Book Eight, the present paper analyzes the long discursive pauses in their subtle game with time: reminder of a praised or blamed past, projection into the future thanks to promises, invention of a future within the past because of an old promise… whereas the present time, overrun with discourses and deliberation, is being manipulated by the avatar of God who “knows everything of the worlds’s past and future”.

Texte intégral

1Dans leurs incessants efforts pour fonder le système des genres littéraires, les théoriciens de l’âge classique ont souvent eu recours à l’analogie entre ceux-ci et les genres oratoires hérités de l’Antiquité1, ou modalités du discours : judiciaire, délibératif, épidictique ou démonstratif, qui décident respectivement entre le juste et l’injuste dans les tribunaux, entre l’opportun et l’inopportun dans les assemblées de la Cité, et distinguent enfin le bien/beau et le mal / laid dans les commémorations publiques et privées. Cette analogie est au principe du classement systématique des genres dans la triade moderne : poésie épique / dramatique / lyrique. Or, les genres rhétoriques se caractérisent chacun depuis Aristote par un lien privilégié à un temps : passé pour le judiciaire, futur pour le délibératif, présent pour le démonstratif. Par analogie, les trois temps (passé, futur, présent) ont ainsi été attribués aux trois genres littéraires, non sans indétermination toutefois : le dramatique s’est rattaché au futur, mais aussi au présent ; l’épique au passé, mais aussi au présent. Ces hésitations témoignent de la difficulté à construire les genres littéraires en système, mais aussi, plus particulièrement, d’une affinité entre l’épopée et le théâtre qui se joue précisément autour de la question de la temporalité.

2L’épopée, on le sait, a fourni au théâtre nombre de ses personnages et de ses situations, qu’il s’agisse de la tragédie antique ou classique, du théâtre sanskrit, ou de formes spectaculaires telles que l’Opera dei Pupi sicilien dont les marionnettistes puisent leur inspiration dans la Chanson de Roland ou l’Orlando furioso. Mais, plus qu’à cet achèvement de la fiction épique par le drame, pour reprendre le titre d’une célèbre pièce sanskrite, l’Uttararâmacarita2 de Bhavabhûti (« Fin de la geste de Râma3 »), et aux ordonnancements temporels parfois extraordinairement complexes auquel celui-ci peut donner lieu4, on voudrait ici s’arrêter sur l’occurrence au sein même de l’épopée d’un type de scène généralement associé au genre dramatique, la délibération, qui suspend l’action parce que celle-ci, problématique, impose un choix et cède la place au dialogue, intérieur ou non. On connaît celle, relativement brève, d’Hector devant les portes Scées de Troie au chant XXII de l’Iliade, se demandant l’espace d’un instant s’il doit ou non affronter Achille. Notons que la question de savoir ce qu’il convient de faire se pose régulièrement dans l’épopée : Agamemnon doit-il ou non rendre Chryséis ? Achille doit préférer une vie courte et glorieuse ou une longue vie sans éclat ? Roland doit-il sonner de l’olifant comme le lui conseille Olivier ? Comment Ségou doit-il prendre Dionkoloni5 ? Dans tous ces cas toutefois, la décision (ce qu’en grec on appelle proairésis) est vite prise, en étant imposée par le plus fort (Agamemnon, l’ethos héroïque, Roland), ou un conseil de spécialistes (les marabouts). Dans l’épopée indienne, et le Mahâbhârata sanskrit tout particulièrement, la délibération (bouleusis en grec) prend en revanche une ampleur remarquable puisque s’y multiplient les débats sur des actions problématiques, pour lesquelles il s’agit de savoir si elles sont conformes ou non au dharma, l’ordre socio-cosmique, dans les obligations qu’il implique pour chacun.

3Ces passages, dont le plus célèbre est sans doute le dialogue de la Bhagavad-Gîtâ entre le héros Arjuna et son cocher Krishna (KRSNa), avatar (avatâr) du dieu Vishnou, à la veille de la grande bataille du KurukSetra, ont beaucoup déconcerté les premiers lecteurs européens du Mahâbhârata, au point de les amener à exclure le poème sanskrit du genre de l’épopée : « Au moment où deux armées rivales vont en venir aux mains, où déjà les traits volent de part et d’autre, après que les trompettes ont donné le signal, deux guerriers se mettent à disserter sur la nature de l’être, sur la réalité et son apparence, sur l’origine et la fin des choses, sur le sens et le but de la vie humaine6 ! », s’exclamait en 1865 dans le Journal des savants le journaliste et polygraphe Jules Barthélemy Saint-Hilaire. Pourtant, comme l’a bien montré Adam Bowles7, ces développements le plus souvent dialogués (samvâda), entrelardés de récits (upâkhyâna), et qui donnent à la fiction sa dimension didactique ne doivent pas être considérés comme de simples digressions, encore moins des interpolations tardives. Par leur contenu – la discussion de la conduite à tenir, notamment en temps de détresse, ce qu’on appelle l’âpaddharma – ils sont au cœur des enjeux du récit épique indien. Mais ils ont pour conséquence de déployer une temporalité narrative singulière, en dilatant par l’argumentation le temps de l’après-guerre, dans le Livre des femmes (XI), Le Livre de la paix (XII), qui comporte une section intitulée « Âpaddharma », et celui de l’enseignement (XIII), mais aussi en suspendant régulièrement dans les livres précédents une action dont la raison apparaît obscure, ou inacceptable, aux protagonistes. On peut dès lors se demander en quoi ces moments dramatiques, qui représentent (et ne narrent pas) une action, loin de détourner (de) l’épopée, participent de la présentification épique, avec ce qu’elle implique de leurre – faire comme si le passé était présent, comme si toute l’histoire était encore ouverte, alors qu’il s’agit bien plutôt de fermer l’ouverture du présent, en l’occurrence dans le Mahâbhârata le questionnement contemporain dans les sectes dissidentes du brahmanisme autour de la notion de dharma.

4Pour les besoins de l’analyse, on se concentrera sur un exemple : la discussion entre deux des cinq frères PâNDava, YudhiSThira et Arjuna, au livre VIII du Mahâbhârata. Après avoir contraint leurs cousins PâNDava à douze années d’exil à la suite de la partie de dés perdue par l’aîné, YudhiSThira, les Kaurava ont refusé de leur restituer la moitié du royaume. La guerre pour la succession du trône de Kuru s’engage alors. Au seizième jour se trouve à la tête des armées Kaurava KarNa, le premier enfant conçu – hors mariage – par la mère des PâNDava grâce à une formule magique (mantra), et abandonné par celle-ci. Lors de la bataille, YudhiSThira, mis à mal par les flèches de KarNa, reproche à son frère Arjuna parti à sa recherche d’avoir manqué de courage et d’avoir fui ; furieux, Arjuna brandit son épée contre son aîné en invoquant une promesse ancienne. Krishna rappelle alors à ce dernier l’obligation dharmique de ne pas tuer, et l’invite à se contenter de montrer de l’irrespect vis-à-vis de YudhiSThira. Arjuna s’exécute mais, après avoir accusé son frère de tous leurs maux passés, il se désole d’avoir commis un tel péché et s’apprête à se suicider. L’avatar l’arrête et lui suggère de se vanter plutôt de ses propres qualités, ce qu’Arjuna fait, en achevant son discours par la promesse renouvelée de tuer KarNa. Humilié quant à lui, YudhiSThira souhaite se retirer dans la forêt, mais il est apaisé par l’annonce de la mort prochaine de KarNa.

5Plusieurs remarques s’imposent à la lecture de ce passage.

61. C’est un passage fort long, qui compte plus d’une soixantaine de pages de texte sanskrit dans l’édition bilingue de la Clay Sanskrit Library, sous le titre « The Dispute of Árjuna and Yudhi-shthira ». Il s’agit d’un dialogue, mais d’un dialogue rapporté, comme tous les livres de la guerre dans le Mahâbhârata, par le cocher Sanjaya au roi aveugle DhRitarâStra, le père des Kaurava. Des retours au cadre sont régulièrement opérés par la formule Sanjaya uvâca : « Sanjaya dit ». Sanjaya possède, quant à lui, le don de la vision à distance – on verra que la question de la vision importe dans le passage, et plus généralement dans le déroulement d’un récit qui est dans une large mesure une vision. Le passage juxtapose trois interlocutions : un bref dialogue sur le champ de bataille entre Arjuna et son frère Bhima, qui ne voient plus leur frère aîné, mais ne souhaitent ni l’un ni l’autre abandonner le lieu du combat ; un long dialogue entre Arjuna, finalement parti à la recherche de YudhiSThira, et ce dernier, où intervient Krishna ; enfin un second long dialogue entre Arjuna et son cocher, repartis vers le champ de bataille.

72. Ce temps de pause, éloigné des combats, reste entièrement habité par eux, et se trouve happé, d’un point de vue temporel, par le passé d’abord (que s’est-il passé ?), puis le futur (que va-t-il se passer ?). Il participe ainsi d’une dramatisation, au sens de l’effet cette fois, de l’action. Mais l’effet va au-delà. Au début, Arjuna et Bhima s’interrogent sur le sort de leur frère aîné, et celui-ci de son côté veut savoir si Arjuna a bien tué KarNa. Or, le récit du passé immédiat qui se trouve au cœur des premiers échanges déçoit toutes les attentes : YudhiSThira rapporte comment il a été submergé par KarNa, et sauvé par leur frère Bhima (66.13), Arjuna de son côté raconte son propre affrontement interrompu avec KarNa (67). Autrement dit, KarNa est toujours vivant alors que deux PâNDava ont quitté le champ de bataille – d’où la lourde incertitude qui pèse sur la suite, car on peut se demander si les PâNDava sont vraiment en mesure de battre leur adversaire.

83. Cette discordance de l’action avec les exigences du code héroïque, mais aussi, par conséquent, avec les attentes mises en place par le récit épique, se trouve mise en relief par la référence, à plusieurs reprises dans le dialogue entre les trois personnages, à une promesse passée8. Furieux du retrait de son frère, YudhiSThira rappelle la promesse faite par KarNa de tuer Arjuna (« aham hantâ Phâlgunasy’ !êti » / « Je tuerai Phalguna », 66.35), en regrettant que celle-ci n’ait pas été réalisée ; puis il rappelle à Arjuna sa propre promesse : « KarNam hant’’âsmy ekaǀrathena ! » / « Je tuerai KarNa sur mon chariot même », 68.4). Arjuna quant à lui invoque une promesse faite secrètement de trancher la tête à quiconque voudrait l’obliger à céder son arc Gandiva à un autre, ce que vient de faire son frère dans sa colère (68.26 et 69.9). Or, dans les trois cas, la promesse ne s’accomplit pas, le présent impose une discontinuité, et s’impose dans cette discontinuité.

94. La pause dialoguée dans le récit ouvre donc une béance dans le schéma épique, et cela à plusieurs titres. Tout d’abord, et c’est un des traits remarquables de ce passage précis, l’action guerrière se trouve remplacée par l’échange verbal, en raison de la présence même du dialogue, mais surtout parce que, par deux fois, Krishna invite Arjuna à réaliser par le truchement d’un substitut langagier l’action violente qu’il envisageait. Il voulait trancher la tête à son frère YudhiSThira : qu’il l’insulte plutôt, car se voir humilié est une mort morale (69.76 sq.). Il voulait se tuer après avoir manqué de respect à son aîné : qu’il vante ses propres mérites à la place, cela équivaudra à un suicide (70.28). Arjuna obtempère, humilie YudhiSThira dans un parallèle avec Bhîma (70.2-70.11) et un rappel de ses fautes et manquements passés, après quoi il se déclare archer sans pareil (70.30). Ce faisant, il déroge aux devoirs du guerrier et adopte le comportement d’un brahmane, au moment même où il insulte son frère en lui rappelant : « Les sages disent que la force du brahmane réside dans les mots, celle du guerrier dans ses bras ; toi tu es fort en mots et cruel9 » (70.12).

105. Par-delà cet infléchissement sur lequel on reviendra, la perturbation de la linéarité du récit guerrier par la mise en scène de la complexité du présent, informé par le passé, mais irréductible à celui-ci, constitue le signe d’une ouverture possible du récit. Le déshonneur des PâNDAva est possible, il se révèle même déjà présent dans l’aveu que YudhiSThira fait de sa terreur ancienne vis-à-vis de KarNa : « Cela fait treize ans que je suis terrorisé par lui, sans pouvoir trouver le sommeil la nuit ni la détente le jour10 » (66.14). La malédiction lancée par YudhiSThira sur Arjuna (68.30) fait quant à elle envisager la possibilité d’un affrontement entre frères qui viendrait redoubler et bouleverser à la fois la querelle familiale au cœur de l’épopée, laquelle se trouve en ce passage très exactement fratricide puisque KarNa est un frère méconnu. Le blâme proféré par Arjuna à l’encontre de son aîné laisse affleurer, à cet égard, une image du passé bien plus conflictuelle, qu’il s’agisse du partage de l’épouse commune DraupaDî (70.14) ou de l’exercice du pouvoir par un frère adonné au jeu (70.16 sq.). Dans sa harangue, Arjuna fait de YudhiSThira le responsable d’une guerre où se trouvent massacrés leurs cousins. La grande guerre tout entière se trouve alors dénoncée comme carnage (70.19-20). La pause dialoguée, développée à la faveur d’une confusion de l’action, approfondit la faille et met à mal le récit programmé, en faisant surgir un passé plus ou moins inédit qui creuse l’incertitude : un autre Mahâbhârata est-il possible ?

116. En vérité, pas vraiment. D’abord parce qu’il convient de penser que cette confusion est non pas la manifestation d’un jeu possible, mais la conséquence de mauvaises actions antérieures. « Les péchés que j’ai commis à la guerre dans le passé doivent avoir été immenses11 », déclare YudhiSThira, humilié par la retraite d’Arjuna (68.22).

127. Mais c’est surtout la présence de Krishna qui oblige à approfondir l’analyse. Non que Krishna le dieu vienne simplement remettre les choses en ordre (guerrier). Loin de dicter leur conduite aux hommes, c’est lui qui met véritablement en place le moment de la délibération, en exposant la difficulté de toute action (« Il n’est pas du tout facile de savoir ce doit ou ne doit pas être fait12 », 69.20) et en proposant une autre option (insulter, plutôt que tuer ; se vanter, plutôt que se suicider). Certes, son discours use des temps attendus dans un passage dont la dimension didactique ne doit pas être émoussée : le passé des récits exemplaires (l’histoire du chasseur Balaka et celle du brahmane Kaushika, en 69), et le présent de vérité générale13. Mais la vérité générale dans la bouche de Krishna revient à dire qu’il n’y a pas de vérité générale, d’où la nature à la fois parfaitement ouverte et totalement verrouillée de la délibération. L’histoire de Balaka le cruel chasseur élevé au ciel pour avoir tué une créature aveugle qui projetait de faire disparaître tous les êtres vivants, celle du brahmane Kaushika qui, s’étant juré de toujours dire la vérité, révèle à des bandits le chemin pris par leurs victimes et se trouve pour cela condamné illustrent le même point : « la loi [dharma] est très difficile à comprendre14 » (69.44). La formule est énoncée à plusieurs reprises par Krishna : « La loi est subtile et difficile à comprendre, tout particulièrement par les stupides ! » (70.28, et dans une légère variation, 71.4). Dès lors la délibération tend à devenir une casuistique au sens moderne et péjoratif du terme, et se résout dans ce qui ressemble à un tour de passe-passe verbal, un jeu sur la dimension métaphorique du langage : « Ton vœu peut être respecté, Arjuna, écoute comment il [YudhiSThira] peut mourir tout en restant en vie. C’est la solution pour toi15 ! », insinue Krishna, qui multiplie les paradoxes : Arjuna peut-il, par peur de la loi, tuer son frère, âme de la loi (70.26-27) ?

138. On comprend pourquoi l’avatar est dit maître du temps, connaisseur de « tout le passé et le présent de ce monde » (69.13), « créateur du passé et du futur dans le monde » (« loke bhûtaǀbhaviSyaǀkRt », 74.3) autant que fondement d’un dharma (« dharmaǀbhRtâm », 70.26) qui apparaît éminemment circonstanciel. Au milieu d’une guerre dévastatrice dont il est un des ordonnateurs, Krishna se fait protecteur de la vie qu’il assimile à la loi suprême, n’hésitant pas à contester le savoir révélé (shruti) comme source exclusive de la loi (69.53-54). Il réussit ainsi à convaincre Arjuna d’épargner son frère en l’amenant à énoncer une critique virulente de la guerre qu’ils mènent tous trois ; puis il le convainc de s’épargner lui-même. Par deux fois, le guerrier Arjuna range l’épée qu’il a tirée. Krishna parvient ainsi à ses fins, qui ne sont autres que la poursuite de la guerre et la mise à mort de KarNa par Arjuna : à la fin du dialogue avec son frère, Arjuna renouvelle son serment de détruire KarNa dans la bataille et jure que ce sera le cas le jour même (70.35 sq.). Krishna demande à YudhiSThira de lui pardonner d’avoir été l’instigateur des insultes d’Arjuna, pour la préservation de la vérité de son serment (70.47-50) ; YudhiSThira de son côté se déclare satisfait (« anunîtah ») et persuadé (« târitah », 70.54), et remercie Krishna de les avoir sauvés, Arjuna et lui, de l’océan de vice qu’étaient leur ignorance et leur confusion (70.55). Ainsi tout l’espace de délibération ouvert par le dialogue s’avère pour finir un leurre : les arguments de Krishna étaient en fait des conseils de dieu manipulateur, largement spécieux, mais destinés à emporter l’adhésion. Le présent de la délibération avait pour fonction principale de légitimer une fois encore le régime d’exception de la guerre où, bien que la vie soit une valeur suprême, le meurtre est indiqué : « Je t’autorise, Dhanañjaya, à tuer KarNa ! », déclare finalement YudhiSThira (71. 28), et Krishna renchérit plus loin : « Nous l’autorisons, il n’y a rien de mal à cela ! » (73.61)

149. En articulant pause dans la narration guerrière, délibération et mise en scène de la singularité absolue du présent, la dispute des deux frères a donc clairement pour fonction, comme d’autres passages du Mahâbhârata, de négocier avec les conceptions nouvelles, bouddhique, ou jaïne, du dharma16. Cela n’invalide pas la lecture moderne, sensible à l’opacité du présent qui, bien qu’anachronique et décontextalisée, n’est pas sans pertinence : en enregistrant, pour les contrer, les contestations contemporaines, l’épopée leur donne une place et laisse planer, un temps du moins, une incertitude, que l’on retrouve, teintée de rage et de désespoir dans les ballades modernes17. Les passages dits didactiques, en vérité narratifs, fictionnalisant la norme et le savoir, se révèlent ainsi paradoxalement les plus touffus, les plus complexes.

1510. Il importe toutefois de préciser. Dans le grand dessein auquel Krishna a soin de ramener les protagonistes, l’incertitude procède moins de l’opacité de leur destin pour les héros que de leur faillibilité aux yeux de l’avatar. Le passage étudié est de ce point de vue très éloquent, puisqu’il fait suivre le long dialogue d’Arjuna avec YudhiSThira d’un dialogue tout aussi long entre Arjuna et Krishna seuls, dont la raison d’être est un soupçon de fébrilité perçu par Krishna chez Arjuna (72.14). Or, il est nécessaire que le héros soit totalement résolu pour abattre un adversaire qui est son égal et peut-être même supérieur à lui, insinue Krishna (42.25), lequel se lance alors dans un long discours à l’adresse d’Arjuna. Car là est le problème pour l’avatar : la marge d’incertitude apportée par la créature humaine, sujette à l’abattement, au découragement (tel Arjuna après avoir insulté son frère), à la transpiration (tel le même Arjuna s’approchant du champ de bataille), et contrariant par là la temporalité de l’attendu, celle de la vengeance (de DraupaDî) notamment.

1611. Le temps épique dans le Mahâbhârata s’avère ainsi toujours déjà là, et encore à accomplir, avec la possibilité d’une défaillance. D’un côté, KarNa est déjà mort, cela ne cesse d’être dit. C’est le point de départ du passage, ce dont est persuadé YudhiSThira, c’est la « vérité » d’Arjuna qui déclare à son frère : « Avec une résolution totale je m’en vais sauver Bhîma de la bataille et tuer le fils du cocher [KarNa], car ma vie est à toi. Je dis la vérité18 ! ». C’est ce qu’estiment toutes les créatures vivantes en voyant Arjuna retourner au combat sur son char, « que le grand PâNDava avait déjà tué KarNa » (72.7-8). De l’autre côté, rien n’est jamais acquis et c’est précisément l’attitude de la nature qui fait croître l’anxiété d’Arjuna : d’où la nécessité de l’intervention permanente de l’avatar, de sa « descente » (sens littéral d’avatâr) et de son art oratoire. Pour affermir Arjuna, Krishna reprend en abyme le récit de la guerre et de ses ravages (la mort du fils d’Arjuna en particulier, 73.69 sq.), remontant comme l’avait fait Arjuna plus tôt aux origines de la guerre, au jeu de dés et à l’outrage de DraupaDî dans la sabhâ, mais en proposant un récit où toute la responsabilité revient à KarNa. Car il ne s’agit pas de s’abîmer dans l’horreur et la désolation d’une guerre détestable, mais bien de la poursuivre. Aussi fait-il de son récit un témoignage (« J’ai vu [apashyam] le fils de Subhadra », 73.69), qui devient, tandis qu’ils approchent du champ de bataille, une exhortation à voir : « Vois [pashya] ! Vois ce qui se passe ! » (73.111). L’anxiété d’Arjuna se transforme alors en excitation : à son tour, il se met à voir (« pashyâmi », « je vois » est en anaphore en 74.5) et peut anticiper le récit qui sera fait de son exploit : « Aussi longtemps que la terre survivra on racontera que c’était dans cette bataille que j’ai tué KarNa19 » (74.7). Il retrouve, en même temps que le lieu du combat, un présent comme il se doit identique à ce qui doit être : le mot « adya » (« aujourd’hui »), par lequel s’ouvrait la seconde tirade de Krishna (73.1) devient, en anaphore, le leitmotiv de la réplique finale d’Arjuna (74.13 sq.) qui commence ainsi : « Aujourd’hui, Duryodhana perdra tout espoir pour son royaume et sa vie une fois que KarNa aura été tué. Krishna, je te dis la vérité ! Aujourd’hui, après m’avoir vu avec mes flèches couper KarNa en morceaux, que ce maître d’hommes se souvienne de tes propositions de paix ! Aujourd’hui, Krishna, que le fils de Subala20 voie en les flèches des dés, en Gandiva [l’arc d’Arjuna] une boîte à dés, et en son chariot une table de jeu ! […] » Dans le temps de l’épopée, l’avenir est une certitude déjà visible, le passé une obsession, le présent est halluciné.

17Moments de vacillement de la programmation narrative, les dialogues délibératifs du Mahâbhârata rebattent les cartes du passé et de l’avenir, mais ne font droit qu’en apparence aux exigences du présent, tant celui des personnages que celui des destinataires du récit21. L’action se fait toujours rattraper par un Temps, « Kâla », dont la nature même en Inde est la destruction, comme il est rappelé dans une scène de bataille en 73.107 où KarNa au milieu des chars de ses ennemis est comparé au Temps destructeur. De ce point de vue, l’épopée sanskrite invite à préciser l’idée, développée par Schiller et Goethe dans leur correspondance, de « l’indépendance des parties » du poème épique (die Selbstständigkeit seiner Theile) et de son « cours retardant » (der retardirende Gang)22. La proposition ne signifie nullement que le poème épique soit dénué d’unité, précise Goethe dans une lettre ultérieure23, quand bien même il serait le produit de rédacteurs multiples. C’est une question de volume et de rythme. Que chaque partie ait une autonomie esthétique n’autorise pas n’importe quel développement de la fiction : c’est celle-ci tout entière qui s’y trouve condensée, tel le lombric de Döblin cité par Brecht qui se laisse découper en parties capables de continuer à vivre leur vie propre24. Les pauses induites par la remémoration des malheurs passés dans l’Odyssée ou l’Iliade sont, selon l’expression de Thomas Pavel, de « faux points d’arrêt25 » des épreuves du protagoniste, qui ne changent rien au cours attendu des choses : Ulysse ne reste pas chez les Phéaciens, ni Énée à Carthage. Leur fonction est esthétique, et axiologique : elles contribuent à expliciter les valeurs et les normes qui régissent l’action des personnages26. Tout le paradoxe du Mahâbhârata est de multiplier les temps de la délibération alors qu’il n’y a pas de choix en réalité ni de valeurs claires et que s’impose aux hommes une exigence qui les dépasse et les écrase, en vue de laquelle toute l’action est ordonnée. Ces temps servent à Krishna à dire et redire la nécessité obscure et supérieure d’un dharma qui semble confondu avec son contraire. Le régime d’historicité de l’épopée sanskrite, pour reprendre la catégorie forgée par François Hartog27, n’est ni celui, ancien, du présent pensé sur le modèle du passé, ni celui, moderne, du futur comme sens du présent. Le caractère contre-exemplaire des récits enchâssés le montre bien : ils ne proposent ni leçon du passé, ni norme à faire triompher, sinon celle d’un incompréhensible dharma. C’est un régime de pensée de l’action humaine qui tend à abolir l’historicité, en tant que celle-ci est le fait – héroïque – des hommes.

18Si, comme dans d’autres épopées, et d’autres épopées indiennes en particulier, la transgression de la norme déclenche le déroulement du récit, la spécificité du Mahâbhârata est sans doute l’élévation de la transgression au rang d’objet d’un discours normatif, c’est-à-dire l’identification, à un certain moment, de ce qui va être et de ce qui doit être, soit une abolition du temps qui ne vise pas simplement l’inactuel comme dans la plupart des récits épiques – et la transformation de l’histoire en destin28 –, mais qui impose le dessein divin à toute la geste humaine. La comparaison avec le chant I de l’Iliade est à cet égard instructive : on se souvient sans doute que celui-ci propose une scène très semblable à la querelle d’Arjuna et de YudhiSThira. C’est celle où Achille, offensé par Agamemnon, hésite entre calme et colère, et tire son épée. Il est arrêté par Athéné, envoyée par Héré, qui lui commande de se contenter de mots d’insultes. Achille obéit à l’ordre divin, et invective Agamemnon. Mais le substitut verbal de combat échoue à épuiser la querelle, le roi poursuit dans l’offense, Athéné a disparu et le vieux Nestor qui prend la parole en conciliateur n’est pas entendu. L’Iliade explore un récit possible que le Mahâbhârata referme après l’avoir esquissé, et rapporte des combats en l’absence d’Achille qui n’auraient pas dû avoir lieu, quand le Mahâbhârata expose comment les combats qui doivent avoir lieu ont lieu malgré tout. Dans les deux cas toutefois, l’occurrence des délibérations et des discours, l’évocation dramatisée des hécatombes advenues ou à venir posent la question de l’enchaînement des causes et des conséquences dans le déploiement du conflit. Qu’est-ce qui fait entrer les hommes dans le temps de la guerre ? Qu’est-ce qui les y fait demeurer ? Questions d’actualité s’il en est.

Bibliographie

Maha.bhárata. Book Eight : Karna, volume two, translated by Adam Bowles, New York University Press-JJC Foundation, « Clay Sanskrit Library », 2008.

Bansat-Boudon, Lyne, « L’épopée mise en scène : l’exemple de l’Uttararāmacarita », Journal asiatique, 288-1, 2000, p. 83-111.

Barthélemy Saint-Hilaire, Jules, « Le Mahâbhârata », premier article, Journal des savants, août 1865, p. 475-480.

Biardeau, Madeleine, Le Mahābhārata. Un récit fondateur du brahmanisme et son interprétation, Paris, Éditions du Seuil, 2002, t. II, p. 347-358.

Bowles, Adam, Dharma, Disorder and the Political in Ancien India. The Āpaddharmaparvan of the Mahābhārata, Leiden, Brill, 2007.

Brecht, Bertolt, Théâtre épique, théâtre dialectique, trad. Jean Tailleur, Guy Delfel, Jean-Marie Valentin et Edith Winkler, nouvelle édition sous la direction de Jean-Marie Valentin, Paris, L’Arche, 1999.

Goethe-Schiller, Correspondance 1794-1805, t. I, trad. Lucien Herr, éd. revue par Claude Roëls, Paris, Gallimard, 1994.

Johan, Virginie, « Du “je” au jeu de l’acteur : ethnoscénologie du Kūṭiyāṭṭam, théâtre épique indien », thèse de doctorat en théâtre et arts du spectacle, dirigée par Martine de Rougemont, Université Paris 3-Sorbonne, 2014.

Hartog, François, Régimes d’historicité. Présentisme et expériences du temps, Paris, Seuil, coll. « La Librairie du xxie siècle », 2003.

Kesteloot, Lilyan, Dieng, Bassirou, Les Épopées d’Afrique noire, Paris, Karthala, 2009.

Kibédi Varga, Aron, Rhétorique et littérature. Étude des structures classiques, Paris, Didier, 1970.

Le Blanc, Claudine, « “Temps de malheur” et destins désastrés. Échos de la colonisation britannique dans les ballades collectées par John Faithfull Fleet au Karnataka », dans Anne Castaing, Lise Guilhamon, Laetitia Zecchini (dir.), La Modernité littéraire indienne. Perspectives postcoloniales, Rennes, PUR, 2009.

Pavel, Thomas, « Temporalité », dans Emmanuel Bouju (dir.) Fragments d’un discours théorique. Nouveaux éléments de lexique littéraire, Nantes, Éditions nouvelles Cécile Defaut, 2015, p. 321-350.

Notes

1 Voir notamment Aron Kibédi Varga, Rhétorique et littérature. Étude des structures classiques, Paris, Didier, 1970.

2 Pour la transcription des termes empruntés au sanskrit, les conventions suivantes ont été retenues (sauf pour les noms de lieux ou de dieux donnés dans leur forme d’usage en français) : l’accent circonflexe note une voyelle longue, la majuscule un son rétroflexe, « sh » enfin représente le s palatal.

3 Voir Lyne Bansat-Boudon, « L’épopée mise en scène : l’exemple de l’Uttararāmacarita », Journal asiatique, 288-1, 2000, p. 83-111.

4 Dans le kûTiyâTTam, théâtre rituel sanskrit pratiqué dans la région du Kérala au sud-ouest de l’Inde, la mise en scène de l’épopée est ponctuée par de longues rétrospections narratives qui suspendent le temps dramatique par le rappel de la fiction antérieure selon des modalités variées de narration, le personnage entré en scène pouvant aussi bien suggérer par son action la présence d’un autre personnage qu’endosser celui-ci, voir Virginie Johan, « Du “je” au jeu de l’acteur : ethnoscénologie du Kūṭiyāṭṭam, théâtre épique indien », thèse soutenue à l’Université Paris 3-Sorbonne Nouvelle en 2014.

5 Voir Lilyan Kesteloot, Bassirou Dieng, Les Épopées d’Afrique noire, Paris, Karthala/Unesco, 2009, p. 179.

6 Août 1865, p. 471-472.

7 Voir notamment Dharma, Disorder and the Political in Ancien India. The Āpaddharmaparvan of the Mahābhārata, Leiden, Brill, 2007, p. 16-35.

8 Rappelons que le Mahâbhârata tout entier se développe dans la conséquence d’une promesse, celle du vœu de célibat de l’ancêtre BhîSma.

9 « balam tu vâci dvijaǀsattamânâm, / kSâtram budhâ bâhuǀbalam vadanti ; / tvam vâgǀbalo, Bhârata, niSThuras ».

10 « trayoǀdás’ âham varSâNi yasma^d bhîto […] / na sma nidrâm labhe râtrau na c’âhani sukham kva cit ».

11 « mama hy aǀbhâgyâni purâ kRtâni / pâpâni nûnam balavanti yuddhe. »

12 « na hi kâryam aǀkâryam vâ sukham jñâtum katham cana. »

13 Voir par exemple la liste des meurtres répréhensibles en 69.24-25.

14 « evam dharmah suǀdurǀvidah. »

15 « jîvann ayam yena mRto bhavedd hi, / tan me nibodh’êha tav’ ânurûpam. »

16 Adam Bowles parle, à propos de l’Āpaddharmaparvan, de « la reformulation d’une conception brahmanique de la royauté en termes de dharma » (« the re-articulation of a brāhmanic view of kinship in terms of dharma », op. cit., p. 407).

17 Voir, pour le kannada, « “Temps de malheur” et destins désastrés. Échos de la colonisation britannique dans les ballades collectées par John Faithfull Fleet au Karnataka », La Modernité littéraire indienne. Perspectives postcoloniales, sous la direction d’Anne Castaing, Lise Guilhamon, Laetitia Zecchini, Rennes, PUR, 2009, p. 99-113.

18 « yâmy eSa Bhîmam samarât pramoktum / sǀarv’âtmanâ sûtaǀputram ca hantum / tava priy’ǀârtham mama jîvitam hi, / bravîmi satyam ! »

19 « ayam khalu sa samgrâmo, yatra KarNam mayâ hatam / kathayiSyanti bhûtâni, yâvad bhûmir dhariSyati. »

20 Il s’agit de Shakuni, oncle maternel des Kaurava, homme intelligent mais pervers, maître du jeu de dés.

21 De ce point de vue, le travail épique du Mahâbhârata vise non à inventer une solution à une crise contemporaine, mais bien à neutraliser celle-ci et ses innovations, même si cette neutralisation ne manque pas de présenter des aspects innovants.

22 Voir Goethe-Schiller, Correspondance 1794-1805, t. I, trad. Lucien Herr, éd. revue par Claude Roëls, Paris, Gallimard, 1994, p. 364 (lettre de Schiller à Goethe datée du 21 avril 1797). L’idée se trouve aussi formulée dans un mot attribué à Lessing, selon lequel l’épopée se tourne vers le déroulement, alors que le théâtre serait tourné vers le dénouement.

23 Ibid., p. 374 (lettre de Goethe à Schiller datée du 28 avril 1797).

24 L’image du Regenwurm, exposée par Alfred Döblin dans ses Bemerkungen zum Roman, est reprise par Brecht dans « Théâtre récréatif ou théâtre épique », dans Théâtre épique, théâtre dialectique. Écrits sur le théâtre, trad. Jean Tailleur, Guy Delfel, Jean-Marie Valentin et Edith Winkler, nouvelle édition sous la direction de Jean-Marie Valentin, Paris, L’Arche, 1999, p. 31.

25 « Temporalité », dans Emmanuel Bouju (dir.) Fragments d’un discours théorique. Nouveaux éléments de lexique littéraire, Nantes, Éditions nouvelles Cécile Defaut, 2015, p. 332 et 343.

26 L’architecture épique est précisément pensée par Brecht comme permettant le calme, le recul, l’absence d’identification et la modération des émotions qui caractérisent à ses yeux l’effet produit par l’œuvre épique (op. cit., p. 45).

27 François Hartog, Régimes d’historicité. Présentisme et expériences du temps, Paris, Seuil, coll. « La Librairie du xxie siècle », 2003.


28 Voir ici la contribution de Jean Derive, « Le régime temporel dans la narration de l’épopée ».

Pour citer ce document

Claudine Le Blanc, « Temps épique, temps dramatique : la délibération dans l’épopée indienne (Mahâbhârata, VIII) », dans Les Temps épiques : Structuration, modes d’expression et fonction de la temporalité dans l’épopée, sous la direction de Claudine Le Blanc et Jean-Pierre Martin, Publications numériques du REARE, 15 novembre 2018 Licence Creative Commons

URL : http://publis-shs.univ-rouen.fr/reare/index.php?id=142

Quelques mots à propos de :  Claudine Le Blanc

Claudine Le Blanc est maître de conférences en littérature comparée à l’Université Sorbonne Nouvelle-Paris 3 et membre du CERC. Ses travaux portent sur les littératures de l’Inde classique et moderne et leur circulation, les traditions orales épiques et la notion de modernité littéraire. Elle est l’auteur d’Une littérature en archipel. La tradition orale de La Bataille de Piriyapattana au Karnataka, Inde du sud (Champion, 2005), d’une Histoire de la littérature de l’Inde moderne. Le roman, xixe-xxe siècles (Ellipses, 2006) et des Livres de l’Inde. Une littérature étrangère en France au xixe siècle (PSN, 2014).