Les Temps épiques
Structuration, modes d’expression et fonction de la temporalité dans l’épopée

sous la direction de Claudine Le Blanc (maître de conférences HDR en littérature comparée à l’Université Sorbonne Nouvelle – Paris 3) et de Jean-Pierre Martin (professeur émérite de langue et littérature du Moyen Âge à l’Université d’Artois)

Le volume constitue les actes du septième congrès du Réseau Euro-Africain de Recherches sur les Épopées (REARE), organisé conjointement par Ursula Baumgardt (INaLCO/Llacan), Romuald Fonkoua (Paris-Sorbonne), Claudine Le Blanc (Sorbonne Nouvelle/CERC) et Jean-Pierre Martin (Université d’Artois/Textes et Cultures), qui s’est tenu à Paris les 22, 23 et 24 septembre 2016 à l’INaLCO et  à la Sorbonne. Il propose une exploration de la question de la temporalité dans l’épopée, question qui reste paradoxalement peu étudiée de façon systématique, en vingt-sept études couvrant un très vaste empan géographique et historique (de l’Afrique à l’Inde, de l’Antiquité aux séries contemporaines), précédées d’une introduction par les coordinateurs.

Les temps épiques
  • Claudine Le Blanc et Jean-Pierre Martin  Dédicace
  • Claudine Le Blanc et Jean-Pierre Martin  Introduction

« La bataille de Makka » ou quand le présent sert la théâtralisation du futur

Abdoulaye Keïta


Résumés

L’analyse porte sur l’utilisation du présent par le griot, homme du présent, pour continuer de maintenir présente l’épopée dans la mémoire de toutes les générations. Elle s’appuie sur deux récits d’un même épisode de l’épopée du Kajoor, la plus impressionnante de l’épopée wolof, tirés du corpus de thèse de Mamoussé Diagne. Le recours à ces deux textes donne l’opportunité de voir les libertés que le griot O. Mbéguéré prend avec la réalité historique dont l’autre récit, celle de S. Mboup, est plus proche. À travers une gestion particulière de la temporalité, le griot Mbéguéré, affectionnant particulièrement l’amplification de la tension dramatique, embellit les moments de confrontation avec pour seul objectif de perpétuer les étapes de cette geste au présent. L’hyperbolisation est son procédé à lui d’opérer une mythification pour immortaliser et contribuer à l’édification du mémorable. Elle procède, dans la qualification des événements, des lieux et des personnages, autour du déroulement du récit en cycles, de pérenniser la renommée de Makka en la gardant présente dans les consciences.

This analysis addresses the use of the present time by the praise-singer, a man of the present, as a means to keep on the epic genre alive in the memory of all the generations. It lies in two narratives from the same episode of Kayoor epic, the most impressive one of Wolof epic. They are drawn from Mamoussé Diagne’s PhD corpus. Examining both texts proves that the praise-singer O. Mbéguéré takes liberties with historical reality while Mboup’s narrative, the second praise-singer, is closer to it. O. Mbéguéré, through a particular mastery of temporality, exaggerates the dramatic tension to make battle moments more beautiful for the only purpose to make the different steps of the gest live long in the present. O. Mbéguéré uses also hyperboles to create mythification, to immortalize and to contribute to the building up of memorable deeds. Hyperbole as a mode of expression grossly depicts events, places and characters around the cyclical progression of the narrative and sustains Makka reputation by keeping it alive in people’s mind. The story of the actions in which the time of the praise-singer and the one of history are alike happens sometimes at the very moment mystic and esoteric forces are called upon with the everyday help of the marabout who can bind the course of events into a somewhat time of religion The religious hint aims, for the most, to emphasize the ceddo beliefs (animists and not open to Islam) which characterize the main actors of the events and show how they are less concerned with religion. The mise en scѐne that introduces each of the characters with his own warhorse labelled with its praise name could be an epic on the whim of the praise-singer; it would be the time of cycles. The present which seems to be the favourite time for the praise-singer tends to affect the future.

Texte intégral

1L’épopée wolof au Sénégal est dominée par le type dynastique. Une des plus emblématiques est celle du Kajoor, royaume issu de la dislocation puis de la reconstruction du Grand Jolof agrandi par la récupération du Bawol. C’est ce dernier stade, le temps du Kajoor-Bawol, qui intéresse cette étude et qui permettra, après l’analyse de la temporalité dans deux versions d’un même épisode marqué par la lutte entre deux lignées, de voir comment le griot choisit de construire le récit à sa manière. Il s’agira d’étudier le temps de la narration, celui du griot et celui de l’histoire, c’est-à-dire des événements. Il sera possible d’envisager la mise en perspective de la notion d’« épopée potentielle » développée par Mamoussé Diagne dans son ouvrage Critique de la raison orale1. Cette épopée se focalise souvent sur un élément important de l’écriture épique africaine, la devise, qui elle-même influe sur la temporalité. Cette devise, partie intégrante de l’histoire, fait vivre ou plutôt maintient vivant un état permanent d’exaltation. Mais face à la réalité, force est de voir retomber cet enthousiasme, cet emportement. On se rend compte aujourd’hui que les héros dont la chanson du griot a pour vocation de perpétuer la geste ne sont pas aussi exemplaires que l’épopée veut le laisser apparaître. Les griots ont en effet choisi d’embellir leur histoire alors que la réalité n’a pas toujours été aussi positive, même si, par ailleurs, cette même épopée peut être envisagée comme moteur de transformation sociale.

2C’est à travers l’étude des trois temps mentionnés par Madelénat dans son ouvrage L’Épopée que l’étude de la temporalité sera menée, « [Le premier], les temps évoqués par l’œuvre, où se déploient les énergies et la force conquérante », « [le dernier], les temps de la production épique, souvent postérieurs de plusieurs siècles », mais surtout le temps intermédiaire sur lequel il insiste et qui intéresse la période que nous analysons :

Enfin, entre ces deux moments de naissance et de renaissance, un intervalle variable : espace négatif, nocturne – guerre civile et anarchie, soumission à un maître étranger –, mais aussi lieu de l’alchimie épogénétique où l’événement se transforme en geste, obscure médiation entre le réel et l’œuvre2.

3C’est cette « collusion » comme le dit Madelénat, qui induit la confusion entre histoire et mythe qui a construit la renommée de Makka dont on peut résumer le récit ainsi : le contrôle de Makka, capitale mythique de deux royaumes, fondée par Lat-Soukabé, oppose ses enfants partagés entre deux lignées : celle des Géej à qui le père laissait la succession et celle des Dorobe dont Mawa est l’unique descendant. Ce dernier se révolte et s’exile. Il revient par surprise, s’empare du pouvoir et exile ses demi-frères qui errent pendant sept ans avec leur mère. Ils décident de venir reconquérir Makka pour l’arracher à leur demi-frère Mawa.

4Mais cette renommée (celle de Makka) n’a pu se construire qu’avec la complicité des griots, la version de Mbenguéré3, la plus emblématique, et celle de Saliou Mboup4. Cette complicité née des relations de proximité tissées entre le griot et une lignée familiale qui l’entretient, permet, avec le poids actualisateur des nombreuses devises5 portées le plus souvent par les chevaux, de mettre en lumière une théâtralisation6 du futur par le présent. Du reste, l’apport d’historiens comme Mamadou Diouf, dans son ouvrage Le Kajoor au xixe siècle. Pouvoir Ceddo et conquête coloniale (1990) ou de spécialistes de l’épopée comme Bassirou Dieng dans son ouvrage Société wolof et discours du pouvoir. Analyse de récits épiques du Kajoor (2008) permet de voir l’ampleur de cette scénarisation et de l’immortalisation, surtout en termes d’efforts et d’artifices du griot.

5L’analyse de la temporalité dans le récit s’orientera vers les différents temps qui semblent dessiner la marche des événements, comme celui du mythe, avec l’insistance sur les caractères. Seront aussi prises en charge les péripéties de l’errance, motif récurrent dans les épopées et dans lequel se dissout le temps de la spiritualité voire du mystique qui y joue sa partition combinée à celle des cycles propres à l’épopée dynastique.

Le temps du mythe : pour le mémorable

6Un des points sur lesquels on s’accorde pour penser que l’épopée est la culture du mémorable7, c’est qu’on a besoin de se remémorer le passé, mais un passé qui galvanise et qui exalte. Un des moyens que les protagonistes, tous princes ou nobles guerriers, utilisent pour se singulariser, c’est de se faire identifier par le nom de leur monture. Chaque combattant a une monture qui a un nom précis. Cette sorte de devise caractérise non le cheval, mais le héros à qui il appartient. Le cheval est le double du cavalier, son nom résume l’idéal de vie ou l’idéal moral de son propriétaire.

7Le mémorable, dans ce contexte, permet la mise en valeur des caractères. Il s’agit pour le griot, gestionnaire de cette encyclopédie des hauts faits et des comportements marquants, d’agir en actualisateur. C’est pourquoi la définition du nom des chevaux, qui est en fait une devise, est déclinée sous la forme d’un présent permanent, éternel ou intemporel. Ce n’est pas une question de durée, mais de réalité ou de perception. Ainsi, au lieu de mettre l’accent sur la qualité visée, l’actualisation se fait par opposition. Le cheval de Mawa s’appelle Cupidité : « Elle croît en raison inverse de son sens de l’honneur » (OM, v. 173). Mawa en effet est l’unique fils de sa mère et il a la prétention de ravir le pouvoir à sept demi-frères. Durant sa période d’exil, l’honorabilité n’a pas été non plus le fil conducteur de son comportement puisqu’il a vécu en véritable brigand. Vers la fin des principaux événements, au lieu d’assumer la perte de la bataille en mourant, il a choisi la survie en s’enfuyant sur une pouliche alors que, comme réplique implicite, l’oncle de ses ennemis s’était écrié : « L’absence de monture ne me fera pas chevaucher un âne ». Le caractère occupe une grande place dans les leçons que le récitant choisit de faire véhiculer par son texte, c’est pourquoi cette sortie peu honorable est ménagée pour Mawa. Mais si on veut connaître la réalité historique, il faut se référer à Bassirou Dieng dans son ouvrage cité plus haut : « L’assassinat de Mawa en 1756 met un terme à la guerre civile8. »

8Il n’est pas besoin d’aller loin pour conclure que la force morale ciblée, les vertus cardinales et les meilleures qualités que cet épisode de l’épopée du Kajoor a choisi de mettre en relief peuvent se résumer à un seul vocable, l’héroïsme. Il faut, pour que ne survienne aucun doute sur le sens de cette qualité, préciser qu’il s’agit plus exactement de témérité. Tous les protagonistes de cette histoire, de sang princier, ne semblent avoir à leur disposition que cette fatale propension à rivaliser de témérité, à vivre littéralement de témérité. Ainsi, la devise de chacun se résume en une périphrase, élucidée par un argument au présent comme par exemple Objurgation de l’hyène : « Elle n’impressionne pas un lion dans la force de l’âge » (OM, v. 300-301). Cette parole au présent sert en fait à introduire le futur. Ce présent contient tous les futurs possibles, tous les projets de ces protagonistes : mener une existence adossée à des principes que seule la mort peut entraver, comme semble le signifier la réplique de l’oncle des exilés, quand ils ont accepté les conditions de l’hospitalité d’Ardo Golli Bânna (partager leurs repas avec son chien). L’oncle qui n’avait pas compris les conditions de l’accord s’était pourtant écrié (OM, v. 361-362) « Être surpris par la nuit en brousse ne me fera pas chevaucher un âne » et il avait déclaré auparavant à leur hôte : « Mon bras est maigre mais je suis l’éléphant des batailles… ». Comme autres exemples, nous avons, dans le récit d’Ousseynou Mbéguéré, une série de noms de chevaux suivis chacun d’une définition motivante :

– Piquet d’attache de Barâ Tall Pèkh : « Les bœufs paniqués le laissent derrière eux » (OM, v. 235)

Gaulage de Beur Guet Mangôné de Khèle : « ne lasse pas celui dont les fruits poussent trop haut » (OM, v. 236-237)

– Danse de Possession de Youga Fall Yacine Isseu : « Un fou n’y assiste pas, il risque de voir les esprits le chevaucher » (OM, v. 282-283)

– Gaillard récalcitrant : « préfère-lui un jeune homme obéissant » (OM, v. 292)

– Haute haie : « Elle n’empêche pas les oiseaux de dévaster le champ » (OM, v. 309)

– Trois Gaillards : « Quand tu les vois détaler à toutes jambes, imite-les aussitôt, sous peine de te retrouver en face de ce qui les fait fuir » (OM, v. 317-318)

– Trou de serpent : « Contente-toi de l’observer mais garde-toi d’y introduire le doigt » (OM, v. 326-327)

–  « Il est bon de marcher ensemble, mais nul ne tombe en marchant seul » (OM, v. 600)

9Ces devises sonnent aussi comme des mises en garde, pour ne pas dire des menaces, c’est cela que le présent met en perspective, un présent immuable, donnant ainsi l’impression d’une vérité éternelle. Ces vérités ne donnent pas l’occasion de leur opposer une quelconque objection ou un semblant de doute. Leur destinateur vit dans la logique du présent. S’occuper du passé ou du futur est une prérogative laissée au griot. Ce présent permanent est donc un présent d’immortalisation, par conséquent, d’actualisation. Le choix de faire connaître ces devises suit comme une logique initiatique. Les Géej vivent en exil, pourchassés incessamment par leur rival. C’est pourquoi tout présent utilisé dans le texte, s’il n’est pas de l’impératif, fonctionne comme un futur potentiel. Le narrateur en est l’actualisateur et le rapporteur chargé de relater le vécu.

10Puisqu’il est question de caractère, il sera nécessaire d’examiner le processus qui contribue à sa détermination et un des moyens traditionnels d’asseoir une bonne éducation consiste à s’éloigner de la base affective, d’où l’exil. Dans l’imaginaire de ces sociétés, l’éducation réussit à coup sûr quand elle se déroule dans un milieu où prévaut l’adversité.

Le temps de l’errance

11Dans l’épopée, l’exil s’impose comme une nécessité9. C’est un moment d’instabilité assimilable à l’élément perturbateur dans le schéma du conte.

12Les deux camps l’ont vécu, chacun à sa manière parce que chacun d’eux a goûté à l’instabilité de l’exil. Cet épisode de pérégrinations n’est cependant pas négatif dans l’épopée, du moins dans la plupart de celles que nous connaissons. C’est une sorte de voyage initiatique destiné à construire la personnalité du héros. C’est aussi un moyen pour le Maître de la Parole de forger le destin des différents protagonistes. Pour Mawa, par exemple, dans la version de Saliou Mboup (v. 183-189), c’est pendant son errance que, fortuitement, le secret de la prise du pouvoir lui fut révélé. Cela confirme que l’initiation n’est pas que physique ou stratégique, elle est aussi mystique et nous plonge ainsi dans la dimension mythique de l’histoire. Il est en effet indiqué à Mawa que son ennemi juré, celui qui règne à Makka, et son griot se transforment en animaux nocturnes pour aller passer la nuit à l’abri de toute surprise inhérente à la vie dans les arcanes du pouvoir.

13Pour ses ennemis, ses demi-frères, l’exil a permis d’opérer une sorte de classification des héros. Cet exercice auquel se livre le griot emprunte une stratégie de différenciation/complémentarité. Même le rôle d’arbitre ou de capitaine n’a pas été négligé et c’est le refrain actualisateur au présent qui en définit les subtilités. La mise en scène est un élément constitutif de l’esthétique de construction de l’épopée, de « l’édification du mémorable », dirait Mamoussé Diagne10.

14La séquence la plus explicite est celle de leur séjour chez Ardo Golli Bânna au Djolof (OM, v. 266-416). La condition de l’hospitalité se décline sous la forme d’une épreuve qualifiante : deux questions au présent : « Qui es-tu ? Quel est le nom de ton cheval ? » sont posées aux visiteurs par le maître des lieux. Les réponses, également données au présent, renseignent sur l’idéal du propriétaire mais contiennent surtout une sorte de défi, une menace contre laquelle il n’y a aucun palliatif. « Mon bras est maigre, mais il est celui d’un roi, et il a transpercé des ventres aussi rebondis que le tien ! ». On dirait que, pour construire le mémorable, le griot a choisi de ne relater que des scènes où il est impossible d’éviter la confrontation, à l’image de ce mythe wolof du lutin lutteur qui, quand il rencontre quelqu’un la nuit, le convie à un combat en ces termes : « tu lutteras, que ça te plaise ou non ». Une hypothétique victoire ouvrirait les portes d’une fortune incommensurable. Les Géej, au cours de leurs pérégrinations, ont toujours eu ce comportement et, chez Ardo, cela est confirmé par la « mutation » d’une réponse (le nom du cheval) en refrain (le bras maigre, princier cependant, ayant l’habitude de transpercer des ventres tout aussi princiers). La théâtralisation du futur par le présent ne peut être plus nette. En effet, devant de tels hôtes il n’y a ni alternative ni dilemme. La bienséance, voire le courage interdit de les éconduire et le réalisme oblige à se préparer à les affronter, à les vaincre ou à périr. Voilà tout un système de vie qui se décline au présent et le griot répète cette mise en scène pour alimenter la future épopée.

15Le temps de l’errance n’est pas seulement le temps de l’initiation et de la formation, c’est aussi celui où les éléments de l’intrigue se mettent peu à peu en place.

16Dans la scénarisation de cette errance, le « mot de la fin », au présent, symboliquement, relance l’action. C’est Mawa qui met fin à son exil (volontaire) par ces mots (dans le texte d’Ousseynou Mbéguéré, vers 167) : » Je veux aller trouver Mâ Siré et les autres à Makka ! » La suite c’est que les Gééj connurent sept ans d’exil pleins de rebondissements, jusqu’à cette phrase de leur mère (aux vers 564-570) :

Gardez-vous bien de sous-estimer un seul !
Un peut surclasser deux voire l’emporter sur neuf.
Vous êtes bien huit preux chevaliers, tous issus de mon sein,
Et même neuf, en comptant votre oncle Ma Siré.
Or le seul Mâwa Mbâthio Samb, l’unique fils de Mbâthio Samb,
vous a chassés de Makka vous condamnant à errer.
Il brise mon écuelle partout où je m’avise de la poser,

17La phrase décisive vient plus loin, au vers 574 : « on ne doit avoir de la préférence que dans la maison de son père » et elle sonne comme un arrêt et somme de mettre fin à l’exil.

18Dans le récit des événements, il y a des sortes de parenthèses culturelles qui, bien que ne jouant pas sur le temps historique, en expliquent néanmoins certains développements. Il en est ainsi de l’évocation de la figure religieuse du marabout dans une épopée dont les acteurs sont ceddo (animistes), visiblement réfractaires aux principes de l’islam. L’incursion de ce sujet, à intervalles réguliers dans les récits, traduit plutôt un habitus.

19Le marabout est au début et à la fin de Makka. Dès les premiers vers du récit de Mbéguéré, il intervient, en premier lieu dans le choix de l’implantation de la cité mythique. Ceux qu’on appelle marabouts sont, jusqu’à nos jours consultés pour des services de divination quant à divers projets.

20Au moment où les Géej allaient attaquer Makka pour l’arracher à Mawa, on leur indiqua qu’un marabout était en train de boire avec des gens de ce dernier, en précisant « Ce Serigne Karé a un calame pire qu’un fusil : il foudroie tous ceux vers qui il le pointe » (OM, v. 640-641). Dans l’autre récit (SM, v. 124), c’est le prince Lat Soukabé, fondateur de la cité, qui insiste :

Il disait : « Mon propos de cette année
Est identique à celui de l’année écoulée :
Durant mon règne, qu’on ne me parle pas de mariage !
Que personne n’aille dans une mosquée, pour s’y marier !

21Le ton est donc donné, il n’est pas question de foi, le mariage étant ici une métaphore de l’islam. C’est une société d’impies, même si, plus loin, c’est un passant qui s’indigne :

Quelqu’un venant à passer, s’exclama : « Fi !
Il ne sert à rien de rétribuer un marabout !
Aucun marabout ne mérite qu’on lui verse les honoraires !
Qu’une balle ait pu ainsi terrasser Tègne Thié Yâssine,
Ses amulettes s’amoncelant sous lui,
Au point qu’il semble assis sur un mortier !
Et dire que, pour chacune de ces amulettes, un marabout jura
Qu’il ne mourrait pas par balle ! Nul marabout ne mérite salaire ! (v. 485-492)

22Le rapport au marabout n’est nullement religieux. Il semble plutôt que c’est la religion traditionnelle ou celle du terroir qui a domestiqué le savoir coranique pour s’en servir dans le projet ceddo11 de domination du pays. Le marabout n’est pas ce guide religieux ou maître coranique que nous connaissons, c’est un obscur manipulateur de forces occultes et sa science, paradoxalement, ne semble prospérer qu’avec l’aide d’une association de pratiques impures, comme le montre la réplique à l’indignation du passant devant l’horrible fin de Tègne Thié Yâssine :

Une des amulettes répondit : « Pourtant un marabout mérite salaire !
Mais à une balle faite de cuivre, d’argent et de fer,
Avec pour étoupe des poux domestiques,
Enterrée dans l’urine d’une femme impure, il est difficile de résister !
Il est dommage qu’on m’ait recouverte d’un tissu rapiécé
Sans quoi mes pouvoirs magiques l’auraient empêché de tomber. » (v. 493-498)

23Dans cette société qui, à l’époque, était guerrière (conquêtes, razzias, consolidation du pouvoir), cet « homme de Dieu », comme l’appellent les wolofs, est un soldat, un combattant dans son genre. Il accompagne tout prince ou noble, comme du reste le griot, mais dans le rôle de l’arme secrète, voire du manipulateur. Cette collusion entre pouvoirs spirituel et temporel semble avoir existé depuis très longtemps, quelle que soit la forme de l’un ou l’autre de ces alliés. Le marabout serait donc, non le propagateur ou l’introducteur de l’islam mais quelqu’un qui s’apparenterait plutôt, par ses pratiques, au féticheur bien connu de la culture traditionnelle. Le présent énonce donc ici un verdict sans appel quant à ses compétences, et il insiste aussi sur ce rôle immuable d’auxiliaire du pouvoir quel qu’il soit, pourvu qu’il soit en mesure de rétribuer ses talents, ce qui fait dire à Bassirou Dieng : « On entrevoit l’émergence d’un sacré plus magique que religieux. Le marabout (guide religieux) est désacralisé et réduit en un technicien dont on apprécie l’habileté. On réprime pourtant sans faiblesse son incompétence12 ». Lui-même n’a aucun doute sur les rapports « opportunistes » entre le souverain et l’objet religieux, comme cela est le cas dans cette autre page de l’épopée du Kajoor13 :

« Lat-Dior est-il sincère quand il prétend avoir embrassé la religion (musulmane) ou bien n’est-ce là qu’une façon habile de retrouver (son trône) du Cayor ?
Ordonnez-lui de se plier et de s’humilier (devant la loi islamique) comme les autres rois. Lui sera-t-il donné de se mesurer encore avec les Blancs colonisateurs ?
Toutes les accusations portées contre lui viennent de cette triste constatation : il n’est resté que dans les vignes du Seigneur depuis son jeune âge, jusqu’à cette fameuse journée de Loro14 »

24L’allusion est à peine voilée, la conversion de Lat-Dior serait une démarche opportuniste visant à le réhabiliter et à reconquérir le pouvoir. Le recours au spirituel, dans quelque culture ou époque qu’on se trouve, et maintenant encore plus qu’avant, tend à donner raison à Karl Marx quant à sa célèbre caractérisation de la religion.

25Pour fermer cette parenthèse sur le religieux qui clôt les éclairages sur le mythe et les caractères des personnages, il faut juste rappeler que pour le griot, cela procède d’une sorte de scène d’exposition avant d’en arriver à l’action principale de la bataille de Makka, motif de cette geste. Le dernier temps est donc celui du griot à qui appartient le récit ainsi que l’illustre cette injonction de Balla Fasséké à Soundjata : « Ne me réponds pas par ta bouche, demain montre-moi dans la plaine de Krina ce que tu veux que je raconte aux générations à venir. Demain, permets-moi de chanter l’air du vautour sur les corps des milliers de Sossos que ton sabre aura couchés avant le soir15. » Au héros épique l’action, au maître de la parole, le récit.

Le temps du récit

26Dans toute épopée ou histoire narrée en général, il y a le temps des événements, c’est-à-dire le temps des événements validés par les historiens et le temps du narrateur, celui qui intéresse cette analyse. Son temps à lui (le griot) possesseur de l’épopée en Afrique, c’est celui du vivificateur. À propos de ce temps, Momar Cissé écrit :

La déixis temporelle exprime la relation existant entre le temps de l’énonciation (t 0) et le temps de l’événement (t 1). Il arrive souvent que le locuteur situe les événements par rapport au temps d’énonciation d’une manière rétrospective, simultanée ou prospective selon que t1 est antérieur, contemporain ou postérieur à t 0. […] En wolof où les catégories présent et futur ne sont pas marquées, on utilise des cadres temporels de référence qui définissent des intervalles de temps à l’intérieur desquels se situe l’événement16.

27C’est pourquoi dans nos deux récits, c’est le présent de l’indicatif et celui de l’impératif qui prévalent. Ce présent est celui de l’heure de vérité, il n’y a ni retour ni recours possibles dans le feu de l’action : rester présent c’est faire la guerre, être présent c’est être chanté / immortalisé par le griot. C’est de ce dernier, quelque part maître du jeu, que Madelénat présente ainsi : « Le Griot – peu avare de magie, de sortilèges et de génies – se présente comme le possesseur du temps historique qu’il reçoit, “synthétise” et, finalement, produit17. » Il illustre ce constat par une précision de D. T. Niane : « Les griots connaissent l’histoire des rois et des royaumes, c’est pourquoi ils sont les meilleurs conseillers des rois. Tout grand roi veut avoir un chantre pour perpétuer sa mémoire, car c’est le griot qui sauve la mémoire des rois18. » On peut ajouter que c’est le griot qui garde vivant le souvenir, les hauts faits du roi. Il a pour rôle, entre autres, de connecter les générations futures à celles passées par le biais du présent.

28C’est pourquoi on peut dire de la bataille de Makka que la récurrence du présent obéit à la logique du faire dire et à celle du faire faire. C’est aussi pourquoi le discours du griot qu’est l’épopée, chanson de geste et de perpétuation de la renommée, est dans son énonciation au présent, le condensé de plusieurs temps qui se superposent selon les circonstances. C’est ainsi que nous avons le temps de l’hymne qui est celui du rappel des devises et qui peut se confondre avec le temps de l’histoire. On peut ajouter indistinctement les temps de l’action, de l’exhortation, des louanges, des rappels, des vérités. Seules les circonstances de la performance rendent l’un ou l’autre pertinent ou non.

29La réflexion cependant, pour ne pas se scléroser en « rappels » du passé comme on a souvent tendance à le penser des épopées, doit s’engager sur des chemins plus concrets. Quel rôle, pour le futur qu’il s’agit de théâtraliser, l’actualisation de cette chanson de geste peut-elle assumer ?

L’épopée potentielle en « cycles »

30L’entité politique qui a motivé les deux textes socles de cette analyse est Makka, capitale fédérale du Kajoor et du Bawol. Nous avons brièvement évoqué la dislocation du Jolof originel qui a donné naissance à des micro-états. Cet épisode est en fait constitué de cycles répétitifs. L’ambition de Lat-Soukabé – premier des cycles répétitifs – qui a été de régner sur des territoires confédérés n’est-elle pas présentée aujourd’hui avec une valeur prodromique, préfigurant l’ambition d’une unité africaine ? La logique de conquête qui a caractérisé cette époque n’a-t-elle pas plus de soubassements politiques qu’économiques ? L’on sait que la singularité du fondateur de Makka dans ses alliances matrimoniales obéissait surtout au souci d’élargissement (voir B. Dieng, 2008) d’une base d’alliances et de consolidation d’une mainmise familiale sur les destinées d’un territoire à agrandir sans cesse. Ainsi en parle O. Mbéguéré :

Lat-Soukabé avait coutume, lorsqu’il épousait une femme,
D’y adjoindre sa sœur, lorsque celle-ci venait la visiter,
et d’offrir une couronne à leur frère s’il se mettait en courroux
Il avait dix épouses et cinq beaux-pères. (v. 45-48)

31Une sorte de refrain semble rythmer l’évolution de ce statut matrimonial, dans la suite du même texte, aux vers 71, 83, 97, 112 quand le prince Lat-Soukabé disait après chaque union : « Point n’ai assez d’épouses. »

32Cela n’est-il pas, par ailleurs, l’ambition de toute fédération ? Sa réponse, toujours au présent permanent, venait sonner comme argument d’autorité à toute objection : « Elles ont le même père et la même mère », qu’on lui présentait quant à son comportement vis-à-vis de ses belles-sœurs : « Elles ont le même époux. Que personne n’essaye de s’ingérer dans un différend les opposant. » Florence Goyet écrirait « dire l’ordre pour le faire advenir19 ». Cela fait penser au proverbe africain « La langue et les dents cohabitent malgré quelques frictions. » L’explication historique de cette instabilité est donnée par B. Dieng :

L’ensemble de la famille gééj, dès 1749, dut affronter le meen doroobe dirigé par Mawa Mbaaco. Ce lignage, entré dans le cercle du pouvoir dominé par les Géej grâce au mariage de Mbaaco Samb avec Lat Soukabe, tenta aussi de s’imposer. Cette lutte entre les deux meen s’étend de 1749 à 1756. Mawa détrôna les Géej pendant un temps, aussi bien au Kajoor qu’au Bawol. […] L’assassinat de Mawa en 1756 met un terme à la guerre civile20.

33Pour chaque protagoniste de cette épopée, le griot pourrait construire une épopée. À la fin, tout est question d’alliance, voire d’intérêt. Ainsi chaque étape vers la confrontation finale est une épopée potentielle ou, comme dirait Madelénat, « une petite épopée dans la grande ». C’est la question des « cycles ». La stratégie du griot dans cette mise en scène repose essentiellement sur une sorte de cycle répétitif où, tel un refrain, il insiste sur ce qu’il faut retenir, ce qu’il faudra octroyer au futur en termes de souvenir mais surtout de référence. C’est, tout au début, le cycle des mariages de Lat-Soukabé qui épousait la sœur venant rendre visite à son aînée fraîchement épousée : « Point n’ai assez d’épouses ! »

34Ensuite la ronde des devises de chevaux quand il a fallu, au moment de l’exil, séjourner chez Ardo Goli Bâna « Qui es-tu ? Quel est le nom de ton cheval ? » C’est l’occasion pour le griot d’étaler un catalogue de devises.

35C’est aussi Mawa jouant au wure21 et demandant à son esclave de lui décrire les assaillants « Que vois-tu ? » Ce cycle de questions traduit non seulement la sérénité de Mawa (parce qu’il continue son jeu) mais surtout son manque de surprise. Quand l’esclave insiste sur le danger imminent que représente tel futur assaillant, la réponse d’un Mawa imperturbable tombe : « Il a hâte d’arriver dans cette cité pour en tuer les hommes. Alors que les hommes s’interposent entre lui et la cité ». En somme, dans ce cycle de Makka, le présent se vit intensément : attaquer ou être attaqué.

36Et l’apothéose, ou ce qui pourrait en tenir lieu : la bataille de Makka. Chaque fois qu’on tue un valeureux combattant (nous entendons un prince), la réponse de l’oncle (l’Éléphant des batailles) tombe invariablement. « Du lever au coucher du soleil, il n’y a pas assez de temps, pour qu’un brave hésite entre la fuite et la mort ! Retournez guerroyer à Makka ». C’est le point culminant de cette épopée, l’instant de l’ultime vérité, la victoire ou la mort. Pour les assaillants, les Géej, mort rimerait avec extermination, voire extinction d’une lignée. C’est pourquoi quand Mâwa a failli prendre le dessus et qu’on appela Ma Siré Isseu, il dit (dans le récit de Saliou Mboup)

Le Kayor a peur : ils invoquent Djounkoun !
Or le titre de Djounkoun ne sied qu’à un damel ou à un teigne
Aujourd’hui, c’est à moi que le Kayor devra son salut ! (v. 519-520)

37Et c’est lui qui mit en fuite Mâwa, mettant ainsi fin à la confrontation.

Conclusion

38Au terme de cette incursion dans la temporalité du récit épique où nous avons mis côte à côte deux versions d’un même épisode récité par deux griots différents, il apparaît que tout ce que le Maître de la parole veut maintenir vivant dans la mémoire des peuples possédant une telle épopée, c’est une sorte « d’éthique du ceddo22 ». Celle du Kajoor, qui n’a rien à envier à une saga, est construite comme une spirale montante et descendante selon les camps en présence. Le discours mise beaucoup sur l’implicite qui, en lui-même, permet d’expérimenter la notion « d’épopée potentielle », c’est ce que le présent dit et qui met en perspective tout le combat guerrier. Quant au présent que nous venons d’analyser, il porte l’intrigue et tout son poids dans la dramatisation. Ce présent qui, de prime abord semble ne rien dire, est parole annonçant le futur et remémorant le passé.

Bibliographie

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Notes

1 Mamoussé Diagne, Critique de la raison orale. Les pratiques discursives en Afrique noire, préface de Bonaventure Mvé-Ondo, Niamey, CELHTO, Dakar, IFAN, Paris, Karthala, 2005, p. 367-368.

2 Madelénat, Daniel, L’Épopée, Paris, Presses Universitaires de France, 1986, p. 85.

3 Ousseynou Mbéguéré, p. 121-185, 1110 vers. Il est griot et un des deux informateurs de Mamoussé Diagne à qui nous avons emprunté le corpus de cette étude (voir Le Preux et le Sage. L’épopée du Kayor et autres textes wolof, Paris, L’Harmattan, 2014) et qui dira de lui (p. 10) : « un auteur, c’est-à-dire un authentique créateur. C’est donc cette qualité que nous devrons reconnaître à Ousseynou Mbéguéré, merveilleux poète hélas disparu… ». Désormais OM.

4 Mamoussé Diagne (2014, 187) dit qu’elle est « plus conforme à la vérité historique ». Désormais SM.

5 Pour la devise, nous renvoyons entre autres, à la remarquable étude de Christiane Seydou, « La devise dans la culture peule : évocation et invocation de la personne », dans Geneviève Calame-Griaule (dir.), Langage et culture africains, Paris, Maspero, 1977, p. 178-264, notamment à la page 199.

6 Concept avancé par Mamoussé Diagne (2005) d’abord dans son introduction, p. 21, puis développé au chapitre II, p. 121 : La dramatisation comme « ruse » de la raison orale.

7 Autre concept développé par Mamoussé Diagne (2005), annoncé dans l’introduction de sa deuxième partie, p. 239 et développé au chapitre II : L’édification du mémorable, p. 273.

8 Op. cit., p. 200.

9 Il appartient en effet à une des trois plages temporelles : voir Madelénat, op. cit., p. 85.

10 Critique…, p. 273.

11 Ceddo signifie animiste. Les aristocrates de l’époque (de cette épopée) étaient animistes.

12 Op. cit., p. 209-210.

13 Traduit et cité par Amar Samb, Essai sur la contribution du Sénégal à la littérature d’expression arabe, Mémoires de l’IFAN no 87, Dakar, IFAN, 1972, p. 263.

14 Lat-Dior a essuyé une cuisante défaite à la seconde bataille de Loro le 12 janvier 1864, c’est alors qu’il s’enfuit du Cayor et qu’il alla trouver Mâba Diakhou au Saloum l’Almamy du Rip (une des régions naturelles du Sénégal) et qu’il embrassa par la suite la religion de Mahomet.

15 D. T. Niane, Soundiata ou l’épopée mandingue, Paris, Présence africaine, 1960, p. 116.

16 Momar Cissé, Parole chantée et communication sociale chez les Wolof du Sénégal, Paris, L’Harmattan, 2010, p. 192-193.

17 Op. cit., p. 84.

18 Op. cit., p. 78.

19 Penser sans concepts : fonction de l’épopée guerrière, Paris, Honoré Champion, coll. « Bibliothèque de littérature générale et comparée », 2006, p. 24.

20 Op. cit., p. 200.

21 Wure : « Awale, jeu de poquets, jeu consistant à mettre des pions dans deux rangées de quatre ou six trous chacune » (d’après le dictionnaire wolof-français et français-wolof de J. L. Diouf, Paris, Karthala, 2003, p. 374). Par ailleurs, dans la présentation de l’ouvrage d’où est emprunté le corpus, L. Kesteloot décrit ce jeu comme une « sorte de backgammon », p. 8.

22 Selon le mot de Malick Ndiaye, L’Éthique ceddo et la société d’accaparement. Tome 1, Le Goorgi, Dakar, Presses Universitaires de Dakar, 1996.

Pour citer ce document

Abdoulaye Keïta, « « La bataille de Makka » ou quand le présent sert la théâtralisation du futur », dans Les Temps épiques : Structuration, modes d’expression et fonction de la temporalité dans l’épopée, sous la direction de Claudine Le Blanc et Jean-Pierre Martin, Publications numériques du REARE, 15 novembre 2018 Licence Creative Commons

URL : http://publis-shs.univ-rouen.fr/reare/index.php?id=104

Quelques mots à propos de :  Abdoulaye Keïta

Abdoulaye Keïta est chercheur au laboratoire de Littératures et Civilisations africaines de l’IFAN (UCAD), chef du Département des langues et civilisations. Auteur d’une thèse intitulée « La poésie orale d’exhortation, l’exemple du bàkku des lutteurs wolof (Sénégal) », il a dirigé Au carrefour des littératures Afrique-Europe. Hommage à Lilyan Kesteloot, Paris, Karthala, 2013.