Mazarinades et territoires

Premier numéro

Volume dirigé par Stéphane Haffemayer et Patrick Rebollar

Published by Stéphane Haffemayer and Patrick Rebollar

Mazarinades et territoires

Les mazarinades après la Fronde : l’exemple du recueil Foppens

Bruno Tribout


Texte intégral

1Signalés dès les premiers travaux sur les mazarinades, les recueils de libelles bénéficient aujourd’hui d’un regain d’intérêt1. Ils permettent en effet d’éclairer les fonctions politiques des pamphlets par leurs actions de sélection et de transmission, qui participent, avec d’autres actions, au déroulement de la crise politique de la Fronde2. En aval de la guerre civile, ils renseignent sur l’historiographie des mazarinades, constituant, y compris jusque dans leur démembrement éventuel3, des témoins privilégiés de la réception et de la diffusion des pamphlets. C’est entre ces deux espaces, celui de la polémique frondeuse et celui de l’historiographie des libelles, que nous souhaitons nous inscrire, en nous penchant sur un recueil constitué à bonne distance de la Fronde, mais qui, grâce à son succès, fut un important vecteur de diffusion des mazarinades sous Louis XIV. Il s’agit d’un ensemble de pièces relatives à la guerre civile, composé pour moitié de mazarinades, imprimé à Bruxelles au cours de l’été 1662, par François Foppens, avec pour titre d’ensemble : Mémoires de M. D. L. R.4. Parce qu’on y trouvait donc une première version des Mémoires de La Rochefoucauld, la critique s’y est intéressée essentiellement pour en dégager l’œuvre du mémorialiste et, comme nous avons tâché de le faire, pour en éclairer la genèse5. Mais nous voudrions revenir à présent sur cet ensemble en le considérant pour lui-même et comme illustrant une forme spécifique de pratique des pamphlets à une époque où celle-ci évolue, notamment sous l’influence de la propagande louis-quatorzienne6.

2Si, en effet, pour reprendre Robert Descimon et Christian Jouhaud, on peut opposer l’importante « extension de la prise de parole politique » qui caractérise la Fronde à la « spectaculaire concentration du droit à l’expression civique » qui en résulte7, la gestion de la mémoire de cette prise de parole, notamment à travers les recueils de libelles, constitue, nous semble-t-il, une manière de la prolonger pour s’en réapproprier ou pour en détourner la charge polémique. C’est donc la question de l’héritage de la Fronde que les recueils permettent d’interroger, tant du point de vue de la pratique du pamphlet que de celui de la pensée politique : en nous encourageant à considérer les usages des mazarinades après la guerre civile, les recueils nous invitent à revenir sur les discussions critiques (portées notamment par Christian Jouhaud et Hubert Carrier) qui se sont attachées à définir la fonction des mazarinades comme instruments de propagande, vecteurs d’idées ou moyens d’action politiques8. En ce sens, nous interrogerons la manière dont ces fonctions sont mobilisées par les recueils et nous nous demanderons dans quelle mesure celles-ci peuvent se maintenir, partiellement ou non, mais aussi évoluer à travers les changements de contexte caractérisant l’après-Fronde.

3De ce point de vue, l’impression Foppens présente l’intérêt d’avoir été rapidement ressaisie par l’espace du manuscrit, conséquence partielle de l’interdiction du livre obtenue par La Rochefoucauld dès 1662, ce qui n’empêchera pas, d’ailleurs, au moins dix-huit éditions de voir le jour avant la mort du mémorialiste. Or cette mise en concurrence des imprimés et des manuscrits permet d’éclairer l’évolution des usages des pamphlets : à travers elle, le recueil Foppens a en effet fonctionné comme une invitation à rechercher, collectionner, archiver, diffuser et commenter les mazarinades après la Fronde, ce dont témoigne la physionomie changeante du recueil dans les quelque soixante-dix manuscrits du xviie siècle qui nous sont parvenus, et qui sont autant de variations sur l’imprimé, de réécritures éditoriales du recueil initial9. Pour en éclairer les enjeux en tenant compte des questions qui précèdent, une approche socio-politique des pratiques pamphlétaires doit donc, nous semble-t-il, être mobilisée à côté d’une histoire des formes et des techniques polémiques. C’est ce que nous tâcherons de faire en interprétant libéralement la notion de territoires qui nous est proposée, comme espaces politiques, sociaux, critiques, et en nous intéressant successivement à la mise en recueil, à la transmission et à la lecture des mazarinades dont témoignent les multiples incarnations du volume Foppens.

Constituer une mémoire de la Fronde : politiques de la mise en recueil

4Les débuts du règne personnel de Louis XIV voient se mettre en place plusieurs historiographies concurrentes de la guerre civile, contexte dans lequel il faut situer le recueil Foppens et les questions soulevées par son énonciation éditoriale, à la croisée de trois logiques étroitement liées. On observe d’abord à l’œuvre une logique de librairie : avec un sens très sûr du goût des lecteurs, les ateliers Foppens s’étaient spécialisés dans l’impression de textes historiques et politiques, souvent à caractère scandaleux, leur catalogue comptant par exemple l’Histoire amoureuse des Gaules, imprimée peu après les déboires de Bussy-Rabutin en 1665, ou encore le Bouclier d’État de Lisola, imprimé en 166710. Publier des Mémoires encore inédits, de surcroît rédigés par l’un des principaux frondeurs, a donc pu apparaître au libraire comme une occasion de réaliser une opération fructueuse. Mais, ces Mémoires étant alors trop fragmentaires pour alimenter à eux seuls un volume et former un récit suivi de la Fronde, une autre logique, de nature historiographique, a pu intervenir pour assurer à l’ensemble une cohérence chronologique et thématique. Majoritairement écrites pendant la Fronde, les pièces intercalaires rassemblées ici pour compléter les fragments de La Rochefoucauld permettent de couvrir ainsi les troubles de la régence, depuis la chute des Importants, évoqués par les Mémoires de La Châtre, jusqu’à la chute de Condé. La volonté de former un ensemble cohérent chronologiquement peut expliquer qu’aient été mises bout à bout des mazarinades de statuts très divers, et ce, d’abord au point de vue de leur publication. On y trouve en effet d’apparents inédits, comme l’anonyme Guerre de Paris, récit du blocus de la capitale qu’on peut dater du début de l’hiver 1650, parfois attribué à un proche de Condé, Louis Ardier de Vineuil, frère d’un président à la Chambre des comptes. Ce fragment resté confidentiel pendant la Fronde est juxtaposé à des textes mieux connus, comme le traité du 24 janvier 1652, dont il subsiste de nombreuses copies manuscrites, imprimé ici sous le titre : Articles et conditions dont S. A. R. et Monsieur le Prince sont convenus pour l’expulsion du cardinal Mazarin, en conséquence des déclarations du Roi, et des arrêts des parlements de France. À côté de ces pièces, on rencontre également des mazarinades plus largement diffusées et qui circulaient toujours au moment où Foppens mit le recueil sous presse. Tel est le cas de la Retraite de Monsieur de Longueville en son gouvernement de Normandie pendant la guerre de Paris, libelle de Saint-Évremond datant sans doute de la fin de l’hiver 1649 et si apprécié de Mazarin qu’il se le faisait lire encore peu avant sa mort11. Le recueil contient aussi l’Apologie ou défense de Monsieur le duc de Beaufort contre la Cour, la noblesse et le peuple, du même auteur, rédigée (peut-être en collaboration) en août 1650, dont on sait, par la police du livre, qu’elle se vendait toujours à Paris au début des années 166012. Si les mazarinades du recueil diffèrent entre elles par l’ampleur de leur circulation préalable, elles ne sont pas moins hétérogènes d’un point de vue générique et stylistique : ainsi la verve satirique de Saint-Évremond dans les pamphlets qui précèdent est-elle très éloignée de la rhétorique judiciaire de Mazarin dans sa lettre à Brienne, rédigée entre mi-septembre et début octobre 1651, durant le premier exil du cardinal (autre texte qui demeura confidentiel pendant la Fronde). Foppens a donc pu chercher à tirer profit du goût du public pour les mazarinades sous toutes leurs formes, intérêt attesté bien au-delà du contexte frondeur. Mais à côté des motivations commerciales de l’imprimeur et des logiques historiographiques, cette disparate interroge un troisième aspect de l’élaboration du recueil, plus problématique, celui de sa cohérence idéologique éventuelle. Cette question est liée à une responsabilité éditoriale volontairement brouillée par le paratexte. Entre ellipse et lieu commun, l’avis liminaire du libraire ne mentionne en effet, au sujet des premiers Mémoires, qu’une « copie fort mal écrite qu’un de [ses] amis [lui] avait envoyée de France13 » ; le même avis mentionne encore l’adjonction tardive des Articles et de la lettre de Mazarin, sans rien dire de l’Apologie ni de la Retraite. Plusieurs hypothèses concernant la genèse du recueil ont pu être évoquées par les contemporains, suggérant notamment le rôle possible des comtes de Brienne dans la constitution du volume. Tout en défendant la mémoire du défunt cardinal, leur protecteur de jadis, il pouvait s’agir, pour ces victimes du remaniement du Conseil en 1661, de rappeler des temps troublés que la propagande royale tâchait alors de faire oublier : ce faisant, le recueil aurait permis de souligner le pouvoir d’une lignée d’officiers, à travers le pouvoir symbolique d’une archive. Quoi qu’il en soit de ces hypothèses, qu’il n’est pas possible de développer ici14, il nous semble néanmoins que, d’un point de vue idéologique, le recueil Foppens recrée à distance la scène polémique de la Fronde, mais en en faussant le jeu : toutes les places y sont en effet occupées simultanément par les voix antagonistes des différents partis, dans un espace polémique ainsi saturé et orienté vers la victoire de la cour. Cousin éloigné du Mascurat de Gabriel Naudé, le recueil paraît, en ce sens, fonctionner comme une méta-mazarinade, détachant des actions polémiques de leur contexte originel pour les réinscrire dans un cadre qui en montre la vanité, le mot de la fin revenant, en apparence du moins, à Mazarin. La mise en recueil n’est donc ni aléatoire, ni neutre : elle produit des effets idéologiques par le fait même de sélectionner une archive pamphlétaire susceptible d’alimenter la première historiographie de la Fronde et d’orienter le discours politique sur la crise de la régence.

5Or précisément parce que ce discours implicite est assumé par la forme du recueil, les contemporains ont pu moduler l’un en modifiant l’autre : le recueil devient alors un espace modulaire et reconfigurable à l’envi, d’une manière qui rappelle les mazarinades pages de titre qu’a étudiées Mathilde Bombart et qui sont autant de promesses de « recueils potentiels15 ». Notons que cette variabilité est inscrite dans les imprimés mêmes, puisque ce que nous nommons par simplification le recueil Foppens connut, entre 1662 et 1688, de nombreuses éditions et contrefaçons, modifiant l’ordre ou la présence des pièces initiales. Mais ces possibilités de recomposition du recueil se trouvent amplifiées, dans l’espace du manuscrit, par la facilité avec laquelle une partie de l’énonciation éditoriale peut être captée par les divers acteurs mobilisés tour à tour (commanditaires, scribes, relieurs, vendeurs, possesseurs et annotateurs successifs). Dans cette perspective, il serait intéressant d’étudier les choix éditoriaux dont témoignent le découpage interne des volumes et les titres retenus pour les différentes pièces, mais nous nous concentrerons ici sur l’insertion, dans les recueils manuscrits, de mazarinades qu’on ne trouvait pas dans les imprimés. Plusieurs effets idéologiques peuvent résulter de ces ajouts, venant renforcer ou corriger le dispositif Foppens, lequel, nous l’avons vu, semblait favorable à Mazarin. Dans le premier cas de figure, par exemple, un volume ayant appartenu à Denis Feydeau de Brou (1633-1691), intendant à Montauban, puis à Rouen et président au Grand Conseil, se referme sur une réponse de Brienne aux Mémoires de La Châtre, réponse qui vante l’action de la cour tout en faisant écho à la lettre apologétique de Mazarin16. Bien souvent, au contraire, l’ajout de mazarinades permet de souligner telle ou telle sensibilité frondeuse dans les recueils recomposés. L’action parlementaire, par exemple, est mise en avant dans un volume des portefeuilles d’Antoine Lancelot, où une copie du recueil voisine avec divers journaux du Parlement pour les années 1647-1648, un récit des affaires parlementaires depuis l’arrestation de Broussel jusqu’à la déclaration royale du 24 octobre, suivi d’un discours de Molé à cette occasion17. Plus radicalement, un manuscrit estampillé aux armes du duc d’Orléans accueille une copie de la Requête des trois états présentée à Messieurs du Parlement (1648), mazarinade si calomnieuse envers le principal ministre que son imprimeur avait été banni par le Châtelet18. Dans une optique différente, pour la défense de la première Fronde, avec une hostilité certaine envers Mazarin comme envers Condé, plusieurs recueils incorporent Les Intrigues de la paix et les négociations faites à la Cour par les amis de Monsieur le Prince, depuis sa retraite en Guyenne jusques à présent, une mazarinade de l’été 1652 attribuable au cardinal de Retz19. Enfin, d’autres volumes permettent de donner plus de poids au parti de Monsieur le Prince : ainsi dans ce manuscrit de la bibliothèque Sainte-Geneviève, où une mazarinade rapporte le succès des troupes condéennes au passage du pont de Mantes, en mars 165220. Un tel rééquilibrage se poursuit d’ailleurs lorsqu’après la mort de Condé, le recueil entre de nouveau dans le circuit de la librairie avec les éditions attribuées à La Houssaye : celles-ci accueillent en effet, à partir de leur seconde édition en 1689, un pamphlet intitulé le Manifeste de Monsieur le prince de Condé, contenant les véritables raisons de sa sortie de Paris le 6 juillet 165121, comme un antidote possible au récit défavorable des raisons qui, suivant La Rochefoucauld, avaient poussé Condé à quitter précipitamment la capitale en prenant « l’alarme sans sujet22 ».

6Pourtant, malgré nos efforts pour tâcher de faire coïncider l’orientation partisane des mazarinades et le sens politique possible de leur insertion dans les recueils, force est de constater qu’il est souvent bien difficile de reconstituer une intentionnalité éditoriale avec quelque degré de certitude. Cela est dû tant à la nature des pamphlets qu’à l’histoire complexe des manuscrits, comme en témoigne un important recueil qui ne contenait d’abord que les quatre dernières sections des Mémoires de La Rochefoucauld : dans un premier temps, ce manuscrit avait appartenu à Robert Arnauld d’Andilly, proche du mémorialiste et intimement lié à la genèse du texte ; mais il est ensuite passé dans la bibliothèque des deux premiers marquis de Surgères (issus d’une branche de la famille provenant du second mariage de François Ier de La Rochefoucauld), et c’est durant la vie de ces personnages plus éloignés de la Fronde comme du projet des Mémoires que le texte a été relié à un fragment dissonant évoquant l’arrestation de Broussel dans une optique, semble-t-il, favorable à la vieille Fronde23. Le recueil Surgères présente donc ce que l’on pourrait appeler un palimpseste éditorial. Au demeurant, comme le suggère cet exemple, l’orientation souvent indécidable de ces recueils modulaires tient, en partie, à l’éloignement progressif de la Fronde et à l’évolution des usages des mazarinades. Il n’est pas rare alors que des ajouts idéologiquement contradictoires se succèdent dans un même recueil, manifestant avant tout la volonté de documenter la Fronde suivant une logique historiographique. Ainsi, dans un manuscrit de la bibliothèque Sainte-Geneviève, un texte anonyme favorable à la cour, intitulé le Voyage de la Cour en Guyenne, 165024, est inséré juste avant la pièce condéenne déjà évoquée sur le passage du pont de Mantes. Ailleurs, une mazarinade datant de début août 1652, Le Récit du duel déplorable entre messieurs le duc de Beaufort et de Nemours 25, vient interrompre le texte de La Rochefoucauld pour le compléter, non sans le rappeler ainsi à sa nature fragmentaire et donc fragmentable dans l’espace du recueil. Or l’indétermination idéologique de ces recueils recomposés induit, pour les mazarinades qui les composent, un devenir archive plutôt qu’une récupération politique. Tout se passe en effet comme si ces diverses pièces étaient perçues comme relevant d’une archive frondeuse modulaire, dans laquelle puiser par opportunisme collectionneur et par intérêt historique plus que par choix idéologiques : non sans évoquer les pratiques sérielles, chères aux mondains et à La Rochefoucauld, cette approche permet aussi de mettre l’accent sur la transmission des libelles, sur laquelle nous nous pencherons maintenant.

Transmettre les mazarinades : trajectoires du recueil Foppens

7En sélectionnant une archive frondeuse, les recueils manuscrits s’attachent également à la transmission de celle-ci : l’étude de leur diffusion au sein d’espaces socio-politiques différents permet ainsi d’éclairer les fonctions du recueil et l’usage des pamphlets dont il est constitué. Pour les anciens frondeurs, notamment auteurs ou commanditaires des textes recueillis, il pouvait s’agir de transmettre une mémoire de la crise politique auprès d’une lignée ou d’une clientèle donnée. L’entourage de La Rochefoucauld en offre un bon exemple : comme les marquis de Surgères déjà évoqués, les Liancourt conservaient une copie manuscrite des Mémoires à caractère authentique, mais aussi, semble-t-il, les exemplaires d’une première impression supprimée ; des copies manuscrites plus proches du recueil imprimé par Foppens furent entre les mains de François de Gelas (1640-1721), lieutenant général de Guyenne, lui aussi lié aux La Rochefoucauld26, et de Melchior de Polignac (1611-1699), aumônier d’Anne d’Autriche et petit-fils de Madeleine, fille de François III de La Rochefoucauld27. La diffusion de ces « papiers de famille28 » est ici liée à la constitution et à la transmission d’une vérité historique conçue comme quasi patrimoniale. Mais au-delà de ce cercle familial, des copies reflétant un état des Mémoires de La Rochefoucauld postérieur aux imprimés furent également procurées aux principaux tenants du parti des princes, tel le comte de Chavigny29 ou Condé lui-même, qui, à bien des égards, peut apparaître comme le destinataire privilégié du texte à un moment où La Rochefoucauld se désolidarisait de son ancien maître ; or une copie provenant de la bibliothèque de Condé censure systématiquement les passages qui lui sont hostiles (comme celui, déjà évoqué, concernant son départ précipité de Paris en juillet 165130). Tout indique donc ici, autour de La Rochefoucauld et du clan Condé, une diffusion et une réception politique du recueil : l’écriture mémorialiste comme le réemploi des mazarinades ont bien une dimension polémique, puisqu’il s’agit de fabriquer un passé utile ou de continuer à défendre, au présent, une vision particulière de la Fronde.

8Pourtant, la circulation du recueil Foppens s’inscrit plus largement dans une sociabilité lettrée, de moins en moins liée aux milieux frondeurs à mesure que l’on s’éloigne de la guerre civile. Partons de l’exemple paradoxal de La Rochefoucauld, qui mobilisa pleinement cet espace lettré en s’opposant au recueil Foppens, ce qui ne fit qu’amplifier la diffusion de celui-ci. Ainsi le mémorialiste transmit-il un manuscrit de travail partiel à Arnauld d’Andilly en l’invitant, selon le Segraisiana, à se pencher « particulièrement sur la pureté de la langue31 » et il en offrit une copie complète à Henri de La Chapelle-Bessé, secrétaire de la « Petite Académie » et auteur du discours imprimé en tête de la première édition autorisée des Maximes32. Première lectrice de celles-ci, Mme de Sablé le fut également des Mémoires, et l’on trouve une copie incomplète du recueil Foppens, avec deux mazarinades, dans les portefeuilles de son secrétaire, le docteur Vallant33. Le poète et fabuliste Gaspard Fieubet de Naulac (1626-1694), ami et imitateur de La Fontaine, en possédait également une copie34. Ici, l’espace des manuscrits reflète d’ailleurs celui des imprimés : la Bibliothèque nationale possède ainsi un exemplaire de l’édition de 1672 annoté par Pierre-Daniel Huet35 ; et l’on rêve de pouvoir retrouver cet exemplaire d’une première édition que l’académicien Segrais aurait fait « brocher avec du papier blanc entre chaque page, où, écrit-il, j’ai fait des corrections nécessaires en plusieurs endroits, suivant l’intention de Monsieur de La Rochefoucauld36 »… Ces exemples illustrent donc un mode de circulation du recueil détaché d’injonctions politiques, et témoignant d’une logique de valorisation essentiellement esthétique. Dans cette optique, les pièces du recueil Foppens bénéficient d’ailleurs, dans plusieurs volumes manuscrits, d’une première critique d’attribution sur des bases stylistiques, notamment pour les mazarinades de Saint-Évremond37. Affinant ces éléments d’attribution, les éditions de 1688-1689, auxquelles La Houssaye a peut-être contribué, mettront également en valeur certaines mazarinades, tout particulièrement la Guerre de Paris, en comparant leur écriture au style de Tacite, par un ensemble de notes et de citations latines (plus nombreuses pour cette pièce, par exemple, que pour les fragments de La Rochefoucauld). Enfin, les mazarinades du recueil font l’objet d’une quête des meilleures versions disponibles : plusieurs manuscrits reproduisent ainsi une version de l’Apologie de Beaufort enrichie de commentaires marginaux qui ne figuraient pas dans les imprimés bruxellois38. Ce dernier point permet d’illustrer les réflexes collectionneurs présidant ici à la sélection et à la transmission des libelles de la Fronde.

9La circulation des mazarinades semble relever toujours davantage d’une telle perspective à mesure que l’on avance dans le règne personnel de Louis XIV, préfigurant le collectionnisme du xviiie siècle. Ainsi notre recueil est-il recherché et enrichi par des hommes qui n’ont pas connu la guerre civile et qui s’inscrivent au cœur de l’administration louis-quatorzienne : c’est le cas du bibliophile Nicolas-Joseph Foucault (1643-1721), intendant de la généralité de Caen, membre de l’académie de cette ville ainsi que de l’Académie des inscriptions et belles-lettres39, ou encore de Martin Billet de Fanière (1675-1727), antiquaire et historien du Collège royal40. Or, dans cet espace collectionneur, le critère de valorisation des volumes, c’est la rareté, voire l’unicité, d’où l’intense compétition des manuscrits avec les imprimés, mais aussi des manuscrits entre eux : la copie Clairambault renvoie ainsi à une édition du recueil de 166941, tandis que l’exemplaire déjà évoqué du bibliophile Antoine Lancelot est comparé au manuscrit d’un certain « Monsieur le duc de S. S. », manuscrit lui-même comparé à une impression de 166442. L’intensification de la circulation des recueils repose donc paradoxalement sur la mise en scène de leur rareté. Dans l’importante bibliothèque du magistrat bourguignon Jean Bouhier, augmentée au sortir de la Fronde par son fils et suivant l’inventaire qu’en a dressé son petit-fils, on trouve un exemplaire manuscrit du recueil Foppens donné comme « différant en quelques choses des imprimés43 ». Cette optique s’applique tout particulièrement à l’œuvre de La Rochefoucauld : au premier feuillet du manuscrit d’Arnauld d’Andilly, une note attribuée au marquis de Surgères signale ce volume comme un « manuscrit infiniment curieux, étant original et le seul44 ». Sur la base de cette quasi-mystique du texte authentique, le marquis de Surgères a d’ailleurs transformé ce qui était originellement un manuscrit de travail parmi d’autres en manuscrit d’apparat, ajoutant une mazarinade, nous l’avons vu, mais aussi seize portraits historiques gravés par Balthazar Moncornet. La performance de ce manuscrit comme incarnation de l’authenticité est également intéressante par ses effets à long terme. Car le libraire Renouard, son nouvel acquéreur, a poursuivi ce processus de mise en valeur du volume en s’en servant comme texte de base pour la première édition moderne des Mémoires de La Rochefoucauld, qu’il imprima en 1804, écartant l’ensemble des mazarinades (mise à part la Guerre de Paris encore considérée comme l’œuvre du mémorialiste). Le manuscrit retrouva alors le chemin de la presse, au bout d’une chaîne de valorisation qui, de critères idéologiques, s’est progressivement déportée vers des critères esthétiques, dégageant la singularité d’une écriture mémorialiste d’une part et, de l’autre, les caractéristiques d’un corpus pamphlétaire spécifique.

Lire les mazarinades : usages critiques de l’archive frondeuse

10Comme les manipulations éditoriales du recueil que nous avons observées plus haut, ses modes de diffusion et de valorisation témoignent donc d’un recul progressif de l’utilisation polémique des mazarinades au cours du demi-siècle qui suivit la Fronde. Mais ce phénomène accompagne l’émergence de nouveaux usages des pamphlets, que nous souhaitons évoquer pour finir. À mesure que s’estompent les autres logiques de mise en recueil, le principe de sélection qui s’impose graduellement repose sur la proximité des pièces choisies avec ce que l’on pourrait nommer, dans une perspective stylistique ou esthétique, une manière frondeuse, fondée sur l’ironie, la satire, la parodie. C’est ce dont témoigne le discours éditorial ou méta-poétique des recueils, lorsqu’il existe. Ainsi le volume du chancelier Séguier met-il en avant la Retraite de Monsieur de Longueville comme une « pièce ironique45 », tandis que la copie du marquis de Fontanieu (1694-1767) identifie, derrière l’Apologie de Beaufort, l’auteur de la Comédie de l’Académie46, insérant de ce fait le pamphlet satirique dans une pratique plus large des genres comiques. L’étoffement des recueils peut alors se comprendre comme l’illustration d’un mode d’écriture, les pièces semblant parfois s’appeler l’une l’autre, comme cette chanson satirique du baron de Verderonne, évoquée dans l’Apologie de Beaufort et insérée à la suite de cette mazarinade dans un recueil de la bibliothèque Sainte-Geneviève47. De tels ajouts illustrent un goût non pas tant pour un genre déterminé que pour un traitement particulier de la matière historique. C’est pourquoi les mazarinades voisinent ici avec des histoires secrètes scandaleuses, comme l’Histoire des amours du Grand Alcandre, insérée dans une copie de notre recueil conservée dans le fonds Lebaudy de la bibliothèque de Versailles48. On peut d’ailleurs considérer cette satire d’Henri IV attribuée à Louise-Marguerite de Lorraine, seconde femme du prince de Conti, comme une mazarinade par emprunt : elle fut en effet imprimée en pleine guerre condéenne par la veuve Guillemot, proche du duc d’Orléans. Mais des textes de facture similaire publiés après la Fronde viennent aussi s’insérer dans nos recueils : tel est le cas des Amours de Madame Royale, pièce anonyme imprimée à Paris en 1667 après avoir couru sous le manteau, que l’on trouve dans le manuscrit Séguier et qui détourne les codes de la nouvelle galante pour noircir la réputation de la sœur de Louis XIII49. Or de telles reconfigurations du recueil impliquent, nous semble-t-il, un mode de lecture spécifique : elles inscrivent les mazarinades ainsi décontextualisées dans une approche satirique et désacralisante de l’action des puissants, porteuse de leçons transhistoriques.

11En ce sens, les manuscrits encouragent une lecture comparatiste, souvent d’abord en étendant les bornes chronologiques du recueil originel pour mettre la Fronde en perspective. C’est ainsi que la copie manuscrite ayant appartenu à la famille de Mesmes est reliée à un imprimé, la « Déclaration de Louis XIII sur la régence » datant d’avril 164350, tandis qu’un volume de la bibliothèque du musée Condé se referme sur quarante feuillets consacrés aux « Motifs de la France pour la guerre d’Allemagne51 ». De tels ajouts invitent ainsi à réfléchir aux facteurs ayant contribué à la crise de la régence. Mais le recueil s’ouvre aussi à l’après-Fronde, comme dans le manuscrit Séguier où, entre l’Apologie de Beaufort et la lettre de Mazarin à Brienne, on trouve un « Journal » des négociations pour la paix des Pyrénées52, non, d’ailleurs, sans une forme d’ironie éditoriale si l’on considère les arguments fournis aux frondeurs par la continuation de la guerre contre l’Espagne. On ne sait si un principe similaire s’applique au recueil de la bibliothèque de la Sorbonne dans lequel les pièces de l’ensemble Foppens, souvent critiques au sujet des opérations militaires des frondeurs, sont chapeautées par les traités « De l’art militaire, du sieur de La Prugne », « De la milice moderne, de Bernardini Imbotti », et « Du parfait capitaine, de Monsieur de Rohan53 ». Il n’en reste pas moins que de telles œuvres, étrangères aux mazarinades, représentent autant d’entrées thématiques possibles dans l’archive frondeuse. Le lecteur est invité à considérer le recueil non plus sous l’angle polémique des différents partis s’affrontant à coup de libelles, mais en posant la question surplombante des moyens et des fins du conflit, sinon des formes du pouvoir et des modes de gouvernement. Une copie manuscrite conservée à la Bibliothèque historique de la Ville de Paris comporte ainsi une « Relation de la mort du marquis de Monaldeschi54 », qui circulait depuis 1657 et qui posait le problème de l’arbitraire princier et du coup d’État, à l’occasion de l’assassinat, par la reine Christine de Suède, de son ancien favori. Dans un même registre, signalons ce volume où le recueil originel a été relié à l’Histoire des favoris français depuis Henri II jusqu’à Louis XIII55. Parfois attribuée, sans certitude, au marquis de Beauvais-Nangis, cette histoire imprimée en 1665 engage à considérer, sur la longue durée, la question de la faveur et du ministériat, si fréquemment travaillée par les pièces frondeuses.

12Les manières de lire qu’appellent de telles recontextualisations semblent confirmées par les traces de lecture conservées dans les recueils, sur lesquelles nous nous pencherons pour finir. Certes, il n’est pas rare de trouver des commentaires polémiques parmi l’annotation des volumes, notamment dans les années qui suivent les premières impressions bruxelloises. On peut songer ici à la célèbre critique inscrite par le premier duc de Saint-Simon, père du mémorialiste, en marge d’un passage le concernant dans une série d’exemplaires imprimés de notre recueil (« l’auteur en a menti » !), geste grâce auquel le rival des La Rochefoucauld aurait tâché de réinsérer l’imprimé immuable dans l’espace du manuscrit corrigeable, donc instrumentalisable56. Néanmoins, la majorité des marginalia qui nous sont parvenus signalent une prise de distance par rapport aux polémiques de la Fronde. Un certain Vignon résume ainsi sa vision de la crise politique en quelques mots, en marge d’un passage de l’Apologie de Beaufort : « La France était au pillage à cause du bas âge du Roi et chacun voulait commander57. » La condamnation de la Fronde va ici de pair avec une conception de la causalité historique fondée sur les passions et sur l’intérêt, saisie anthropologique que développera d’ailleurs l’annotation tacitiste des éditions dites La Houssaye, lesquelles, en 1688 et 1689, vont à leur tour refondre et amplifier le recueil Foppens. En ce sens, dans un manuscrit remarquable ayant appartenu à la famille Gelas, une seconde main différente de celle du copiste a reporté dans les marges une sélection partielle des notes de l’édition de 1688, et ce processus de sélection illustre en lui-même l’évolution de la lecture du recueil. Certes, il est clair que l’annotateur du manuscrit Gelas apprécie les bons mots des éditions La Houssaye, qui rappellent la manière ironique évoquée plus haut. Ainsi, dans un passage de la Guerre de Paris, lors d’une séance houleuse au Parlement, le président Viole évoque maladroitement le Saint-Esprit, ce qui suggère aux éditeurs de 1688 cette remarque reprise par notre annotateur : « en ce rencontre, le Saint-Esprit ne répandit ses lumières ni sur Viole ni sur Monsieur le Prince, quoi que l’un et l’autre possèdent une langue de feu58. » Ici, l’ironie n’est donc pas (ou n’est pas seulement) une technique de dévoilement des arcanes du pouvoir dans une optique tacitiste ; on notera d’ailleurs que les citations de Tacite en latin, présentes dans les éditions La Houssaye, ont été systématiquement éliminées par l’annotateur du manuscrit Gelas ; le commentaire ironique, dans les notes sélectionnées, semble bien plutôt servir une analyse de type moraliste des motifs et des passions des acteurs de l’histoire59. Le conseiller Longueil, par exemple, était décrit dans la Guerre de Paris comme « l’oracle de la Fronde tant qu’il a été constant dans son parti », passage qu’une note de 1688 reprise par l’annotateur du manuscrit Gelas commente de cette manière : « car il l’abandonna dès que le cardinal Mazarin lui eut promis 50 000 écus pour lui, et la surintendance des Finances pour le président de Maisons son frère, tant est vraie la maxime de Tacite que, dans les guerres civiles, l’argent est plus puissant que les armes60. » Grâce à la comparaison avec d’autres guerres civiles et à la généralisation offerte par la maxime, la lecture moraliste cherche finalement moins ici à éclairer la Fronde en elle-même que les ressorts humains au fondement de la crise politique.

13À travers leurs modulations éditoriales, leur diffusion et leur réception, les avatars manuscrits du recueil Foppens nous paraissent donc offrir un prisme intéressant pour étudier le devenir des mazarinades après la Fronde. Si, sous certaines conditions, les mazarinades peuvent retenir ou recouvrer une partie de leur force agonistique originelle, elles contribuent aussi, dans le cadre du recueil, à l’avènement de nouvelles approches du passé. La mise en recueil a certes pu être régie initialement par une intention polémique, amplifiée ou corrigée par des configurations différentes, au service de la cour ou des anciens frondeurs. En sélectionnant et en diffusant une archive frondeuse, il s’agissait d’encadrer la première historiographie de la guerre civile, de fabriquer un passé utile. Mais le flottement de l’énonciation éditoriale dans les recueils ainsi que leurs modes de circulation et de valorisation libérés graduellement de toute dimension partisane témoignent d’une mise à distance de la scène polémique de la Fronde. S’il faudrait confronter ces conclusions provisoires à un plus large corpus de recueils de libelles, il nous semble néanmoins que les lecteurs des mazarinades qui continuent de circuler après la guerre civile se désintéressent progressivement des stratégies polémiques ou historiographiques au profit de nouveaux usages du passé frondeur, alimentant une réflexion sur la crise politique et sur les modes de gouvernement, influencée notamment par une optique moraliste. Ce faisant, l’exemple des recueils de mazarinades montre l’intérêt de la mobilisation conjointe d’une étude des formes polémiques et d’une histoire des pratiques socio-politiques de l’écrit pour éclairer l’évolution de la réflexion politique dans cette période charnière. Dans cette perspective, étudier le devenir des libelles dans l’après-Fronde permet d’éclairer différemment les questions évoquées en introduction concernant la nature et les fonctions des mazarinades. Car c’est en vertu de qualités présentes dès leur conception mais exploitées par diverses opérations postérieures à la Fronde que les mazarinades mises en recueil pourront favoriser, auprès d’un lectorat toujours plus large, un usage critique du passé. Ainsi, tant par la forme originelle de leurs éléments constitutifs que par le savoir-faire de leur mise en volume, de leur diffusion et de leurs lectures, ces recueils contribuent – telle est du moins notre hypothèse – à l’évolution des cultures politiques à la fin du xviie siècle61.

Notes

1 Comme en témoignent notamment, dans ce volume, les contributions de Laura Bordes et de Myriam Tsimbidy.

2 Voir Dinah Ribard, « Savoir et savoir-faire du libelle de la Fronde. Le travail de l’événement », dans Usages et stratégies polémiques en Europe (xive-premier xviie siècles), dir. Marie Bouhaïk-Gironès, Tatiana Debbagi Baranova et Nathalie Szczech, Bruxelles, Peter Lang, 2016, p. 359-374, et Mathilde Bombart, « La Fronde en recueils », Pratiques et formes littéraires, no 18 (« Recueils factices. De la pratique de collection à la catégorie bibliographique », dir. Mathilde Bombart), 2021, mis en ligne le 29 mars 2022, consulté le 6 octobre 2022. DOI : 10.35562/pfl.374

3 Voir par exemple Christophe Vellet, « Les mazarinades à l’affiche ? Armand d’Artois et la collection de la Bibliothèque Mazarine », Histoire et civilisation du livre, no 12 (« Mazarinades, nouvelles approches », dir. Stéphane Haffemayer, Patrick Rebollar et Yann Sordet), 2016, p. 51-67.

4 La page de titre de ce que l’on considère, après Jean Marchand, comme la première impression du recueil (in-12 de 387 pages) portait : Mémoires de M. D. L. R. contenant : Les Brigues pour le gouvernement à la mort de Louis XIII. Guerre de Paris. Retraite de Monsieur de Longueville en Normandie. Récapitulation ou Abrégé de tout ce que dessus, avec l’emprisonnement des trois Princes. Ce qui s’est passé depuis la prison des Princes jusqu’à la Guerre de Guyenne. Guerre de Guyenne avec la dernière de Paris, etc. Auxquels sont ajoutés les Mémoires de M. de La Châtre, avec la fausse adresse suivante : à Cologne, chez Pierre van Dyck, 1662 (BnF, RES-LB37-173). Dès cette date, de nombreuses impressions et contrefaçons se succédèrent : voir Jean Marchand, Bibliographie générale raisonnée de La Rochefoucauld, Paris, L. Giraud-Badin, 1948, p. 15-105.

5 Nous nous permettons de renvoyer à notre édition des Mémoires, Paris, Classiques Garnier, 2022, 2 vol., t. I, p. 81-96.

6 Voir par exemple Kathrina Ann LaPorta, Performative Polemic: Anti-Absolutist Pamphlets and their Readers in Late Seventeenth-Century France, Newark, University of Delaware Press, 2021.

7 Robert Descimon et Christian Jouhaud, « La Fronde en mouvement : le développement de la crise politique entre 1648 et 1652 », xviie siècle, no 145, 1984, p. 305-322 (ici, p. 320-321).

8 Voir Christian Jouhaud, Mazarinades. La Fronde des mots, Paris, Aubier, [1985] 2009, p. i-xvii, p. 37-40, et Hubert Carrier, Le Labyrinthe de l’État, Paris, Honoré Champion, 2004, p. 13-16, ainsi que, dans ce volume, la contribution de Pierre Ronzeaud concernant l’historiographie de ces débats.

9 Pour une description des manuscrits, voir La Rochefoucauld, Mémoires, éd. cit., t. II, p. 1018-1109.

10 Sur François Ier Foppens, actif depuis 1637 et décédé en 1686, voir par exemple Auguste Vincent, « La typographie bruxelloise au xviie siècle et au xviiie siècle », dans Histoire du livre et de l’imprimerie en Belgique des origines à nos jours, Bruxelles, Éditions du Musée du livre, 1923-1934, 6 vol., t. IV (1926), p. 9-41 (notamment, p. 26-30).

11 Selon le témoignage de l’auteur, confié à Desmaizeaux et cité par René Ternois dans Saint-Évremond, Œuvres en prose, Paris, Didier, 1962, 4 vol., t. I, p. 29 (sur ce texte plus généralement, voir t. I, p. 27-38).

12 Sur cette mazarinade, voir Saint-Évremond, éd. cit., t. I, p. 59-76. De nombreuses copies attestent de sa diffusion manuscrite, y compris avant l’impression bruxelloise : outre le texte de base utilisé par René Ternois (Arsenal, ms. 5419) et certains manuscrits mobilisés pour l’établissement des variantes, il en existe plusieurs exemplaires indépendants des copies du recueil Foppens (BnF, ms. Cinq cents de Colbert 499 et ms. Clairambault 505). Un manuscrit de l’Apologie circulant sous le manteau fut saisi à Paris en 1660 : Alain Mothu, « Une liste d’ouvrages saisis, 1660-1718 », La Lettre clandestine, no 4, 1995, p. 565-575, ici p. 567.

13 « Le libraire au lecteur », avis qui apparaît dans la seconde édition (n. p.).

14 Voir La Rochefoucauld, Mémoires, éd. cit., t. I, p. 74-81, p. 89 et p. 94.

15 Mathilde Bombart, « La Fronde en recueils », art. cit., §. 10.

16 Bibliothèque de l’Arsenal, ms. 3885, fo 329ro-358ro. On retrouve cet ajout dans d’autres copies manuscrites du recueil Foppens : Bibliothèque historique de la Ville de Paris, ms. 570, f122ro-154vo et bibliothèque Sainte-Geneviève, ms. 790, fo 55ro-67ro.

17 BnF, ms. n.a.f. 9638, fo 1ro-139vo et fo 158ro-172vo.

18 BnF, ms. fr. 13725, fo 31ro-37vo, copie de Moreau 3494 (reprise dans Moreau 1478 ; cf. bibliothèque Mazarine, M 14766).

19 Bibliothèque Mazarine, ms. 16135, fo 260ro-266ro (seule la seconde partie de cette mazarinade est copiée ici, soit la Suite véritable des Intrigues de la paix, datant de mi-août 1652) : Moreau 1725 (une seule entrée pour les deux parties). Pour l’attribution de ces pamphlets, voir Myriam Tsimbidy, Le Cardinal de Retz polémiste, Saint-Étienne, Publications de l’université de Saint-Étienne, 2005, p. 51-57. Cf. BnF, ms. n.a.f. 9638, fo 338ro-341vo.

20 Bibliothèque Sainte-Geneviève, ms. 789, fo 177ro-182vo. Il s’agit de Moreau 3191 : Relation véritable contenant tout ce qui s’est fait et passé à Mantes à l’arrivée des troupes conduites par M. le duc de Nemours, avec la marche de ladite armée, Paris, Jacob Chevalier, 1652, 8 p.

21 Mémoires de la minorité de Louis XIV, Villefranche, Jean de Paul, 1689, 2 vol., t. II, p. 345-370, copie de Moreau 2372 (voir aussi Moreau 3942 et bibliothèque Mazarine, M 15258).

22 Une « faute » jugée « ridicule », selon les premières versions des Mémoires (La Rochefoucauld, Mémoires, éd. cit., t. II, p. 838-839).

23 Bibliothèque municipale de Versailles, ms. L. 139 (ms. Lebaudy in-fol. 66), fo 118ro-127vo (ce récit de la journée du 27 août 1648, dont il manque le titre et les premiers feuillets, est attribué par erreur à Bassompierre dans une note manuscrite au début du texte).

24 Bibliothèque Sainte-Geneviève, ms. 789, fo 183ro-195ro.

25 BnF, ms. fr. 13725, fo 248vo-251vo : Moreau 2992 et bibliothèque Mazarine M 13271.

26 BnF, ms. fr. 23316.

27 Bibliothèque Mazarine, ms. 16135.

28 Sur cette dimension des écrits de soi, voir Sylvie Mouysset, Papiers de famille. Introduction à l’étude des livres de raison (France, xve-xixe siècle), Rennes, Presses universitaires de Rennes, 2007 et Yohann Deguin, L’Écriture familiale des Mémoires. Noblesse. 1570-1750, Paris, Honoré Champion, 2020.

29 La Rochefoucauld, Mémoires, éd. cit., t. II, p. 1107-1108.

30 Bibliothèque du château de Chantilly, musée Condé, ms. 937 (pour l’exemple cité, f67ro).

31 Ana en partie compilé par l’antiquaire et orientaliste Antoine Galland à partir d’entretiens avec Segrais (Paris, Compagnie des Libraires, 1721, 3 vol., ici t. I, p. 156).

32 Bibliothèque municipale de Versailles, ms. L. 142 (ms. Lebaudy in-4o 42).

33 BnF, ms. fr. 17492.

34 Bibliothèque de l’Institut, ms. 344.

35 BnF, 8-LB37-174 (E).

36 Segraisiana, op. cit., p. 159.

37 Voir BnF, ms. Cinq cents de Colbert 47, ainsi que le manuscrit Chavigny.

38 Bibliothèque de l’Arsenal, ms. 3565 ; bibliothèque de l’Institut, ms. 342, ms. 344 et ms. 346 ; BnF, ms. fr. 5822, ms. fr. 10457 et ms. fr. 17470.

39 Bibliothèque de l’Institut, ms. 345.

40 BnF, ms. fr. 24502.

41 BnF, ms. Clairambault 436.

42 BnF, ms. n.a.f. 9638, fo 232ro et fo 322ro.

43 BU Historique de Médecine de Montpellier, ms. H 19, p. 13, décrivant le manuscrit Bouhier (BnF, ms. fr. 23317).

44 Bibliothèque municipale de Versailles, ms. L. 139 (ms. Lebaudy in-fol. 66).

45 BnF, ms. fr. 17470, fo 91ro, mention marginale d’une autre main que celle du copiste.

46 BnF, ms. fr. 10457, fo 208vo.

47 Bibliotheque Sainte-Geneviève, ms. 789, fo 176vo.

48 Bibliothèque municipale de Versailles, ms. L. 233 (ms. Lebaudy in-fol. 58), fo 230ro-274ro.

49 BnF, ms. fr. 17470, fo 287ro-296vo.

50 BnF, ms. fr. 4146, en tête du volume.

51 Bibliothèque du château de Chantilly, musée Condé, ms. 936, f133ro-173vo.

52 BnF, ms. fr. 17470, fo 211ro-278vo : ce Journal sera imprimé dans l’Histoire du traité de la paix conclue sur la frontière d’Espagne et de France entre les deux couronnes, en l’an 1659 de Galeazzo Gualdo Priorato (1606-1678), traduit par Honoré Courtin, Cologne, Pierre de La Place, 1665, p. 129-216.

53 Bibliothèque de la Sorbonne, ms. 1336, fo 1ro-273vo : le premier ouvrage avait été imprimé en 1613, le second fut traduit en 1646 et le dernier parut en 1636.

54 Bibliothèque historique de la Ville de Paris, ms. 570, fo 354ro-366vo.

55 Bibliothèque historique de la Ville de Paris, ms. 571, fo 219ro-288ro.

56 Saint-Simon, Mémoires, éd. Yves Coirault, Paris, Gallimard, coll. « Bibliothèque de la Pléiade », 1983-1988, 8 vol., t. I (1691-1701), p. 85-86. Cf. « Note sur la maison de Saint-Simon », dans Saint-Simon, Les Siècles et les Jours. Lettres (1693-1754) et Note « Saint-Simon » des Duchés-pairies, etc., éd. Yves Coirault, Paris, Honoré Champion, 2000, p. 765.

57 BnF, ms. fr. 5822, fo 150ro.

58 BnF, ms. fr. 23316, fo 58ro. Cf. Mémoires de la minorité de Louis XIV, éd. cit., t. I, p. 252.

59 Sur cette évolution plus généralement, voir Béatrice Guion, Du bon usage de l’histoire. Histoire, morale et politique à l’âge classique, Paris, Honoré Champion, 2008, notamment p. 255-321.

60 BnF, ms. fr. 23316, fo 29vo. Cf. Mémoires de la minorité de Louis XIV, éd. cit., t. I, p. 200-201.

61 Sur l’influence des mazarinades après la Fronde plus généralement, nous nous permettons de renvoyer à notre article : « La mémoire des mazarinades : une critique politique sous Louis XIV », Revue d’histoire littéraire de la France, no 115/4, 2015, p. 933-950.

Pour citer ce document

Bruno Tribout, « Les mazarinades après la Fronde : l’exemple du recueil Foppens » dans Mazarinades et territoires,

Premier numéro

© Revue du GRHis, « Revue du GRHis », n° 1,2025

URL : http://publis-shs.univ-rouen.fr/grhis/index.php?id=143.

Quelques mots à propos de :  Bruno Tribout

Professeur à l’université d’Aberdeen, il s’intéresse aux rapports entre littérature, histoire et pensée politique à l’âge classique, notamment à partir de textes associés à la Fronde (mazarinades, Mémoires, écrits historiographiques). Il a travaillé en particulier sur Retz ainsi que sur La Rochefoucauld, dont il a édité les Mémoires (Classiques Garnier, 2022).