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Individu et société : représentation, rapports, conflits (I. Espagne)

Ce volume recueille quelques-unes des communications présentées au colloque international « Les représentations de l’individu et la société : rapports et conflits dans le monde hispanique » (Université de Rouen, les 13, 14 et 15 février 2008), sous la direction scientifique des professeurs Venko Kanev, Milagros Torres, José Antonio Vicente Lozano et Daniel Vives, avec le concours du laboratoire ERIAC, de l’École doctorale « Savoirs Critique Expertises » et du Conseil Scientifique de l’Université de Rouen. Les textes ont été recueillis par Milagros Torres et Miguel A. Olmos.

Couverture de

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Un exemple de reproduction sociale : mariage et transmission du patrimoine dans la Biscaye rurale des xviiie et xixe siècles

Sylvie Hanicot-Bourdier


Résumés

Appréhension par l’analyse des contrats de mariage et des apports dotaux des pratiques par lesquelles les paysans de la Biscaye marient leurs enfants et perpétuent le statut social de la famille, tout en assurant le maintien du patrimoine familial. Après une brève présentation de la clientèle notariale et du système successoral, nous nous intéresserons aux comportements des familles dans le processus d’alliance et aux critères de choix du conjoint. Puis nous évoquerons les transferts de patrimoine qu’occasionne le mariage d’un enfant d’un point de vue qualitatif et quantitatif.

Análisis de los contratos de matrimonio y de la dote como instrumento para aprehender las prácticas de los campesinos de Vizcaya para casar a sus hijos y perpetuar el estatus social de la familia. Tras un bosquejo del sistema sucesorio y de las funciones de los notarios, se presenta el comportamiento de las familias en los procesos de alianza y los criterios de elección de cónyuge. Se revisan después las transferencias patrimoniales ocasionadas por el matrimonio de los hijos desde perspectivas cualitativas y cuantitativas.

Texte intégral

1Le mariage et la transmission du patrimoine familial, une des pièces maîtresses de la reproduction sociale, constitueront les thèmes de cette communication.

2En situant notre recherche en Pays basque espagnol, nous souhaitons étudier une région qui se distingue par la permanence, à travers les siècles, d’une organisation communautaire basée sur la conservation des biens du lignage, conservation qui assure la stabilité et, par conséquent, la survie de la société.

3Le mariage s’accompagne souvent d’un échange de biens. Il est traditionnellement considéré comme l’un des moments importants du règlement de la dévolution patrimoniale1. En Biscaye, l’héritier de la maison ancestrale est fréquemment désigné à l’occasion de la signature de son contrat de mariage. Les ententes matrimoniales, première étape du règlement des successions, constituent la clé de voûte du système de reproduction sociale2.

4Notre propos est d’appréhender par l’analyse des contrats de mariage et des apports dotaux les pratiques par lesquelles les paysans de la Biscaye marient leurs enfants et perpétuent le statut social de la famille, tout en assurant le maintien du patrimoine familial.

5Pour mener à bien ce projet, nous avons dépouillé quarante-sept contrats de mariage rédigés entre le 27 mai 1749 et le 7 décembre 1817. Ce corpus documentaire est issu des fonds des études notariales d’Antonio de Aguirre et de José Manuel de Arostegui3 qui couvrent aux xviiie et xixe siècles une zone d’une trentaine de kilomètres autour de la ville de Guernica. Le choix de cette aire géographique et de cette période a été guidé par la volonté d’observer une société où les donations patrimoniales jouent un rôle décisif, le statut socio-économique de nos contractants reposant essentiellement sur la possession d’un capital foncier4.

6Après une brève présentation de la clientèle notariale et du système successoral, nous nous intéresserons aux comportements des familles dans le processus d’alliance et aux critères de choix du conjoint puis nous évoquerons les transferts de patrimoine qu’occasionne le mariage d’un enfant d’un point de vue qualitatif et quantitatif : Quel enfant hérite de la maison familiale ? Dans quelles conditions ? Qui constitue la corbeille des futurs ? De quels types d’avoirs sont constitués les trousseaux nuptiaux ? Telles sont les questions auxquelles nous tenterons d’apporter une réponse.

La clientèle notariale et le système successoral

7À l’exclusion de deux documents5, l’activité professionnelle de la clientèle notariale n’est jamais explicitement mentionnée. Le contenu des apports nuptiaux indique toutefois clairement que notre échantillon comprend essentiellement des paysans : quarante-deux contrats – soit près de neuf sur dix – enregistrent l’apport de propriétés rurales, de bétails, d’outils agricoles et/ou de récoltes.

8Établies à proximité des communes de Munguía et de Busturia, les transactions matrimoniales qui font l’objet de cette étude sont régies par le droit foral basque. Rappelons qu’en matière de succession deux législations coexistent dans la Biscaye des xviiie et xixe siècles. Dans les treize villas6 et la ville d’Orduña s’applique le droit civil castillan, tandis que le reste de la province7 est régi par les Fors de Biscaye8. Issus des us et coutumes, ces privilèges émanent d’une organisation sociale spécifique dont la cellule élémentaire n’est pas l’individu, incapable de se suffire, mais la famille, seule entité qui permet d’assurer la permanence de l’exploitation agricole, la perpétuité de la race par l’éducation des enfants, en même temps que l’emploi des vieillards, des faibles et des infirmes. Cette permanence est symbolisée par l’attachement de la famille à la maison. Il s’établit entre les deux une correspondance très profonde. La maison porte un nom qui affirme sa personnalité, et qui sert de patronyme aux individus qu’elle abrite. C’est également la demeure familiale qui détermine la condition sociale de ses membres9.

9Sous peine de provoquer sa propre ruine et sa désagrégation, chaque parentèle doit éviter tout ce qui peut porter atteinte à la viabilité économique de l’exploitation familiale et à la pérennité de la maison. Selon des règles successorales rigoureuses, celles de l’héritage unique et de l’indivision, le maître de maison transmet l’intégralité du patrimoine ancestral à un seul de ses descendants, héritier qu’il choisira librement parmi ses fils et ses filles sans distinction d’âge, ni de sexe10. Au maintien du bien commun, du bien de famille, on sacrifie donc les droits successoraux des cohéritiers. Cet usage est en contradiction avec le droit civil castillan qui établit l’égalité des droits héréditaires de tous les enfants.

Le choix du conjoint

10Le mariage des enfants met en jeu des intérêts économiques majeurs ; le chef de famille se doit d’en assurer la responsabilité. Quel que soit leur sexe, quand ils ne sont pas orphelins, les futurs établissent systématiquement leur contrat de mariage en présence d’un parent11. L’autorité maternelle ne fait par ailleurs aucun doute : lorsqu’ils sont tous les deux encore en vie, le père et la mère dotent toujours conjointement leur enfant12.

11La signature d’une entente matrimoniale apparaît très fréquemment comme l’aboutissement de négociations menées en vue du mariage. Quinze contrats sur quarante-sept évoquent le rôle d’intermédiaires, des parents ou des amis de la famille13. Dans dix-neuf documents, les parents de la jeune fille à marier déclarent verser la dot « à la vue » ou/et « en récompense » de l’apport introduit par la famille du promis14.

12Un mariage arrangé ne signifie pas que les pères et les mères choisissent le parti de leurs enfants sans les consulter. Près de la moitié15 des contractants qui mentionnent l’entremise de tierces personnes déclarent aimer leur futur.

13Au total, un acte sur trois évoque un mariage d’amour16. Notre documentation laisse toutefois penser que la liberté de choix du conjoint est plus importante au xixe siècle : avant 1801, moins d’une entente matrimoniale sur cinq17 mentionne l’affection que les fiancés ressentent l’un pour l’autre, contre près d’une sur deux au xixe siècle18.

14La volonté parentale semble moins peser sur les mariages paysans que sur les mariages urbains : les promis qui déclarent aimer leur futur sont au xixe siècle cinq fois plus nombreux dans notre zone d’étude qu’à Bilbao ; le consentement des parents des fiancés, jamais signalé dans notre documentation, est énoncé dans près d’un cinquième des contrats établis dans la capitale de la province19.

15L’étude du domicile des futurs donne l’impression d’une communauté très peu mobile. Les étrangers à la province sont absents de notre documentation : seule la transaction établie le 30 décembre 1817 implique des époux originaires de la proche province basque d’Alava. Signalons également une forte endogamie : plus de la moitié des alliances20 unit des partenaires natifs d’une même ville21. À défaut de conjoint originaire de la commune, nos contractants parcourent en moyenne moins de dix kilomètres pour trouver l’âme sœur. Seuls trois fiancés élargissent leur champ de recherche à plus de trente kilomètres. Ce manque de mobilité entraîne une grande dépendance par rapport à l’héritage, et en particulier par rapport à la terre héritée.

16Bien que le nombre de cas étudiés nous interdise toute conclusion définitive, les mariages endogames prennent de l’ampleur au xixe siècle : entre 1801 et 1817, deux unions sur trois22 impliquent un homme et une femme originaires de la même commune contre une sur trois23 au siècle précédent.

17Les couples répertoriés sont uniquement formés de célibataires : une seule alliance unit un veuf et une célibataire. Si la grande majorité des unions sont aux xviiie et xixe siècles des premiers mariages, cette hégémonie est symptomatique du fait que la dotation familiale, et plus particulièrement la dotation en biens-fonds, arrive au moment des premiers mariages24.

18Seules les annotations « mineur(e) » ou « majeur(e) » permettent d’appréhender l’âge au mariage. Elles signalent l’usage d’un mariage tardif25 : plus de huit actes sur dix indiquent que la future et le futur sont majeurs. Lorsqu’ils se présentent devant l’autel, seuls quatre filles et trois garçons n’ont pas atteint l’âge de la majorité. À l’exception d’un cas, ces conjoints mineurs ont tous célébrés leur mariage avant 1801. Les unions les plus précoces ont donc tendance à disparaître au xixe siècle.

19Dans plus d’un cas sur deux, les conjoints mineurs ont entre vingt et un et vingt-cinq ans. Deux documents évoquent l’union d’« un mineur », sans précision aucune. Au total, un seul contrat signale un âge au mariage inférieur à vingt et un ans26.

20La participation des parents des futurs à la rédaction du contrat de mariage peut être considérée comme un signe de jeunesse. Il semble alors que les épouses se marient plus tôt que leurs conjoints : vingt-deux d’entre elles sont orphelines de père et/ou de mère, contre vingt-cinq de leurs homologues de sexe masculin.

21Notre documentation laisse à penser qu’un grand écart d’âge entre les époux donne lieu à compensation : en mai 1771, Manuel de Lequerica Meaca offre à sa future, Maria Josepha de Acillona, deux cents ducats. Pour justifier une telle générosité, ce veuf invoque la jeunesse – la tierna hedad  de sa promise27.

L’apport foncier au mariage

22L’apport de biens-fonds au mariage constitue en milieu rural une réalité tangible qui motive fréquemment un passage chez le notaire : sur l’ensemble de la période étudiée, trente-deux ententes matrimoniales – soit près de sept sur dix – comportent une mention immobilière. Les parents donnent par contrat de mariage une maison « avec toutes ses dépendances »28, sans stipuler la nature ou la valeur de ces dépendances.

23Dans ce type d’entente, la maison n’est pas seulement un logement. En léguant la propriété ancestrale, les donateurs ne transmettent pas uniquement des murs et des terres, mais tout ce qu’ils contiennent et que l’on se lègue de génération en génération. Ce contenant, ce sont les lits, les coffres, le linge, mais aussi des instruments agricoles et des semences qui assurent la récolte suivante.

24Hormis trois conjoints, les futurs n’amènent pas plus d’un bien immobilier. À l’exception d’un cas, les deux époux n’apportent jamais conjointement des terres29. Cette pratique est liée à l’obligation de transmettre le patrimoine ancestral à un seul de ses descendants au détriment des cohéritiers : unir l’héritier de la maison à un conjoint qui compense l’absence de bien-fonds par un apport de liquidités permet de doter les autres enfants sans amputer le patrimoine familial en utilisant l’argent apporté par l’adventice30.

25Trois actes incluent des immeubles acquis par voie d’héritage. Tous les autres legs fonciers sont des donations entre vifs que les pères et les mères assignent à leur descendant « en faveur de son mariage et des enfants qui en seront procréés »31. À l’exception d’une maison-tour32, il s’agit de petites exploitations agricoles familiales33 constituées d’une maison, d’une ferme et de quelques arpents de vignes et/ou de terres.

26Au xixe siècle, la part des contrats qui stipulent un apport foncier diminue considérablement pour atteindre la moitié du contingent34 contre plus des trois quarts35 au siècle précédent. Une telle évolution marquerait-elle un changement des mentalités dans la dévolution des immeubles au moment du mariage ? Dans la crainte de se voir dépouiller avant leur mort ou de ne pouvoir revenir sur leur décision, les parents différeraient-ils plus fréquemment le choix de l’héritier de la maison familiale ? Une rapide étude des dispositions de dernières volontés ne plaide pas dans ce sens mais dans celui d’un recours plus fréquent à l’acte notarié en l’absence de transmission foncière : les testaments qui incluent des donations d’immeubles connaissent également une baisse conséquente ; ils représentent 41 % du contingent au xviiie siècle contre 25 % un siècle plus tard36.

27Dans quatre cas sur cinq37, c’est l’homme qui apporte la terre. Le rang de naissance de cet héritier n’est pas systématiquement indiqué. Nos documents évoquent néanmoins fréquemment l’application d’un droit d’aînesse, plusieurs pères et mères justifiant leur choix par l’exclusion des puînés.

28Seuls sept immeubles sont amenés au mariage par une épouse38. Deux de ces apports ne sont pas des biens souches mais des acquêts transmis à part égale à plusieurs cadets39. En facilitant l’installation matérielle des plus jeunes enfants, ces legs viennent compenser l’indisponibilité de la maison familiale. « Fille(s) unique(s) »40, deux des cinq héritières de biens ancestraux sont, en l’absence de frère et de sœur, les seules candidates à la succession. Les trois héritières préférées à un frère vivant sont des cas très marginaux. Un acte laisse à penser qu’en leur transmettant la demeure familiale, leurs parents ont souhaité respecter l’ordre de primogéniture, quel que soit le sexe du premier né41.

29Si les pères et les mères choisissent souvent de léguer leurs immeubles à un garçon, c’est sans aucun doute pour que le nom des fondateurs se perpétue. Trois contrats de mariage contenant plusieurs legs d’immeubles, trente-sept maisons font l’objet d’une transaction. Seules quatre propriétés sont d’acquisition récente. Les trente-trois autres appartiennent depuis plus de deux générations à la même famille. Près d’un quart d’entre elles42 porte le même nom que la lignée qu’elles abritent depuis un temps immémorial. À titre d’exemple, Ignacio de Goitisolo établit son fils José de Goitisolo y Beitia Olacoa héritier de la maison de Goitisolo43. En mai 1761, Gabriel de Elguezaval prend la tête de la ferme44 de Elguezaval45. Cette analogie atteste que, depuis la fondation du logis, il s’est toujours trouvé un héritier mâle pour garder le nom donné au vieux toit par les ancêtres.

30Le décès du père n’est pas un préalable nécessaire au mariage de l’héritier, la majorité des parents transmettant le patrimoine familial avant que la mort ne vienne briser leur union : six détenteurs de biensfonds sur dix ne sont orphelins ni de père, ni de mère, contre cinq sur dix pour l’ensemble de nos contractants. Recevoir la maison ancestrale le jour de ses noces n’est pas synonyme de mariage plus tardif46.

31L’apport au mariage d’un bien immeuble ne semble pas déterminer l’origine géographique du conjoint recherché. Ce genre de dotation n’est pas réservé aux seuls couples endogames. À l’image des autres contractants, près de la moitié des futurs47 possesseurs d’un immeuble choisissent un conjoint originaire d’une autre ville. Comme l’ensemble des ententes matrimoniales, les actes mentionnant des biens-fonds connaissent une diminution de l’exogamie : au xixe siècle, 42,9 % des couples48 qui bénéficient de ce type de legs ne sont pas originaires de la même commune, contre 61,1 % au siècle précédent (soit un recul de 18,2 %).

Le sort des parents

32Au total, vingt-neuf parents transmettent un avoir foncier à l’occasion du mariage de leur enfant49. Seuls deux de ces legs concernent des propriétés d’acquisition récente. Constituées très majoritairement de biens souches indivisibles, ces donations aux descendants ne peuvent être, selon le droit local, que totales. Aussi, le devenir des ascendants est-il étroitement imbriqué avec le mariage de l’héritier et la question de la transmission du patrimoine familial. De ce fait, les donateurs de biens-fonds ont fréquemment le souci d’assurer leur existence durant leurs vieux jours. Pour ce faire, ils peuvent se réserver la jouissance d’une partie des biens donnés. L’usufruit porte alors systématiquement sur la moitié des immeubles sans que la nature de celle-ci ne soit explicitée. Cette imprécision est le signe que l’ensemble du patrimoine sera travaillé en commun par le donateur et le légataire, chacun fournissant son travail, la moitié des semences, et percevant la moitié des fruits. C’est une sorte de métayage intrafamilial.

33À l’image de Martin de Jaureguizar et de son épouse Josepha de Uribe qui déclarent « se réserver selon les usages la moitié de la maison de Uribe »50, les parents qui se réservent un droit de jouissance revendiquent expressément leur soumission à la coutume51.

34Nous avons comptabilisé dix-sept cas d’usufruit sur les vingt-neuf donations inter vivo, soit 58,6 %. C’est peu au regard des vingt-sept donateurs qui en transmettant la maison familiale lèguent leur lieu de résidence. La plupart des dix couples restants assurent leur existence au moyen d’une autre disposition : la cohabitation. Neuf détenteurs d’immeubles donnent leur bien à condition que leur successeur vive en leur compagnie. La formule la plus fréquente établit que les futurs cohabiteront avec les parents « en leur compagnie et à leur table »52. Un seul contrat prévoit une cohabitation limitée dans le temps53. De nature différente, cette entente matrimoniale n’a pas – contrairement aux autres – pour principal objectif de fonder une communauté de vie et de travail entre ascendant(s) et descendant, mais vise à faciliter l’installation du jeune couple en lui permettant de réaliser quelques économies.

35Au total, près d’un tiers des actes54 comportant la transmission d’un immeuble établit que les donateurs et les donataires vivront sous un même toit. Mais, nous avons au moins deux raisons de penser que la cohabitation effective est beaucoup plus fréquente qu’il n’y parait. D’abord, quatre réserves d’usufruit s’accompagnent d’une clause de cohabitation. Puisque les deux phénomènes ne s’excluent pas, il est probable qu’un certain nombre de parents se sont réservés la jouissance d’une partie de leurs biens et en profitent tout en vivant au côté de leur héritier sans que cette communauté ne prenne une forme contractuelle. Le droit d’usufruit garantit à lui seul la sécurité des donateurs ; l’énonciation formelle de la clause de cohabitation n’a pas de raison d’être. Une seule entente matrimoniale prévoit le versement d’une pension en cas de veuvage de la donatrice55 ; ce qui plaide en faveur d’une plus grande fréquence de la communauté de vie : en l’absence de pension, seule une cohabitation avec l’héritier de la maison familiale permet d’assurer la prise en charge des veuves.

36Limitée en nombre absolu, notre documentation témoigne néanmoins clairement d’une modification formelle des dispositions concernant le sort des parents. Nos ententes matrimoniales laissent apparaître un renforcement au xixe des clauses de cohabitation au détriment des donations avec réserve d’usufruit. Signalons également l’émergence d’une nouvelle mesure destinée à assurer l’avenir du jeune ménage : toutes les ententes matrimoniales prévoyant au xixe siècle une communauté de vie comprennent une clause de séparation en cas de mésentente, disposition pratiquement inexistante un siècle auparavant56. Ces évolutions signalent la naissance d’une nouvelle attitude vis-à-vis du couple donataire, couple qui peut désormais choisir de vivre en toute indépendance. C’est sans doute pourquoi les clauses de séparation constituent avant tout un gage de tranquillité et prennent rarement l’allure d’une sanction. En cas de dissolution de la communauté de vie, les futurs obtiennent systématiquement la garantie de recevoir le fruit de leur travail sur les terres familiales, à savoir la moitié des récoltes à venir. En prévoyant le partage par moitié de l’ensemble du patrimoine familial, trois contrats témoignent d’une réelle égalité entre les deux couples. Au total, un seul contrat établit explicitement le départ des jeunes maîtres : l’entente matrimoniale établie le 8 avril 1815 stipule que si désaccord il y a entre les donateurs et les donataires, ces derniers devront quitter le domaine familial en emportant les biens meubles cédés à l’occasion de leur union et la moitié des graines de la récolte de l’année en cours57.

La provenance et le contenu de la dot

37Dans la Biscaye rurale des xviiie et xixe siècles, il n’est pas de mariage sans le versement d’une dot : tous nos contrats enregistrent une double constitution de dot, celle de la fiancée mais aussi celle du futur. Au Pays basque, l’apport d’un trousseau n’est pas réservé aux femmes. De nombreux époux participent à l’installation matérielle du ménage58. Dans la capitale de la province, près d’une entente sur deux se contente toutefois de consigner les avoirs de la fiancée59. La raison d’être des contrats de mariage – transmettre le patrimoine familial en zone rurale et protéger les intérêts matériels des veuves en milieu urbain60 – est à l’origine de cette différence.

38Dans notre zone d’étude, tous les parents – lorsqu’ils sont encore en vie – constituent tout ou partie de la dot de leur enfant, qu’il s’agisse d’une fille ou d’un garçon61. Un conjoint sur dix62 – des hommes exclusivement – participe à la constitution de son trousseau. Dans la capitale de la province, 69,6 % des hommes garnissent seuls leur corbeille nuptiale63. Cette comparaison confirme l’importante dépendance des paysans par rapport à l’héritage à l’heure de contracter une union.

39Quand ils ne sont pas veufs, les pères des futurs sont systématiquement assistés de leur épouse64. Cette participation des mères témoigne d’un certain droit de regard des adventices, et plus généralement des femmes, dans la gestion et la transmission du patrimoine familial65.

40À l’exception des immeubles, les parents de nos contractants lèguent deux types d’avoirs : des liquidités et des biens meubles. Ces derniers font rarement l’objet d’une estimation précise, seuls les apports en numéraire permettent d’apprécier l’importance des dots, d’où la fragilité de nos évaluations66. La valeur moyenne des liquidités est de trois cent quatre-vingt-treize ducats pour les hommes contre six cent trente-six ducats pour les femmes, soit l’équivalent au début du xixe siècle de cinq cent quarante et de huit cent soixante-quatorze journées de travail d’un cultivateur67. Les valeurs médianes atteignent respectivement cinq cents et deux cents cinquante ducats. Il semble donc que les efforts financiers des familles soient majorés à l’occasion du mariage des filles.

41La classification des apports dotaux selon le sexe du bénéficiaire n’est pas totalement pertinente. Il y a parmi notre contingent masculin beaucoup d’héritiers d’immeubles. À l’inverse, de nombreuses épouses ont le statut d’adventice. Nous distinguerons trois types de dots : celles apportées par les héritiers de biens-fonds, celles de leurs futurs – que nous appellerons dots entrantes – et celles attribuées aux enfants qui fondent un nouveau ménage68 – appelées dots sortantes. Cette nouvelle classification des corbeilles nuptiales révèle une importante disparité entre les dots entrantes et les dots sortantes : le premier type d’apport – celui des adventices – atteint la moyenne de six cent quatre-vingt-dix-sept ducats contre seulement deux cent soixante-sept ducats pour les dots sortantes, soit un rapport de 2,669.

42L’analyse séparée des dots sortantes des garçons et des filles confirme que le montant des liquidités apportées aux fonds dotaux n’est pas lié au sexe du bénéficiaire mais à la possibilité d’unir son enfant à un maître de maison : les hommes qui ne bénéficient ni du statut d’héritier, ni de celui d’adventice, mentionnent un apport numéraire moyen de deux cent quatre-vingt-quatre ducats, contre deux cent cinquante-deux ducats pour leurs homologues de sexe féminin ; soit un écart de trente-deux ducats70.

43Le mariage des enfants donne plus souvent lieu à l’endettement des parents en milieu rural qu’en zone urbaine : trois contrats sur quatre71 évoquent un délai entre la promesse et le versement des liquidités ; à Bilbao, la proportion est de un sur dix72. Des ressources plus limitées sont sans aucun doute à l’origine de cet écart73. Les donateurs qui unis­sent leur descendant à l’héritier d’une maison contractent plus fréquemment des dettes : les liquidités payables à tempérament sont deux fois plus courantes dans les dots entrantes que dans les dots sortantes74. Les parents d’adventices allongent les délais de versement : un tiers des conjoints d’héritiers doit patienter plus de deux ans pour recevoir la totalité de sa corbeille nuptiale contre moins d’un dixième des bénéficiaires de dots sortantes.

44Treize contrats stipulent que les sommes engagées seront versées aux parents de l’héritier. Selon les us et coutumes de Biscaye, ces donations des adventices sont utilisées pour dédommager les frères et les sœurs de l’héritier et les pourvoir d’une dot. Un quatorzième contrat est à ce sujet des plus parlants : le 2 juillet 1774, Josepha de Arechaga, l’héritière de la maison ancestrale de Arechaga, s’engage à épouser Joseph de Beazcoechea ; en échange de cette entrée pour gendre, les parents de Joseph indemniseront le frère de la future en lui cédant trois cent cinquante ducats75.

45Soixante-dix futurs sur quatre-vingt-dix-sept (soit 74,5 %) bénéficient d’une donation de biens meubles. Certaines dotations en nature sont issues de l’activité agricole de la maison d’origine : quarante-deux conjoints mentionnent l’apport de céréales (du maïs et du blé), trente-huit se voient offrir quelques têtes de bétail. Les futurs reçoivent en moyenne trois à cinq animaux, le plus souvent deux ou trois moutons, une ou deux chèvres, une vache, plus rarement un cochon (seules huit mentions ont été enregistrées), très exceptionnellement un bœuf (deux mentions), un cheval ou un âne (un seul cas). S’ils élèvent le niveau de vie des jeunes mariées en facilitant son alimentation, ces legs sont également destinés à régénérer le cheptel de la maison d’accueil. Ils concernent dans plus de trois cas sur quatre76 des ententes matrimoniales comportant la transmission d’un bien-fonds.

46Cinq conjoints, dont quatre adventices, intègrent une ruche à leur fonds dotal.

47Vingt-trois trousseaux, dont huit féminins, incluent des outils agricoles, essentiellement des faux et des râteaux. Lié à l’exercice d’une activité professionnelle, ce type d’apport est en milieu urbain exclusivement réservé à la gent masculine77.

48Les deux tiers des promis78 apportent des objets d’ameublement. Prépondérant, le lit est mentionné dans trente-quatre actes. Souvent usagé, il est systématiquement garni d’une paillasse. Chaque couple dispose en moyenne d’un ou de deux lits et de cinq paires de draps de rechange. Il n’est pas inintéressant de noter que neuf hommes fournissent le lit conjugal alors que près d’une femme sur quatre n’apporte pas ce type de mobilier. À Bilbao, c’est toujours l’épouse qui apporte le lit. Lorsqu’elles déclarent posséder des meubles, les futures mentionnent systématiquement ce type d’apport79.

49Quarante promis, dont onze hommes, consignent un, deux ou trois coffres, où ranger leurs effets personnels. Trente-huit époux et quatorze épouses complètent leur dot de vêtements usuels.

50Enregistrés dans un quart des contrats80, les chaudrons constituent avec les poêles et les marmites en fer le matériel de cuisson de base. Seuls quatre trousseaux, dont deux masculins, comprennent une table agrémentée de chaises ou de bancs.

51Le linge de table et la vaisselle sont présents en petit nombre. Seuls trois couples disposent d’un chandelier pour s’éclairer.

52À la lecture de leur trousseau, le confort de nos contractants apparaît des plus limité. Sept fois mentionnées, les chocolatières semblent constituer leur seul luxe.

Conclusion

53Les clauses matrimoniales ne remettent jamais en cause les principes fondamentaux des coutumes de Biscaye. Les parents transmettent l’intégralité du patrimoine ancestral à un seul de leurs enfants, le choix de ce dernier ayant souvent lieu au moment de son mariage. Ce successeur est le plus souvent le fils aîné, mais la fille aînée est quelquefois héritière. Pour assurer ses vieux jours, le couple donateur établit fréquemment une clause de cohabitation ou d’usufruit. S’il n’y a pas égalité devant l’héritage, il n’y a pas non plus égalité devant la dot : le montant de celle-ci est ajusté à l’espoir qu’ont les parents d’unir leur enfant à un maître de maison. De là viennent les gratifications souvent accordées aux filles.

54La signature d’une entente matrimoniale apparaît souvent comme l’aboutissement de négociations familiales. Pourtant, le statut d’héritier – ou de non héritier – et le montant de la dot à verser ne déterminent pas à eux seuls le choix du conjoint, plusieurs futurs déclarant éprouver de l’affection l’un pour l’autre. Les hommes choisissent principalement de s’unir à des célibataires, majeures et issues des proches alentours. Enfin, le contenu des corbeilles nuptiales, à savoir les fréquents enregistrements de bétail, d’outils agricoles et de récoltes, laisse à penser que les paysans de Biscaye épousent essentiellement des jeunes filles issues de leur milieu. Milieu qui n’est pas synonyme d’aisance et de confort ; les biens meubles légués aux époux couvrent uniquement leurs besoins essentiels.

55Nos contrats de mariage signalent enfin une évolution des mentalités. L’apparition au xixe siècle de donations de maisons familiales avec une clause de séparation en cas de mésentente et la diminution des mentions d’usufruit témoignent d’une plus grande liberté des jeunes époux par rapport au couple donateur. Signalons pour la même période l’augmentation des mariages d’amour.

Bibliographie

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Muchembled Robert, Société et mentalités dans la France moderne xvie-xviiie siècle, Paris, Armand Colin, 1990.

Notes

1 Pierre Bourdieu, « Célibat et condition paysanne », Études rurales, nos 5 / 6, 1962, p. 33-34.

2 Itziar Monasterio, « La familia en Bizkaia y su régimen jurídico », Boletín de la Academia Vasca de Derecho, Bilbao, 2005, p. 49-50.

3 Le premier exerce entre 1742 et 1795 à proximité de la commune de Munguía, le second de 1798 à 1817 aux environs de Busturia, contrée située à une dizaine de kilomètres de Guernica. Les fonds de ces notaires sont conservés à Bilbao dans les Archives Forales de Biscaye.

4 Rappelons qu’après 1860, la Biscaye connaît une forte augmentation de l’émigration vers les Amériques et un important développement des exploitations minières et de la sidérurgie, activités qui en s’imposant dans l’économie globale marginalisent le secteur agricole. Liées à la progression du commerce, de l’artisanat et de l’industrie, de nouvelles professions se développent et détendent les liens entre capital foncier et statut social. Établir un enfant ne signifie plus sys­tématiquement transmettre une terre (Joseba Agirreazkunenaga, Vizcaya en el siglo xix (1814-1876) : las finanzas públicas de un Estado emergente, Bilbao, Universidad del País Vasco, 1987, p. 224-225.

5 Maître Antonio de Aguirre précise la profession de deux de ses clients, un architecte et un marin : Archivo Foral de Vizcaya, N0008/0003, 5 février 1780, f. 5r ; N0009/0007, 19 mai 1785, f. 14r.

6 Les Villas de Balmaseda, de Bermeo, de Bilbao, de Durango, d’Ermua, de Guernica y Luno, de Lanestosa, de Lequeitio, de Marquina-Jeméin, d’Ondárroa, d’Ochandiano, de Plencia et de Portugalete.

7 Les territoires historiques, appelés Tierra Llana ou Infanzonado.

8 Ce droit foral fut établi par écrit aux xve et xvie siècles. En 1452, les habitants de la Biscaye obtiennent que soit rédigé le Fuero Viejo de Vizcaya, privilège qui sera modifié et complété par la rédaction en 1526 du Fuero Nuevo de Vizcaya (Itziar Monasterio, op. cit., p. 31).

9 Georges Augustins, Comment se perpétuer ? Devenir des lignées et destins des patrimoines dans les paysanneries européennes, Nanterre, Société d’Ethnologie, 1989, p. 200.

10 Ce droit basque et le principe de la famille souche avec indivision du patrimoine familial, la troncalidad, sont toujours vivaces dans les provinces basques espagnoles. Ils ont été actualisés par la loi du droit civil foral basque du 1-7-1992.

11 Une seule exception a été répertoriée : bien qu’il ne soit orphelin ni de père, ni de mère, le veuf de Maria Legarra – Juan de Yturriez – se rend seul chez le notaire pour établir un contrat de mariage avec les parents de sa future seconde épouse. L’état civil de ce fiancé motive une telle singularité (A.F.V., N0021/0015, 11 avril 1810, f. 79r). Preuve d’une moins grande dépendance économique, en milieu urbain trois prétendants sur quatre établissent seuls leur contrat de mariage au début du xixe siècle. Cette plus grande liberté est toutefois exclusivement le fait des garçons : Sylvie Hanicot-Bourdier, « Femmes et patrimoine dans la Biscaye du xixe siècle », à paraître dans la revue Topoï.

12 À titre de comparaison, à Bilbao, les mères participent à la constitution de la dot des enfants dans un peu moins d’un document sur deux (ibid.)

13 Mentionnons deux exemples. En octobre 1814, Juan de Oleaga et Maria Antonia de Garay y Porteras déclarent que « des parents et des personnes bienveillantes » (parientes y personas de buena intención) sont à l’origine de leur union. Quelques mois plus tard, Juan Manuel de Sarricoloa et Maria Josefa de Guena mentionnent « l’entremise d’amis et de parents » (la interbención de amigos y parientes). A.F.V, N0022/0050, 8 avril 1815, f. 133r ; N0022/0034, 29 octobre 1814, f. 80r.

14 Citons, pour imager nos propos, le cas de Maria de San Juan de Unibasso qui dote sa fille Maria Antonia « à la vue et en récompense de la précédente dot ». En décembre 1769, c’est la corbeille nuptiale de Josepha de Acerecha qui est octroyée « en récompense et pour rémunérer » les apports du futur (A.F.V., N0006/0107, 19 juillet 1773, f. 296v ; N0005/0161, 18 décembre 1769, f. 428v).

15 Sept sur quinze.

16 Les futurs déclarent ressentir de l’« amour et de l’affection » (amor y afecto), ou de l’« amour et de la tendresse » (amor y cariño). Cet épanchement de sentiments a toujours une seule raison d’être : justifier un don financier accordé au conjoint survivant. À titre d’exemple, Thomas et Maria Antonia s’octroient en cas de veuvage un legs de cent ducats de vellon « en raison de l’affection et de l’amour qu’ils éprouvent l’un pour l’autre » (por el afecto i amor que entre sí tenían) : A.F.V., N0006 /0091,16 février 1773, f. 250r.

17 Quatre sur vingt-trois.

18 Onze sur vingt-quatre.

19 Ibid.

20 Vingt-quatre sur quarante-sept.

21 Cette proportion est très proche de celle obtenue à Bilbao, commune qui enregistre entre 1814 et 1850 un taux d’endogamie de près de 50 % (ibid.).

22 Seize sur vingt-quatre.

23 Huit sur vingt-trois.

24 À Portugalete, 21,9 % des unions sont aux xviiie et xixe siècles des remariages. À Bilbao, ce type d’alliance concerne au début du xixe siècle 17,4 % des unions ayant donné lieu à l’établissement d’un contrat de mariage dans les études notariales de don Nicolás Cayetano de Artaza et de don Antonio Serrapio de Urquijo (Sylvie Hanicot-Bourdier, Portugalete aux xviiie et xixe siècles : contribution à une étude socio-démographique, Villeneuve d’Ascq, Presses Universitaires du Septentrion, 2003, p. 197 ; « Femmes et patrimoine dans la Biscaye du xixe siècle », à paraître dans la revue Topoï courant 2008).

25 Comme le signale Robert Muchembled, les démographes y voient un mécanisme collectif inconscient de limitation des naissances (Robert Muchembled, Société et mentalités dans la France moderne xvie-xviiie siècle, Paris, Armand Colin, 1990, p. 41).

26 Le 14 juin 1784, un tuteur protège les intérêts de Juan de Uriarte de Urquiza, le futur de Maria de Arteche. Cette mise sous tutelle témoigne d’un âge au mariage inférieur à vingt et un ans ; au-delà de sa vingt et unième année, un mineur est uniquement assisté d’un curateur, et ce jusqu’à vingt-cinq ans, l’âge de la majorité (A.F.V., N0008/0181, 14 juin 1784, f. 62r-v).

27 A.F.V., N0006/0010, 18 mai 1771, f. 30v-31r.

28 Con todos sus pertenecidos.

29 Thomas de Fullaondo y Sertucha, héritier de la maison de Echevarria, s’engage le 16 février 1773 à épouser Maria Antonia de Sustacha y Gorosarri qui intègre à sa corbeille nuptiale un autre domaine, la maison de Sustacha. Fils et fille uniques, ces deux futurs sont les seuls enfants susceptibles de prendre la direction des affaires familiales (A.F.V., N0006/0091,16 février 1773, f. 247v-248r).

30 Ce terme désigne le conjoint de l’héritier ou de l’héritière d’une maison.

31 Para el matrimonio y los hijos que de él tubieren y demás subcesores. Précisons qu’en zone urbaine, le mariage d’un enfant n’est pas un moment privilégié par les parents pour envisager la transmission d’un bien-fonds : au début du xixe siècle, cette catégorie d’avoirs ne concerne à Bilbao qu’une entente matrimoniale sur quatre (ibid.).

32 Una casa torre.

33 Une maison d’habitation et une ferme : una casa y casería.

34 Treize actes sur vingt-quatre.

35 Dix-neuf actes sur vingt-trois.

36 Ces pourcentages ont été établis à partir du dépouillement des fonds notariés de Maître Antonio de Aguirre et de Maître José Manuel de Arostegui.

37 Vingt-six apports fonciers sur trente-trois sont imputables au futur ou à ses parents.

38 Quatre sur vingt au xviiie siècle et trois sur treize au xixe siècle.

39 En octobre 1776, Maria Ybarrola ajoute à la corbeille nuptiale de sa fille Manuela une maison que cette dernière hérite en copropriété avec un jeune frère. Le 2 mai 1801, Ana Maria de Basterrechea Uruburu reçoit de ses parents, Juan de Basterrechea et Maria Uruburu, le quart d’une propriété connue sous l’appellation la casa de Ordorica Echezurias (A.F.V., N0007/0067, 21 octobre 1776, f. 165r-166v ; N0020/0042, 2 mai 1801, f. 94v-95r).

40 Hija única.

41 Antonio de Arechaga intègre à la corbeille nuptiale de sa fille Josepha la maison de Arechaga sous réserve que son jeune fils (un hijo menor) hérite de sa sœur si cette dernière décède sans succession (A.F.V., N0006/0145, 2 juillet 1774, f. 393v et 397v).

42 Huit sur trente-trois.

43 A.F.V., N0022/0037, 7 décembre 1814, f. 89v.

44 La casería.

45 A.F.V., N0004/0100, 4 mai 1761, f. 59v.

46 Précisons que pour constituer la corbeille nuptiale de leurs autres descendants, les pères de famille doivent souvent avoir reçu au préalable la dot de l’adventice. Retarder l’établissement de l’héritier signifierait par conséquent différer l’union de ses frères et de ses sœurs.

47 Soit quinze.

48 Onze sur dix-huit.

49 Rappelons que trois actes incluent des immeubles acquis par voie d’héritage.

50 Reservarse la mitad de la casa de Uribe según se acostumbre.

51 A.F.V., N0007/0007, 30 janvier 1775, f. 18r.

52 En su compañía y mesa.

53 Le 4 mai 1761, Antonio de Elguezaval et Maria Antonia de Goiri Aguirre prévoient d’héberger leur fils Gabriel et sa femme. Cette cohabitation prendra fin le 25 juillet de cette même année (A.F.V., N0004/0100, 4 mai 1761, f. 60v).

54 Neuf sur vingt-neuf.

55 Dans l’entente matrimoniale de sa fille Manuela de Urrutia, Maria de Ybarrola rappelle que son défunt mari, San Juan de Urrutia, a cédé la maison de Goiri Mariana à deux de ses enfants, Manuela et son frère Martin, à condition qu’ils subviennent à l’alimentation de leur mère (A.F.V, N0007/0067, 1 octobre 1776, f. 167r-v).

56 Un seul cas a été recensé.

57 A.F.V., N0022/0050, 8 avril 1815, f. 134v.

58 Selon les us et coutumes, le régime matrimonial est en Biscaye une combinaison du régime dotal et de la communauté d’acquêts. Il établit la séparation des avoirs que le mari et la femme apportent à l’autel, ainsi que la communauté des biens qui ont été acquis pendant le mariage. En cas de dissolution de l’union, chaque conjoint reprendra ses apports nuptiaux. Aussi, les hommes enregistrent-ils fréquemment devant notaire les biens qu’ils mettent à la disposition du ménage.

59 Ibidem.

60 En lui garantissant par un enregistrement la restitution de sa dot (ibid.).

61 Signe d’une plus grande indépendance économique, à Bilbao, plus d’un couple sur quatre s’unit sans aucune aide financière (ibid.).

62 Soit dix conjoints sur quatre-vingt-quatorze.

63 Ibidem.

64 À Bilbao, un tiers des pères constituent seuls le fond dotal de leur enfant(ibid.).

65 Le statut d’héritier diffère juridiquement de celui de l’adventice. Seul le premier est maître des biens immobiliers. Le second ne possède que sa dot, avoir qui ne donne aucun droit de propriété ou de décision sur le patrimoine transmis à l’héritier.

66 Cinquante-trois futurs, dont vingt-trois hommes, intègrent un versement en espèces à leur trousseau.

67 Un ducat de vellon vaut onze réaux de vellon. Or, un acte contrat de mariage rédigé à Bilbao le 23 novembre 1835 établit le salaire d’un cultivateur à huit réaux de vellon (Archivo Histórico Provincial de Bizkaia, microfilm 826, 23 novembre 1835, f. 331r).

68 C’est-à-dire ceux qui n’héritent pas d’un patrimoine mobilier et n’épousent pas un héritier ou une héritière.

69 Les valeurs médianes se situent à six cents et deux cents ducats respectivement. Le montant des liquidités des héritiers ne peut donner lieu à une étude, seuls cinq maîtres de maison possédant ce type d’apport.

70 Les valeurs médianes atteignent deux cents ducats pour les deux sexes.

71 Trente-six sur quarante-sept.

72 Ibidem.

73 Annonçons que l’étude des biens meubles apportés à l’autel relèvera ci-dessous un quotidien dépourvu de superflu et de luxe.

74 Vingt-deux dots entrantes sur trente-trois contre onze sortantes sur trente ne sont pas versées dans leur totalité au début du mariage.

75 A.F.V., N0006/0145, 2 juillet 1774, f. 396r.

76 Soit vingt actes sur vingt-six.

77 Ibidem.

78 Soixante sur quatre-vingt-dix-sept.

79 Ibidem.

80 Soit quatorze ententes matrimoniales.

Pour citer ce document

Sylvie Hanicot-Bourdier, « Un exemple de reproduction sociale : mariage et transmission du patrimoine dans la Biscaye rurale des xviiie et xixe siècles » dans « Individu et société : représentation, rapports, conflits (I. Espagne) », « Travaux et documents hispaniques », n° 1, 2011 Licence Creative Commons
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Quelques mots à propos de :  Sylvie Hanicot-Bourdier

Université Nancy 2 / ROMANIA (EA 3465)
Sylvie Hanicot-Bourdier, maître de conférences au Dpt. d’Espagnol de l’Université Nancy 2, membre titulaire de ROMANIA (E.A. 3465). Axes de recherche : les xviiie et xixe siècles, le Pays basque espagnol (famille, démographie, mœurs et mentalités). Auteur de plusieurs articles publiés en France et en Amérique Latine (« Ensayo sobre la religiosidad de una comunidad vasca en los siglos xviii y xix » ; « Le rapport à la mort et à la famille des habitants de Bilbao au xixe siècle » ; « La transmission patrimoniale au xixe siècle : entre histoire individuelle et mémoire collective » ; « Femmes et patrimoine dans la Biscaye du xixe siècle »).