5 | 2013-2014
Mallarmé en traduction (aire hispanique)

Ce volume recueille les communications présentées lors de la journée d’étude « Mallarmé en traduction (domaine hispanique) », organisée par l’équipe, dirigée par Annick Allaigre et Pascale Thibaudeau, « Transferts textuels et migrations esthétiques » du Laboratoire d’Études Romanes (EA 4385) de l’Université Paris 8, le 7 décembre 2013 au Colegio de España de la Cité internationale universitaire de Paris. Elle a été soutenue par le Pôle Méditerranée de l’Université Paris 8 Vincennes-Saint-Denis. Les textes ont été recueillis par Annick Allaigre et Sandrine Lascaux.

Couverture de

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« Mallarmé est[-il] toujours énigmatique ? » : le recueil Poesía francesa. Antología (1954) d’Andrés Holguín

Claudine Lécrivain


Résumés

Cette étude de l’anthologie Poesía francesa, publiée par Andrés Holguín (Madrid, Ediciones Guadarrama, 1954), a une visée descriptive et elle aborde une brève présentation d’Andrés Holguin, anthologue et traducteur, les caractéristiques et la réception critique de l’anthologie. Dans un deuxième temps, concernant directement Mallarmé, l’étude porte sur la situation du poète dans l’anthologie, les caractéristiques de la notice qu’Holguín lui consacre, les traits du projet traductif d’Holguín, qui mettent en évidence une divergence entre la notice préliminaire sur Mallarmé et les traductions proposées.

El presente estudio de la antología « Poesía francesa », publicada por Andrés Holguín (Madrid, Ediciones Guadarrama, 1954) tiene un objetivo descriptivo y una breve presentación de Holguín, antólogo y poeta, las características y la recepción crítica de la antología, así como los rasgos del proyecto antológico del autor. En cuanto a la recepción de Mallarmé, el estudio analiza su ubicación en la antología, las características del estudio preliminar de Holguín, y los rasgos del proyecto de traducción del autor que evidencian una divergencia entre el estudio preliminar y las traducciones propuestas.

Texte intégral

1Dans un article publié il y a quelques années, j’avais distingué quatre différentes étapes dans la réception de l’œuvre de Mallarmé en Espagne1. J’envisagerai aujourd’hui la troisième période qui s’étend de la fin de la Guerre Civile jusqu’à la fin des années 1960.

2C’est à cette époque que vont paraître les deux premières anthologies consacrées à Mallarmé (l’anthologie bilingue de Xavier de Salas de 19402 ; Las prosas de Stéphane Mallarmé, de Agustí de Esclasans, 19423) ainsi que deux poèmes proposés dans des revues littéraires4. Le recueil Antología de poetas franceses qui fut initialement publié en 1929 et où figurait un poème de Mallarmé sera réédité en 19585. Entre temps, en 1954, Andrés Holguín publie à Madrid, aux éditions Guadarrama6, l’anthologie Poesía Francesa où il inclut trois poèmes de Mallarmé, œuvre sur laquelle j’ai souhaité m’attarder lors de la Journée d’études « Mallarmé en traduction » organisée par l’axe Transferts textuels et migrations esthétiques de l’université Paris 8, le 7 décembre 2013. Je propose ici un état de mes recherches actuelles, dont une version exhaustive sera publiée ultérieurement.

3Mon analyse s’intègre dans le cadre des études descriptives et interculturelles de la traduction, et ma visée sera éminemment descriptive. Je m’appuierai en partie sur les observations de l’École de la Manipulation (Lefevere, Toury, Snell-Hornby) qui ont mis en évidence la manipulation dont fait l’objet la littérature traduite7. J’aborderai ici le projet anthologique et le projet traductif d’Holguín, lesquels répondent aux différentes normes mises en avant par l’École de la Manipulation, et je centrerai mon étude essentiellement sur les « normes initiales », qui concernent les options et les approches individuelles du traducteur, ainsi que les « normes opérationnelles » qui se réfèrent aux décisions traductives prises lors du processus de traduction.

4Les points essentiels de mon analyse seront donc les suivants : une première partie concernera la figure du traducteur (présentation d’Holguín, caractéristiques du projet anthologique, réception critique de l’ouvrage, nature de l’anthologie en elle-même) ; dans une deuxième partie j’aborderai plus spécifiquement la situation de Mallarmé dans l’anthologie, les caractéristiques de la notice qu’Holguín lui consacre, ainsi que les spécificités du projet traductif.

L’anthologue et traducteur : Andrés Holguín (1918-1989)

Brève présentation

5Andrés Holguín, de nationalité colombienne, fut diplomate, juriste, critique littéraire, essayiste, poète et professeur de littérature, notamment à l’université des Andes de Bogotá. Il semble avoir découvert la littérature française très tôt, alors même qu’il était étudiant en droit. Lors de séjours en France, dans les années 1940, il put faire la connaissance de nombreux écrivains et poètes, et rassembler de multiples documents.

6Dans un commentaire autobiographique intitulé « El recuerdo de los libros y yo » (publié dans le quotidien colombien El Siglo, le 8 juillet 1973), Holguín affirme qu’adolescent, il lisait sans cesse des poètes colombiens et français. Il y détaille sa fascination pour Les Fleurs du Mal qu’il apprenait, se récitait, et traduisait :

Devoré ávidamente los poemas, los aprendí de memoria, los repetía en larguísimas caminatas yendo al colegio, los traduje toscamente. También aquí resulta legítimo preguntarme qué entendía entonces de Baudelaire; acaso no iba mucho más allá de la anécdota de albatros, del alma del vino, las letanías a Satán o la travesía a Citeres. Pero ha sido para mí un libro que, como el de Nietzsche, a través de lecturas siempre renovadas, no acaba de entregarse por entero.

7Outre les recueils de poèmes et les essais, on retiendra de l’œuvre d’Holguín ses activités de traducteur8 et d’anthologue9. Celui-ci s’inscrit en effet dans une tradition colombienne double, celle de la traduction des œuvres de poètes européens et américains, amplement établie au xixe siècle et celle de l’élaboration d’anthologies10. Leur permanence dans le panorama littéraire vient, me semble-t-il, de ce que l’anthologie permet au traducteur et anthologue d’hériter d’un certain capital symbolique (il profite du prestige de l’auteur ou des auteurs) ; par ailleurs, la symétrie entre la figure du poète et celle du traducteur vient en quelque sorte garantir le transfert de littérarité dans la traduction.

Projet anthologique

8Dans l’ouvrage analysé, Holguín ne fait aucune déclaration sur ses objectifs : le recueil ne comporte en effet ni préface11, ni postface, ni notes qui permettraient d’apprécier les caractéristiques de son projet anthologique. Il ne propose pas non plus de définition de la poésie pouvant justifier, même partiellement, ses choix. Il se contentera de dire, au détour d’un commentaire sur l’âge classique, que « cette Anthologie n’est pas une histoire de la poésie : simplement, une sélection des meilleurs poèmes français »12.

9Il faut néanmoins se poser la question des emprunts possibles aux sélections proposées dans trois anthologies de poésie publiées en France dans les années 1940 (époque où il séjournait en France), puisque les coïncidences concernant les auteurs et les poèmes retenus sont fréquentes : l’Anthologie de la poésie française de Marcel Arland, éditée chez Stock en 1941, et sa seconde édition augmentée en 1942 ; Le Meilleur Choix de poèmes est celui que l’on fait pour soi, 1818-1918, de Paul Éluard, aux Éditions du Sagittaire (1947) ; l’Anthologie de la poésie française, d’André Gide, aux éditions Gallimard (1949).

10D’autre part, afin de cerner quelles étaient ses intentions précises en tant qu’anthologue, je me suis également référée à d’autres anthologies établies par ses soins, bien que publiées ultérieurement. Dans un essai de 1964 intitulé «Síntesis de la poesía colombiana», Holguín constate que l’essence même de la poésie est indéchiffrable, et que pour faire un choix de poèmes, il est nécessaire de partir de l’intuition et du goût personnel13. Il semblerait donc qu’il tende à proposer des coups de cœur, des textes qu’il aime tout particulièrement. Dans sa préface à Antología crítica de la poesía colombiana (1874-1974), publiée en 1974, il revient encore sur l’impossibilité d’établir une définition de la poésie et sur l’importance de l’intuition esthétique14.

Réception de l’ouvrage

11En l’état actuel de mes recherches, j’ai relevé deux articles qui mentionnent la réception de l’ouvrage. Un premier article de Melchor Fernández Almagro, intitulé « Poesía francesa » (La vanguardia española, 2 janvier 1955) le présente comme un volume harmonieux, pour poser de nouveau la question des difficultés de la traduction poétique, tout en souscrivant indirectement à l’affirmation selon laquelle le bon traducteur de poésie est (forcément) lui-même poète. Si Melchor Fernández Almagro déplore l’absence de certains auteurs, il ne critique cependant pas les choix qui ont été faits. Il regrette en revanche que les chapitres ne présentent pas de jugement général sur les œuvres et les auteurs.

12Le second article de l’écrivain colombien Eduardo Caballero Calderón, intitulé « Una antología de poetas franceses. Las traducciones de Holguín », publié dans le journal colombien El tiempo (10 avril 1955), présente l’ouvrage comme l’un des plus importants qui ait été écrit dans le panorama peu réjouissant de la littérature colombienne des cinquante dernières années. Il émet cependant des doutes quant au rapprochement établi entre la sensibilité d’Holguin et celles des jeunes écrivains et poètes colombiens, un point qui, selon lui, devrait faire polémique. Caballero Calderón considère que la tâche du traducteur et de l’exégète est ingrate ; il souligne l’originalité d’un recueil qui, selon lui, vient de ce qu’Holguín ne propose pas une réception critique passive, mais au contraire tout à fait engagée puisqu’il ne se limite pas à la traduction des poèmes les plus proches de sa sensibilité, les plus populaires ou caractéristiques.

Caractéristiques de l’anthologie

13Le recueil ne fait aucune allusion à la traduction; il n’y a ni préface ni postface explicative, et aucun indice para textuel, comme « traduit de », « traduit par » n’est intégré. C’est donc par déduction que l’on suppose qu’Holguín est à la fois anthologue et traducteur. L’auteur y dresse un panorama, une synthèse de la poésie en langue française, allant de fragments de la chanson de Roland, jusqu’à ce qu’il nomme « les derniers poètes » (des années 1950), selon un découpage en chapitres regroupant différentes périodes et courants. Il suit l’ordre chronologique de la publication des œuvres qui est explicitement indiqué dans l’index général à la fin de l’ouvrage. Chaque auteur y fait l’objet d’une brève notice biographique, d’une synthèse de ses recherches et de ses productions poétiques.

Mallarmé (1842-1898)

14Le poète figure bien évidemment dans le chapitre consacré aux Parnassiens et aux Symbolistes ; celui-ci rassemble quatorze auteurs.

La notice sur Mallarmé

15Elle s’étend sur un peu plus de six pages, ce qui la place en troisième position (celles de Baudelaire et de Rimbaud font dix pages et celle de Valéry également six). En ce qui concerne la notice biographique, Holguín souligne le contraste entre la vie monotone de Mallarmé (professeur d’anglais pendant trente ans) et l’aspect révolutionnaire de son œuvre qui offre « un art intense et rebelle » (p. 343), précisant que sa condition de « magicien de la langue » faisait de lui le poète privilégié d’un cercle d’intellectuels (p. 344), et séduisait la jeunesse. Il est surprenant de voir à quel point Holguín revient dans les différentes notices biographiques sur les aspects les plus sordides de la vie personnelle des différents poètes évoqués dans ce chapitre, sans doute en écho à la perception des poètes maudits de Verlaine (1884).

16Quant à la notice littéraire, Holguín y présente le Symbolisme comme une réaction au Parnasse et comme la recherche d’une nouvelle intuition face à la vérité objective (p. 344). Cette nouvelle formule se concrétise dans la musicalité qui est la seule à pouvoir restituer, par suggestion, l’idée ou la sensation (p. 345). Dans son anthologie, Holguín compare constamment Mallarmé et Verlaine, et relève leurs points communs, notamment la musicalité et la poésie en tant que forces suggestives de pensée, de sensations, d’indicibles états d’âme. Mais il soulignera surtout leur opposition : « Verlaine es todo emoción y Mallarmé es todo cerebro. Si ambos aman la música, la una es una música que brota del fondo del alma y la otra de un esfuerzo consciente y elaborado » (p. 345-346). Il insiste sur le fait que Verlaine est toujours clair tandis que Mallarmé reste énigmatique15, d’où le titre de mon intervention. Pour l’un, la musique surgit du fond de l’âme, pour l’autre il s’agit d’une élaboration consciente : Holguín définit d’ailleurs Mallarmé comme un « Pythagore moderne de la poésie » dont l’« œuvre géométrique, [serait] aussi difficile qu’un théorème, aussi froide également qu’un théorème » (p. 347-348).

17D’après Holguín, l’intérêt de Mallarmé repose sur sa « méthode », – et finalement peu sur les résultats puisqu’il n’a pas réussi à créer le poème véritable dont il parlait tant –, ses recherches sur les propriétés du langage, son analyse de la grammaire, de la syntaxe, son incomparable étude des relations mystérieuses entre les mots, son obsession du hasard qu’il cherche à supprimer pour atteindre l’absolu (p. 346-347).

18Il s’agit d’une poésie avide d’infini, de pureté où seuls les mots font surface dans le naufrage universel (p. 348). Mais Holguín revient surtout sur l’hermétisme de Mallarmé en répétant qu’il s’agit d’« une œuvre poétique difficile » (p. 343), énigmatique (p. 347), de poèmes « chiffrés » (p. 344), dont l’obscurité est proverbiale (p. 346), qui vont « de la pénombre symboliste la plus belle jusqu’à la frontière de l’inintelligible » (p. 346) et qui se meuvent « entre la pureté et l’inexistence » (p. 346). En ce sens, indépendamment de sa connaissance de l’œuvre de Mallarmé, on peut penser qu’Holguín est probablement influencé par les écrits de Paul Valéry qu’il avait traduits en 1944. Ce dernier, grand admirateur de Mallarmé, y soulignait la complexité de ses textes, leur obscurité, leur caractère énigmatique et la lecture ardue qui en découlait16. Holguín insiste de son côté sur le fait que l’hermétisme mallarméen exige une « collaboration lucide » du lecteur (p. 346).

19D’une manière assez surprenante, Holguín termine sa présentation en soulignant ce qu’il considère être « la plus grave erreur » (p. 348) et même l’échec de Mallarmé. Ce n’est pas une exception car à plusieurs reprises dans l’anthologie, l’auteur formule des jugements négatifs sur les recherches poétiques de certains auteurs retenus.

20Il reconnaît au lecteur, après avoir lu, relu et déchiffré intensément la poésie de Mallarmé, le droit de se demander si la poésie n’est pas autre chose, celui-ci pouvant légitimement attendre de l’émotion et non de simples jeux cérébraux, idiomatiques qui, selon Holguín, éblouissent, « comme une mine de sel », mais n’émeuvent pas (p. 348). Et il se demande finalement si l’importance accordée à certains poèmes de Mallarmé ne tiendrait pas plutôt du mythe littéraire, puisqu’il a fini par faire de sa poésie un jeu de subtilités et d’abstractions, et que la réalité – dont la réalité poétique – a échappé à ses filets (p. 349). Lors de la présentation de Valéry (qui est le dernier poète du chapitre), alors qu’il dresse un bilan de la poésie de l’époque, Holguín fera cette surprenante affirmation : « Mallarmé parecía haber fracasado –como él mismo lo admitía– y haber muerto, afortunadamente, sin herederos » (p. 401).

21Les notices sur les différents poètes sont une accumulation ininterrompue de commentaires qui, en multipliant les « mises en rapport diachroniques » dans un « jeu constant d’annonces et de rappels »17, mettent l’accent sur les caractéristiques et les singularités de la poésie de Mallarmé que je viens de développer. Mallarmé est bien présent tout au long du chapitre, dans la présentation des autres poètes : soit pour établir des rapprochements (Baudelaire au sujet de la musicalité, Claudel au sujet de l’obscurité), soit pour mettre en évidence des contrastes (l’émotion de Verlaine contre la poésie de l’intellect de Mallarmé, la clarté de Corbière contre l’obscurité de Mallarmé).

Le projet traductif

22Le projet anthologique (qui traduire, que traduire) s’articule donc avec le projet traductif (comment traduire). Sur le deuxième point (que traduire), les projets anthologique et traductif coïncident puisque la sélection des poèmes peut éventuellement découler d’une plus ou moins grande capacité du texte à passer dans une autre langue. Cependant, Holguín ne justifie à aucun moment ses choix ; il n’indique aucun critère de sélection si ce n’est celui de l’intuition, déjà mentionné.

Que traduire ?

23Concernant Mallarmé, le choix d’Holguín s’arrête sur trois poèmes (deux sonnets et un seizain) qui avaient déjà été traduits à différentes époques. Il est impensable qu’un traducteur ne prenne pas en compte les versions antérieures des textes sur lesquels il veut travailler, soit pour s’en inspirer, soit pour s’en éloigner le plus possible18. Cependant, il est très difficile de déterminer si ces traductions ont servi de modèle à celles d’Holguín, et si celles-ci en conservent des traces. La chronologie des traductions antérieures de ces poèmes nous permettra seulement de montrer qu’Holguín n’a nullement été novateur sur ce point :

24Brise marine19 apparaît sous le titre Brisa Marina dans :

  • Le recueil Ritos du poète colombien Guillermo Valencia (1899) ; il est repris dans le numéro 17 de la revue Heraldo del Istmo du 30 septembre 1904 (Panama).

  • Le numéro 12 de la revue madrilène La República de las letras du 22 juillet 1905, traduit par Andrés González Blanco.

  • Le supplément littéraire de La Verdad (Murcie) du 23 septembre 1923 dans une traduction anonyme postérieurement attribuée à Andrés Sovejano [sic], selon Alfonso Reyes (1932).

  • L’article « Mallarmé en castellano » dans la Revista de Occidente, 37-110 (août 1932), traduit par Alfonso Reyes.

25Le poème Angoisse20 sera publié sous le titre Angustia dans :

  • Le numéro 10 de la revue Acanto (Madrid, 1947), dans une traduction de Carlos Edmundo de Ory ; il sera repris dans le numéro 13 de la revue littéraire Platero (Cadix, janvier 1952).

26Le Tombeau d’Edgar Poe21 sera publié sous le titre La tumba de Edgar Poe dans :

  • La traduction de Les Poètes maudits de Verlaine par Mauricio Bacarisse, où sept poèmes de Mallarmé sont intégrés (Ediciones Mundo latino, 1921).

  • L’anthologie Poetas franceses, de Xavier de Salas, recueil de vingt-quatre poèmes dans une édition bilingue (Ediciones Yunque, Barcelone, 1940).

27Les trois poèmes retenus par Holguín figuraient dans l’Anthologie de la poésie française, d’André Gide (1949) ; le poème Brise Marine apparaît dans l’anthologie d’Arland (1942) et dans l’essai de Thierry Maulnier, Introduction à la poésie française (1939) ; Le Tombeau d’Edgar Poe sera intégré dans l’anthologie de Paul Éluard (1947).

28Si on tente d’établir une relation entre le paratexte de l’étude préliminaire sur Mallarmé et le choix des poèmes, on peut retenir les critères, toujours relatifs, de la clarté et de la lisibilité. Ces critères considèrent que certains textes peuvent être « déchiffrés » par le lecteur tandis que d’autres seront plus difficiles à lire et donc à traduire. En effet, deux des trois poèmes choisis font partie de la première époque de Mallarmé, toujours considérée comme la plus « claire », un point de vue partagé par Holguín (p. 346) qui rejetait l’excès de virtuosité et les splendeurs formelles. Comme ses prédécesseurs, Holguín aura sans doute choisi des textes issus d’une première période plus accessible et plus à même de susciter l’émotion ; Holguín considère précisément que ce sont ces caractéristiques qui permettent à la poésie de résister au temps. Par ailleurs, l’engouement d’Holguín pour Baudelaire et l’inspiration baudelairienne des poèmes Brise marine22 et Angoisse23 ne sont sans doute pas étrangers à ce choix.

29D’autre part, en reprenant l’ensemble des poèmes qui figurent dans le chapitre sur les Parnassiens et les Symbolistes, j’ai pu constater la prédominance d’un axe thématique de type dysphorique : les poèmes traduits développent essentiellement un profond pessimisme illustré par le spleen, la mélancolie, le remords, la nostalgie, le désenchantement face aux dures réalités de la vie et à la malédiction sociale (pauvreté, vieillesse, fugacité du temps, désamour, exil, fin de vie, forte présence du champ lexical des pleurs). Le choix des poèmes aurait été fait sous le signe des Poètes maudits et ferait écho aux notices biographiques des différents auteurs dont Holguín souligne la vie turbulente (Verlaine, Rimbaud) marquée par les malheurs (Corbière) ; le déséquilibre (Baudelaire, Verhaeren), les souffrances de l’âme (Leconte de Lisle), la toxicomanie, la solitude (Laforgue), la démence (Lautréamont), etc.

30La figure du poète meurtri par une sensibilité à fleur de peau et par l’incompréhension apparaîtra fréquemment. Cette vision d’Holguín qui considère que la meilleure poésie devrait surgir de la douleur est développée dans d’autres anthologies, certains critiques ne manquant pas de souligner le caractère simpliste de cette interprétation24.

31En même temps, et c’est sans doute plus inattendu, une grande majorité des poèmes retenus développeront une thématique maritime comme l’illustrent deux des poèmes de Mallarmé.

Comment traduire ?

32Comme je l’ai déjà signalé, Holguín ne se prononce pas sur sa vision de la traduction ou sur sa pratique. On ne trouve dans l’ouvrage aucun commentaire sur les difficultés qu’il a pu rencontrer, ou bien sur un éventuel choix entre une position cibliste (qui justifierait la manipulation au nom de l’élégance et de la clarté du texte-cible) ou sourcière (privilégiant la fidélité et le respect de l’intention de l’auteur, de son style, de son expression). On peut penser que la traduction était pour lui une façon de connaître en profondeur les auteurs qu’il lisait, autrement dit qu’il les traduisait pour les comprendre et que l’épreuve de la traduction représentait finalement un mode de connaissance. Le nombre de traductions qu’il a publié laisse penser qu’il « se faisait la main », et que la traduction était pour lui l’activité principale d’un laboratoire expérimental de formation, comme il le rappelait à propos de Baudelaire : « Devoré ávidamente los poemas, los aprendí de memoria, los repetía en larguísimas caminatas yendo al colegio, los traduje toscamente » (El Siglo, 8 juillet 1973).

33L’analyse des traductions de Mallarmé permet de dégager quelques constantes concernant la manière dont Holguín envisageait les poèmes :

– Il conserve la rime, comme le veut la tradition classique, mais varie leur disposition, sans doute parce qu’il s’agit d’un élément qui perturbe les choix lexicaux et l’agencement syntaxique. Holguín propose principalement des rimes consonantes ; les trois poèmes de Mallarmé offrent une variété de configuration rimique : croisées et tripartites dans Angoisse, embrassées dans Le Tombeau d’Edgar Poe, plates dans Brise Marine. Holguín conserve les rimes embrassées dans les deux quatrains d’Angustia, mais pour le reste, il applique systématiquement une disposition en rimes croisées qui conduit à une certaine uniformité.
– Il opère une réduction du nombre d’enjambements ce qui conduit à atténuer les effets de surprise syntaxique à la source des ambiguïtés, des équivoques ou de la polysémie de la poésie de Mallarmé.
– Dans les trois poèmes traduits, il ajoute des signes de ponctuation en fin de vers, notamment des virgules, comme s’il s’agissait de mieux signaler l’arrivée d’une pause syntaxique.
– Il supprime les majuscules traditionnelles en début de vers et maintient les majuscules de début de phrase ce qui facilite la saisie visuelle d’une certaine cohérence syntaxique et écarte les ambiguïtés.
– Des ajouts conceptuels semblent répondre à des objectifs métriques, ils viennent également compenser la perte de certains éléments de l’original, ce qui conduit parfois à des redondances conceptuelles ou connotatives.
– Il restructure les insertions d’expansion afin de contrecarrer la « désorganisation » des poèmes de Mallarmé qui repose sur une distribution singulière des éléments de la phrase.
– Holguín établit des relations logiques (en particulier temporelles, et donc argumentatives) là où le poème original n’en offre pas.
– Enfin, il neutralise certaines métaphores, analogies et sens figurés.

34Concernant le registre de langue, on peut constater un système de compensation. Même si Mallarmé choisit globalement un lexique simple, ses poèmes présentent des termes peu courants, voire archaïques. Holguín s’efforce de respecter cet équilibre. On remarque la même préoccupation en ce qui concerne l’antéposition ou la postposition des adjectifs. Mallarmé a abondamment recours à l’antéposition, et si dans les poèmes analysés, sans doute pour des préoccupations accentuelles et rimiques, Holguín permute souvent la place de l’adjectif, on retrouve bien dans l’ensemble un emploi fréquent de l’antéposition.

35Il me semble que les procédés que je viens de signaler montrent clairement qu’il y a chez Holguín une intention communicative qui convoque une lecture (traditionnelle) pour chercher un discours sous-jacent par une forme d’explication des textes originaux. Ainsi, Holguín tente de trouver et d’exprimer un référent clair, comme s’il s’agissait de résoudre une énigme, alors que Mallarmé affirmait qu’il devait toujours y avoir une énigme en poésie. En proposant une plus grande linéarité, il atténue l’ambigüité, minimise l’indécision et les tâtonnements du lecteur, réduit l’atomisation. Il comble les suspensions du sens et essaie de rétablir la relation entre le langage et le monde en redonnant aux éléments de la phrase matrice une place centrale.

36Toutes ces caractéristiques semblent donc contredire les différentes affirmations sur l’hermétisme et le caractère énigmatique de l’œuvre de Mallarmé.

37L’étude préalable n’introduit pas véritablement les traductions, car celles-ci se déploient différemment. C’est en ce sens que mon titre reprend, sous forme d’interrogation, l’affirmation d’Holguín selon laquelle « Mallarmé est toujours énigmatique », puisque sous la plume du poète colombien, Mallarmé semble ne plus l’être, ou en tout cas l’être beaucoup moins.

Conclusion

38Pour conclure ce travail en cours, j’aimerais signaler qu’en Colombie les traductions d’Andrés Holguín sont toujours citées et reprises et qu’elles sont, en quelques sorte, canonisées.

39Elles sont diffusées sous la forme de rééditions. En effet, la présente anthologie a été rééditée en 1977 (Bogotá, Ediciones Baal). Il s’agit d’une édition illustrée25 que je n’ai pas pu consulter. Il y a eu une troisième réédition en 1995, sous le titre Antología de la Poesía Francesa (Bogotá, El Áncora Editores)26, certains auteurs ont été supprimés de cette édition bilingue27, mais d’après mes sources celle-ci inclut toujours Mallarmé28. On y mentionne cette fois clairement l’auteur («Traducción, selección y notas de Andrés Holguín»29).

40Parallèlement, la réception critique considère toujours cette œuvre comme «una de las antologías más ambiciosas que se han realizado en Colombia, o en cualquier otro país de habla hispana, sobre la tradición poética de Francia»30, et continue de commenter la qualité des traductions d’Holguín, qui semblent donc ne pas avoir vieilli.

41Lors de la réédition de 1995, la revue Semana considère qu’il s’agit « tal vez [de] una de las más completas y de mejor calidad que se hayan hecho en idioma español. Pues Holguín, cosa curiosa, fue mejor traductor de poesía que poeta »31. Des affirmations du même type seront formulées en 2009, dans la revue Viandantes (Publicación del grupo de estudios de literatura colombiana32) : « A pesar de que es arriesgado afirmarlo, es claro que Holguín presenta una traducción hermosa, sujeta al original tanto en estructura como en belleza ».

42En 2010, dans la revue Sociedad latinoamericana, le poète et essayiste colombien Raúl Henao présente Holguín comme un anthologue et traducteur d’exception et signale que l’ouvrage fait partie des « hitos importantes difíciles de superar en un medio que ya a punto de finalizar la primera década del siglo xxi continúa gravitando en torno de lo localista y provinciano de su cultura »33. Cette anthologie qui fait référence est entrée dans le patrimoine de la littérature colombienne, comme le souligne en 2009 la revue Viandantes :

la agudeza y el tacto fino que requiere una traducción –y que logra Andrés Holguín– son en sí un acto de creación literaria tan complejo, que logra incluso despertar “esas leves sacudidas de asombro que esperamos”, y si a esto le agregamos –como ya lo dije– el oficio de la crítica, que también es un acto literario, tendremos una justificación de por qué ésta antología de la poesía francesa hace parte de la literatura colombiana.

43On comprend ainsi pourquoi les traductions d’Holguín sont toujours reproduites, citées, et proposées sur de très nombreux sites hispano-américains consacrés à la poésie ou à la littérature.

Bibliographie

Alexandre Didier (dir.), L’Anthologie d’écrivain comme histoire littéraire, Bern, Peter Lang, 2011.

Baudelaire Charles, Las flores del mal, trad. Andrés Holguín, Bogotá, Instituto Colombiano de Cultura, 1976.

Esclasans Agustí de, Las prosas de Stéphane Mallarmé, Barcelona, Aymá, 1942.

Guarner Luis (ed.), Antología de poetas franceses, Barcelona, Fama, 1958.

Gutiérrez-Girardot Rafael, « Sobre una antología », Estravagario (Revista Cultural El Pueblo), 9, Cali, 23 mars 1975, p. 5 (reproduit dans Aquelarre. Revista del centro cultural de la Universidad de Tolima, 4-8, 2005.

Henao Raúl, « Andrés Holguí y el canon poético colombiano », Revista Sociedad Latinoamericana, 2010 http://sociedadlatinoamericana.bligoo.com/content/view/1129421/Andres-Holguin-y-el-canon-poetico-colombiano.html.

Holguín Andrés, Poesía francesa. Antología, Madrid, Guadarrama, 1954.

Holguín Andrés, Las mejores poesías colombianas, 2 vols., Lima, Talleres Gráficos Torres Aguirre, 1959

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Vrinat-Nikolov Marie, Miroir de l’altérité : la traduction, Grenoble, ELLUG, 2006.

Notes

1 Claudine Lécrivain, « La réception de Mallarmé en Espagne », Revue d’Études Françaises, CIEF de l’Université Eötvös Lorand, Budapest, 5, 2000, p. 65-77.

2 Stéphane Mallarmé, Poesía, sel., trad. y pról. Xavier Salas, Barcelona, Yunque, « Poesía en la Mano » n13, 1940.

3 Agustí de Esclasans, Las prosas de Stéphane Mallarmé, Barcelona, Aymá, 1942.

4 Las ventanas, trad. José M. Caballero Bonald, Platero. Revista Literaria Gaditana, 4, abril 1951 ; Angustia, trad. Carlos E. de Ory, Acanto, Madrid, 10, 1947 ; reproduit dans Platero, 13, janvier 1952.

5 Antología de poetas franceses, selección y traducción Luis Guarner, Barcelona, Fama, 1958.

6 La publication en Espagne de cette anthologie mise au point par un poète colombien met en évidence une question territoriale assez complexe, comme souvent en ce qui concerne les relations littéraires espagnoles et hispano-américaines.

7 André Lefevere, Traducción, reescritura y la manipulación del canon literario [1992], Salamanca, Ediciones Colegio de España, 1997 ; Gideon Toury, Los estudios descriptivos de traducción y más allá. Metodología de la investigación en estudios de traducción [1995], Madrid, Cátedra, 2004 ; Mary Snell‑Hornby, The Turns of Translation Studies. New Paradigms or Shifting Viewpoints?, Amsterdam / Philadelphia, Benjamins, 2006.

8 Paul Valéry, 4 maestros franceses: Stendhal, Baudelaire, Verlaine, Mallarmé, Bogotá, Librería Suramericana, 1944 (trad. de Variété II, 1929) ; Poesía francesa. Antología, Madrid, Guadarrama, 1954 ; La poesía de François Villon. Ensayo biográfico-crítico y traducciones, Bogotá, Universidad de los Andes, 1968 ; Baudelaire, Las flores del mal, Bogotá, Instituto Colombiano de Cultura, 1976.

9 Las mejores poesías colombianas, 2 vols., Lima, Talleres Gráficos Torres Aguirre, 1959 ; Antología crítica de la poesía colombiana, 1874-1974, 2 vols., Bogotá, Biblioteca del Centenario del Banco de la República, 1974 ; Himnos al sol, Bogotá, Editorial Revista, 1970 ; Nueva aventura y otros poemas, Bogotá, Eds. Tercer Mundo, 1977 (anthologie de sa propre création poétique).

10 Sonja Karsen, « Guillermo Valencia: el poeta como traductor », Thesaurus, XL, 2, 1985, p. 350 ; Hector H. Orjuela, Las antologías poéticas de Colombia, Bogotá, Instituto Caro y Cuervo, 1966.

11 Les préfaces représentent une « mine d’informations concernant aussi bien les représentations qu[e les traducteurs] ont de leur propre pratique, de leur statut et de leur activité, que leur projet et leur position traductive, les enjeux de la traduction à telle ou telle époque » (Marie Vrinat-Nikolov, Miroir de l’altérité : la traduction, Grenoble, ELLUG, 2006, p. 9).

12 Poesía francesa…, p. 191. Dans cette étude, toutes les citations en français des propos d’Andrés Holguín dans l’anthologie étudiée correspondent à ma propre traduction.

13 « Síntesis de la poesía colombiana », dans le recueil Las formas del silencio y otros ensayos, Caracas, Monte Avila Editores, 1969, p. 171-192 (p. 171).

14 Ce critère d’intuition poétique fut fortement critiqué dans un compte-rendu de Rafael Gutiérrez Girardot, publié la même année : « En este caso la intuición estética no resulta ser la `suprema forma de conocimientoˊ, sino lo que es la intuición en general, la suprema forma del desconocimiento ». Voir « Sobre una antología », en Estravagario (Revista Cultural El Pueblo), 9, Cali, 23 mars 1975, p. 5 (reproduit dans Aquelarre. Revista del centro cultural de la Universidad de Tolima, 4-8, 2005 ; en ligne, http://desarrollo.ut.edu.co/tolima/hermesoft/portal/home_1/rec/arc_17674.pdf>. )

15 Poesía francesa…, p. 346. Vingt ans plus tard, dans son Antología, Holguín reprend cette affirmation sur Mallarmé : « Pero también en el simbolismo hay varias vertientes: la rebelde, violenta, cerebralizada, de Arthur Rimbaud; la emotiva, sensual, musical, de Paul Verlaine; la hermética, de Mallarmé ».

16 Paul Valéry, Œuvres [1957], Paris, Gallimard, La Pléiade, vol. 1, 1980, p. 636-638.

17 Michel Murat, « Les anthologies de la poésie française d’André Gide et Marcel Arland », dans Didier Alexandre (dir.), L’Anthologie d’écrivain comme histoire littéraire, Bern, Peter Lang, 2011, p. 19-37.

18 Alfonso Reyes signalait déjà, à propos des traductions de Mallarmé, que le premier traducteur exerce une forte attraction sur le deuxième, qui essaie de lui échapper en proposant de nouvelles traductions qui prennent, en quelque sorte, le contre-pied des premières. La première traduction fonctionne donc comme aimant-repoussoir où se jouent déjà les traductions à venir (« Mallarmé en castellano », Revista de Occidente, 37-110, 1932, p. 190-219).

19 Le poème fut composé en 1865 et publié dans Le Parnasse contemporain : recueil de vers nouveaux, éds. Catulle Mendès et Louis-Xavier de Ricard, éd. Alphonse Lemerre, Paris, 1866 ; Stéphane Mallarmé, Œuvres complètes [1945], Paris, Gallimard, La Pléiade, 1979, p. 1432-1433.

20 Composé en février 1864 et publié en mai 1866 dans Le Parnasse contemporain sous le titre À celle qui est tranquille, et à partir de l’édition des Poésies (Revue Indépendante, 1887) sous le titre Angoisse, dans Stéphane Mallarmé, Œuvres complètes, p. 1426.

21 Composé en 1876 et initialement publié aux États-Unis, en 1877 (Œuvres complètes, p. 1492.)

22 « Il fait songer à un Baudelaire plus condensé et d’une sonorité plus délicate » (Paul Valéry, Œuvres, p. 665.

23 Le titre original À celle qui est tranquille fut visiblement imité de À celle qui est trop gaie de Baudelaire. Il semblerait que Mallarmé modifia le titre pour « débaudelairiser » son œuvre (Stéphane Mallarmé, Œuvres complètes, p. 1426).

24 « Debemos disentir de él en lo que respecta a lo superficial o simplista de las conclusiones a las que llega tomando como referente o pretexto la obra del poeta [Porfirio Barba Jacob]. Nos referimos a aquella tesis suya tan obvia que dictamina que ˋla mejor poesía deriva del dolorˊ. O aquel postulado estético suyo de que ˋcomo otra Venus la mejor poesía emerge del agua salada de las lágrimasˊ » (Raúl Henao, « Andrés Holguín y el canon poético colombiano », Revista Sociedad Latinoamericana, 2010 ;
http://sociedadlatinoamericana.bligoo.com/content/view/1129421/Andres-Holguin-y-el-canon-poetico-colombiano.html.)

25 El Tiempo, 5 de noviembre de 1995 http://www.eltiempo.com/archivo/documento/MAM-445874.

26 Certains fragments de l’anthologie de 1954 ont été publiés séparément (après la mort d’Holguín), notamment la section consacrée à Baudelaire : Poesía escogida [1995], Bogotá, El Áncora, 2011.

27 El Tiempo, 5 de noviembre de 1995. Voir la note 27.

28 http://leerliteraturacolombiana.blogspot.com.es/2009/03/antologia-de-la-poesia-francesa-de.html.

29 http://www.semana.com/cultura/articulo/un-acierto/27039-3.

30 Ibid.

31 Ibid.

32 Voir la note 27.

33 http://sociedadlatinoamericana.bligoo.com/content/view/1129421/Andres-Holguin-y-el-canon-poetico-colombiano.html.

Pour citer ce document

Claudine Lécrivain, « « Mallarmé est[-il] toujours énigmatique ? » : le recueil Poesía francesa. Antología (1954) d’Andrés Holguín » dans « Mallarmé en traduction (aire hispanique) », « Travaux et documents hispaniques », n° 5, 2013 Licence Creative Commons
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Quelques mots à propos de :  Claudine Lécrivain

Universidad de Cádiz
Claudine Lécrivain, maître de conférences à l’Université de Cadix (Espagne), a publié récemment des travaux portant sur différents rapports à l’altérité. Ils concernent la traduction et réception de la littérature française et francophone en Espagne (« Réception des traductions et appartenances communautaires : étude de trois collections de catalogues éditoriaux espagnols », 2010 ; « Exterritorialité et médiation éditoriale », 2010) ; les migrations dans la littérature marocaine (« Des chevreuils égarés aux yeux éblouis : les clandestins entre humanité et animalité », 2010 ; « Romans marocains et passage du détroit : déambulation à la lisière des frontières ? », 2012) et le discours touristique (« Andar y desandar el tiempo: la contribución de una revista de viaje a la construcción de la alteridad », 2011 ; « El público francófono ante el escenario turístico andaluz: ¿el litoral tras las bambalinas? », 2013).