2 | 2016
Littérature et événement

Ce volume recueille les communications présentées lors du colloque international « Littérature et événement » organisé par l’équipe, à l’initiative d’Anne-Laure Tissut, Hervé Cantero et Karim Daanoune, en novembre 2015 à la Maison de l’Université de Mont-Saint-Aignan.

This volume gathers the papers given at the international conference “Littérature et événement” organised by the ERIAC research center and managed by Anne-Laure Tissut, Hervé Cantero and Karim Daanoune, that took place in November 2015 at the Maison de l’Université in Mont-Saint-Aignan.

Couverture de

2 | 2016

De l’événement à la surprise : le trauma et son expression

Natalie Depraz


Texte intégral

Introduction

Et les hommes […], de quels mouvements ne sont-ils pas agités dans le sommeil ! Que de vastes projets formés et exécutés dans les rêves ! Ils s’emparent des rois ou deviennent leurs prisonniers, ils se jettent dans la mêlée, crient comme des gens qu’on égorge. Beaucoup se débattent, gémissent de douleur et comme sous les dents cruelles d’une panthère ou d’un lion, ils emplissent l’air de leurs cris. D’autres s’entretiennent en songe d’importantes affaires et dénoncent souvent leurs propres crimes. Il en est qui marchent à la mort, certains croient, épouvantés, tomber du haut des montagnes et, de tout leur poids, s’écraser à terre ; tirés du sommeil, ils reprennent avec peine leurs esprits, tant l’émotion les a bouleversés.

1Dans cette évocation saisissante, le poète et philosophe latin épicurien du Ier siècle avant J.-C. Lucrèce met en scène les cauchemars qui habitent les êtres humains. Il insiste tout particulièrement sur des scènes de terreur, de douleur, d’épouvante voire de mort, et sur le bouleversement corporel intense, tout à la fois moteur et émotionnel qui les accompagne, et qui rend difficile le retour à la conscience lors du réveil, comme lors d’un blanc d’antenne. Il n’est pas anodin que, dans ces vers 1005 à 1020 du De Natura Rerum, ces moments de violence émotionnelle intense que l’on nomme aujourd’hui volontiers des situations traumatiques soient révélés à l’occasion de l’activité onirique du sujet, comme si le moment même du trauma était en lui-même difficile à ré-investir directement, comme si le rêve, lieu des remontées psychiques préconscientes, on le sait depuis la psychanalyse, était un canal privilégié pour faire émerger à la conscience ce qui le plus souvent fait l’objet d’un « refoulement » par l’individu.

2À cet égard, ce qui avec Lucrèce se présente comme la narration d’un moment récurrent de la vie nocturne de l’être humain, lieu de révélation et de figuration d’un trauma antérieur, s’est trouvé justement théorisé par le fondateur de la psychanalyse, Sigmund Freud, sous l’expression technique de la « névrose traumatique » :

[La] névrose traumatique commune […] offre deux traits sus­ceptibles de nous servir de guides, à savoir que la surprise (Überraschung), la frayeur (Schreck) semblent jouer un rôle de premier ordre dans le déterminisme de cette névrose et que celle-ci paraît incompatible avec l’existence simultanée d’une lésion (Verletzung) ou d’une blessure (Wunde)1.

3L’auteur de Au delà du principe de plaisir décrit ici avec précision le mécanisme psychique (non-organique) qui conduit à ce qu’il nomme alors une « névrose traumatique », et qu’on appelle aujourd’hui un « trouble de stress post-traumatique » (PTSD). Il en cerne la source dans l’expérience d’une « surprise » qui est d’emblée évaluée négativement sous le registre de la « frayeur », et qui correspond au moment même du trauma, lequel n’est pas d’abord corporel, comme le serait une blessure organique. Selon Freud, c’est cette surprise-frayeur qui détermine principalement ce que l’on diagnostiquera ensuite, à titre de symptôme, comme une « névrose traumatique » (PTSD).

4Et Freud de préciser ce qu’il convient d’entendre par cette surprise-frayeur d’abord psychique :

On considère généralement les mots frayeur, peur (Furcht), angoisse (Angst) comme des synonymes. En quoi on a tort, car rien n’est plus facile que de les différencier, lorsqu’on les considère dans leurs rapports avec un danger. L’angoisse est un état qu’on peut caractériser comme un état d’attente de danger, de préparation au danger, connu ou inconnu ; la peur suppose un objet déterminé en présence duquel on éprouve ce sentiment ; quant à la frayeur, elle représente un état que provoque un danger actuel, auquel on n’était pas préparé : ce qui la caractérise principalement, c’est la surprise. Je ne crois pas que l’angoisse soit susceptible de provoquer une névrose traumatique ; il y a dans l’angoisse quelque chose qui protège contre la frayeur et contre la névrose qu’elle provoque2.

5En proposant dès 1920 de distinguer clairement la surprise-frayeur, effet immédiat d’un danger actuel, de l’angoisse et de la peur, états d’attente indéterminée ou déterminée d’un événement à venir, Freud, non seulement anticipe la distinction heideggerienne de l’angoisse et de la peur dans Etre et temps en 1927, mais il offre un contexte d’entente de la surprise-frayeur-trauma fortement hétérogène à ce que Heidegger nommera « événement » (Ereignis) dans les Beiträge (1936-1937) : un advenir à soi absolument singulier depuis le déploiement des possibilités de son être, lors même que dans Être et temps plus tôt, en 1927, l’événement est le plus souvent pensé dans son sens courant objectif ontique : ce qui se produit.

6En effet, l’angoisse, affect situé temporellement en amont d’un événement imminent et répondant à la phase temporelle de l’attente protentionnelle, protège, comme le note remarquablement Freud, du trauma à venir, et crée ainsi un contexte de non-émergence d’une névrose traumatique. C’est le constat parallèle de S. Ferenczi qui, dès 19163, développe l’argument miroir de l’absence d’anticipation du trauma pour un ego trop assuré de lui-même, trop fort, en lien avec une confiance excessive. Bref, c’est l’individu trop confiant, sans angoisse, qui risque un trauma. Pour prolonger l’analyse de Ferenczi par celle de Freud, alors que l’angoisse crée une attitude de préparation interne au sujet, son absence peut placer ce dernier dans un état de non-relation à lui-même qui est la condition exacte de la frayeur-surprise traumatique – cette dernière, on l’a vu, étant elle-même la condition de la névrose traumatique qui perpétue l’état de non-liaison sous la forme d’une « compulsion de répétition » structurelle.

7C’est justement cette réalité close et séparée, non-reliée du trauma, sur laquelle insistera Jacques Lacan à la suite de Freud dès 1953-1954, puis plus tard dans son Séminaire XI en 1973 :

[…] le réel se présente sous la forme de ce qu’il y a en lui d’inassimilable – sous la forme du trauma, déterminant toute sa suite, et lui imposant une origine en apparence accidentelle […]4.

8Dans son premier séminaire, Les écrits techniques de Freud (1953-1954), Lacan rappelait déjà l’expression freudienne de Prägung pour définir la « frappe de l’événement traumatique originaire » : une frappe qui m’atteint avec violence et contre toute attente5. Le trauma est ici synonyme de l’inassimilable et a pour nom « le réel », littéralement ce qui s’imprime en moi (Prägung). Il arrive « contre toute attente » (Freud disait déjà : la frayeur, je n’y suis pas préparé), mais ici, Lacan insiste aussi sur les traces qu’il laisse : déterminant toute la suite, impliquant ses « répercussions » dans la vie future de l’individu.

9À la suite de l’approche psychanalytique du trauma, et en étroite proximité avec elle, les philosophes Emmanuel Levinas et Henry Maldiney développent une phénoménologie du trauma placée sous le signe de la rupture radicale in-appropriable et de l’effraction vertigineuse, lesquelles posent le problème, non seulement de l’accès à l’expérience traumatique, mais de sa description. Comment rendre compte d’une réalité à laquelle on n’a pas accès ? Dès lors, peut-on même parler d’une « phénoménologie » du trauma, laquelle suppose l’accès à l’expérience et sa description possible ?

10Ainsi, c’est dès 1974, dans Autrement qu’être ou au-delà de l’essence, que Levinas propose un concept de « passivité » plus radicale que la seule réceptivité husserlienne entendue comme ouverture disponible, et rend ainsi compte autrement de l’expérience du trauma. En des formulations frappantes où affleure une dimension fortement incantatoire, le penseur de l’éthique de la démesure offre une écriture poïetique de l’emphase prophétique apte à faire résonner la puissance non-représentable du trauma :

Passivité dont la source active n’est pas thématisable. Passivité du traumatisme, mais du traumatisme qui empêche sa propre représentation, du traumatisme assourdissant, coupant le fil de la conscience qui aurait dû l’accueillir dans son présent6.

La persécution est un traumatisme – violence par excellence sans avertissement ni a priori, sans apologie possible, sans logos7.

Le réel précédant et surprenant le possible – ne serait-ce pas la définition même du présent ? ; […] à travers les filets tendus de la conscience, traumatisme qui m’a absolument surpris, l’ordre n’a jamais été représenté, car il ne s’est jamais présenté – pas même dans le passé venant en souvenir8.

11Comme Lacan, Levinas montre l’inassimilable du trauma : son aspect non-thématisable, non-représentable. Comme Lacan, Levinas use du terme « réel », entre guillemets, comme s’il s’agissait d’un emprunt. Sa spécificité : une insistance emphatique sur la « passivité de la passivité » du traumatisme, une mise en évidence de son caractère immémorial. On ne peut pas se faire une représentation du traumatisme car il n’a jamais été présenté au sujet : pas d’expérience, pas de perception, pas de souvenir conscient. Le trauma est im-mémorial au sens de non-mémorable. D’où un réel in-intégrable par la conscience, un présent qui n’a pas eu lieu, une surprise qui se formule en verbes plutôt qu’en noms, qui n’a pas de lieu au sens d’un état, d’une identité de substantif, qui tient tout entière dans son processus insaisissable.

12Quant à Henry Maldiney, le trauma est pour lui effraction du non-sens9 qui laisse l’être béant, déchirure non-raccommodable de la trame du monde :

L’événement d’une sensation, dans sa proximité, est un événement de tout le fond du monde, comme lorsqu’au détour d’une rue, un visage, une voix, une flaque de soleil sur un mur ou le courant du fleuve, déchirant tout d’un coup la pellicule de notre film quotidien, nous font la surprise d’être et d’être là. Le réel, c’est ce qu’on n’attendait pas – et qui toujours pourtant est toujours déjà là10.

La rencontre ouvre la faille nécessaire à la surprise en la comblant. Elle comble originairement par cette ouverture même. Ce que nous attendons, c’est quelque chose à quoi nous ne puissions pas nous attendre : la déchirure de la trame de l’étant […]. Or, qu’est-ce qui, à chaque fois, déchirant la trame de l’étant, s’ouvre au jour de la déchirure ? – L’ÉVÉNEMENT11.

[…] un événement-avènement est une rupture de la trame du monde, une déchirure dans l’éclair de laquelle apparaît quelque chose12.

La vie comporte, par essence, des ruptures, des discontinuités, qui sont autant de failles où le vivant est mis en demeure d’être ou de s’anéantir13.

13Ce qui caractérise la compréhension de Maldiney par différence d’avec les auteurs précédents, c’est la non-distinction entre la surprise et l’événement, ainsi que l’absence explicite du vocabulaire du trauma, quoique les termes de blessure, de faille, de déchirure soient omniprésents. Par ailleurs, l’expérience non-nommée du trauma résonne fortement avec la dimension pathique de l’existence, assumée quant à elle. Et cette expérience est mise en scène au cœur de l’ouverture de l’espace plutôt que du seul temps. Autre différence avec Heidegger : la surprise-événement concerne le vivant dans son entier, et pas seulement l’homme. Alors que l’auteur de Être et temps14 et des Problèmes fondamentaux de la métaphysique réserve la surprise à l’animal (Benommenheit = stupeur, hébétude) et à la réaction quotidienne du corps sursautant, et parle d’étonnement pour rendre compte de l’ouverture ontologique au monde, Henri Maldiney refuse cette discontinuité et fait de la surprise une effraction qui ouvre le monde.

14En présentant ces différentes propositions d’entente de la surprise traumatique, aussi bien dans le champ de la psychanalyse que de la phénoménologie, on aura offert un début de réponse aux questions suivantes, qui ouvrent notre réflexion.

15Pourquoi en effet, pour commencer, parler de surprise plutôt que d’événement ? Je voudrais dans cette contribution montrer que la surprise a des caractéristiques corporelles, affectives et intersubjectives qui lui sont inhérentes, et qui permettent de rendre compte du trauma comme une surprise radicale et négative.

16Pourquoi ensuite parler de trauma plutôt que d’événement ? Pour les mêmes raisons que pour la surprise, avec ceci de plus que le trauma qui, comme l’événement, peut être entendu comme relevant de l’irreprésentable, de l’indicible, auto-exige son expression. Tout en effet dans notre culture et nos pratiques thérapeutiques nous enjoint à l’expression du trauma, de quelque sorte que ce soit. Il y a donc ce paradoxe aigu du trauma, surprise négative radicale, surprise intensément corporelle et affective, qui réclame son expression, et cette expression sera là où le soi se rassemble sinon se guérit. Là où l’événement a contrario se tient en lui-même dans un temps sans corps et sans affect, et se contient dans l’indicible.

De l’événement à la surprise

17La question a lieu de se poser : pourquoi parler de surprise plutôt que d’événement ? Non seulement en vertu de l’usage courant du terme “événement” pour qualifier tout moment, toute situation qui fait irruption, qui interrompt le cours quotidien et habituel de nos activités, et qui a effectivement un caractère unique et singulier, mais aussi parce que, de fait, la surprise partage avec ce dernier un certain nombre de caractéristiques, dont la singularité. Evénement et surprise sont des réalités qui relèvent du temps discontinu, et peuvent être communément nommées en termes de rupture, de brèche, voire de déchirure ou de faille. À cette première caractéristique commune s’en adjoignent deux autres : l’événement comme la surprise, relevant du temps de l’instant, nous confrontent à l’impossibilité de leur expérience au moment même de leur advenue. On dira qu’il y a un blanc d’antenne, une syncope, quelque chose qui se produit sans que je sois là pour l’expérimenter en conscience, et à quoi je peux seulement me rapporter après-coup. On dira aussi que ce sont des « non-expériences », des « non-vécus » au moment même. En tout cas, si l’on souhaite parler d’une expérience ou d’un vécu de la surprise et de l’événement, il conviendra de disposer d’un concept de présent qui ne se limite pas à un instant ponctuel, mais qui inclut une durée, aussi minime soit-elle, suffisante en tout cas pour permettre à l’esprit de se ressaisir, de se « retrouver », quelque chose comme une « rétention » qui maintient l’instant et lui confère l’épaisseur d’un vécu. Par suite, la troisième caractéristique que partagent surprise et événement, c’est leur caractère structurellement irreprésentable, in-intégrable à la conscience immédiate, et leur seule appropriation possible dans une conscience d’après-coup.

18Ces trois caractères communs (temps discontinu, non-expérience, irreprésentabilité pour la conscience) offrent une plate-forme d’intelligibilité depuis laquelle on peut mieux apercevoir leur différentiel.

19Celui-ci tient en trois déplacements principaux : tout d’abord, de l’événement à la surprise, l’accent se déplace du temps, majeur avec l’événement, au corps affecté et altéré, majeur dans la surprise. En effet, le terme événement, du latin « evenire » contient en lui-même ce sens temporel de ce qui vient et advient. En revanche, le mot surprise recèle une sémantique d’un tout autre ordre, ancrée dans la prise (du latin capere, prendre), mais décliné au passif de l’être-pris. C’est cette passivité d’un subir qui est ce qui affecte et altère le sujet sur-pris, littéralement pris au dépourvu. C’est tout l’être du sujet qui est surpris, corps et psychisme, motricité et affect ; deuxièmement et par suite, l’ancrage fortement corporel et affectif de la surprise confère à cette dernière une valence qui est inhérente à sa structure : s’il y a de l’affect associé intimement à la surprise, celle-ci inscrira la valence +/- en elle : bonne ou mauvaise, joyeuse ou triste, merveille ou terreur. Par contraste, l’événement n’inclut pas en lui-même, de façon interne, une valence : il est neutre par rapport à toute polarisation affective. Enfin, troisièmement, la surprise a une structure intrinsèquement relationnelle : pour qu’il y ait surprise, il doit y avoir une extériorité qui en est la condition factuelle, qu’il s’agisse d’une chose ou d’un être humain. Telle est la composante d’altérité interne à la surprise, qui contribue par là même à altérer le sujet surpris. En revanche, l’identité de l’événement est son unicité et sa singularité, ce qui lui confère la structure d’un individu séparé plutôt qu’intrinsèquement relié.

20Depuis ces différences structurelles, je m’engage à présent dans une phénoménologie de la surprise plutôt que de l’événement. Comme en témoigne cette phrase remarquable de Charles Le Brun dès 1667 qui décrit les manifestations corporelles de l’être-surpris : « La bouche fort ouverte fait voir le saisissement du cœur », il y a une phénoménologie spécifique de la surprise qui contient des composantes organique, affective et intersubjective, et qui ne sont pas présentes dans l’événement.

21Dans un article co-signé avec W. Friesen, « Constants across cultures in the face and emotion » (1971)15, P. Ekman mène une enquête empirique qui prend appui sur des photographies d’expressions de visage à travers les différentes cultures, et il identifie notamment les expressions de surprise chez plusieurs centaines de sujets.

22Ces expressions de surprise d’ordre corporel, émotionnel et intersubjectif, associées à des émotions diverses, peur, tristesse, joie, colère, dégoût, sont clairement inscrites physiologiquement dans le sursaut, la température du corps, le cœur qui bat, les yeux écarquillés voire effarés, la bouche ouverte, les sourcils haussés.

23Le modèle de la surprise que je propose procède directement de ce constat. En effet, la surprise est communément mise en équation avec un événement dit « inattendu » ou se produisant « contre toute attente ». Elle équivaudrait à un choc instantané abstrait du flux temporel qui nous traverse. Par contraste, mon hypothèse s’énonce ainsi : la surprise, qu’en tant que sujet j’éprouve spontanément comme une brèche dans le flux continu du temps, est en tant que brèche structurellement liée à ce que je viens tout juste d’éprouver avant la brèche, et qui y perdure (rétention), mais aussi à ce que j’éprouve juste après et qui procède justement de cette brèche (protention). C’est pourquoi je définis la surprise comme un processus plutôt que comme un événement isolé, ce processus prenant la forme d’une dynamique micro-temporelle corporelle, affective et relationnelle dépliée en sous-phases : ainsi, le temps de la crise, qui identifie la brèche comme telle, est directement reliée à son anticipation implicite et à sa résonance rémanente.

24Bref, la surprise est une dynamique structurée en trois micro-phases : a) une phase d’attention (attente ouverte polarisée émotionnellement en détente-sérénité/tension-anxiété), b) une phase de choc-rupture (blanc émotionnel-attentionnel), c) une phase d’émotion (résonance immédiate polarisée – soulagement/sidération – associée à des modulations attentionnelles). Dit simplement, il n’y a pas de surprise sans a) ce sur le fond de quoi elle s’enlève, à savoir un horizon attentionnel d’attente coloré d’émotion, une mémoire organique, un fond de présence latente à ce qui vient, b) un choc-rupture qui a tout d’un “blanc d’antenne” c’est-à-dire. d’un non-vécu, c) un effet corporel immédiat avec sa résonance émotionnelle, dont la valence peut aller du plus (soulagement) au moins (malaise), mais aussi de l’ordinaire (passer à autre chose : “move on”) à l’extrême (sidération), et se trouve tissée en arrière-plan par des régulations attentionnelles modulatoires diverses.

25Nous avons ainsi proposé ce modèle de la surprise16 fondé sur une dynamique en trois dimensions, et selon lequel les processus attentionnels (dimension 1) et émotionnels (dimension 2) se déploient selon une temporalité en trois phases (dimension 3) : anticipation, rupture, contrecoup.

Temps

Anticipation

Rupture

Contrecoup

Attention

Attente

Flottement-suspens attentionnel

Hyper-vigilance

Emotion

Tension-anxiété/Détente-sérénité

Blanc émotionnel

Sidération/Soulagement

De la surprise au trauma

26Depuis ce modèle de la surprise, nous partirons de l’hypothèse selon laquelle le trauma est une surprise radicale négative, et nous nous attacherons à en décrire la dynamique spécifique. La notion de trauma, du grec τραῦμα, désigne une « blessure » ou une « lésion » physique ou psychique, et l’expérience traumatique alias « traumatisme » définit généralement les conséquences et impacts de ce trauma :

tout blessé physique peut aussi être un blessé psychique, surtout s’il n’a pas perdu connaissance lors de l’accident, de l’agression ou de tout événement violent (viol, attentat, catastrophe), et qu’il a vécu, dans ce court instant et dans la surprise, une expérience d’imminence de mort sans échappatoire. Ce phénomène de désorganisation du psychisme qu’on dénomme trauma peut toucher non seulement les victimes, mais aussi les témoins et les intervenants […] qui ont été exposés directement à l’événement effrayant et horrifiant.

27Ainsi s’exprime Louis Crocq (2012, p. 7-8), psychiatre de terrain spécialiste réputé du trauma, dans l’Introduction de ses Seize leçons sur le trauma17, qui entérine ainsi la mise en équation freudienne puis lacanienne de la surprise et du trauma comme frayeur-effraction. Cependant, il le situe non seulement dans le psychisme interne et archaïque de l’individu, mais aussi dans la réalité situationnelle et relationnelle de ce dernier.

28Nous chercherons ainsi, dans ce qui suit, à caractériser plus avant la structure du trauma et la dynamique propre au traumatisme, en opérant pour commencer une distinction entre les deux, qui nous permettra de les articuler plus précisément.

29Si l’on part de l’entente psychanalytique du trauma et sa qualification levinassienne, le processus traumatique est identifié de façon nette par Freud en termes de « compulsion de répétition ». À cet égard, la notion de pulsion de mort contient une intuition juste, mais aussi une limite, car elle révèle un blocage dans cette compulsion et signifie une absence de lien dans le psychisme qui génère de la confusion. De même, la rigueur de Levinas, solidaire de ce point de vue de celle de Lacan, consiste à se tenir dans ce blocage définitif et à n’en point sortir : tel est le noyau indéfectible du trauma, qui en fait un irreprésentable, un inassimilable, une non-expérience, jamais présentée, et dès lors non-représentable, car reflétant une forclusion dans le soi. Ce faisant, on identifie bien une situation originaire du sujet-trauma, mais on ne décrit pas le sujet traumatisé, à savoir le processus traumatique qui renvoie quant à lui à une temporalité de la répétition, laquelle doit être décrite pour elle-même.

30En quoi consiste donc cette temporalité répétitive ? Quelle est sa structure ? Sa dynamique ? On connaît bien aujourd’hui les expressions récurrentes que l’on utilise ou qui reviennent dans les propos de personnes qui ont subi un traumatisme, notamment récemment dans le cadre des attentats meurtriers liés à l’État islamique : « ça tourne en boucle », « ça tourne à vide », « ça grippe », qui nomment l’absence d’identification et d’intégration du trauma.

31Cependant, ces expressions, aussi frappantes soient-elles dans la révélation du caractère obsédant c’est-à-dire émotionnellement intense du trauma, sont trompeuses en ce qu’elles laissent penser à un mécanisme de retour du même. La structure de répétition du traumatisme serait de l’ordre de la redondance et de la tautologie, comme si le sujet traumatisé ne cessait de vivre deux fois la même chose. Or, la répétition traumatique est tout sauf une redondance : elle opère une fragmentation du trauma qui repose sur le retour intensifié de certains éléments au détriment d’autres qui sont amnésiés. Ce morcellement crée une amplification et une déformation et entraîne une récurrence partielle qui a une dimension émotionnelle amplifiée. Par ailleurs, les modalités sensorielles qui sont suractivées le sont en deçà de la conscience explicite, sous forme d’éclairs visuels, sonores ou olfactifs. La temporalité répétitive traumatique est donc davantage de l’ordre d’une perdurance obsessive et hétérogène, jouant sur des associations aléatoires. Conclusion provisoire : la répétition traumatique relève d’une dynamique temporelle amnésique-hypermnésique associée à un émoussement ou au contraire à une hyper-vigilance attentionnels consécutifs au pic émotionnel initial du trauma. À ce stade, on peut identifier deux notions clés du temps traumatique : 1) la reviviscence ; 2) la chronicité. Plus structurellement, et en articulation avec la surprise, on pourrait dire que le trauma serait une surprise-limite dont la négativité radicale relève du non-sens et qui génère des micro-surprises en cascade.

32Ceci étant dit, il convient maintenant de présenter la cartographie de la dynamique spécifique du trauma, y compris irréductible à la surprise. À ce sujet, on peut souligner que, avec le trauma, il y a déplacement du modèle de la surprise eu égard au changement de format 1) temporel, 2) affectif, 3) imaginaire et 4) identitaire. En effet, la dynamique spécifique du trauma et, consécutivement, du traumatisme, est colorée négativement et plus radicalement que la dynamique de la surprise qui, on l’a vu, est bi-valente et peut aussi être anodine. De plus, sa temporalité ne se limite pas à une dynamique de trois micro-phases : anticipation, crise et après-coup, dotée de modalités attentionnelles diverses (focalisation, attente ouverte), et de composantes émotionnelles multiples, forte ou faible, rapide ou plus durable. Elle est lourde d’une sédimentation passive faite de latences, de cascades associatives sans règles, de rappels morcelés et partiels du souvenir-trauma, de retours compulsifs et chroniques du même fragment in-appropriable, de réactivations en boucle sans récupération identitaire visible.

33Plus spécifiquement, l’hypothèse de compréhension tient dans le déplacement de l’accent mis sur l’attention-attente-anticipation dans le modèle de la surprise à un accent porté sur l’allongement et la structure répétitive chronique temporelle liée à l’amplification émotionnelle ruminatoire du contrecoup dans le modèle du trauma. Dès lors, s’il y a majoration émotionnelle dans l’après-coup du trauma, il y a aussi allongement temporel, durée ruminatoire préconsciente et passive, et, par contraste, minorisation consécutive de l’aptitude attentionnelle, qui rend le sujet captif, aliéné et incapable d’oubli récupératif.

34Dès lors, si l’on insiste sur le trauma en tant que tel, on met l’accent sur la faille originaire qu’il est, et sa non-représentabilité. Si en revanche, on souligne le traumatisme, on introduira un processus de régulation possible du trauma. S’agit-il d’un mécanisme inconscient subi (refoulé) par le sujet, la temporalité traumatique étant absolument passive ? Ou bien le sujet a-t-il une action possible via une forme de “mémoire concrète” et une forme de réactivation même préconsciente, suscitée par exemple lors d’une verbalisation thérapeutique ? En d’autres termes, la force émotionnelle du choc en cascade génère-t-elle un trouble de l’attention, soit émoussement, soit au contraire hyper-vigilance ? Ou bien un mode d’attention reporté sur le trauma peut-il contribuer à le réactiver en vue de se le réapproprier, ce qui pourrait donner lieu à une verbalisation thérapeutique ?

Du trauma à son expression

35Nous nous trouvons donc face à deux hypothèses opposées relatives à l’expression du trauma. Soit l’hypothèse radicale de Lacan, selon laquelle le trauma est un fait qui relève d’un indicible définitif, soit la contre-hypothèse suivante : le trauma auto-exige son expression. Dans ce dernier cas, l’expression pourra être plurielle, et non-nécessairement verbale : expressivité corporelle (danse, modelage) ; expression éthique : témoignages, entretiens d’explicitation ; expression artistique : fiction littéraire (roman, journal), peinture, sculpture. D’où, parallèlement, une multiplicité de thérapies, corporelle, comportementale, artistique, verbale (hypnose).

36Dans le premier cas de figure, en revanche, le trauma est de l’ordre d’un indicible absolu, et le demeure. En effet, pour Lacan, le trauma s’identifie au « réel », et le réel, c’est « ce qui résiste absolument à la symbolisation »18 Ainsi, la Prägung, qui ne peut pas tout de suite être symbolisée, est atteinte « par un jeu rétroactif » : le trauma peut donc, après-coup (nachträglich), être réintégré au monde symbolique, mais il n’est pas pour autant intégré au sujet lui-même : « il prend sur le plan imaginaire sa valeur de trauma »19. À peine a-t-il réintégré le monde symbolique qu’une partie du monde symbolique, celle qui est réintégrée par le trauma, se détache du sujet :

Le trauma, en tant qu’il a une action refoulante, intervient après-coup, nachträglich. À ce moment-là, quelque chose se détache du sujet dans le monde symbolique même qu’il est en train d’intégrer. Désormais, cela ne sera plus quelque chose du sujet. Le sujet ne le parlera plus, ne l’intégrera plus. Néanmoins ça restera là, quelque part, parlé, si l’on peut dire, par quelque chose dont le sujet n’a pas la maîtrise20.

37Il y a donc une autonomie du signifiant. Le sujet ne peut jamais dire le trauma, il est parlé par lui, par un signifiant détaché du sens : le trauma n’est jamais dit ni représenté. Ainsi, la frappe qu’est le trauma, la Prägung, « n’a pas été intégrée au système verbalisé du sujet, […] n’est même pas montée à la verbalisation, et même pas, on peut le dire, à la signification »21.

38Mais il y a une autre hypothèse, celle selon laquelle le trauma contient intrinsèquement son expression, comme si le sujet, en tant qu’être humain vivant, était appelé à sortir de lui-même et à se transcender.

39À cet égard, Emmanuel Levinas, s’il souligne tant et plus la passivité radicale du traumatisme, lequel bloque son dit, s’ouvre cependant au Dire, dans une posture éthique qui relève du témoignage. Avec cette expression éthique, on a un antidote de taille au traumatisme. L’expression corporelle-organique quant à elle est une expressivité inhérente à la chair. Elle répond de l’intérieur à la blessure organique profonde du trauma, selon un corps à corps magnifiquement emblématisé par la « parole », qui est chez Merleau-Ponty continûment langage du corps (gestes, mimiques) et corporéité du langage (déictiques, exclamations, interjections, interrogations)22. L’expression verbale enfin, qui permet l’explicitation, qu’elle soit psychologique23 ou littéraire24, répond à la fonction thérapeutique globale de la verbalisation en créant du lien et en enclenchant la dynamique de régulation du vivant sujet, qui construisant à mesure une relation de guérison du trauma.

40On aura compris que l’auto-exigence expressive du trauma répond davantage à ma conception du vivant qu’est l’humain qu’une quelconque forclusion mortifère du trauma dans le sujet, qui a pour effet séparation et destruction. D’où le modèle dynamique de la surprise que j’ai présenté, entée sur ses structures internes : l’attention attente et l’émotion résonance, lesquelles œuvrent à la dynamique de régulation du vivant. C’est cette expressivité vitale qui opère la résilience de la coupure sur laquelle reste bloquée la posture abstraite d’un trauma originaire forclos sur soi.

Conclusion

41Dans la présente enquête sur le trauma comme surprise négative radicale et ses expressions revitalisantes voire résilientes, j’ai été grandement inspirée et nourrie par de nombreuses personnes, qui m’ont tout à la fois permis de prendre la mesure de la puissance conceptuelle et pratique de la psychanalyse sur ce sujet, mais aussi de percevoir la rigueur et l’originalité des apports phénoménologiques de Heidegger et de Levinas. Ces personnes m’ont ainsi permis de me situer quant à la surprise et au trauma et, pour cela, je voudrais les remercier. En premier lieu, Michel Haar et Françoise Dastur pour leurs contributions phénoménologiques pionnières au traumatisme et à la surprise-événement25. Plus récemment, ma réflexion a été fortement étayée par les propos vigoureux et rigoureux de Guy-Félix Duportail26 et de Simon Critchley, dont je voudrais, pour conclure, citer ces mots signifiants, tirés d’un chapitre de son livre intitulé « The Original Traumatism : Levinas and Psychoanalysis » :

For Freud, trauma is an economic concept, and refers to a massive cathexis of external stimulus that breaches the protective shield of the perceptual consciousness system or ego. Trauma is shock and complete surprise […] In Lacanian terms, trauma is the subjective affect or contact with the Real. It is the opening up of the ego to an exteriority that shatters its economic unity27.

Bibliographie

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Notes

1 Sigmund Freud, Au delà du principe de plaisir, Paris, Payot, 2001 [1920], p. 56.

2 Ibid.

3 Sandor Ferenczi, Further contributions to the theory and technique of psycho-analysis, transl. from the german, New York, Boni and Liverright publishers, 1927, chapter 1 : « Two Types of War Neuroses » (1916-19717), p. 134 sq.

4 Jacques Lacan, Séminaire XI, Les quatre concepts fondamentaux de la psychanalyse, Paris, Le Seuil, 1973, p. 65.

5 Jacques Lacan, Séminaire I, Paris, Seuil, 1975, p. 295.

6 Emmanuel Levinas, Autrement qu’être ou au delà de l’essence, La Haye, Nijhoff, Coll. Phaen., 1974, p. 175.

7 Op. cit., p. 195.

8 Op. cit., respectivement p. 42 et p. 189. A propos de la surprise et Levinas, cf. Natalie Depraz, « “Se laisser surprendre” avec Levinas : le “Dire” traumatique de la surprise », Colloque sur Autrement qu’être ou au delà de l’essence, Université de la Sorbonne, déc. 2013, D. Cohen-Levinas & A. Schnell éds., Paris, Vrin, 2016.

9 À propos de la surprise comme non-sens, cf. Natalie Depraz, « The Non Sense of Surprise », in Massimiliano Cappuccio et Tom Froese (eds.), Enactive Cognition at the Edge of Sense-Making, Palgrave MacMillan, 2014.

10 Henri Maldiney, Regard, parole, espace, Lausanne, L’Âge d’Homme, 1994 [1973], p. 152.

11 Henri Maldiney, Penser l’homme et la folie, Millon, 2007, p. 315-316.

12 Henri Maldiney, Penser l’homme et la folie, op. cit., p. 204.

13 Henri Maldiney, Penser l’homme et la folie, op. cit., p. 277-278.

14 Martin Heidegger, Sein und Zeit [1927], Tübingen, Niemeyer, 2001, § 68, p. [337], trad. fr. E. Martineau, Paris, Authentica, 1985, p. 237 ; la Benommenheit animale (emprise, hébétude, accaparement) renvoie à une surprise ontique en 1929 dans les Problèmes fondamentaux de la métaphysique ; la conférence de 1955 « Qu’est-ce que la philosophie ? » dans Questions II fait droit, en une recompréhension ontologique du pathos qu’est le thaumadzein des Grecs, à un Erstaunen humain et tient en une Stimmung fondamentale d’ouverture interrogative au monde.

15 Paul Ekman, Wallace V. Friesen, « Constants across cultures in the face and emotion » (1971/1993), Journal of Personality and Social Psychology, vol. 17, p. 124-129.

16 Thomas Desmidt, Maël Lemoine, Catherine Belzung, Natalie Depraz, « The temporal dynamic of emotional emergence », Phenomenology and the Cognitive Sciences, Emotion Special Issue, 2014, Springer, Heidelberg ; Natalie Depraz, Thomas Desmidt, « Cardio-phénoménologie », in La naturalisation de la phénoménologie 20 après, J.-L. Petit (éd.), Cahiers philosophiques de Strasbourg, no38, 2015 ; Natalie Depraz, Maria Gyemant, Thomas Desmidt. « A First-Person Analysis Using Third Person-Data as a Generative Method. A Case Study of Surprise in Depression », in Constructivist Foundations, vol. 12, no 2, A science of experience: Neurophenomenology, A. Riegler & C. Valenzuela (eds.), 2017, p. 192-218.

17 Louis Crocq, 16 leçons sur le trauma, Paris, Odile Jacob, 2012, p. 7-8.

18 Jacques Lacan, Séminaire I, Paris, Seuil, 1975, p. 110.

19 Jacques Lacan, Séminaire I, Paris, Seuil, 1975, p. 297.

20 Jacques Lacan, Séminaire I, Paris, Seuil, 1975, p. 197.

21 Jacques Lacan, Séminaire I, Paris, Seuil, 1975, p. 295.

22 Maurice Merleau-Ponty, La prose du monde, Paris, Gallimard, 1992 [1969].

23 Pierre Vermersch, L’entretien d’explicitation, Paris, ESF, 1994/2011.

24 Natalie Depraz, Écrire en phénoménologue, La Versanne, Encre marine, 1999.

25 Michel Haar, « L’obsession de l’autre. L’éthique comme traumatisme », Cahier de l’Herne Levinas, 1991, no 60, p. 444-453 ; Françoise Dastur, « Phénoménologie de la surprise : horizon, projection et événement », Études phénoménologiques, 1997, vol. 13, no 25, p. 59-75 et « Phénoménologie de la surprise : horizon, projection et événement », Alter. Revue de phénoménologie, no 24, « La surprise », N. Depraz (éd.), 2016.

26 Guy-Félix Duportail, Intentionnalité et trauma : Levinas et Lacan, Paris, L’Harmattan, 2005, notamment p. 16-22.

27 Simon Critchley, « The Original Traumatism: Levinas and Psychoanalysis », in Simon Critchley, Ethics-Politics-Subjectivity. Essay on Derrida, Levinas and Contemporary French Thought, London, Verso, 1999, p. 191.

Pour citer ce document

Natalie Depraz, « De l’événement à la surprise : le trauma et son expression » dans « Littérature et événement », « Lectures du monde anglophone », n° 2, 2016 Licence Creative Commons
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Quelques mots à propos de :  Natalie Depraz

Normandie Univ, UNIROUEN, ERIAC, 76000 Rouen, France
Membre Universitaire des Archives-Husserl (ENS-CNRS-Paris)
Professeure de philosophie contemporaine et de phénoménologie allemande et française à l’Université de Rouen (ERIAC), et Membre Universitaire des Archives-Husserl (ENS/CNRS/Paris). Elle a été en Délégation CNRS aux Archives-Husserl entre 2012 et 2014 en lien avec la Direction de l’ANR EMCO Emphiline (2012-2015), intitulée « La surprise au sein de la spontanéité des émotions : un vecteur de cognition élargie », qui a suscité un partenariat avec le CHU de Tours, en lien avec l’étude neuro et physiologique de la dépression comme hypo-réactivité à la surprise.