Sommaire
Appropriations de Corneille
Actes du colloque organisé à l’Université de Rouen en octobre 2014, publiés par Myriam Dufour-Maître
- Myriam Dufour-Maître Remerciements
- Collectif Le Festival Corneille de Barentin (1956-1975) et le Mouvement Corneille
- Myriam Dufour-Maître Introduction
- RÉCEPTIONS CRÉATRICES
- Sylvain Ledda Polyeucte, ou comment mettre en scène la violence ?
- Hélène Merlin-Kajman Comment déterminer ce qui est « religion » en littérature ? Réflexions à partir du cas de Polyeucte de Corneille
- Liliane Picciola De la « seconde Médée » à la « mamma souveraine […] suscitant l’horreur et le rire » : Rodogune au Petit Montparnasse en 1997
- Jacques Téphany Corneille, l’autre fondateur du TNP
- Roxane Martin Horace à l’épreuve des révolutions : les remaniements du texte et l’édification d’un Corneille patriote (1789-1799 vs 1848)
- Claire Carlin L’Illusion comique sur la scène du monde anglophone, entre traduction et « adaptation libre »
- Cécilia Laurin L’Illusion comique, « entre Platon et Hollywood » ? Du théâtre du monde au cinéma du monde : autour du film Illusion de M. A. Goorjian
- Julia Gros de Gasquet Filmer L’Illusion comique, réécrire Corneille ? À propos du film de Mathieu Amalric à la Comédie-Française (2010)
- Noëmie Charrié Le rêve d’une réappropriation : Othon sur les écrans
- Jean-François Lattarico De l’Horace (1641) à l’Orazio (1688). Prémisses de la réforme dans le premier dramma cornélien per musica
- Sarah Nancy Le Cid de Massenet, Gallet, d’Ennery et Blau : une appropriation amoureuse
- Mises en scènes et actualisation
- Réécritures, adaptations ou « inadaptations »
- LES DISCOURS D’APPROPRIATION
- Mariane Bury Le Corneille des historiens de la littérature au xixe siècle
- Michal Bajer Les contextes de la traduction. L’établissement de la tradition cornélienne en Pologne au tournant romantique : discours critique, pratiques éditoriales, péritextes
- Lise Forment Roland Barthes, Sans Corneille : les « résons » politiques d’un silence critique
- Bénédicte Louvat « L’invention » du dilemme cornélien
- Jean-Yves Vialleton Les exemples rhétoriques empruntés à Corneille et la construction de la mémoire collective
- Marie-Emmanuelle Plagnol-Diéval Un Corneille à l’usage de la jeunesse au tournant des xviiie et xixe siècles : quelques jalons
- Beate Langenbruch Corneille, auteur de concours
- Hélène Bilis Corneille aux États-Unis, ou quel « auteur classique » pour les campus américains ?
- La critique et l’histoire littéraire
- L’enseignement
Appropriations de Corneille
Le Festival Corneille de Barentin (1956-1975) et le Mouvement Corneille
Collectif
1Le Festival Corneille de Barentin (1956-1975) constitue un événement unique dans l’histoire du théâtre en Normandie. L’âme du projet est André Marie (1897-1974), député-maire de Barentin, ancien ministre de l’Instruction publique, résistant et déporté, féru de théâtre et ardent promoteur de la culture pour tous. André Marie crée en 1956 le « Cercle Pierre et Thomas Corneille », qui doit « perpétuer le souvenir de la vie et de l’œuvre de Pierre et Thomas Corneille ». La programmation du Festival Corneille relève de la gageure, puisqu’il s’agit d’abord de monter, au fil des années et pour une représentation le plus souvent unique, toute l’œuvre théâtrale de Pierre Corneille ou presque, mais aussi chaque année une pièce de Thomas Corneille. Au bout du compte, un nombre impressionnant de pièces sont montées, dont beaucoup n’avaient jamais été rejouées depuis le temps des Corneille…
2Car l’aventure dure vingt ans, portée avec enthousiasme et générosité par des dizaines de personnes, dont quatre personnalités marquantes : Jean Serge, ancien élève du lycée Corneille, directeur des Bouffes du Nord, journaliste, cinéaste et homme de théâtre novateur et audacieux, qui est le metteur en scène presque exclusif des spectacles ; Jacqueline Morane son épouse, tragédienne, qui fut élève de Jouvet et pensionnaire de la Comédie-Française ; Francis Grenet, peintre et décorateur de théâtre ; Ivan Morane, fils de Jean Serge et de Jacqueline Morane, qui débute comme comédien et assistant à la mise en scène en 1971, dans le cadre de ce festival1. Un nombre impressionnant d’acteurs ou de personnes célèbres participent à l’aventure, presque toujours bénévolement : Maurice Escande, Paul-Émile Deiber, Hélène Sauvaneix, Paule Noëlle, Philippe Dechartre, Paul Ecoffard, Alain Etcheverry, Alberte Aveline, Robert Hossein, Roger Hanin, Rita Renoir, Deschamps, Pierre Vaneck, Pauline Carton, Zappy Max, Rellys, Simon Eine, Renée Faure, Franck Fernandel, etc.
3André Marie a fait de Barentin une « ville-musée », « cité des arts » ponctuée de statues par Rodin, Bourdelle, Gromaire, Belmondo, Coustou, Drivier… Les statuts du « Cercle Pierre et Thomas Corneille » précisent de favoriser et « réaliser toutes constructions pouvant permettre la célébration devant de vastes publics des œuvres et des mérites des deux Tragiques Normands ». Le festival prend place d’abord dans le cadre dépouillé d’un parc dominant la vallée de l’Austreberthe et orné de dix-sept colonnes venues des Tuileries, les « Tuileries Courvaudon » récemment restaurées (3000 places). On joue ensuite au théâtre Montdory, ultramoderne à l’époque (600 places).
4Le festival connaît de rares fours, et davantage de succès, parfois retentissants comme ceux du Cid en 1956, de Cinna en 1965, mais aussi de ces pièces méconnues, comme Héraclius (rapproché par la critique de l’époque de Hitchcock et de Pirandello à la fois), Sophonisbe, cette « Jeanne d’Arc carthaginoise » en 1975, Le Baron d’Albikrac de Thomas Corneille en 1962, etc. La passion que suscite le festival dans la région se traduit aussi par une intense activité intellectuelle et créatrice en marge des représentations : conférences (ainsi « Les Corneille et les musiciens » en 1961 par Roland Manuel), « hommages », mais aussi pastiches et parodies, comme L’Impromptu de Barentin, Corneille c’était nous par Maurice Morisset, une « Complainte de la Toison d’or » par Jacques Brel, un 6e acte de Tartuffe par André Marie, etc. Le label « Festival national » obtenu dès 1957 confère à l’événement un écho plus large : les pièces sont diffusées par la radio nationale (« Théâtre et Université » puis France Culture). Des critiques importants comme Max Favalelli, Robert Kemp, Maurice Morisset, François Chalais, etc. signent de très nombreux articles dans les journaux nationaux.
5Après le décès d’André Marie en 1975, le festival se déplace vers Rouen et Le Havre. En 1982, Ivan Morane et Jean-Claude Guézennec fondent le Mouvement Corneille, association loi 1901, dont la vocation est de « faire connaître largement la personnalité et l’œuvre de Pierre Corneille » (art. 2 des statuts). Alain Niderst, Myriam Dufour-Maître et Evelyne Picciola en assurent successivement la présidence jusqu’aujourd’hui2.
Bibliographie indicative
6Beauregard Jean, « André Marie : un notable normand sous trois Républiques », dans Études Normandes, année 1986, no 35-2, p. 66-77.
1 Metteur en scène, comédien et auteur, Ivan Morane a signé plus de 50 mises en scène depuis 1974 au théâtre et à l’opéra. Il a dirigé plusieurs théâtres dont la Scène Nationale d’Albi, de 1996 à 2006. Il joue régulièrement comme comédien, et participe à de nombreuses lectures de textes classiques et contemporains. Dans de l’exposition « Corneille et nous », il a donné une lecture-spectacle d’extraits de Corneille, intitulée « Amoureux ! », avec Silvia Lenzi à la viole de gambe.
2 Voir le site du Mouvement Corneille, www.corneille.eu.
Actes du colloque organisé à l’Université de Rouen en octobre 2014, publiés par Myriam Dufour-Maître
© Publications numériques du CÉRÉdI, « Actes de colloques et journées d’étude », n° 24, 2020
URL : http://publis-shs.univ-rouen.fr/ceredi/index.php?id=808.