Deuxième partie : Cartes et tarots : imaginaire et représentations littéraires – Coord. scientifique : Sylvain Ledda

Les arcanes majeurs selon Ouspensky, Guaita et le Père Gabriele Amorth

Piero Latino


Texte intégral

1Au début du xxe siècle, le philosophe, mathématicien, mystique et ésotériste russe Pëtr Dem’janovič Ouspensky1 [ou Piotr Dem’ianovich Ouspensky (Uspenskij), 1878-1947] écrivit un ouvrage, Le Symbolisme du tarot2, dans lequel il présente son interprétation philosophique et métaphysique des vingt-deux arcanes majeurs3. Le présent article vise à faire connaître cette œuvre d’Ouspensky, qui n’a pas eu l’attention qu’elle mériterait au sein des études universitaires4, et vise, en outre, à introduire un autre ouvrage traitant du thème du tarot, Au seuil du mystère de l’écrivain et poète français Stanislas de Guaita (évoqué dans Le Symbolisme du tarot), et à voir enfin le point de vue sur la cartomancie non pas d’un ésotériste mais d’un homme de l’orthodoxie chrétienne, le Père Gabriele Amorth.

2L’ouvrage d’Ouspensky fut rédigé en 1911 et publié en 1913. Il retrace l’histoire du tarot qui s’insère au sein de ce que l’auteur russe nomme « littérature occulte et symbolique5 », à savoir « la littérature qui se base sur la reconnaissance de l’existence d’un savoir caché6 ». Il parle, en effet, d’une philosophie occulte cachée dans les symboles et les nombres du tarot, présenté comme le dépositaire d’un profond savoir alchimique, astrologique, théologique et hermétique.

3Soulignant qu’il existe différentes typologies de tarot, Ouspensky prend en considération notamment les tarots de Marseille, composés de soixante-dix-huit cartes, et affirme que ces cartes ne sont pas simplement des cartes à jouer inventées par les gitans illettrés du xive siècle : elles sont un livre dont le contenu est philosophique, métaphysique et psychologique. Leurs origines sont à chercher dans la sagesse de l’Égypte ancienne. Plus précisément, selon la légende évoquée par l’ésotériste russe, le Tarot représente « un ancien livre de hiéroglyphes égyptiens, composé de soixante-dix-huit tablettes qui sont miraculeusement parvenues jusqu’à nous7 ».

4D’après Ouspensky, le tarot est une « machine philosophique8 », un système qui habitue l’esprit à penser à une dimension supérieure, à l’existence de multiples dimensions qui vont au-delà du monde physique. La machine philosophique du tarot est, en effet, étroitement liée à la métaphysique, au mysticisme et, comme le souligne Ouspensky, même aux mathématiques et à la psychologie. La dimension métaphysique est donc étroitement liée à la dimension psychologique, puisqu’elle implique une transformation ontologique de l’être, de la psyché de l’individu. Cela conduit à développer la conscience, et dans Le Symbolisme du tarot, il est précisé que « l’enrichissement et la croissance de l’intellect consistent à développer sa capacité à trouver des analogies9 », par exemple, grâce à l’étude des quatre lettres cabalistiques du nom de Jéhovah10. Or si la compréhension du mystère de ces quatre lettres conduit à un développement de la conscience, cela signifie que même la compréhension des symboles du tarot vise à ce but. En effet, selon Ouspensky, la Kabbale, l’alchimie, la magie et l’astrologie convergent dans le tarot qui représente une combinaison de ces quatre sciences hermétiques. Ainsi, les quatre symboles du tarot (Bâtons, Coupes, Épées, Deniers) correspondent respectivement aux quatre principes de l’alchimie (feu, eau, air, terre) ; aux quatre lettres du nom de Dieu selon la Kabbale, c’est-à-dire Jéhovah (Yod, le principe active de l’initiative ; He, le principe passive de l’inertie ; Waw, le principe de l’équilibre, de la forme; He, le principe de l’énergie latente) ; aux quatre points cardinaux (nord, sud, est, ouest) de l’astrologie ; aux quatre typologies des esprits selon la magie, à savoir ceux du feu, de l’eau, de l’air et de la terre, correspondant respectivement, à leur tour, aux elfes, aux ondines, aux sylphides et aux gnomes11. Tous ces quaternaires se retrouvent aussi dans l’Apocalypse, avec les quatre bêtes : la première bête à tête de taureau, la deuxième à tête de lion, la troisième à tête d’aigle et la quatrième à tête d’homme. Or ces quatre principes sont inclus et fondus dans l’image du Sphinx du tarot12.

5Le Symbolisme du tarot d’Ouspensky n’est pas seulement une œuvre de vulgarisation, elle peut être considérée aussi comme une véritable œuvre littéraire. En effet, dans la deuxième partie de l’ouvrage, l’auteur analyse les vingt-deux arcanes majeurs, et cette deuxième section est caractérisée par le mélange de prose poétique et de savoir initiatique. Ouspensky transpose sa profonde connaissance ésotérique du tarot sous forme littéraire. Il écrit une sorte de petit roman en prose poétique où, dans le sillage du voyage dantesque, le moi-narrateur fait un pèlerinage et décrit ce qu’il voit et découvre, à savoir la signification cachée des vingt-deux arcanes majeurs. Une voix (mot imprimé en capitales) dialogue et répond aux doutes du narrateur-pèlerin, qui comprend de plus en plus ce que l’auteur appelle, à maintes reprises, la « Vérité ».

6Ainsi, la première carte, celle du Bateleur, représente le début du pèlerinage du moi-narrateur qui, à travers le symbolisme de cette image, comprend l’existence des « fils mystérieux reliant la Terre aux étoiles lointaines13 ». Il se rend compte que son âme avait ouvert une « fenêtre, à travers laquelle [il] vécut et entendit des choses supraterrestres14 ».

7La carte suivante, la numéro zéro, celle du Fou, montre un homme épuisé, boitant, marchant avec un paquet de choses inutiles sur ses épaules. Comme le souligne Ouspensky, seule la folie pouvait inciter cet homme à porter sur ses épaules ces choses non nécessaires15. Le Fou se retrouve face à un profond précipice, et du fond de l’abîme émerge un crocodile aux mâchoires grandes ouvertes. C’est après l’apparition du crocodile que la Voix mystérieuse se manifeste et explique au moi-narrateur quel est le contenu du paquet, en affirmant ceci : « les quatre symboles magiques, le bâton, la coupe, l’épée et l’argent. Le fou les porte toujours avec lui, mais il ne comprend pas ce qu’ils signifient. Tu ne vois pas que c’est toi-même16. » Selon cette perspective, le Fou semble donc symboliser l’être humain, qui ignore la réalité spirituelle et charge sa vie de choses inutiles et insignifiantes. Le monde de l’esprit gît à l’état latent, tandis que l’existence des individus est accablée par les choses matérielles.

8La troisième carte présentée par Ouspensky est celle de la Papesse (carte deux), qui est rattachée au Temple des Initiations, où le moi du Symbolisme du tarot entre, et la Voix lui dit que c’est dans ce Temple qu’on fait la rencontre avec la connaissance du Bien et du Mal. C’est une rencontre qui fait peur au moi-pèlerin, lequel sait qu’il a franchi une frontière dangereuse, celle de la connaissance occulte17. Le mystère du Temps est à la base de la carte suivante, le Monde (carte vingt et un), symbolisé par un cercle à l’intérieur duquel se trouve une femme tenant une baguette magique, tandis que sur chaque côté sont représentées les quatre bêtes de l’Apocalypse, sous forme d’un lion, d’un taureau, d’un homme et d’un aigle. La Voix explique la signification de cette image, qui est indispensable pour « franchir les portes du Temps18 », et précise au pèlerin : « tout ce que tu vois, les choses et les phénomènes, ne sont que les hiéroglyphes d’idées supérieures19 ». C’est le principe de l’analogie, de haut en bas, du Ciel à la terre.

9C’est à partir de l’arcane de l’Impératrice (carte trois) que la peur du moi-narrateur se transforme en paix séraphique : il comprend le mystère de la mort, la mort qui n’existe pas puisque la vérité réside dans l’éternité, que l’homme ne peut pas comprendre. Ainsi, assise sur un trône de marbre gravé du signe de Vénus, la déesse de l’Amour, l’Impératrice rassure le voyageur effrayé, qui déclare : « l’Impératrice me regarda en souriant et, sous son sourire, je sentis soudainement s’ouvrir dans mon âme la fleur d’une compréhension claire, comme si quelque chose allait m’être révélé, et la terreur de la mort s’éloigna de moi20. » La compréhension d’une réalité supérieure qui dissipe la peur de la mort commence sous le signe de l’Amour, le même Amour que les poètes ont toujours chanté, de l’Antiquité à nos jours, de Platon à Dante, de Shakespeare à Nerval, de Rimbaud à Yeats.

10« Et je compris le mystère de la naissance et de la mort21 », ainsi le moi-narrateur explique l’enseignement qu’il a appris grâce à la carte du Jugement, la carte vingt, celle de la résurrection des morts. La carte de l’Empereur (carte quatre) lui permet, en revanche, de connaître « la Grande Loi des Quatre22 », les quatre lettres des noms de Dieu, les quatre principes, les quatre éléments, les quatre saisons, les quatre points cardinaux : tout cela est contenu dans les quatre emblèmes du tarot, à savoir les Deniers, les Bâtons, les Épées et les Coupes23. Cette dernière carte est associée à celle du Soleil (carte dix-neuf) : le Soleil est le signe de l’Empereur.

11L’arcane majeur du Pape (carte cinq) s’imprègne d’une forte dimension initiatique. En effet, le Pape symbolise le Maître du Temple. Il est représenté assis sur un trône d’or, sa tiare est également dorée, et sous ses pieds se trouvent deux clés croisées et deux personnes prosternées devant lui. Ces deux personnes sont deux initiés. Le pèlerin observe le dialogue entre le Pape et les deux initiés. C’est le Pape qui parle, mais le moi de l’ouvrage d’Ouspensky ne comprend pas la signification de ses mots. Ainsi, la Voix lui explique le pourquoi de cette incompréhension :

Il ne parle que pour ceux qui ont des oreilles. Mais malheur à ceux qui croient entendre avant d’avoir réellement entendu, ou qui entendent ce qu’il ne dit pas, ou qui mettent leurs propres mots à la place des siens. Ceux-là ne recevront jamais les clés de la compréhension. C’est pour eux que l’on a dit qu’ils ne s’atteindront jamais eux-mêmes, et qu’ils ne pourront jamais supporter ceux qui s’atteignent eux-mêmes24.

12Ce passage rappelle le « connais-toi toi-même » de la philosophie grecque, et fait une distinction entre ceux qui obtiennent la vraie connaissance, à travers la connaissance de soi, et ceux qui ne réussissent pas à atteindre ce but. Ces derniers n’auront pas la possibilité de recevoir les clés du savoir initiatique, représentées dans la carte du Pape. Or ce savoir initiatique implique aussi la connaissance d’une réalité dangereuse, décrite par Ouspensky lorsqu’il parle de l’arcane majeur de la Lune (carte dix-huit). « Je sentis la présence d’un monde mystérieux, un monde d’esprits hostiles, de cadavres sortant des tombes, de fantômes tourmentés25 », tels sont les mots prononcés par le moi du Symbolisme du tarot, hanté par la peur causée par la présence de ces fantômes associés à la lumière pâle de la lune. Le sentier du pèlerin, dans l’ouvrage d’Ouspensky, est entravé par les périls de la lune. Après la rencontre avec cette réalité effrayante, il se retrouve dans un jardin vert, où il y a un homme et une femme : c’est la carte de l’amant, de la Tentation (carte six). En effet, dans le sillage de la narration biblique, Ouspensky introduit la figure du serpent qui tente la femme, laquelle accepte les flatteries de la tentation. Ainsi, la femme et l’homme acceptèrent de croire à la tentation, et non pas à la voix qui les avait toujours guidés jusqu’à ce moment. Le monde enchanté du jardin leur fut interdit. Ils devinrent mortels et, à partir de ce moment, qui brisa l’équilibre paradisiaque, toute chose leur apparut sous une lumière fausse : ce fut la Chute, le premier péché de l’homme qui se répète éternellement car, comme l’écrit Ouspensky à travers la Voix de son ouvrage, « l’homme ne cesse de croire en lui-même et vit en fonction de cette croyance26 ». L’être humain a donc oublié Dieu et croit en lui-même, et « ce n’est que lorsque l’homme se sera purifié de ce péché par de grandes souffrances qu’il pourra vaincre le pouvoir de la mort et revenir à la vie27 ». À l’instar de l’enseignement chrétien, Ouspensky considère le monde comme un théâtre dominé par le Mal, par le prince des ténèbres, qui a transformé la vie éternelle en mort, et c’est à travers la souffrance que l’être humain peut se sauver et vaincre la mort pour revenir à la vie28.

13La lutte entre le Bien et le Mal est confirmée dans la carte suivante, l’Étoile (carte dix-sept), où la Voix explique au pèlerin qu’il doit choisir entre les deux principes, soit le Bien soit le Mal29. Les cartes suivantes, du Chariot (carte sept) et de la Tour (carte seize), sont liées aux périls qui attendent l’individu qui doit se connaître et se conquérir lui-même, en dirigeant savamment la volonté30. Mais les périls ne sont pas seulement des obstacles qui se présentent pendant le parcours initiatique du pèlerin, dans le petit roman en prose d’Ouspensky : le péril majeur est la découverte de la Vérité, de la connaissance qui se matérialise dans la carte de la Justice (carte huit). Le moi-narrateur obtient finalement les clés et peut lever le voile du Temple, il peut entrer dans le sancta sanctorum, où il voit une femme. La Voix intervient et dialogue avec le moi-narrateur, pour expliquer à ce dernier qu’il est face à la Vérité, mais la Vérité a un prix à payer :

Tu voulais voir la Vérité, et maintenant tu la vois.
Mais souviens-toi de ce qui attend un mortel lorsqu’il voit la déesse. Il ne pourra plus jamais fermer les yeux sur ce qu’il n’aime pas, comme il le faisait jusqu’alors. Il verra perpétuellement la vérité, toujours et en toute chose. Peux-tu le supporter ? Tu as vu la vérité. Maintenant, tu dois aller plus loin, même si tu ne le veux pas31.

14La carte de la Vérité est suivie par celle du Diable (carte quinze). Le pèlerin d’Ouspensky aperçoit « le visage rouge et hideux du diable32 » s’élevant au-dessus de la terre. Il aperçoit, en outre, le symbole de la magie noire gravé sur la paume de la main du diable, « le Roi du Mensonge33 », qui parle au pèlerin. La voix du diable affirme être le Mal et indique les sentiers qui conduisent les êtres humains à se constituer prisonniers dans son royaume des ténèbres, à savoir la tromperie, la suspicion, la calomnie, la diffamation et la médisance34.

15Après la rencontre avec le diable, le pèlerin se rapproche de plus en plus à la connaissance des mystères. Il rencontre l’Ermite (carte neuf), qui tient en main une lanterne allumée (symbole de la lumière permettant de trouver le trésor enterré) et qui lui apprend le premier mystère : « nous [les êtres humains] ne savons pas quel est le trésor que nous cherchons, s’il s’agit de celui qui a été enterré par nos ancêtres ou de celui qui sera enterré par nos descendants35 ». Suivant cette affirmation, l’existence de chaque individu serait donc une recherche dont les fils invisibles doivent être aperçus dans l’héritage de nos pères ou dans l’héritage laissé à nos fils. Il y a ici un discours sur le temps qui se développe, en effet, dans la carte suivante, celle de la Tempérance, du Temps (carte quatorze), liée à l’image d’un ange vêtu de blanc avec une auréole d’or sur la tête et portant sur la poitrine le symbole du tarot, c’est-à-dire un carré contenant un triangle. Cet ange décrit dans l’ouvrage d’Ouspensky est nommé Temps : il porte sur le front un cercle, symbole de l’éternité. Le mystère du temps et l’un des derniers mystères que le moi-narrateur découvre, guidé par la Voix, qui lui dit :

Les hommes pensent que tout s’écoule sans cesse dans une seule direction. Ils ne voient pas que tout se rejoint éternellement, qu’une chose vient du passé et une autre du futur, et que le temps est une multitude de cercles tournant en direction opposée36.

16Autrement dit, l’homme ne comprend pas le mystère de l’éternité : comprendre le mystère de l’éternité signifie comprendre Dieu.

17Le concept de l’éternité est répété dans la carte suivante (carte dix), celle de la Roue de Fortune. Le moi-pèlerin voit un cercle tournant dans le ciel, couvert de lettres de la Kabbale, et aux quatre coins du ciel, il voit les quatre bêtes de l’Apocalypse, sous les formes d’un lion, d’un veau, d’un homme et d’un aigle. Ce sont les voix des animaux de Zarathoustra qui lui explique le mystère de l’éternité :

Tout s’en va, tout revient ; éternellement, la roue de l’être tourne. Tout meurt, tout refleurit ; éternellement l’année de l’être tourne.
Tout s’effondre, tout se rattache ; éternellement l’être se construit. Tout part, tout revient pour se saluer ; éternellement fidèle à lui-même demeure l’anneau de l’être37.

18Le moi du Symbolisme du tarot comprend que la mort n’existe pas, et il le répète à l’occasion de la description de l’arcane de la Mort (carte treize), où cette vérité est exprimée par le biais de l’image du soleil : « je compris que [le soleil] se lève quand il se couche et qu’il se couche quand il se lève, et que la vie, au moment où elle se lève, meurt, et qu’en mourant, elle revient à la vie38. » Autrement dit, on ne meurt jamais et cette notion de l’immortalité est soulignée, encore une fois, dans la carte de la Force (carte onze), où la Voix explique au pèlerin l’importance de l’amour, le seul qui peut conquérir le mal, l’amour qui va de pair avec le symbolisme de la rose. En effet, comme le dit la Voix, dans le texte d’Ouspensky, les couronnes de roses liées à l’arcane de la Force constituent une chaîne magique, elles créent un pouvoir qui plie toutes les forces inconscientes et sauvages de l’être humain39.

19Le dernier arcane majeur du voyage d’Ouspensky est celui du Pendu (carte douze), qui symbolise l’achèvement initiatique conduisant à la connaissance de la Vérité ; mais cette vérité comporte la souffrance, car l’individu se retrouve doté d’une connaissance de l’Infini incompatible avec la finitude de la vie sur la Terre, comme le dit la Voix au pèlerin : « regarde, voici l’homme qui a vu la vérité. De nouvelles souffrances, telles qu’aucun malheur terrestre ne pourra jamais en apporter, attendent l’homme sur terre lorsqu’il trouvera le chemin de l’Éternité et la compréhension de l’Infini40 ». Il s’agit d’une véritable torture, car « il est encore un homme, mais il sait déjà beaucoup de choses inaccessibles même aux dieux. Et ce conflit dans son âme entre ce qui est petit et ce qui est grand représente sa torture et son Golgotha41 ». C’est pourquoi on l’appelle le Pendu, car « une grande potence a été érigée dans son âme, à laquelle il se balance dans la douleur, se sentant comme pendu la tête en bas42 ». Le Pendu est la personne qui, comme le souligne la Voix, « a entrepris un long voyage, épreuve après épreuve, initiation après initiation, à travers des échecs et des chutes » et ainsi « il a trouvé la Vérité et a connu lui-même43 ». Se connaître soi-même, c’est trouver la supposée vérité, le but du parcours initiatique qui opère la transformation ontologique de l’être.

20Le Pendu incarne plusieurs arcanes précédents, en représentant une sorte d’accomplissement, comme le montre un passage du texte d’Ouspensky :

Il [le Pendu] sait qu’il est celui qui se trouve entre le ciel et la terre et qui contrôle les éléments à l’aide de symboles magiques ; il est aussi celui qui marche avec la casquette à sonnettes du Fou sur la route poussiéreuse, sous le soleil brûlant, vers l’abîme où l’attend le crocodile. C’est le même qui se trouvait avec sa compagne dans le jardin de l’Eden sous la protection du génie bienfaisant ; c’est lui qui se trouvait comme le conquérant éphémère du chariot trompeur, tiré par les sphinx prêts à courir dans des directions opposées ; et c’est encore lui dans le désert qui cherchait la Vérité avec une lanterne en pleine lumière du jour.
Et maintenant, il a trouvé la Vérité44.

21Avec ces mots se conclut l’œuvre d’Ouspensky, qui suit le sillage d’autres ouvrages sur le tarot écrits entre la fin du xixe siècle et le début du xxe, tels que Dogme et rituel de la Haute Magie (1853) d’Éliphas Lévi, Tarot des Bohémiens (1889) et Tarot divinatoire (1909) de Papus, ou encore Au seuil du mystère (1890) de Stanislas de Guaita45. Or tous ces livres sont évoqués par Ouspensky dans Le Symbolisme du tarot et parmi ces auteurs, c’est Guaita qui représente la figure la plus étroitement associée à la littérature française. Il fut, en effet, un écrivain et poète dont la production littéraire est imprégnée de la pensée ésotérique et n’a pas encore été explorée de manière détaillée et approfondie. Dans Au seuil du mystère, Guaita met en évidence des concepts abordés par Ouspensky, comme les liens entre la tradition cabalistique, l’alchimie et le tarot. Ainsi, le Iod de la tradition cabalistique est défini par Stanislas de Guaita comme « l’esprit mâle ; le principe créateur actif ; Dieu en soi ; le Bien », et « correspond au signe du phallus, au sceptre du tarot, et à la colonne Iakin du temple de Salom », tandis qu’« en alchimie, c’est le soufre46 ». Le Hẻ cabalistique est « la substance passive ; le principe producteur féminin ; l’âme universelle plastique ; la potentialité du Mal ; – figurés par les ctéis, la coupe des libations du tarot, et la colonne Boaz » : « en alchimie, c’est le mercure47. » Ce qui, en alchimie, « est l’Azoth des Sages » est, comme l’écrit Guaita, le Vaf ou Vau de la tradition cabalistique, à savoir « l’union féconde des deux principes ; la copulation divine ; l’éternel devenir ; – représentés par le lingham, le caducée et l’épée du tarot48 ». Une attention particulière est accordée par l’auteur du Seuil du mystère à la lettre Hẻ [ה] de la Kabbale, symbolisant « la fécondité de la nature dans le monde sensible ; réalisations ultimes de la pensée incarnée dans les formes ; – le sicle du tarot49 ». Plus précisément, cette dernière lettre, qui « en alchimie […] est le sel50 », est caractérisée par le fait qu’elle « associe à l’idée de Dieu celle de l’univers, comme finalité : aussi le tétragramme Iêvê (Iod-hẻvê), si admirable d’ailleurs, est, en ce sens, d’une portée moins précise que le tétragramme אגלא (Agla), dont la quatrième lettre, exprimant la synthèse absolue de l’Être, affirme puissamment l’unité de Dieu51 ».

22Dans Au seuil du mystère est présentée en appendice une section intitulée « Analyse de la Rose-Croix d’après Henry Khunrath », où Guaita analyse, de manière approfondie, la première clef du tarot (le Bateleur), la troisième (la Mort), et la quatrième clef (l’Empereur). Il y est précisé que le Bateleur correspond à l’Aleph (א) de la tradition cabalistique et symbolise « Dieu et l’homme ; le Principe et la Fin, l’Unité équilibrante52 ». La clef de la Mort (correspondant à la lettre Mem kabbalistique, ם), symbolise « [la] Destruction et la Restauration », ainsi que « [la] nuit et [le] jour moraux et physiques », « l’éternité de l’éphémère », « la Passivité féminine, à la fois gouffre du passé et matrice de l’avenir53 ». Quant à la clef de l’Empereur, elle est associée à la lettre Daleth (ד) de la tradition de la Kabbale, correspondant au Fils de la Trinité, tandis que l’Aleph correspond au Père et la lettre Mem (ם) au Saint-Esprit54, « dont le corps éthéré, dévorateur et fécondateur à la fois des formes transitoires, fait fleurir la Vie55 ».

23« Méthode tarotique56 », telle est définition donnée, dans Au seuil du mystère, des rapports entre Kabbale et tarot, afin d’exprimer le concept ésotérique de la traduction des lettres en chiffres. Autrement dit, c’est la Kabbale numérique appliquée au tarot57. On peut conclure cette brève parenthèse concernant l’interprétation symbolique du tarot offerte par Guaita en affirmant qu’il confère aux cartes une valeur initiatique. Il définit le tarot comme un « admirable livre initiatique, prostitué dès longtemps aux plus vils usages58 », et, comme nous l’avons vu, la même nature initiatique est attribuée aux arcanes majeurs par Ouspensky. Tant Ouspensky que Guaita considèrent le tarot comme un moyen initiatico-divinatoire. Or si des ésotéristes comme Ouspensky ou Guaita confèrent aux arcanes majeurs une valeur positive, de nature initiatique, métaphysique, voire divinatoire, d’autres figures affirment, au contraire, les dangers du tarot. C’est le cas, par exemple, du Père Gabriele Amorth (1925-2016), qui a été jusqu’à sa mort l’exorciste en chef du Vatican et de l’archidiocèse de Rome. Dans ses ouvrages, il se consacre au thème délicat de l’exorcisme, et donc de la possession diabolique. Bien que ce sujet puisse paraître étroitement et exclusivement lié à la religion et à la croyance (ou à l’incroyance) d’une force du Mal qui agit sur les êtres humains, il faut souligner que les cas d’exorcisme opérés par Gabriele Amorth ont été confirmés par des hommes de sciences, notamment des psychiatres qui ont assisté aux exorcismes du Père italien et parfois collaboré avec lui (ou avec d’autres exorcistes)59. Au-delà de cet aspect concernant les exorcismes, ce qu’il est important de mettre en évidence est l’avis du Père Gabriele Amorth sur le tarot, un avis qui n’est pas du tout positif. Le titre d’un chapitre de ses Confessions est significatif à cet égard : « Le tarot et ses risques60 ».

24Cet ouvrage se structure sous la forme dialoguée d’entretiens entre le journaliste Marco Tosatti et Gabriele Amorth. À la question « ainsi donc, en plus des envoûteurs et des sectes, il faut se garder des cartomanciens61 ? », Gabriele Amorth répond : « oui, car beaucoup se sont associés à Satan. Par le moyen d’un pacte, un pacte d’amitié avec lui. Ce ne sont pas des possédés, juste des associés à Satan. Par son entremise, ils devinent62. » Et au sujet des personnes qui consultent les cartomanciens, il affirme que « le premier effet de leur contact avec Satan, c’est de s’éloigner complètement de Dieu63 ». Il ajoute ceci :

Ce qui intéresse Satan, ce n’est pas de faire de vous un possédé ou autre. Ce qui l’intéresse, c’est de vous éloigner de Dieu et de vous jeter dans le péché. Il veut que les gens aillent en enfer, alors que Dieu veut qu’ils aillent au paradis. Et en se liant aux cartomanciennes, en renonçant à la prière, on commence ce parcours qui consiste à s’éloigner de Dieu, à se mettre entre les mains du Malin64.

25D’après Gabriele Amorth, le jeu des cartes est très dangereux, car le tarot conduit vers une dérive satanique, et il s’étonne que « le sujet de la cartomancie n’est jamais ou presque jamais traité dans les textes ecclésiastiques, ce qui est stupéfiant, tant est répandue l’habitude de se faire tirer les cartes65 ». Dans un passage de ses Confessions, il décrit de manière détaillée le jeu des cartes et ses implications avec l’occulte :

On emploie – c’est toujours le cas – des cartes à jouer basiques, ou bien des cartes spéciales, mais longues ; le plus souvent, ce sont des cartes de tarot. Le but est de connaître l’avenir, ou d’avoir accès à des choses occultes, et c’est là que se cache le danger. Le fondement, donc la condamnation morale, réside dans le fait de vouloir connaître l’avenir ou des choses occultes en employant un moyen inadapté à l’objectif ; autrement dit, on attribue au moyen choisi le pouvoir d’indiquer une réalité ou des événements, sans tenir compte du fait que les cartes n’ont absolument pas ce pouvoir. Même si l’on n’invoque pas le démon, explicitement ou implicitement, et même si l’on ne fait pas appel à des bizarreries de type magique – avec des bougies de couleur disposées dans un certain ordre, par exemple, ou avec des herbes, ou encore avec des soucoupes destinées à accueillir de l’huile, etc. –, il n’en demeure pas moins que l’on attribue à un objet un pouvoir qu’il n’a pas, cela dans le but de connaître des choses que Dieu, et lui seul, connaît… Et cela représente une grave faute morale, l’indice d’une rébellion contre Dieu qui est le seul Seigneur de l’histoire ; c’est aussi l’indice d’un abandon de la foi et de la prière en faveur d’une dépendance psychologique : la lecture des cartes par tel ou tel cartomancien66.

26Gabriele Amorth précise que « la cartomancie compt[e] parmi les formes de superstition, et en particulier de divination67 », et ce dernier aspect est partagé par P. D. Ouspensky et Stanislas de Guaita, qui, comme nous l’avons vu, considèrent le tarot comme un moyen de nature initiatique et divinatoire. Mais si pour des ésotéristes comme Ouspensky et Guaita le tarot est imprégné d’une valeur positive, pour une figure strictement liée à la tradition chrétienne, telle que le Père Gabriele Amorth, le tarot est une porte qui ouvre l’accès au monde dangereux de l’occulte et du satanisme. Un auteur comme Gérard de Nerval, qui connaissait très bien la réalité de l’occulte68, souligne que cette voie conduit au désordre l’esprit et, comme il l’écrit dans Aurélia, évoquant l’image de Jésus-Christ, « lorsque l’âme flotte incertaine entre la vie et le rêve, entre le désordre de l’esprit et le retour de la froide réflexion, c’est dans la pensée religieuse que l’on doit chercher des secours69 ».

Notes

1 P. D. Ouspensky fut disciple du mystique arménien Georges Ivanovič Gurdjieff. Sur la figure de P. D. Ouspensky, voir Jacob Needleman, « Ouspensky [Uspenskii], Piotr Dem’ianovich », dans Dictionary of Gnosis and Western Esotericism, éd. Wouter J. Hanegraaff, en collaboration avec Antoine Faivre, Roelof van den Broek, Jean-Pierre Brach, Leiden-Boston, Brill, 2006, p. 911-913.

2 P. D. Ouspensky, The Symbolism of the Tarot. Philosophy of Occultism in Pictures and Numbers [1913], New York, Dover Publications, 1976.

3 Presque simultanément, au début du xxe siècle, l’une des figures les plus importantes de l’ésotérisme italien de cette époque, Giuliano Kremmerz (1861-1930), publia un ouvrage dans le même sillage que celui d’Ouspensky : I Tarocchi dal punto di vista filosofico (trad. Les Tarots du point de vue philosophique). Voir Giuliano Kremmerz, I Tarocchi dal punto di vista filosofico [1909], Montevarchi (Ar), Harmakis Edizioni, 2016.

4 Sur les relations entre littérature et tarot, voir June Leavitt, Esoteric Symbols. The Tarot in Yeats, Eliot and Kafka, Lanham, Plymouth, University Press of America, 2007. En particulier, cet ouvrage se consacre aux liens entre le symbolisme du tarot et la production littéraire de trois auteurs : Yeats, Eliot et Kafka. Ouspensky est mentionné par June Leavitt dans son livre sur le tarot (p. 14, 61, 130). L’ouvrage d’Ouspensky est évoqué également par Jean-Pierre Laurant dans le Dictionary of Gnosis and Western Esotericism. Voir Jean-Pierre Laurant, « Tarot », dans Dictionary of Gnosis and Western Esotericism, p. 1111.

5 « Letteratura occulta e simbolica ». P. D. Ouspensky, Il simbolismo dei Tarocchi. Filosofia dell’occultismo nelle figure e nei numeri, trad. Nicola Bonimelli, Roma, Edizioni Thlon, 2017, p. 29. C’est à cette version italienne que je fais référence dans cet article. Les citations tirées de ce livre sont traduites par moi.

6 « La letteratura che si basa sul riconoscimento dell’esistenza di una conoscenza nascosta ». Ibid.

7 « Un antico libro di geroglifici egizi, costituito da 78 tavolette giunte a noi ». Ibid., p. 31.

8 « Macchina filosofica ». Ibid., p. 35.

9 « L’arricchimento e la crescita dell’intelletto consistono nell’ampliare la sua capacità di trovare analogie ». Ibid., p. 42.

10 Voir ibid.

11 Voir ibid., p. 41-43.

12 Voir ibid., p. 44.

13 « Fili misteriosi che collegano la terra agli astri lontani ». Ibid., p. 80.

14 « Finestra, attraverso la quale vidi e udii cose ultraterrene ». Ibid., p. 81.

15 Voir ibid., p. 82-84.

16 « I quattro simboli magici, il bastone, la coppa, la spada e il denaro. Il matto li porta sempre con sè, ma non capisce cosa essi significhino. Non vedi che sei tu stesso ». Ibid., p. 84.

17 Voir ibid., p. 86-87.

18 « Attraversare i cancelli del Tempo ». Ibid., p. 89.

19 « Tutto ciò che vedi, cose e fenomeni, non sono che i geroglifici di idee superiori ». Ibid., p. 90.

20 « L’Imperatrice mi guardò sorridendo, e sotto il suo sorriso sentii improvvisamente che nella mia anima si stava aprendo il fiore di una chiara comprensione, come se qualcosa fosse sul punto di essermi rivelato, e il terrore della morte si allontanò da me ». Ibid., p. 93.

21 « E compresi il mistero della nascita e della morte ». Ibid., p. 95.

22 « La Grande Legge dei Quattro ». Ibid., p. 96.

23 Voir ibid., p. 97.

24 « Egli parla solo per coloro che hanno orecchie. Ma guai a coloro che credono di udire prima d’aver udito realmente, o che sentono ciò che egli non dice, o che mettono le loro parole in luogo delle sue. Questi non riceveranno mai le chiavi della comprensione. Ed è per loro che è stato detto che non raggiungeranno mai loro stessi, e che non potranno mai sopportare chi riesce a raggiungersi ». Ibid., p. 102.

25 « Sentii la presenza di un mondo misterioso, un mondo di spiriti ostili, di cadaveri che sorgevano dalle tombe, di fantasmi tormentati ». Ibid., p. 104.

26 « L’uomo non smette mai di credere in sé stesso e vive in base a questa credenza ». Ibid., p. 107.

27 « Solo quando l’uomo si sarà purificato da questo peccato con grande sofferenza potrà superare il potere della morte e tornare alla vita ». Ibid.

28 Voir ibid., p. 106-107.

29 Voir ibid., p. 109.

30 Voir ibid., p. 110-114. Le chariot est tiré par deux sphinx (un sphinx blanc et l’autre noir) symbolisant les différentes forces qui peuvent détruire tant le chariot que le pèlerin. L’intégrité de ces derniers dépend de l’utilisation correcte de la volonté de la part du moi-narrateur, métaphore de l’être humain. Voir ibid., p. 112.

31 « Volevi vedere la Verità, e ora la vedi. / Ma ricorda cosa attende un mortale quando questi vede la dea. Non sarà mai più in grado di chiudere gli occhi di fronte a ciò che non gli piace, come faceva fino a quel momento. Vedrà perpetuamente la verità, sempre e in ogni cosa. Puoi sopportarlo ? Tu hai visto la verità. Ora devi andare oltre, anche se non lo vuoi ». Ibid., p. 116.

32 « L’orribile faccia rossa del diavolo ». Ibid., p. 118.

33 « Il Re della Menzogna ». Ibid., p. 122.

34 Voir ibid., p. 119-120. Le thème du mal associé au diable est examiné par Ouspensky dans son ouvrage allégorique Talks with a Devil, écrit en 1914 et publié en anglais en 1977 par la maison d’édition londonienne Turnstone Press Ltd.

35 « Noi non sappiamo quale sia il tesoro che stiamo cercando, se si tratta di quello che fu sepolto dai nostri antenati, o di quello che verrà sotterrato dai nostri discendenti ». Ibid., p. 122.

36 « Gli uomini pensano che ogni cosa scorra incessantemente in un’unica direzione. Essi non vedono che tutto s’incontra eternamente, che una cosa proviene dal passato e un’altra dal futuro, e che il tempo è una moltitudine di cerchi che ruotano in direzioni opposte ». Ibid., p. 125.

37 « Tutto va, tutto torna indietro ; eternamente ruota la ruota dell’essere. Tutto muore, tutto torna a fiorire, eternamente corre l’anno dell’essere. / Tutto crolla, tutto viene di nuovo connesso ; eternamente l’essere si costruisce la medesima abitazione. Tutto si diparte, tutto torna a salutarsi ; eternamente fedele a sé stesso rimane l’anello dell’essere ». Ibid., p. 127.

38 « Compresi che [il sole] sorge mentre tramonta e che tramonta mentre sorge, e che la vita, nel suo momento sorgivo, muore, e morendo viene alla vita ». Ibid., p. 131.

39 Voir ibid., p. 134.

40 « Guarda, questo è l’uomo che ha visto la verità. Nuove sofferenze, tali che nessuna disgrazia terrena potrà mai procurare, aspettano l’uomo sulla terra quando egli trova il sentiero verso l’Eternità e la comprensione dell’Infinito ». Ibid., p. 136.

41 « Egli è ancora un uomo, ma conosce già molte cose inaccessibili persino agli dèi. E questo conflitto nella sua anima tra ciò che è piccolo e ciò che è grande rappresentano la sua torturta e il suo Gòlgota ». Ibid.

42 « Nella sua anima è stata eretta una grande forca, dalla quale egli penzola in preda alla sofferenza, sentendosi come appeso a testa in giù ». Ibid.

43 « Ha intrapreso un lungo viaggio di prova in prova, di iniziazione in iniziazione, attraverso fallimenti e cadute. / E ora ha trovato la Verità e conosciuto sé stesso ». Ibid.

44 « Egli sa di essere colui che sta tra cielo e terra e che controlla gli elementi con i simboli magici ; ed è anche quello che cammina col berretto a sonagli del Matto lungo la strada polverosa sotto il Sole cocente verso l’abisso dove l’attende il coccodrillo. È lo stesso che stava con la sua compagna nel giardino dell’Eden sotto la protezione del genio benefico ; è lui che si ergeva come conquistatore effimero del carro ingannevole, tirato dalle sfingi pronte a correre in direzioni opposte ; ed è lui ancora nel deserto che cercava la Verità con una lanterna nella piena luce del giorno.

45 Ouspensky attaque les ouvrages sur le tarot provenant de la littérature « occulte », en particulier théosophique. L’interprétation théosophique du Tarot est fortement critiquée par Ouspensky. Voir ibid., p. 50 et 66.

46 Stanislas de Guaita, Essais de sciences maudites. I. Au seuil du Mystère, Paris, G. Carré, 1890, p. 34.

47 Ibid.

48 Ibid.

49 Ibid.

50 Ibid.

51 Ibid., p. 34-35.

52 Ibid., p. 110.

53 Ibid., p. 111.

54 Voir ibid., p. 110-111.

55 Ibid., p. 111.

56 Ibid.

57 Voir Ibid.

58 Ibid., p. 91.

59 Sur ce sujet, voir Gabriele Amorth, Esorcisti e psichiatri [1996], Bologna, EDB, 2023, p. 187-208. Cet ouvrage a été traduit en français : Gabriele Amorth, Exorcisme et psychiatrie, Paris, Éditions François-Xavier de Guibert, 2002.

60 Père Gabriele Amorth, Confessions. Mémoires de l’exorciste officiel du Vatican, traduit de l’italien par Serge Filippini, Neuilly-sur-Seine, Michel Lafon, 2010, p. 269. Les critiques de Gabriele Amorth envers le tarot sont mises en évidence dans d’autres ouvrages du Père italien, tels que Più forti del male et Nuovi racconti di un esorcista. Voir Padre Amorth, Roberto Italo Zanini, Più forti del male. Il demonio riconoscerlo vincerlo evitarlo, Cinisello Balsamo (Milano), San Paolo, 2010, p. 61-64 ; Gabriele Amorth, Nuovi racconti di un esorcista, [1992], Bologna, EDB, 2023, p. 192. Cette dernière œuvre a été traduite en français : Gabriele Amorth, Nouveaux récits d’un exorciste, trad. de l’italien par Lucie Samsoen, Paris, F.-X. de Guibert, 1993.

61 Père Gabriele Amorth, Confessions. Mémoires de l’exorciste officiel du Vatican, p. 269.

62 Ibid.

63 Ibid.

64 Ibid.

65 Ibid., p. 270.

66 Ibid., p. 270-271.

67 Ibid., p. 270.

68 Sur les relations entre Nerval et l’occultisme, voir Jean Richer, Gérard de Nerval et les doctrines ésotériques, avec des textes et des documents inédits, Paris, Éditions du Griffon d’or, 1947.

69 Gérard de Nerval, Aurélia, dans Œuvres complètes, t. III, édition publiée sous la direction de Jean Guillaume et de Claude Pichois, avec, pour ce volume, la collaboration de Jacques Bony, Michel Brix, Lieven D’Hulst, Vincenette Pichois, Jean-Luc Steinmetz, Jean Ziegler et le concours d’Antonia Fonyi, Paris, Gallimard, coll. « Bibliothèque de la Pléiade », 1993, p. 722.

Pour citer ce document

Piero Latino, « Les arcanes majeurs selon Ouspensky, Guaita et le Père Gabriele Amorth » dans Littérature et occulture,

Programme de recherche
Coordination scientifique : Frank Greiner, Sylvain Ledda et Catherine Douzou

© Publications numériques du CÉRÉdI, « Actes de colloques et journées d’étude », n° 29, 2023

URL : http://publis-shs.univ-rouen.fr/ceredi/index.php?id=1866.

Quelques mots à propos de :  Piero Latino

Università degli Studi di Bari Aldo Moro
Sorbonne Université, CELLF
University of Westminster