Pierre Corneille, la parole et les vers

sous la direction de Myriam Dufour-Maître, avec le concours de Cécilia Laurin

Pierre Corneille, la parole et les vers
  • Myriam Dufour-Maître, avec le concours de Liliane Picciola, de Bénédicte Louvat et de Cécilia Laurin  Introduction

Vers lyrique, vers dramatique

Vers, parole, musique. Les Airs sur les stances du Cid de Marc-Antoine Charpentier

Sarah Nancy


Résumés

En 1681, trois airs de Marc-Antoine Charpentier sur les trois premières stances de Rodrigue paraissent dans le Mercure galant. Musicalement, c’est une évidence : les stances ne demandent qu’à être chantées. Mais est-ce en raison de la rondeur des strophes et des effets de retour ou, au contraire, des ruptures et des inégalités qu’elles permettent à tous les niveaux ? Cette définition complexe de la musicalité des stances introduit en fait à un débat sur leur capacité à servir l’action dramatique, selon qu’elles sont considérées comme la traduction des soubresauts de la parole passionnée (La Mesnardière et Corneille), ou comme un vers artificiel et trop chantant (d’Aubignac). C’est à la première conception que semblent se rattacher les airs de M.-A. Charpentier, qui offrent au « mal infini » du héros une incarnation sonore idéale, en même temps qu’ils tendent vers un univers de musique pure, indifférent au théâtre.

Texte intégral

1[Note de l’auteur]1

2Doit-on s’étonner que les stances de Rodrigue, dans Le Cid, aient inspiré Marc-Antoine Charpentier pour trois airs2 qui paraissent dans le Mercure Galant en janvier, février et mars 1681 ? Il est vrai qu’habituellement, pour s’adresser à un public mondain3, le compositeur s’inspire de vers au ton « galant, coquet, amoureux4 » plutôt que de vers de tragédie. Mais avec les stances, cet ensemble de strophes généralement hétérométriques « au bout duquel il se fait un repos5 », ne trouve-t-il pas en fait ce qui du théâtre en général est le plus apte à être mis en musique, voire le plus semblable à la chanson ? C’est de cette évidence musicale des stances que nous partirons pour interroger le rapport entre vers et parole chez Corneille.

L’évidence musicale des stances

3Les stances, introduites pour la première fois en 1630 par André Mareschal dans sa Généreuse allemande, et connaissant ensuite la vogue que l’on sait pendant une trentaine d’années, sont le vers lyrique par excellence. Tirant leur origine, selon Henry Carrington Lancaster, des insertions de petites formes du type dialogues amoureux, lettres, chansons, oracles, poèmes récités dans les genres de la comédie et de la pastorale dès le xvie siècle6, elles possèdent ce que Benoît de Cornulier appelle le « style métrique de chant7 », à savoir un style influencé par la versification et les formes de pièces chantées qui peut même se manifester dans des pièces non mises en musique. Les stances du Cid se présentent ainsi comme un ensemble de six dizains remarquables à la fois par leur hétérométrie (avec une alternance de quatre mètres différents), et par l’effet de refrain formé par les deux derniers vers qui « s’opposent pour aboutir au nom de l’objet aimé8 » – « Chimène » rimant dans chaque strophe avec le mot « peine » qui termine l’hexasyllabe. Si ces stances « tranche[nt] sur la monotonie circonflexe des scènes dialoguées9 », selon les mots de Georges Lote, c’est donc parce qu’elles accentuent le principe de retour propre au vers10, tant au niveau de la strophe comme unité, dont la structure complexe se répète, que des vers eux-mêmes, dont le retour régulier est paradoxalement souligné par l’hétérométrie, en un dessin qui peut être senti comme musical.

4Un certain nombre d’hypothèses sur l’origine des stances, quoique jugées erronées par Henry Carrington Lancaster, ont toutefois le mérite de témoigner de cette perception musicale : Jules Pilet de La Mesnardière, dans le chapitre x de sa Poétique, les rattache aux passages chantés de la tragédie des Anciens11 ; Voltaire lui aussi aux chœurs grecs, ainsi qu’aux tragédies à la mode antique du siècle précédent12 ; Rigal, dans l’Histoire de la langue et de la littérature française de Louis Petit de Julleville13 et, après lui, Georges Lote dans l’Histoire du vers français14, aux chansons des Bergeries de Racan au début des années 1620. Pour La Mesnardière, le changement de mètre à l’origine des stances a été conçu pour permettre un ajustement avec les rythmes de la musique qui accompagnait les vers dans les moments d’expression des passions violentes, et c’est cette musicalité partielle – rythmique, donc, mais non mélodique ni harmonique, comme le souligne Bénédicte Louvat15 – qu’il apprécie et encourage dans les stances de ses contemporains. Cette approche, caractéristique de la prudence qui, au xviie siècle, domine les débats sur la possible réintégration de la musique dans la tragédie, est cependant incomplète. On ne peut en effet ignorer que la musicalité des stances tient aussi aux intonations quasi mélodiques et à la densité vocale spécifique que cause leur effet de ralentissement, voire de sur-place dans le déroulement de la pièce. Elles sont d’ailleurs souvent perçues comme des moments de bravoure vocale, ainsi que le souligne Georges Lote en passant par une image opératique : « on les attendait avec impatience pour applaudir frénétiquement l’acteur qui ferait valoir son art et sa voix, comme on guette un ténor aux difficultés de son grand air16. » Georges Lote cite alors Scarron faisant parler Jodelet dans l’une de ses comédies : « Je pensais, ô noble assistance / Vous régaler de quelque stance17. » De même que le « vin de Champagne », les « beaux tableaux », les « belles curiosités », pour reprendre les exemples du dictionnaire de Furetière, les stances ont en effet le pouvoir de « régaler ». Hissées, en quelque sorte, au-dessus du dialogue utile et transitif, elles ont leur beauté propre, comme cela apparaît très clairement chez La Mesnardière et chez Corneille, qui en parlent comme d’un « lieu où l’on attend des beautés extraordinaires18 », ou comme de « quelque espèce de fard » bien utile pour « embelli[r] notre ouvrage » et « aide[r] à mieux atteindre le but de notre art, qui est de plaire19 ».

5Les stances apparaissent donc comme un objet en quelque sorte prêt à chanter, et c’est ce à quoi Charpentier semble avoir été sensible : il avait prévu, si l’on en croit le Mercure Galant, de « donne[r] [chaque mois] un couplet20 ». Et si cependant seuls les trois premiers sont livrés, sans qu’on sache si les autres ont été écrits et non livrés, ou si le compositeur s’est arrêté après la composition du troisième air, c’est pour un résultat qui laisse rien moins qu’un sentiment d’inachèvement. Les trois parties, en effet, s’agencent avec une remarquable cohérence : on a d’abord un récitatif, c’est-à-dire un type d’écriture vocale proche de la déclamation ponctué d’harmonies réalisées par la basse continue au clavecin : « Percé jusques au fond du cœur21… » ; puis une chaconne, c’est-à-dire un air sur une basse obstinée, qui se répète ici toutes les cinq mesures : « Que je sens de rudes combats… » ; et enfin, pour la troisième strophe, à nouveau un récitatif, plus libre mélodiquement que le premier (« Père maîtresse… »), qui cède la place pour la toute fin à un petit air qui reprend la mesure ternaire de la chaconne (« Fer qui causes ma peine… »). Les trois strophes forment donc un édifice triangulaire, avec, au centre, le moment le plus lyrique, celui de la chaconne traditionnellement associée à la plainte.

6Du point de vue de l’incarnation vocale, Charpentier se montre complètement en accord avec la typologie du théâtre musical de l’époque en confiant le monologue de Rodrigue à une tessiture de haute-contre : la voix de haute-contre est la voix des héros22. Elle se caractérise par sa clarté et son brillant autant que par sa douceur, mais surtout par une légère tension dans le timbre, puisqu’elle ignore le phénomène de la « couverture » vocale dont procèdera plus tard la véritable voix de ténor. Voix noble, conquérante, mais souvent fébrile, et jamais à l’abri des défaillances : là encore, Charpentier n’a eu qu’à monter le son, en quelque sorte, pour faire entendre l’opéra tapi dans les stances du Cid.

7Enfin, à l’échelle du style, la composition musicale se nourrit des effets de symétrie et d’antithèses qui ont rendu ces vers si célèbres pour produire des contrastes et des balancements. On le remarque par exemple avec : « Il faut venger un père ou perdre une maîtresse » (deuxième strophe), qui, le long d’une phrase s’élevant par paliers, fait entendre deux fois la même séquence rythmique calquée sur les accents du vers23 ; ou encore dans la manière dont la musique figure le choc entre l’évocation de l’espoir et l’exclamation douloureuse dans : « Si près de voir mon feu récompensé / Ô dieux l’étrange peine » (première strophe) : la mélodie d’abord régulière et précautionneuse, sur des tons conjoints, se heurte à l’interjection « Ô dieux », dont la répétition donne lieu à une montée brusque en deux étapes (scandées par deux grands intervalles descendants, une quinte, puis l’inconfortable triton24), jusqu’à ce que la mélodie ne s’effondre sur les mots « l’étrange peine », resserrés en un rythme agité que soulignent les tremblements demandés par la partition.

8Cet exemple montre bien de quelles ressources dispose la musique pour rejouer les contrastes expressifs, ici entre le bonheur presque atteint et la « peine » bien présente. Mais il montre aussi ce qui du texte est laissé pour compte : ici la différence de volume métrique entre le décasyllabe et l’hexasyllabe qui, chez Corneille, soutenait ce même contraste. De fait, avec la répétition de l’interjection « Ô dieux », l’hexasyllabe a disparu. C’est l’effet paradoxal des répétitions musicales de mots ou de syntagmes : si celles-ci renforcent, en un sens, la logique circulaire du vers, accentuant en cela l’écart par rapport à la parole qui va tout droit (une trentaine d’années après, le dramaturge Antoine-Louis Le Brun produira tout un « théâtre en musique » non destiné à être mis en musique, pour le plaisir, entre autres, d’employer ces répétitions25), elles ont aussi pour conséquence de défaire la logique numérique du vers par l’ajout de syllabes – et donc de défaire la structure de la strophe (la version musicale ne permettant pas ici de noter le retour de l’hexasyllabe). Est-ce une trahison de la musicalité innée des stances ? Non, bien sûr, mais cela montre la nécessité de compléter et de redéfinir ce qu’on entend par ce terme de musicalité.

« Et pour cela préfère l’Impair »

9Car si les stances sont si propres à être mises en musique, c’est aussi, en fait, parce qu’elles ne sont pas trop musicales, ou plutôt parce que leur musicalité ne relève pas seulement de cette « harmonie » qu’analyse Patricia M. Ranum26, mais plutôt de l’« Impair », pour citer Verlaine27. Variété, diversité, rupture des attentes : voici en effet ce qu’en attendent La Mesnardière et Corneille. La Mesnardière apprécie ainsi leur système de rimes : « le plus souvent entrelacées dans cette espèce de vers, [… elles] concourent encore à y mettre du changement et de l’inégalité » ; Corneille salue quant à lui « leurs cadences inégales », les « pauses qu’elles font faire à la fin de chaque couplet », et vante l’effet qui en résulte : « La surprise agréable que fait à l’oreille ce changement de cadence imprévu rappelle puissamment les attentions égarées28. » Notons que le dramaturge, avec cette remarque sur les virtualités musicales de l’hétérométrie, se montre curieusement en accord avec ce qui constituera, quelques années plus tard, l’un des principes moteurs de l’opéra français. Serait-ce que ses collaborations réussies29 aux tragédies à machines Andromède (1650), La Toison d’or (1661) et Psyché (1671)30 ont eu raison de la crainte d’un asservissement du poète par le musicien , exprimée plus tôt dans l’« Excuse à Ariste31 » ? Cet éloge du rythme heurté des stances, qui vient bien après que Corneille a cessé d’en écrire pour le théâtre parlé (il faut remonter à Polyeucte, en 1643), semble être redevable, en effet, à une conception assouplie de l’association entre théâtre et musique.

10Mais si cette hétérométrie inspire directement Charpentier, ce n’est pourtant pas dans un simple décalque de la versification car, comme on l’a vu, les répétitions de mots ou de syntagmes ont pour conséquence de désamorcer certains effets d’irrégularité pour en activer d’autres. Le système des rimes, par exemple, qu’apprécie La Mesnardière, est nécessairement malmené en plusieurs endroits. Ainsi, à la fin de la deuxième strophe, la répétition des deux derniers vers : « Faut-il laisser un affront impuni / Faut-il punir le père de Chimène », qui s’inscrit dans le prolongement de la longue phrase musicale commençant avec « Ô dieux… » (la cadence finale ne viendra que sur la deuxième occurrence de « Chimène ») détourne l’attention de la rime entre « infini » et « impuni ». Celle-ci s’estompe à l’intérieur de la ligne mélodique, dont on ne retient que le point culminant sur le mot « peine ». Plus flagrant encore : à la fin de la troisième strophe, le mot « bonheur » avec lequel rime « honneur » deux vers plus loin (« M’es-tu donné pour venger mon honneur ») se trouve complètement détaché dans la dernière phrase de récitatif qui constitue un climax émotionnel et vocal avant le petit air. La rime passe alors complètement inaperçue. Enfin, la perception de la mesure du vers est elle aussi brouillée. On l’a vu avec l’hexasyllabe perturbé par la répétition de « Ô dieux », mais on peut aussi l’observer avec le décasyllabe qui termine la dernière strophe : « Et l’offenseur le père de Chimène ». Le vers est disloqué à la fois en raison de la répétition du syntagme coordonné « Et l’offenseur » (répétition doublée par la reprise de la formule rythmique au clavecin, en un effet de resserrement), et en raison de l’interruption entre « père » et « Chimène ». Ne reste qu’une succession de cinq groupes de quatre notes martelées, séparés par des intervalles irréguliers, dont il est bien possible de penser qu’elle aurait plu à Corneille32 – surtout si l’on remarque qu’elle a pour effet de restituer son étrangeté au mot « offenseur », dont Furetière rappelle qu’il a été « accusé […] de n’être pas français » alors que « l’autorité [de Corneille] suffit à l’établir33 ». C’est en cela que l’appropriation des vers du Cid par Charpentier est une vraie rencontre : car la musique non seulement corrige ce que le dramaturge lui-même a jugé après coup « affecté34 » – la rime systématique entre « peine » et « Chimène », que la version musicale rend bien plus discrète –, mais aussi concrétise ce qu’il a imaginé pour améliorer les stances sans jamais l’avoir tout à fait réalisé35, à savoir une « inégalité » encore plus grande :

Pour s’en écarter moins [du naturel], il serait bon de ne régler point toutes les strophes sur la même mesure, ni sur les mêmes croisures de rimes, ni sur le même nombre de vers. Leur inégalité en ces trois articles approcherait davantage du discours ordinaire, et sentirait l’emportement et les élans d’un esprit qui n’a que sa passion pour guide, et non pas la régularité d’un auteur qui les arrondit sur le même tour36.

11Cette enthousiaste déclaration sur les bénéfices de l’inégalité rythmique le confirme donc : la musicalité des stances à laquelle répond la composition de Charpentier est moins celle des « tours » et des « arrondi[s] » que celle du déséquilibre et des ruptures, et par là même, comme le dit Corneille, moins celle du vers que du « discours ordinaire » (ou du « langage commun37 », pour reprendre une autre de ses formules), et plus particulièrement du « discours ordinaire » emporté par la « passion ». Or cette valorisation de la forme des stances au motif qu’elle traduit au mieux le trouble passionnel que le théâtre est en charge d’exprimer n’est en fait pas évidente.

Contre le théâtre ou pour les passions ?

12On sait en effet les réserves que l’abbé d’Aubignac émet à l’encontre des stances dans sa Pratique du théâtre, sonnant le glas de leur usage dramatique. Le théoricien prétend ne pouvoir y croire qu’à condition que la fiction ménage la vraisemblance d’un personnage, poète ou musicien, ayant eu la possibilité de les composer :

Il faut qu’il y ait une couleur ou raison pour autoriser ce changement de langage. Or la principale et la plus commune est que l’acteur qui les récite ait eu quelque temps suffisant pour y travailler ou pour y faire travailler, car certes, il est bien peu raisonnable qu’un prince ou une grande dame, au milieu d’un discours ordinaire, s’avise de faire des vers lyriques, c’est-à-dire s’avise de chanter ou du moins de réciter une chanson, ce qui est d’autant plus insupportable que souvent nos poètes ont mis des stances dans la bouche d’un acteur parmi les plus grandes agitations de son esprit, comme s’il était vraisemblable qu’un homme en cet état eût la liberté de faire des chansons. C’est ce que les plus entendus au métier ont très justement condamné dans le plus fameux de nos poèmes [Le Cid], où nous avons vu un jeune seigneur recevant un commandement qui le réduisait au point de ne savoir que penser, que dire, ni que faire […] faire des stances au lieu même où il était, c’est-à-dire composer à l’improviste une chanson au milieu d’une rue38.

13Aucun point de passage n’est cette fois envisagé entre le « discours ordinaire » et les stances, qui sont perçues comme une expression artificielle. Et l’ironie de d’Aubignac verrouille sa théorie : en prétendant ne pas avoir d’autre choix, pour comprendre l’intrigue, que d’intégrer à celle-ci le scénario d’un Rodrigue poète de rue, il établit le caractère irréductiblement et excessivement musical des stances. De cette intransigeance, Georges Lote voit un prolongement dans le Roman bourgeois de Furetière (1666), où un personnage ridicule regrette que Cinna n’ait pas comporté « cinq ou six couplets de vers, comme [il] en [a] vu dans Le Cid, car c’est le plus beau des pièces39 ». Le présupposé d’une hétérogénéité des stances par rapport au théâtre est en effet le même et confère à l’admiration de ces « beau[tés] » dans une tragédie une absurdité aussi grande que celle du travestissement de l’intrigue imaginé par d’Aubignac.

14De toute évidence, cette position de d’Aubignac est conforme à son exigence d’une économie de la vraisemblance aussi efficace qu’invisible, exigence que traduit aussi sa position à l’égard des figures de style. S’il préconise en effet, pour traduire l’émotion, d’introduire de la variété dans les figures de style, il recommande cependant d’en limiter l’usage pour ne pas nuire à l’intensité de l’expression :

On doit avouer que ce désordre dans les paroles d’un homme qui se plaint, est un défaut qui affaiblit les marques extérieures de la douleur, et il le faut réformer sur le Théâtre, qui ne souffre rien d’imparfait : C’est où les manquements de la Nature, et les fautes des actions humaines doivent être rétablies40.

15Le saut qu’opère d’Aubignac entre « les paroles » véritablement affectées et la forme exigée par le théâtre est ici très net : pour émouvoir, le dramaturge ne doit pas puiser à l’authentique « désordre » de la douleur mais bien recomposer celui-ci – si bien qu’on peut dire, en considérant ensemble cette approche des figures et celle des stances, que pour d’Aubignac, la seule musicalité acceptable du vers serait, à la limite, celle qui contribuerait à donner à la parole affectée une forme plus efficace et plus « parfait[e] ».

16Pour La Mesnardière et Corneille, c’est tout autre chose. Leurs réflexions sur les stances montrent bien qu’ils comptent sur la musique du vers pour recueillir les effets des passions sur la parole. Chez La Mesnardière, les formules abondent : « [L]es stances sont beaucoup plus propres à exprimer les passions qui agitent diversement un esprit inquiété, que la taille toujours égale de la mesure alexandrine41 ». Elles ont « de la douceur pour exprimer les passions tendres […] des entrecoupures et des inégalités pour représenter le désordre d’une âme agitée de tempêtes », et

leur sens qui recommence à la tête de chaque strophe et qui admet facilement des pensées toutes contraires à celles qui ont précédé, peut figurer les combats et les divers mouvements d’un esprit irrésolu qui n’a pas assez de forces pour déterminer ses doutes, ni pour se remettre en l’assiette d’où la douleur l’a fait sortir42.

17En somme, ajoute l’auteur de la Poétique, elles sont idéales pour « exprimer puissamment les inquiétudes d’une âme violemment agitée43 ». Corneille tient des propos très ressemblants : selon lui, les stances sont capables de rendre au mieux « les déplaisirs, les irrésolutions, les inquiétudes, les douces rêveries, et généralement tout ce qui peut souffrir à un acteur de prendre haleine, et de penser à ce qu’il doit dire ou résoudre44 ». En considérant les ruptures de rythme propres aux stances comme parfaitement ajustées au choc dramatique en tant qu’il affecte le souffle du personnage45, le dramaturge confirme qu’il conçoit la restitution des émotions dramatiques davantage comme une dynamique que comme une stylisation.

18Or cette conception dynamique est déjà ce qui conduit La Mesnardière à préconiser de réserver les stances pour des « scènes solitaires46 » : il s’agit d’éviter que, par leur singularité formelle, les stances n’apparaissent comme une « langue différente47 » de celle des alexandrins à rime plate. Mais l’objectif de cette mise à l’écart, on peut maintenant le supposer, n’est peut-être pas seulement de garantir la vraisemblance de l’univers de fiction. Car si l’on se souvient que parler tout seul, pour le médecin et philosophe Marin Cureau de La Chambre, est la preuve d’un dérèglement hors norme de la parole, réserver les stances pour des scènes de monologue revient aussi à organiser les conditions d’une perception maximale de leur étrangeté :

Il se voit même des personnes qui se plaignent et qui parlent tout seuls. Et cependant, c’est contre l’intention de la Nature qui a destiné la voix et la parole pour être des instruments de la société, et pour servir à la communication que les animaux doivent avoir ensemble. Or tout cela procède du trouble que l’âme ressent, et qui la fait égarer du chemin qu’elle doit tenir48.

19La conséquence d’un traitement monologique des stances, en ce sens, est bien de faire sentir que leur forme, et donc leur musicalité spécifique, est le symptôme de cet « égare[ment] » de la parole qui marginalise celui qui en est la proie.

20Charpentier l’a bien compris. Sa musique, en effet, excelle à restituer tous ces phénomènes de dysfonctionnement qu’analyse Cureau de La Chambre dans ses Caractères des passions : ces « pas perdus, postures ridicules et paroles inutiles », ces « moyens qui ne servent de rien à obtenir ce qu[e les passions] désire[nt]49 ». Elle fait particulièrement bien entendre, par exemple, le raidissement de la pensée et de la parole, leur « immobil[isation] » évoquée dans le texte (« Je demeure immobile »), notamment avec la répétition des syntagmes « Et l’offenseur », ou encore « mon amour » au deuxième vers de la deuxième strophe : « Contre mon propre honneur / mon amour, mon amour m’intéresse ». Dans ce dernier cas, la répétition se fait sur un intervalle descendant, un demi-ton plus bas, ce qui renforce l’impression d’une défaillance – vaine quête de réconfort sur le mot « amour », ou sanglot sous l’effet de la douleur.

21Mais la musique ne se contente pas de ces évocations presque mimétiques de la parole affectée. Car elle a la capacité de prolonger le bouleversement, même lorsque la pensée et la parole s’arrêtent, c’est-à-dire, comme le dit Marin Mersenne dans son Traité de la voix et des chants50, perdent leur « liberté » sous l’emprise de la passion. La répétition de « L’un m’anime le cœur, l’autre retient mon bras » est en ce sens très suggestive. La seconde occurrence apparaît comme une version dénervée de la première, en raison de la mélodie du premier hémistiche qui, à la seconde occurrence, semble avoir renoncé à soutenir le sens : avec sa progression par intervalles réduits et son mouvement de dépression, elle est très éloignée de toute évocation de l’héroïsme. À la reprise du vers, il n’y a donc plus trace de l’opposition entre l’élan de vengeance et la préoccupation amoureuse qui structurait la première occurrence. Seul subsiste l’abattement, comme pour faire entendre que le locuteur cesse de penser, de « peser » ses mots, et se contente de les répéter dans une sorte d’hébétude.

22Par là, la musique fait accéder à l’indécision entre extériorité et intériorité qui caractérise la parole solitaire. Elle permet notamment de suivre la mise au dehors progressive d’une idée, comme dans la phrase musicale qui porte les vers 4 et 5 de la deuxième stance : « Réduit au triste choix ou de trahir ma flamme / Ou de vivre en infâme ». L’entrée subreptice de la voix sur le dernier temps donne l’impression d’accéder brusquement à une pensée jusqu’alors souterraine, qui poursuit son développement jusqu’à l’explosion dans le haut de la tessiture sur les mots « Ou de vivre en infâme », en un cri de honte qui marque le rejet de la possibilité tout juste exprimée. À l’inverse, d’autres phrases indiquent un repli vers l’intériorité. C’est le cas de la fin du troisième air, qui semble entraîner l’auditeur dans l’espace irrésolu et désorienté du personnage. Car cette fin n’est pas une vraie fin : l’air, en effet, ne se termine pas dans le ton d’origine, comme cela se fait la plupart du temps, mais dans le ton de la sous-dominante, c’est-à-dire dans un ton étroitement en rapport avec celui d’origine, mais comme décentré par rapport à lui, et pouvant, à ce titre, être utilisé comme tremplin vers une autre tonalité. C’est en l’occurrence ce que fait Charpentier : là où le texte de Corneille s’arrête, il conclut bien sur un accord de sol mineur (le ton dans lequel il a commencé). Mais de là, avec la reprise des décasyllabes, il reprend une quinte au dessus, ce qui le conduit au ton de do mineur. Cette fois il s’arrête (dans un ton qualifié par lui d’« obscur et triste51 »), mais tout se passe comme si, avec cette reprise des vers, il avait initié une marche modulante, suggérant que la phrase musicale, de même que les questions pourraient inlassablement rebondir52, comme pour dessiner le « mal infini » qui paralyse le personnage : « M’es-tu donné pour venger mon amour ? / M’es-tu donné pour perdre ma Chimène ? »

23Si Charpentier a exploité l’évidence musicale des stances, c’est donc en adéquation avec la conception que l’on trouve chez La Mesnardière et chez Corneille. Il ne s’agit pas pour lui d’épouser leur rondeur – qui semble à d’Aubignac si hétérogène au théâtre –, mais de tirer parti de leur dynamique irrégulière pour une musique qui déploie l’onde de choc des passions plus loin encore que ne le fait le texte de Corneille.

24L’évidence musicale des stances s’est donc confirmée et compliquée, nous plongeant dans un débat sur la perception musicale du vers dont nous avons donné quelques grandes lignes : d’Aubignac veille à empêcher que cette musicalité ne détruise la cohérence de l’action dramatique ; avant lui, La Mesnardière et Corneille se montrent sensibles à ce que le vers, dans ses rythmes et ses sonorités, peut saisir des turbulences et des errances de la parole. C’est clairement ce que reconnaît Charpentier pour s’en inspirer, ce qui oblige à revoir l’affirmation de Pierre Larthomas selon laquelle le but des « stances de la tragédie classique » serait « de nous donner les résultats d’une pensée plutôt que de surprendre cette pensée dans sa vie même53 ». Avec les Airs sur les stances du Cid, nous sommes, tout à l’inverse, dans la « vie » bruissante de cette pensée en train de se faire et de se défaire. De ce point de vue, l’alchimie entre texte et musique est parfaite et semble indiquer que la rencontre d’abord mal engagée de Corneille avec la chose musicale54 s’est en fait opérée par les stances – tandis qu’au-delà, la musique de Charpentier déploie sa pure spirale, dans une douce et peut-être sublime indifférence au texte et au héros.

Annexes musicales

25Extraits de la communication en musique donnée lors du colloque « Corneille : la parole et les vers », le 2 juin 2017 à l’amphithéâtre Axelrad de l’Université de Rouen, avec Sarah Nancy, dessus, et Florian Carré, clavecin :

261. Airs sur les stances du Cid, version transposée en mineur

272. Une fin infinie ? Mise en œuvre musicale d’une interprétation

Notes

1 Les réflexions qui suivent doivent beaucoup à la présence musicale et aux suggestions du claveciniste Florian Carré, qui a participé à la communication en musique donnée lors du colloque « Corneille : la parole et les vers », le 2 juin 2017 à l’amphithéâtre Axelrad de l’Université de Rouen (avec Sarah Nancy, dessus, dans une version des Airs sur les stances du Cid transposée en mineur). Qu’il en soit ici chaleureusement remercié.

2 H457, H458, H459.

3 Les airs publiés du vivant du compositeur paraissent dans le Mercure Galant (voir Catherine Cessac, Marc-Antoine Charpentier, Paris, Fayard, 1988, p. 355), ce qui les destine a priori à être joués dans le cadre restreint et privilégié de quelques hôtels particuliers de Versailles ou de la capitale.

4 Lila Maurice-Amour, « Les Musiciens de Corneille », Revue de Musicologie, no 37, juillet 1955, p. 43-75, p. 50.

5 Antoine Furetière, Dictionnaire Universel, La Haye / Rotterdam, A. et R. Leers, 1690, article « Stance ».

6 Henry Carrington Lancaster, « The Origin of the Lyric Monologue in the French Classical Tragedy », PMLA, vol. 42, no 3, septembre 1927, p. 782-787.

7 Benoît de Cornulier définit et étudie cette notion dans des corpus variés. Voir, par exemple, « Rime et répétition dans le Voir Dit de Guillaume de Machaut », édité en 2002 par Denis Hue sur le site de l’université de Haute-Bretagne : http://www.normalesup.org/~bdecornulier/VoirDit.pdf, consulté le 5 octobre 2017) ; « Style métrique de chant. Exemples chez Baudelaire et Rimbaud », Parade sauvage « Hommage à Steve Murphy », oct. 2008, p. 231-253.

8 Pierre Larthomas, Le Langage dramatique : sa nature, ses procédés, Paris, PUF, rééd. 2012, p. 387.

9 Georges Lote, Histoire du vers français, t. 4, deuxième partie : le xvie et le xviie siècles, Aix-en-Provence, Université de Provence, 1988, p. 227.

10 Rappelons que le mot latin versus est le participe passé de vertere, qui signifie « tourner ».

11 Hippolyte Jules Pilet de La Mesnardière, La Poëtique, Paris, Antoine de Sommaville, 1639, p. 403.

12 Voltaire, Œuvres complètes, éd. L. Moland, Paris, 1877-1885, t. XXXI, p. 199 ; cité par H. C. Lancaster, op. cit., p. 782.

13  Louis Petit de Julleville (dir.), Histoire de la langue et de la littérature française, des origines à 1900, Paris, Colin, 1896-1899, IV, p. 223-224 ; cité par H. C. Lancaster, op. cit., p. 783.

14 Georges Lote, Histoire du vers français, op. cit., p. 228.

15 Bénédicte Louvat, Théâtre et musique. Dramaturgie de l’insertion musicale dans le théâtre français (1550-1680), Paris, Champion, 2002, p. 96.

16 Georges Lote, Histoire du vers français, t. 4, deuxième partie : le xvie et le xviie siècles, op. cit., p. 227.

17 Paul Scarron, Jodelet duelliste (1646), IV, 8, cité par G. Lote, ibid.

18 Hippolyte Jules Pilet de La Mesnardière, La Poëtique, op. cit., p. 409.

19 Pierre Corneille, « Examen » d’Andromède, dans Pierre Corneille, Le Théâtre de P. Corneille, revu et corrigé par l’auteur, troisième partie, Paris, Augustin Courbé et Guillaume de Luyne, 1660, p. lxvi, consulté le 30 novembre 2020 dans l’édition de Sandrine Berrégard sur le site http://idt.huma-num.fr/notice.php?id=141).

20 Mercure Galant, janvier 1681, p. 246.

21 Nous citons le texte des stances dans la version des airs donnés au Mercure Galant en 1681. L’absence de ponctuation a été conservée, mais l’orthographe a été modernisée.

22 Chez Charpentier, c’est la voix d’Orphée dans l’opéra de chambre La Descente d’Orphée aux Enfers (1686-1687), de David dans la tragédie biblique David et Jonathas (1688) et de Jason dans Médée (1693). C’est aussi, on peut le souligner, la voix de Charpentier lui-même, musicien de la Maison des Guise. C. Cessac fait d’ailleurs l’hypothèse qu’il a lui-même été l’interprète de ces trois airs (Catherine Cessac, Marc-Antoine Charpentier, op. cit., p. 360).

23 La substitution (fautive du point de vue du sens) de la conjonction de coordination « ou » à « et » est peut-être une trace de la séduction exercée par les parallélismes sur le compositeur.

24 Au xviie siècle, ce saut descendant de quarte diminuée est parfois appelé saltus duriusculus. Il est caractéristique des influences italiennes dans l’écriture de Charpentier.

25 Antoine-Louis Le Brun, Théatre Lyrique avec une Préface, ou l’on traite du Poëme de l’Opéra. Et la Réponse à une Epître satyrique contre ce Spectacle, Paris, Pierre Ribou, 1712.

26 Patricia M. Ranum, The Harmonic Orator. The Phrasing and Rhetoric of the Melody in French Baroque Airs, New York, Pendragon Press, 2001, p. 34 .

27 Paul Verlaine, « Art poétique », dans Jadis et Naguère, éd. Olivier Bivort, Paris, Livre de poche classiques, p. 83.

28 Pierre Corneille, « Examen » d’Andromède, op. cit., p. lxix.

29 L. Maurice-Amour cite à ce propos les éloges dont Corneille gratifie Dassoucy, le musicien, ainsi que sa remarque, contemporaine de La Toison d’or, sur la supériorité de la tragédie antique au motif qu’elle comporte de la musique (dans le premier discours sur le poème dramatique). Voir L. Maurice-Amour, « Les Musiciens de Corneille », art. cité, p. 45.

30 Si l’on estime qu’il en a assuré la versification.

31 Pierre Corneille, Excuse à Ariste, dans Œuvres complètes, éd. Georges Couton, Paris, Gallimard, « Bibliothèque de la Pléiade », 1980, t. I, p. 780.

32 On ne sait rien d’une éventuelle connaissance par Corneille de cette adaptation. Quoi qu’il en soit, comme le suggère C. Cessac, le fait que Charpentier s’attaque l’année d’après à de nouvelles compositions pour Andromède en vue d’une reprise au théâtre Guénégaud montre au moins qu’il n’y a pas eu de différend entre les deux hommes (Catherine Cessac, Marc-Antoine Charpentier, op. cit., p. 361).

33 « Quelques Critiques ont accusé ce mot de n’être pas Français, mais l’autorité d’un si grand homme est suffisante pour l’établir » (Antoine Furetière, Dictionnaire Universel, op. cit., article « Offenseur »).

34 Voir Pierre Corneille, « Examen » d’Andromède, op. cit., p. lxix.

35 Il dira quand même l’avoir fait dans le prologue de La Toison d’or (ibid., p. lxx).

36 Ibid., p. lxix-lxx.

37 « Les vers de stances sont moins vers que les alexandrins parce que parmi notre langage commun, il se coule plus de ces vers inégaux […] », « Examen » d’Andromède, op. cit., p. lxviii.

38 Abbé d’Aubignac, La Pratique du théâtre, Paris, A. de Sommaville, 1657 ; éd. Hélène Baby, Paris, Champion, 2001, p. 385.

39 Cité par Georges Lote, Histoire du vers français, t. 4, deuxième partie : le xvie et le xviisiècles, op. cit., p. 230.

40 Abbé d’Aubignac, op. cit., p. 472.

41 H. J. Pilet de La Mesnardière, La Poëtique, op. cit., p. 402.

42 Ibid., p. 402-403.

43 Ibid.

44 Pierre Corneille, « Examen » d’Andromède, op. cit., p. lxix.

45 Nous remercions Myriam Dufour-Maître de nous avoir rappelé que le terme d’« acteur » désigne, chez Corneille, le personnage et non le comédien.

46 H. J. Pilet de La Mesnardière, La Poëtique, op. cit., p. 409.

47 « […] à cause que tout le théâtre représentant un même lieu, les personnes introduites doivent parler même langage, et que cette différence [de mesure] ferait paraître le discours de ces diverses proportions comme deux langues différentes », ibid.

48 Marin Cureau de La Chambre, Traité de la connaissance des animaux, Paris, P. Rocolet, 1647, p. 246.

49 « L’âme ne se contente pas dans les Passions d’agiter les esprits et les humeurs de cette sorte, elle fait encore mouvoir les parties qui sont capables du mouvement volontaire, comme étant celles qui sont les plus puissantes pour rechercher ou pour embrasser le bien, et pour repousser ou fuir le mal. […] Il est vray qu’il y a quelques uns de ces mouvements où l’âme se trompe aussi bien qu’en celui des Esprits : Combien de pas perdus, de postures ridicules et de paroles inutiles dans les Passions ? […] Il y a bien quelque rapport avec le dessein que l’âme s’est proposé […] Mais il est aisé de voir aussi qu’elle se trompe, et que l’aveuglement et le trouble où elle est, lui fait employer des moyens qui ne servent de rien à obtenir ce qu’elle désire » (Marin Cureau de La Chambre, Les Charactères des passions, Amsterdam, Antoine Michel, 1658, p. 12-13).

50 « Nous expérimentons la liberté, que nous avons de parler ou de nous taire à tous moments, quand même la passion nous fait parler ; si ce n’est qu’elle soit si forte qu’elle nous ôte l’usage de la raison » (Marin Mersenne, Harmonie universelle contenant la théorie et la pratique de la musique, Paris, 1636, rééd. facsimilée de l’exemplaire conservé à la Bibliothèque des Arts et Métiers et annoté par l’Auteur, Paris, CNRS, 1986, vol. 2, Traitez de la voix et des chants, livre premier, proposition VIII, p. 10).

51 Règles de composition par Monsieur Charpentier, dans Catherine Cessac, Marc-Antoine Charpentier, op. cit., p. 491.

52 Une réalisation musicale de cette fin infinie a été présentée lors du colloque : les derniers vers ont été repris cinq fois dans une marche modulante à la quinte. Voir l’annexe 2.

53 Pierre Larthomas, Le Langage dramatique, op. cit., p. 406-407. Cette idée d’une stabilité de la pensée dans les stances est en partie nuancée lorsqu’il dit son admiration pour la manière dont le monologue de Rodrigue « retrouve, au-delà de la forme rigide de la strophe, la palpitation du langage humain, et pour tout dire, de la vie » (op. cit., p. 388).

54 La fonction de simple distraction qu’il attribue à la musique dans l’examen d’Andromède (« Examen » d’Andromède, op. cit., p. lxii) a souvent été commentée.

Pour citer ce document

Sarah Nancy, « Vers, parole, musique. Les Airs sur les stances du Cid de Marc-Antoine Charpentier » dans Pierre Corneille, la parole et les vers,

sous la direction de Myriam Dufour-Maître, avec le concours de Cécilia Laurin

© Publications numériques du CÉRÉdI, « Actes de colloques et journées d’étude », n° 26, 2020

URL : http://publis-shs.univ-rouen.fr/ceredi/index.php?id=1023.

Quelques mots à propos de :  Sarah Nancy

Université Paris 3-Sorbonne Nouvelle
EA 174 – « Formes et idées de la Renaissance aux Lumières »
Sarah Nancy est maîtresse de conférences en littérature française du xviie siècle à l’Université Sorbonne Nouvelle-Paris 3. Elle travaille sur la voix aux xviie et xviiie siècles – ses pratiques (éloquence, théâtre, chant…), ses effets, en s’appuyant pour cela sur sa propre pratique du chant lyrique, ainsi que sur les représentations genrées de la littérature et de la musique. Elle est membre du mouvement Transitions depuis sa création.